[Retour à Gruyères-Pâquier]
Organisation des communautés du Pâquier
de 1341 à 1539
(Source : Paul Pasquier "Le Pâquier")

Elles formaient une société d'exploitants comparable à nos sociétés actuelles de laiterie administrées par un comité ayant un président.
Les membres fondateurs, ceux de l'endroit, étaient désignés par le mot communier.
Ceux venant du dehors, des beaux-fils, puis après l'amortissement et la vente des terres, les nouveaux acquéreurs étaient dits: les communiers forains. Tout comme nos sociétés de laiterie, les communautés et les exploitants avaient établi des statuts.

LES COMMUNIERS

Le titre, le droit de communier n'étaient pas personnels, mais attachés au foyer, à la famille, à l'exploitation.
Une famille composée du père, de plusieurs fils majeurs, n'avait droit qu'à une seule voix dans les délibérations de la communauté, cela exactement comme pour les sociétés actuelles de laiterie.
Si un ressortissant de l'endroit allait s'établir ailleurs, lui et sa famille perdaient leur droit de "communier".
Il devait demander sa réintégration s'il revenait en son village, une finance d'entrée était alors exigée.

LES COMMUNIERS FORAINS

Les ressortissants d'autres localités que celles des villages du Pâquier, ayant épousé des filles de ces villages furent reçus communiers forains s'ils avaient leur propre foyer et leur exploitation.
Une partie des terres totalement amorties furent vendues à des personnes du dehors. Le nouveau propriétaire pouvait être reçu dans la communauté en qualité de communier forain s'il avait son foyer en ces villages.
Aucune limite n'existait entre les villages et le bourg de la Tour de Trême. Des complications en résultèrent entre les communautés des villages et celle du bourg par suite de l'enchevêtrement des propriétés, ce qui obligea à établir des conventions entre les parties.
Le titre de communier n'étant conféré que pour l'exploitation des fonds, il ne donnait aux récipiendaires aucun droit de ressort.
De nombreux communiers forains furent reçus par la communauté des villages de 1650 à 1800, aucun ne devint de ce fait bourgeois de la nouvelle commune du pâquier fondée en 1827. Quoique plusieurs d'entre eux en furent gouverneurs, conformément aux statuts stipulant que chaque communier avait l'obligation d'accepter cette charge pour une année durant.
S'il ne se jugeait pas capable, il devait se faire remplacer à ses frais.

LES BOURGEOIS

Les bourgeois étaient autrefois les membres d'un bourg, d'une ville, d'un lieu fortifié ayant sa mairie, son église, son école.
C'était le cas pour le bourg de la Tour de Trême, centre administratif de la châtellenie de ce nom, où, soi-disant, des ouvrages de défense y étaient entretenus.
Ce bourg pouvait donc recevoir de nouveaux bourgeois, lesquels n'en devenaient pas nécessairement des communiers, du moment que les deux termes de bourgeois et communier n'ont pas du tout le même sens et les mêmes qualités.
La Tour de Trême reçut de nombreux bourgeois, sa liste porte de nos jours plus de trente noms de bourgeois.
Par contre, la commune du Pâquier avait, en 1830, seulement trois souches considérées comme ressortissants, soit: Pasquier ou Dupasquier ou Vallélian précédemment Pasquier, puis Morand et Gremion.

RELATIONS ENTRE LES VILLAGES ET LE BOURG DE LA TOUR de 1341 à 1539

Les communautés du Pâquier, des Carrets et des Chavonnes avaient, selon l'acte de 1341, des terres à cens sur le territoire actuel de la commune de la Tour de Trême : au Servy près des Rougeoles, au lieu dit le Coin ( le Carroz ) entre le chemin de la gare de la Tour et la Rochenaz, et la route la Tour- Pringy dite alors la voie publique de la Tour, puis aux Prâ de la Joux, (parts de la Joux) en Fontanetta, aux Praly et les Pleins.
Le 29 avril 1430, Jean des Chavonnes, Jean et Pierre Blanc ou Blanchard habitant aux Chavonnes comparaissent à la Tour à propos de difficultés qu'ils ont avec Jean de la Chenaux au sujet du pâturage du Serpoz.
Les Blanchard étaient propriétaires ou teneurs à cens du pâturage dit la Blanchardaz, attenant à celui de La Cheneaudaz en dessous de Serpoz, tenu par Jean de la Cheneau.
Le 13 septembre 1432, Rolet dit Vender, précepteur à la Tour de Trême affirme que Jean des Chavonnes est du ressort de la Tour de Trême et qu'il doit en assumer les obligations ce que ce dernier conteste.
Le 20 novembre 1435, un acte traduit par Christinus Masalier nous apprend ce qui suit: " Moi, Pierre Curti, clerc, châtelain de la Tour de Trême, sur la demande de Jean Verna, précepteur de la Tour de Trême, ai convoqué Jean et Jacques Blanchard ( des Chavonnes ).
Jean Verna précepteur de la Tour de Trême demande à ce que les deux prénommés soient condamnés à indemniser ceux qui ont exécuté divers travaux de musillier, entretien de four, de murailles, de fossés à la ville de la Tour de Trême, en remplacement des deux nommés. Cela dit en présence des deux témoins, Aimé de St Germain et Pierre Hugonnier.

