En 1999, l'astrophysicien Jean Duprat, chercheur au Centre de Spectrométrie Nucléaire et Spectrométrie de Masse (CSNSM-IN2P3-CNRS) d'Orsay (France), responsable de l’équipe d’Astrophysique du Solide et du programme français de recherche de Micrométéorites en Antarctique, se rend au Dôme C, à Concordia, une station scientifique franco--italienne en Antarctique Sud. Celle-ci a été construite grâce aux moyens logistiques et financiers mis en oeuvre par l'IPEV, l'Institut Polaire français Paul-Emile Victor qui pourvoit également à l'acheminement et l'approvisionnement des chercheurs en matériel et consommables. - Photo 1: Le bateau brise-glace l'Astrolabe à l'arrivée devant la côte de Terre Adélie - Duprat/Engrand ©CSNSM-IN2P3-CNRS -.

Informations Internet : Depuis les années 1970, le Dôme C est un lieu de prélèvement de carottes glaciaires par des géologues de diverses nationalités. Alors que 44 bases se répartissent sur le pourtour du continent antarctique (parmi lesquelles la base française Dumont d'Urville), il n'existe en 1993 que 2 bases continentales : Amundsen-Scott (USA) et Vostok (Russie). Le site du Dôme C a été choisi conjointement par la France et l’Italie en fonction de plusieurs critères scientifiques : Présence d'une épaisse calotte glaciaire (3.300 mètres d'épaisseur) permettant d'accéder aux archives du climat de la planète et de reconstruire les cycles interglaciaires sur plus de 800.000 ans, Atmosphère particulièrement stable, pure et sèche, idéale pour des observations en astronomie et pour des études sur la composition chimique des basses et hautes couches de l'atmosphère, Situation éloignée des perturbations côtières, favorable aux observations en magnétisme et sismologie, complétant ainsi le réseau mondial de données peu fournies dans l'hémisphère sud. En outre, l'isolement et l'hostilité du climat sont un excellent terrain d'entraînement pour la réalisation de programmes biomédicaux applicables à des vols spatiaux.

Une équipe commence à construire un camp d'été au Dôme C en 1996, appelé station Concordia, et qui ne sera réellement opérationnel qu'en 1997. De 2002 à 2005 sera édifiée une station permanente en dur. - (Photo 2 : Localisation du Dôme C en Antarctique de l’Est, où a été réalisé le forage du programme EPICA (European Project for Ice coring in Antarctica) qui prend fin en 2004. La carotte de glace obtenue a permis une reconstitution unique de la composition de l’atmosphère sur 650 000 ans ainsi que l’histoire du climat en cette région. Les études en cours permettront d’étendre l’enregistrement aux derniers 800 000 ans.) -

Jean Duprat vient collecter dans cette neige d’une pureté extrême des micrométéorites dont l’analyse devrait permettre de mieux connaître le processus de formation du système solaire, il y a 4,5 milliards d’années. Il prend la suite de Michel Maurette qui découvrit en 1987 dans les champs de glace bleue de Cap Prudhomme (Terre Adélie, Antarctique), alors qu'il était directeur de recherche au Centre de spectrométrie nucléaire et de spectrométrie de masse (CSNSM) d'Orsay, une nouvelle sorte de micrométéorites qui n'avaient pas fondu lors de l'entrée atmosphérique. L'analyse de leur composition minéralogique, chimique et isotopique révéla qu'elles s'apparentaient à une classe rare de météorites, les chondrites "carbonées-hydratées" (moins de 2 % des chutes de météorites) - les scientifiques pensent que les chondres sont les premières pierres qui se sont formées lors de la condensation de la nébuleuse solaire ; elles contiennent moins de 35% de métal -. Les météorites carbonées contiennent plus de carbone et d'eau que les météorites "ordinaires". Elles sont principalement constituées d'assemblages primordiaux très déséquilibrés de minéraux anhydres et hydratés.

Certains constituants de ces météorites (les inclusions réfractaires) remontent à l'époque de la formation du système solaire (~ 4,5 milliards d'années). Elles pourraient avoir joué un rôle important dans la formation de l'atmosphère et des océans, et dans l'apparition de la vie sur la Terre primitive : c'est le scénario EMMA (Early Micro Meteorites Accretion) proposé par Michel Maurette. - Photo 3: L'hélicoptère de débarquement de l'Astrolabe vers la station Dumont d'Urville - Duprat/Engrand ©CSNSM-IN2P3-CNRS -.

