Colloque

"Que ne peut l'informatique"


27, 28, 29 octobre 1999

au Conservatoire national des Arts et Métiers
292, rue Saint-Martin - 75003 Paris
Métro Réaumur-Sébastopol

Amphithéatre C

avec le soutien de l'Université Paris-Nord
et la participation de l'Association Diderot et du CREIS
(Centre de Coordination pour la Recherche et l'Enseignement
en Informatique et Société)


> Comité de pilotage :

Coordinateur : Guy Chaty, Professeur émérite d'Informatique à l'Université Paris-Nord ;
Pablo Argon, membre de l'Asssociation Diderot ;
Alain Cazes , Maître de Conférences en Informatique au CNAM ;
Michel Chein, Professeur d'Informatique à l'Université de Montpellier II ;
Daniel Kayser, Professeur d'Informatique à l'Université Paris Nord ;
Dominique Lecourt, Professeur de Philosophie à l'Université Denis Diderot /Paris VII, Président de l'Association Diderot ;
Marie-Laure Mugnier , Maître de Conférences d'Informatique à l'Université de Montpellier II ;
Pierre Moeglin, Professeur en Sciences de la communication à l'Université Paris-Nord ;
Pascal Nouvel, Rédacteur en chef de la revue " L'Aventure Humaine " de l'Association Diderot ;
Félix Paoletti, Maître de Conférences d'Informatique à l'Université Paris VI ;
Olivier Roux, Professeur d'Informatique à l'Ecole Centrale de Nantes et à l'Institut Universitaire de France.

 

"Je crois qu'à la fin de ce siècle, l'usage des mots et l'opinion publique auront tellement évolué, qu'on pourra parler de machines qui pensent sans crainte d'être contredit", Alan Turing, 1950.

A l'approche de l'an 2000, que penser de cette affirmation ? Dans les années cinquante et soixante, il a pu sembler qu'il était devenu possible de gérer tout échange, toute communication et aussi peut-être toute invention, toute création en termes de traitement et de transfert d'information. La théorie qui se présentait comme la récapitulation de ces espoirs et le fondement d'un savoir nouveau, et la pratique qui lui était associée ( et portait par là les promesses d'une transformation effective du monde) se développaient. L'informatique était née. Sans doute y a-t-il eu un peu d'excès, d'emballement et d'illusions dans de telles conceptions. Leurs limites restent mal connues. C'était à l'informatique de les découvrir pas à pas. Jusqu'où pouvait-elle aller dans la formalisation de la pensée ? dans la création artistique ? dans le pilotage des procédures automatisées ? dans le contrôle social ?
Ces questions, il n'est plus possible d'y répondre par une théorie d'ensemble. Il faut les soumettre, pour chacun des domaines particuliers auxquels elles sont attachées, à ceux qui se sont engagés dans l'exploration et l'utilisation de l'informatique. Ce sont eux qui viendront tracer les limites de l'informatique telles qu'ils les perçoivent actuellement, eux qui viendront décrire les avancées, les obstacles, les surprises que leur ont réservés leurs recherches et leurs pratiques.


> PROGRAMME

Mercredi 27 octobre 1999

9h : Accueil
9h30 : Discours d'ouverture

 

9h45 - 12h30 -
> Informatique et libertés, Félix Paoletti

Périodiquement le spectre de « Big Brother » refait surface donnant lieu à des débats passionnés entre « optimistes » et « pessimistes ». Aujourd’hui, la croissance exponentielle et l’extrême diversification des fichiers nominatifs, la possibilité d’une interconnexion planétaire au moyen d’Internet font peser de réelles menaces sur la vie privée et les libertés de tout un chacun.
Des dispositifs législatifs protecteurs ont été élaborés depuis le début des années 70. La pérennité et l’efficacité d’un dispositif législatif reposent sur les principes qui le sous-tendent. Quels sont les principes à la base de la loi française « Informatique et libertés » ? Quelles sont la portée et les limites de ces principes et de cette loi ? Quelle est la philosophie de ce droit de l’informatique ? Comment ce droit s’applique-t-il à l’échelle internationale ?
L' application de ces principes à l’étude de trois domaines particulièrement « sensibles » :
-les fichiers de la police ;
-les systèmes de vidéo-surveillance ;
-Internet ;
devrait permettre de mieux cerner les risques d’atteinte à la vie et aux libertés des personnes.

Intervenants  :   Daniel Naulleau, Félix Paoletti, Chantal Richard, André Vitalis, Alain Weber.

Exposés, Table ronde, Questions.