Les deux cités demandent un délai de réflexion. Il furent à nouveau assignés pour le samedi 27 novembre.
La séance fut renvoyée au samedi après la St Nicolas.
Sont alors présents : Mermet Curt et Jean Sautérat, au nom de la ville de la Tour de Trême. Il est dit que conformément à l'usage Jean et Jacques Blanchard soient tenus de payer une indemnité à ceux qui à leur place ont effectué des travaux incombant aux membres du ressort.
Jean Blan et Jacques Blanchard déclarent qu'ils n'ont rien à voir avec la plainte et cette demande, en contestant être du ressort de la ville de la Tour de Trême, cette ville ne pouvant être considérée comme un lieu de ressort, n'étant ni fortifiée ni défendable, n'ayant ni rempart ni fossé, ni muraille. Ils déclarent que leurs ancêtres ne furent jamais du ressort de la Tour de Trême.
Ils n'ont d'ailleurs jamais profité des biens de la Tour de Trême.
Ils affirment en outre que s'ils devaient faire partie d'un ressort, se serait plutôt à celui de Gruyères, au lieu de celui de la Tour de Trême, car à Gruyères il y a des remparts, c'est un lieu défendable où siège l'autorité.
Pour ces diverses raisons, ils déclarent n'avoir aucune obligation de faire partie du ressort de la Tour de Trême.Le précepteur répond que déjà précédemment les anciens ont participé à l'entretien des murailles de la Tour de Trême et autres travaux usuels imposés aux membres du ressort. Le châtelain propose de remettre à plus tard toute décision au sujet de ce différend. Les parties furent à nouveau convoquées pour le 18 décembre.
Etaient alors présents: les parties puis Jean Joly et Jean Chenau. Chaque partie exposa son point de vue sans modification.

Le châtelain déclare qu'il avait mûrement réfléchi sur cette affaire et qu'il admettait que Jean Blan et Jacques Blanchard devaient se conformer à l'usage et qu'ils devaient contribuer aux divers travaux d'entretien de la ville de la Tour de Trême mais cela dans une proportion moindre que ceux de la Tour de Trême.
Se sentant offensés par cette déclaration, Jean Blan et Jacques Blanchard déclarèrent vouloir recourir auprès des commissaires du comte Jean de Gruyères.
Le châtelain se fâche, frappe sur la table tout en recommandant aux parties de modérer leurs exigences. Signé Christinus Masalier. "

En un autre cas, ces Blanchard se disaient être originaires de Marsens. Ils ne furent jamais considérés comme ressortissants des villages du Pâquier.
En janvier 1520, un jugement fut rendu par le comte Jean II de Gruyères, à propos des droits qu'avaient ceux des villages du Pâquier à la forêt comtale de Sous-Tour, aujourd'hui Sauthaux.
En décembre 1519, le jeune Loys, fils de Valérien du Pasquier se rend à la forêt de Sous-Tour pour y chercher du bois réservé aux sujets des comtes, avec une jument attelée à une bride de char ( une charrette à deux roues).
II est arrêté par le forestier de la Tour de Trême qui l'interpelle, fait dételer la jument et la conduit en fourrière à la Tour de Trême.
Ceux des villages du pâquier protestent, ont recours au châtelain de la Tour de Trême qui leur donne évidemment les torts.
Puis, ils s'adressent au comte Jean II qui déclare formellement : "La forêt de Sous-Tour m'appartient, mais mes sujets de la châtellenie de la Tour de Trême sont autorisés à y prélever certaines essences autres que le chêne, le frêne, le foyard, pommiers et poiriers auvages, soit le sapin blanc et certains feuillus. Mes sujets des villages de la Tour de Trême sont de cette châtellenie, ils ont les mêmes droits que ceux du bourg sur cette forêt comtale, la jument doit être rendue immédiatement, et ceux des villages ne doivent pas être molestés lorsqu'ils se rendent en cette forêt de Sous-Tour s'approvisionner du bois qui leur est réservé.
[Début de page] [Retour à Gruyères-Pâquier]