Le voyage est long depuis la France. L’écrivain Marie Darrieussecq, épouse de Jean Duprat, l’accompagne jusqu’à la petite île de Tasmanie, au sud de l’Australie, où il embarque au port de Hobart, la capitale, à bord de l’Astrolabe, un bateau brise-glace qui l’emmène à 2700 Km de là en Terre Adélie, à la station polaire Dumont d’Urville. Il s’envolera enfin de la base italienne Terra Nova Bay en Twin Otter, un petit avion pour une dizaine de passagers, qui atterrira au petit campement d’été de Dôme C distant de 1200 Km, soit 4 heures de vol. La station la plus proche, Vostok, est située à 560 Km l'intérieur des terres. Le matériel lourd, acheminé en containers tirés par des tracteurs à chenilles, parvient à destination en dix jours depuis la côte, quel que soit le temps. C’est le mois de novembre, le début de l’été austral. La température est de –25°C en été. En hiver, elle est de –50°C et peut descendre jusqu’à –80°C car le Dôme C est situé à l’intérieur du continent, sur un haut plateau de 3300 mètres de neige et de glace qui repose sur le socle rocheux. - Photo 4: Jean Duprat devant le Twin Otter - Duprat/Engrand ©CSNSM-IN2P3-CNRS -.

Tout nouvel arrivant doit donc s'adapter à un dépaysement total, un froid pénétrant qui nécessite un équipement spécial que l'on doit endosser pour aller d'une tente à l'autre, aggravé par l'altitude de haute montagne qui coupe le souffle. L'environnement désertique plat constitué uniquement de neige présente une très grande sécheresse de l'air. La luminosité en été est très forte malgré la faible hauteur du soleil qui tourne à 360° au-dessus de l'horizon sans jamais se coucher : la lumière est permanente, sans alternance de jour et de nuit. Enfin, l'isolement du reste du monde s'allie à la promiscuité au sein de ce groupe très réduit, avec des conditions d'hébergement et de nourriture relativement spartiates. Le livre "White" de Marie Darrieussecq, publié en 2003 à la suite de l'expérience de son époux, en donne une description très évocatrice et très concrète, bien qu'elle ne s'y soit pas rendue personnellement. - Photo 5: Jean Duprat devant les panneaux Lucmau et Bassussarry - Duprat/Engrand ©CSNSM-IN2P3-CNRS -.

Il n’est donc pas étonnant que ses occupants temporaires ressentent le désir de l’humaniser et sacrifient davantage que dans les autres stations à la tradition de marquer leur passage par la pose d’un panneau où figure le nom de leur lieu d’origine, souvent un petit village des Alpes, ou des Dolomites. Jean Duprat pose ainsi deux pancartes, l’une indiquant la direction de Bassussarry, d’où provient son épouse, et l’autre Lucmau, où il séjournait durant son enfance pour les vacances chez ses grands-parents, aux confins de la Gironde et des Landes. En 2009, cela fait donc dix ans qu'ils sont dressés à Concordia. Le chercheur retourne à deux reprises sur le site, en 2002 et en 2006. Il en résultera un film documentaire auquel il collabore, intitulé « Poussières du Pôle », élaboré par le CNRS sur un support DVD pour le public et les scolaires, et qui sera primé en 2008 lors du Festival du film du chercheur à Nancy. - Photo 6: Collecte de micrométéorites dans les régions centrales antarctiques. Départ de la traverse (Raid), qui relie Dôme C (régions centrales antarctiques) à Cap Prudhomme, Terre Adélie. 6/12/2002 © CNRS Photothèque / CSNSM / DUPRAT Jean, ENGRAND Cécile -.

- Photo 7: Départ du Raid pour Concordia - Duprat/Engrand ©CSNSM-IN2P3-CNRS -.

S’il tombe chaque année sur Terre 3 à 8 tonnes de météorites, elle reçoit également une pluie évaluée à 5300 tonnes par an de micrométéorites. Celles qui intéressent Jean Duprat ont une taille allant de 30 à 100 microns (millièmes de millimètres) et sont souvent recouvertes d’une coquille noire de magnétite, un oxyde de fer caractéristique de leur origine extra-terrestre, qui s’est formé lors de l’échauffement pendant la chute dans l’atmosphère. Jean Duprat n'est pas un spécialiste de la chimie de la vie, basée sur le carbone, et n'effectue aucune recherche en exobiologie (recherche de la vie en dehors de la Terre). Il confirme simplement que l'on ne sait pas encore quel degré de complexité peuvent atteindre des molécules formées en milieu extra-terrestre. Pour le moment, les seuls composants extraterrestres dont on soit sûr, ce sont les acides aminés, les autres (composants comparables à ceux d'une enveloppe cellulaire, ou bien ayant une fonction identique à de la chlorophylle) seraient encore du domaine de la spéculation, selon lui. Il convient qu'il y a un monde entre ces grosses molécules et le plus infime être vivant, et que l'on ignore encore tout du passage du stade de composants organiques à celui d'un organisme doué de vie, aussi simple soit-il. Photo 8: La station Concordia au Dôme C - Duprat/Engrand ©CSNSM-IN2P3-CNRS -.