 

14h15 - 17h15 -
> Apport de l'Intelligence Artificielle (IA) à la connaissance de la pensée, Daniel Kayser

L'Intelligence Artificielle (IA), par son intitulé provocateur, puis par des promesses inconsidérées, s'est elle-même placée dans une situation délicate : en effet, malgré ses prouesses spectaculaires, l'ordinateur ne parvient toujours pas à effectuer certaines tâches intellectuelles ou motrices rudimentaires. Près d'un demi-siècle après l'article fondateur d'Alan Turing, on dispose d'un recul suffisant pour tenter d'évaluer objectivement ce que l'IA a apporté.
En confrontant les tâches à la portée de l'IA avec celles qui demeurent actuellement en dehors de son champ, peut-on se rendre compte si  l'IA s'attaque à des problèmes qu'elle ne pourra jamais résoudre, ou si elle utilise des moyens inappropriés pour résoudre ces problèmes, ou encore si elle est sur la bonne voie, cette voie étant plus longue qu'on ne le croyait au départ ?
La réponse que l'on apporte à la question ci-dessus dépend évidemment du point de vue philosophique adopté. Mais ce point de vue peut-il être amené à évoluer en fonction des résultats théoriques ou expérimentaux obtenus en IA ? Plus précisément, certains résultats d'IA ont-ils déjà une signification philosophique ? Y a-t-il des questions philosophiques qui se posent en termes différents depuis l'apparition de l'IA ? A contrario, y a-t-il des questions auxquelles l'IA ne peut, par principe, apporter de contribution ? L'objectif de l'IA s'est-il peu à peu modifié ?


Intervenants  : Michel Chein, Daniel Kayser, Jean Lassègue, Jean-François LeNy, Pascal Nouvel, Yves-Marie Visetti.

Exposés, Table ronde, Questions.

 

Jeudi 28 octobre 1999

 

9h - 11h -
> Maîtrise des systèmes complexes - modélisation et contrôle des systèmes critiques, Pablo Argon et Olivier Roux

Contrairement à l'usage qui est fait actuellement du mot cybernétique, cette science étudie " les mécanismes de communication et de contrôle dans les machines et chez les êtres vivants ". Dans cette démarche, qui consiste à faire appel à des systèmes informatiques pour tenter de maîtriser la complexité du monde physique, une étape importante est la modélisation des systèmes critiques et de leur sûreté de fonctionnement. L'aspect critique tient à l'exigence "zéro défaut", considérant que toute défaillance de ces systèmes peut entraîner des conséquences graves sur l'environnement et/ou les personnes.
Cet objectif ne peut-être atteint, en général, que par une prise en compte des phénomènes temporels, passant donc par une représentation du temps qui s'avère délicate. En particulier, à la veille du passage à l'an 2000, nous connaissons les difficultés du codage de la simple date : l'année étant figurée par deux ou quatre chiffres. Comment les concepteurs (chercheurs, ingénieurs, . . . ) de ces systèmes font-ils pour atteindre cet objectif ? Et quelles sont les répercussions pour les usagers dans la vie quotidienne ?
Mais on peut aussi se demander si nous n'avons pas créé des systèmes qui "échappent" à notre contrôle : véhicules sans conducteur (trains, métros, automobiles), systèmes de commande des centrales nucléaires, systèmes de pilotage automatique des avions, engins spatiaux autonomes, télécommunications, etc.
Il est donc pertinent d' interroger les différents acteurs concernés : chercheurs, industriels, politiques, et de tenter de répondre aux questions de fond : qu'est ce que la maîtrise de la complexité présuppose sur le monde physique ? Peut-on parler d'un progrès : pour la compréhension du monde ? Pour l'humanité ?

Intervenants  : Jean-Raymond Abrial, E. Ledinot.

Exposés, Table ronde, Questions.


11h - 11h15 : Pause


11h15 - 13h15 -

> Informatique et besoins sociaux, Pierre Mœglin

La représentation commune des rapports entre informatique et société tient pour acquise l'existence de besoins sociaux. Il est admis qu'ils trouvent leur traduction (et leur satisfaction) dans l'organisation et le fonctionnement du marché.
Contre cette représentation commune, l'on se propose de mettre en doute trois des postulats qui lui sont sous-jacents :
a) 1er postulat : que l'offre informatique trouverait, pour ainsi dire en creux, son répondant dans les pratiques sociales ; 
b) 2e postulat : qu'il y a des besoins propres à la société, émergeant naturellement et susceptibles d'être établis sur la base de constats objectifs : tel manque ou tel dysfonctionnement affectant telle partie du corps social ou de son organisation ; 
c) 3e postulat : qu'entre une offre technologique et une demande sociale censées être faites l'une pour l'autre, il y aurait seulement à rechercher la meilleure adaptation possible.
Derrière ces trois critiques, se profile évidemment une mise en question plus générale du projet d'informatisation sociale et des discours qui l'accompagnent, l'objectivent et cherchent à le légitimer.  Nous proposons de retenir plus spécialement deux contextes — éducation et santé — où se dessinent peut-être également le mieux a contrario les possibilités de contre-scénarii, laissant transparaître une conception alternative des besoins sociaux.

