Nous n'avons pas l'intention de traiter la question politique qui a amené M.Constans sur le tapis, à propos de l'interdiction qu'il a decrétée, dit-on, au Cambodge, du jeu des trente-six bêtes, jeu de hasard comme la roulette, bannie des établissements publics en France et dans les colonies. Nous avons voulu seulement montrer à nos lecteurs en quoi consiste ce jeu aussi simple que pittoresque. Nous aurons à revenir sur un autre jeu, le "ba-couan", qui se joue dans toute l'Indo-chine, excepté en Conchinchine, où il fut défendu en 1874, et qui fleurit encore au Cambodge; c'est une sorte de trente et quarante bien plus dangereux que le précédent.
Notre dessin représente la maison de jeux devant laquelle se trouvent les joueurs cambodgiens. Dans l'intérieur, sont rangées en ligne les trente-six bêtes en carton-pâte, devant lesquelles les joueurs pontent la somme qu'ils veulent risquer. Le matin, on a affiché, sur un tableau accroché devant la porte, des spécimens artificiels de morceaux de peau, de corne, de dent, de plume, d'arête, de bois, etc., de la bête qui doit sortir.
Le joueur doit deviner, d'après ce spécimen placé sur le tableau, la bête qui doit gagner. L'animal, en carton, est placé dans un panier hermétiquement fermé. Il est midi, heure à laquelle se fait connaître le résultat du jeu. Le panier est hissé au haut d'un mât. Au bout de cinq minutes, le couvercle est levé au moyen d'une corde que tient en main le croupier. La bête est attachée dans l'intérieur à ce couvercle, de sorte que, quand il est levé, la bête est soulevée en même temps et tous les joueurs peuvent le voir. En admettant que la bête en question soit un chien, par exemple, tous les joueurs qui ont ponté sur le chien gagnent trente-deux fois leur mise et les autres perdent.
C'est le jeu de la journée; le lendemain, on recommence.