Sa spécialité, c'est l'astrophysique, les sciences de l'univers : quelle est la matière qui a formé le système solaire à l'origine ? Dans le monde, seuls deux autres groupes font des recherches similaires aux siennes, aux Etats-Unis et au Japon. Leur chance, souligne-t-il, c'est qu'il s'agit de recherche fondamentale pure, sans aucun débouché ni intérêt commercial (contrairement à la recherche de météorites de plus grande taille). A l'issue de ses études universitaires, il a fait sa thèse en physique nucléaire, avec les accélérateurs de particules. Cela fait dix ans qu'il travaille dans la recherche.

Ainsi qu'il est exposé dans le documentaire "Poussières du Pôle", une micrométéorite est plus intéressante qu'un gros corps car elle est restée inchangée depuis sa formation, elle n'a pas été percutée, elle n'a pas fondu, elle n'est pas agglomérée dans une planète, elle constitue donc une véritable archive, un élément de l'histoire du système solaire. Ce qui la distingue d'une poussière terrestre, c'est d'abord sa composition chimique. Elle contient plus d'éléments lourds, fer, nickel, or (qui ne forme pas d'oxyde), iridium. Sur Terre, la plupart de ces éléments lourds ont migré vers le centre et sont, en proportion, bien plus rares en surface. -

Lors des deux premières expéditions pendant l'été austral novembre 1999-février 2000 et 2001-2002, sont extraites plus de 250 micrométéorites de 40 m3 de neige prélevée au voisinage de la station Concordia. D'une taille supérieure à 25 micronmètres (millièmes de millimètres), elles se distinguent nettement des poussières terrestres beaucoup plus fines. Conservées à très basse température dans de la neige très pure, elles n'ont subi que très peu d'altérations terrestres, contrairement à celles collectées dans les glaces bleues sur la côte antarctique. C'est ainsi qu'elles ont pu conserver une importante proportion d'inclusions de sulfures de fer (très solubles dans l'eau) et que des météorites très friables, jamais observées auparavant, ont pu être récupérées intactes. L'équipe espère qu'elles sont aussi représentatives que possible du complexe de poussières interplanétaires rencontré par notre planète et constate, à l'étude, que leur matrice à grains fins présente une composition similaire à celle de référence du système solaire. Comme il s'agit de poussières contemporaines (remontant aux années 1960, avant toute intrusion humaine sur le site), elles sont comparées aux poussières interplanétaires collectées dans la stratosphère par la NASA. L'évaluation du volume reçu par la Terre est de 6000 tonnes par an de flux de poussières extraterrestres. L'équipe projette d'exploiter à l'avenir d'importantes surfaces pour chercher des particules provenant d'averses historiques d'étoiles filantes telles que les Léonides.

Ces micrométéorites proviennent principalement de deux réservoirs. Le premier, relativement proche, est la ceinture d'astéroïdes située entre Mars et Jupiter. Cette planète gazeuse très massive a aspiré tout ce qui avait été à proximité dans les premiers temps, les éléments les plus anciens par conséquent. Le deuxième réservoir est plus intéressant, mais il est aussi plus éloigné, il s'agit de la zone tout à fait externe du système solaire, excessivement froide, où gravitent les comètes. Certaines d'entre elles sont parfois déstabilisées de leur orbite lointaine, "tombent" vers le centre du système solaire et passent à proximité de la Terre. La chaleur des rayons du Soleil sublime une partie de la glace dont elles sont majoritairement constituées, qui s'échappe sous la forme d'un panache de cristaux mêlés de poussières.

Celles-ci sont fort différentes des poussières d'astéroïdes. L'équipe de chercheurs dirigée par Jean Duprat a pu ainsi collecter des agrégats qui n'avaient jamais été observés auparavant. D'aspect très poreux, très friables, on distingue encore nettement les grains dont ils sont constitués, à peine soudés entre eux par une gangue carbonée. Issus de diverses sources, ils ont été préservés de toute modification en étant enfermés très tôt dans de la neige cométaire qui s'est ensuite transformée en glace cométaire. Les comètes sont donc des congélateurs-"poubelles" très intéressantes. Puis, en chutant sur la neige de l'Antarctique, ces poussières ont été également préservées de toute altération terrestre (aqueuse et mécanique). - Photo 9: Micrométéorite entière - Duprat/Engrand ©CSNSM-IN2P3-CNRS -.