Intervenants pressentis : Dominique Carré, Yolande Combès, Jean-Guy Lacroix, Arié Mizrahi, Gaëtan Tremblay.

Exposés, Questions.

15h - 17h45 -
> Art et Informatique, Alain Cazes

L'art et les ordinateurs entretiennent depuis plus de 20 ans des rapports ambigus. D'un côté, on trouve les "adorateurs" du pixel qui vénèrent la capacité des ordinateurs à imiter toujours mieux les techniques classiques, de l'autre, les "puristes" qui rejettent en bloc les machines considérées comme la négation de tout art.
Pour débattre de cette ambiguïté nous demanderons à des artistes, non pas de développer une opinion "conceptuelle" sur l'art et l'informatique, mais de présenter leurs relations personnelles avec les ordinateurs autour de quatre thèmes.
1) L'écriture et le processus de création : l' outil informatique est-il une contrainte pour l'artiste ? Les outils seraient-ils différents si les artistes participaient à leur production ? Les outils existants ne sont-ils pas une contrainte modifiant le comportement originel de l'artiste ? La production d'œuvres implique-t-elle d'inventer un langage de communication entre techniciens et artistes ?
2) Le statut des oeuvres interactives et aléatoires : quelles sont les implications économiques induites par l'outil informatique dans la production d'œuvres ? Les réseaux n'induisent-ils pas une nouvelle notion d'exposition ?
3) Le problème de la production et de la distribution des œuvres : le travail coopératif au travers des réseaux  suppose-t-il une nouvelle approche de la production d'œuvres ?

4) L'apprentissage de la technologie : comment se fait l'appropriation par un artiste d'outils conçus par des techniciens ?

Intervenants  : Jean-Pierre Arnaud, Paul Braffort, Alain Cazes, Jean-Paul Longavesne, Stéphane Natkin.

Exposés, Table ronde, Questions.

 

Vendredi 29 octobre 1999

9h - 11h
> Les enjeux de l’informatisation du monde du travail, Félix Paoletti

L’informatisation du monde du travail a commencé dès les années 50 avec la commercialisation des premiers ordinateurs. A partir de la fin des années 70, des systèmes homme-machine de traitement de l’information seront mis en place. Les applications informatiques vont se diversifier de façon considérable. Des millions de personnes seront amenées à utiliser l’ordinateur et l’informatique, à travailler avec ces nouveaux « outils ».
Avec cette informatisation généralisée du monde du travail de nombreux enjeux sociaux vont se faire jour, qui concernent aussi bien l’organisation du travail que les conditions de travail ou l’emploi.
Avec le processus d’informatisation-automatisation peut-on parler d’un déterminisme technologique ? d’une organisation du travail post-taylorienne ? post-fordienne ? L’informatique ne favorise -t-elle pas le développement d’une organisation taylorienne du travail dans le secteur tertiaire ?
Comment l’outil informatique modifie t-il le contenu et les procédures de travail ? Amélioration des conditions de travail dans certains cas, pérennisation ou création de mauvaises conditions de travail dans d’autres cas, le processus d’informatisation-automatisation n’est-il pas, dans son essence, un processus ambivalent ? Le développement du chômage n’est-il pas directement lié à la recherche d’une augmentation de la productivité et de la compétivité des entreprises et non à l’informatisation ?

Intervenants  :
Thierry Dezalay, Yves Lasfargue, Alain Lebaube.

Exposés, Table ronde, Questions.


11h - 11h15 : Pause

 

11h15 - 13h15 -
> Rôle de l'Informatique dans la Mondialisation, Michel Chein et Marie-Laure Mugnier

Aujourd'hui, on évoque la mondialisation dans différents domaines : les marchés financiers, les multi-nationales, les organismes internationaux, les réseaux d'information, le pouvoir politique, la culture, ...
L'informatique en réseaux a-t-elle été, pour cette mondialisation, un facteur technique essentiel et nécessaire (numérisation de tous les types d'information, construction de modèles rationnels complexes, maîtrise de l'incertitude...), le World Wide Web en étant la figure emblématique ?
Quel a été le rôle de l'informatique dans l' accélération des mouvements de capitaux ( et donc le développement de la spéculation), la régulation par le marché global, la moindre importance accordée au politique, les types possibles de pannes ou d'accidents sur les réseaux et leurs conséquences, le développement de l'uniformité ou de l'unité du genre humain, le rapprochement entre les peuples, la transformation de l'appréhension du temps et de l'espace ("Avec Internet en un instant le monde est à vous !"),...

Intervenants  : Olivier Coppin, Blandine Laperche, Dominique Lecourt.

Exposés, Table ronde, Questions.


ENTREE LIBRE ET GRATUITE


Contact : moreauv@cnam.fr
Alain CAZES
Groupe Diapason
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