Les atomes qui sont fabriqués à l'intérieur des étoiles sont déclinés en plusieurs isotopes. Si l'on prend l'exemple de l'oxygène, il est formé d'un noyau de 8 protons autour duquel gravitent 8 électrons qui lui procurent ses caractéristiques physico-chimiques. Son noyau contient également des neutrons qui n'ont d'influence que sur la masse de l'atome. Un isotope est caractérisé par le nombre de neutrons dans chaque atome. Sur Terre, il existe plusieurs isotopes stables de l'oxygène, dont l'oxygène 16 qui contient 8 neutrons ou l'oxygène 18 qui contient 10 neutrons (respectivement 99% et 0,2%). On les retrouve dans tous les composés oxygénés naturels, notamment l'eau et les carbonates. Ils sont utilisés couramment pour reconstituer les paléoclimats, en étudiant leur proportion notamment dans les carottes obtenues par forage des calottes glaciaires de l'Antarctique et du Groënland. Chaque milieu a une "signature isotopique", c'est à dire une proportion d'isotopes, qui lui est propre, l'eau de mer chaude a une signature différente de l'eau de mer froide, elle-même différente de l'eau de pluie, etc. Parallèlement, le réservoir cométaire a une signature isotopique différente du système solaire interne avec ses planètes telluriques (Mercure, Vénus, Terre, Mars). La détermination de la signature isotopique est donc un moyen de connaître la provenance des micrométéorites et de leurs constituants. - Photo 10 : L’Astrolabe, navire de desserte de la Terre Adélie. Base Dumont d’Urville, Terre Adélie (Antarctique). 2006 © CNRS Photothèque/ IPEV / FRENOT Yves -.

Les micrométéorites collectées dans les neiges de l'Antarctique à Concordia sont analysées en France, au Centre de spectrométrie nucléaire et de spectrométrie de masse (CSNSM) d’Orsay. Après avoir fait un premier tri au microscope électronique à balayage, on étudie les éléments les plus intéressants avec un instrument qui les analyse de façon plus poussée. C'est une microsonde ionique qui envoie à la surface de la micrométéorite que l'on étudie un fin pinceau d'ions (atomes ionisés de Césium Cs+ ou Oxygène O-, dont on a retiré un électron pour les rendre électriquement positifs, ou bien auxquels on a ajouté un électron pour les rendre négatifs). Celle-ci est ainsi "décapée" très finement en atomes dont certains sont ionisés par ricochet et dirigés grâce à un champ électro-magnétique dans une autre machine, un spectromètre de masse, qui sépare les atomes selon leur masse afin de déterminer les constituants de la micrométéorite. C'est lors de ce processus que l'on mesure la proportion d'isotopes. - Photo 11: Tranchée pour la collecte des micrométéorites - Duprat/Engrand ©CSNSM-IN2P3-CNRS -.

Les chercheurs ont constaté qu'une fraction (1%) des poussières de Concordia contenait des phases réfractaires. Le terme réfractaire signifie que des éléments à l'état gazeux ont été condensés pour devenir de petits grains solides. Etant donné leur nature (Calcium, Aluminium par exemple), la température nécessaire pour qu'ils soient à l'état gazeux (supérieure à 1500°C ou 2000°C) montre qu'ils ne pouvaient se trouver qu'à proximité du Soleil. Au lieu de retourner dans l'astre, une petite partie a été éjectée très loin et a été condensée sous l'action du refroidissement rapide. L’équipe de recherche a eu la confirmation de l'origine cométaire de certaines des poussières ramassées à Concordia, et notamment celles qui contiennent des phases réfractaires, en recoupant ses informations avec les données recueillies par Stardust, la sonde de la NASA qui a rapporté fin 2006 des échantillons prélevés dans la queue de la comète Wild 2. Ce résultat indique que des objets fabriqués à courte distance de notre étoile en constitution (il y a 4,5 milliards d'années) ont été transportés jusqu’au réservoir de formation des comètes. - Photo 12 : Télescope et plate-forme de l’expérience Concordiastro. Il s’agit d’un programme de mesure des qualités astronomiques du site de Dôme C dans la perspective d’un futur observatoire à Concordia. Au premier plan les deux télescopes de 28 cm de diamètre ont été spécialement adaptés pour fonctionner dans les conditions de froid de l’hiver polaire (températures descendant jusqu’à -80°C). Au second plan (à droite) les deux plates-formes de 5 mètres de haut supportent d’autres télescopes et expériences. Les systèmes électriques de contrôle se trouvent dans le petit tonneau en bois au milieu des plateformes. L’ensemble est piloté depuis la base Concordia (au fond à gauche) grâce à une liaison par fibre optique. 2007 © CNRS Photothèque / L.U.A.N. /ARISTIDI Eric -.

L'analyse isotopique de ces inclusions réfractaires (les gaz condensés) montre qu'elles sont très particulières. Elle indique la présence, au moment de leur formation, de radio-isotopes (isotopes radioactifs) à courte durée de vie (inférieure à quelques millions d’années). Pour nombre de ces isotopes (Beryllium 10Be, Aluminium 26Al, Chlore 36Cl, Calcium 41Ca, Fer 60Fe,…), les concentrations initiales sont supérieures aux valeurs prévues par l’évolution chimique de la galaxie. Ces données impliquent donc un (ou plusieurs) événement(s) de nucléosynthèse contemporain(s) de la formation du système solaire. Elles confirment également que ces poussières sont bien restées isolées dans l'espace et ne sont pas des fragments de météorites. - Photo 13: Collecte de micrométéorites à Concordia - Duprat/Engrand ©CSNSM-IN2P3-CNRS -.

Jean Duprat explique qu'il existe deux hypothèses pour la formation des étoiles (et donc du Soleil). Celles-ci se forment au sein de nébuleuses interstellaires, c'est à dire de régions de l'espace riches en gaz (essentiellement de l'hydrogène) et en poussières. Les nuages moléculaires géants peuvent rester dans un état stable pendant très longtemps, mais les ondes de choc provoquées par les supernovæ voisines (première hypothèse), ou des interactions gravitationnelles et magnétiques (autre hypothèse) peuvent entraîner l'effondrement gravitationnel d'une partie du nuage, ce qui conduit à la formation d'étoiles (ces gaz se rassemblent en tournoyant et se concentrent tellement que la fusion nucléaire s'enclenche, l'étoile "s'allume"). - Photo 14: L'importante proportion d’inclusions de sulfures de fer dans les micrométéorites collectées à Concordia montre leur absence d'altération terrestre - Duprat/Engrand ©CSNSM-IN2P3-CNRS -.

Jean Duprat et son équipe pensent que les inclusions réfractaires pourraient contenir des éléments de ces supernovæ (première hypothèse). Une autre explication possible serait qu'elles proviennent de la production in-situ d’anomalies isotopiques par irradiation de la matière circumstellaire par des particules légères (p, He) énergétiques (quelques MeV/A). Cette quête de radioactivité éteinte dans les micrométéorites constitue l'axe de recherche principal de Jean Duprat pour comprendre la formation du système solaire. Si l'on trouvait de l'uranium (ou du plomb ?) radioactif dans ces micrométéorites, leur très longue durée de vie permettrait de les dater précisément, car ce sont les meilleures horloges qui soient à notre disposition. - L’uranium 238 qui constitue à lui seul 99,3 % de l’uranium naturel possède la durée de vie la plus longue : sa période est de 4,5 milliards d’années, soit à peu près l’âge de la Terre. Il est très peu radioactif. Sa très longue période explique qu’il soit encore présent dans la croûte terrestre. - Photo 15 : Réglage optique du télescope de l’expérience Corona : c’est un prototype de coronographe stellaire qui a vocation à détecter des compagnons faibles d’étoiles brillantes. Malgré la présence du Soleil, le ciel de Dôme C est suffisamment coronal (atmosphère extrêmement pure) pour autoriser l’observation d’étoiles en plein jour © CNRS Photothèque / LUAN / ARISTIDI Eric -.

Il faudra sans doute dix ans de recherche pour reconstituer l'histoire de ces micrométéorites grâce auxquelles Jean Duprat et son équipe espèrent mieux comprendre celle du système solaire...

Base franco-italienne Concordia

SOMMAIRE

 

 

Cathy : Entretien avec Jean Duprat, astrophysicien, chercheur au Centre de Spectrométrie Nucléaire et Spectrométrie de Masse (CSNSM-IN2P3-CNRS) d’Orsay (France), responsable de l’équipe d’Astrophysique du Solide et responsable du programme français de recherche de Micrométéorites en Antarctique
Poussières de comètes
Mercredi 15 Avril 2009