Sciences et Avenir – Février 2000 – n°
636
Dix questions sur la génétique
Le cancer est-il génétique ?
Question piège que celle-là ! Car, bien sûr,
les cancers - parce qu'ils naissent lorsque l'ADN des cellules
est endommagé - sont, par nature, tous génétiques.
Maintenant, s'il s'agit de savoir si tous les cancers sont héréditaires,
la réponse est tout autre. Seulement de 5 % à
10 % présentent une origine familiale. Un gène
muté, hérité des parents, prédisposera
à la survenue d'un cancer, des dizaines d'années
avant l'âge moyen d'apparition de la tumeur. Certains
cancers du côlon ou du sein se transmettent ainsi de génération
en génération.
Le reste des cancers est dû à l'alimentation (plus
de 30 % dans les pays industrialisés), à l'environnement,
au mode de vie (tabac, alcool) ou encore aux virus (pour 10
% des cas). Au bout du compte, c'est un individu sur quatre,
dans la population, qui développera un cancer, terme
générique désignant plus d'une centaine
de maladies réparties sur la quasi-totalité de
l'organisme.
Toutes les cellules qui constituent une tumeur sont, au départ,
issues d'une seule cellule qui s'est déréglée.
Suite à une mutation d'un de ses gènes, la cellule
échappe au contrôle normal de sa prolifération.
Elle adopte alors un comportement anarchique. Elle ne meurt
plus et se multiplie de façon excessive, formant un premier
amas cellulaire. Il faudra ensuite plusieurs autres mutations,
de l'ordre d'une demi-douzaine, réparties sur plusieurs
années, pour que cet amas grossisse, devienne alors une
tumeur maligne, qui pourra essaimer dans les organes périphériques
et créer des métastases.
Deux types de gènes sont plus particulièrement
en cause dans l'apparition du cancer : les proto-oncogènes
et les gènes suppresseurs de tumeurs. Normalement impliqués
dans la stimulation de la croissance des cellules, les premiers
ne deviennent nocifs que lorsqu'ils subissent une mutation.
Ils deviennent alors oncogènes et favorisent une prolifération
cellulaire incontrôlée. Les oncogènes peuvent
agir à différents niveaux. Certains codent directement
des formes mutantes hyperactives de protéines de stimulation,
type enzymes. D'autres perturbent des signaux cellulaires normaux,
comme celui du suicide cellulaire programmé, l'apoptose.
Ce mécanisme de sauvegarde est essentiel car il permet
d'éliminer une cellule dès qu'elle devient maligne.
Du côté des traitements, beaucoup d'efforts sont
d'ailleurs consentis pour mettre au point des thérapies,
géniques ou non, qui permettraient de reprogrammer l'apoptose
des cellules cancéreuses afin de leur arracher leur immortalité
usurpée.
L'autre catégorie de gènes associés au
cancer a, tout comme les proto-oncogènes, une action
normale dans l'organisme : les gènes suppresseurs de
tumeurs sont chargés de juguler l'action des proto-oncogènes
et la multiplication des cellules. Mais, lorsqu'ils sont inactivés
par des mutations malheureuses, ces gènes garde-fous
laissent alors le champ libre aux proto-oncogènes qui
peuvent, à tout moment, emballer la machinerie cellulaire.
Un dysfonctionnement dans les gènes suppresseurs de tumeurs
peut également être à l'origine des tumeurs
secondaires, ou métastases. En effet, ces gènes
codent pour des protéines d'adhérence permettant
aux cellules normales de rester agrégées les unes
aux autres. Si ces protéines deviennent inaptes, les
cellules cancéreuses se détachent alors du tissu
d'origine, envahissent un vaisseau sanguin qui les transporte
à un autre endroit de l'organisme, où elles s'implantent
et établissent une nouvelle colonie tumorale. La gravité
d'un cancer doit beaucoup à la multiplication et à
la dissémination de ces tumeurs secondaires.
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Sciences et Avenir – Febrero de 2000 – n°
636
¿Es el cáncer genético?
¡Esta es una pregunta con trampa! Ya que, evidentemente,
los cánceres – puesto que nacen cuando el ADN de
las células está dañado - son, por naturaleza,
todos genéticos. Ahora bien, si se trata de saber si
todos los cánceres son hereditarios, la respuesta es
muy otra. Solamente del 5% al 10% presentan un origen familiar.
Un gen mutado, heredado de los padres, predispondrá a
la aparición de un cáncer, decenas de años
antes de la edad media de aparición del tumor. Algunos
cánceres de colon o de mama se transmiten así
de generación en generación.
El resto de los cánceres se debe a la alimentación
(más del 30% en los países industrializados),
al medio ambiente, al modo de vida (tabaco, alcohol) o también
a los virus (en un 10% de los casos). Al final, un individuo
de cada cuatro de la población será el que desarrolle
un cáncer, término genérico que designa
más de un centenar de enfermedades distribuidas en la
casi totalidad del organismo.
Todas las células que constituyen un tumor proceden,
al principio, de una única célula que se dañó.
A raíz de una mutación de uno de sus genes, la
célula escapa al control normal de su proliferación.
Adopta entonces un comportamiento anárquico. Ya no muere
y se multiplica de manera excesiva, formando una primera masa
celular. Serán necesarias a continuación otras
varias mutaciones, del orden de media docena, distribuidas durante
varios años, para que esta masa crezca, y se convierta
entonces en un tumor maligno, que podrá diseminarse en
los órganos periféricos y crear metástasis.
Dos tipos de genes son especialmente responsables de la aparición
del cáncer: los protooncogenes y los genes supresores
de tumores. Normalmente implicados en el estímulo del
crecimiento de las células, los primeros sólo
se vuelven nocivos cuando sufren una mutación. Se convierten
entonces en oncogenes y favorecen una proliferación celular
incontrolada. Los oncogenes pueden actuar a distintos niveles.
Algunos codifican directamente formas mutantes hiperactivas
de proteínas de estímulo, tipo enzimas. Otros
perturban señales celulares normales, como el del suicidio
celular programado, la apoptosis. Este mecanismo de protección
es esencial ya que permite eliminar una célula cuando
se vuelve maligna. En cuanto a los tratamientos, se consienten
también muchos esfuerzos para poner a punto terapias,
génicas o no, que podrían permitir programar de
nuevo la apoptosis de las células cancerosas para arrancarles
su inmortalidad usurpada.
La otra categoría de genes asociados al cáncer
tiene, al igual que los protooncogenes, una acción normal
en el organismo: los genes supresores de tumores se encargan
de suprimir la acción de los protooncogenes y la multiplicación
de las células. Pero, cuando son inactivados por mutaciones
infelices, entonces estos genes protectores dejan el campo libre
a los protooncogenes que pueden, en cualquier momento, acelerar
la maquinaria celular.
Un disfuncionamiento en los genes supresores de tumores puede
también ser la causa de los tumores secundarios, o metástasis.
En efecto, estos genes codifican para proteínas de adherencia
que permiten a las células normales permanecer agregadas
las unas a las otras. Si estas proteínas se vuelven inaptas,
las células cancerosas se despegan entonces del tejido
de origen, invaden un vaso sanguíneo que las transporta
a otro lugar del organismo, donde se implantan y establecen
una nueva colonia tumoral. La gravedad de un cáncer depende
mucho de la multiplicación y la diseminación de
estos tumores secundarios.
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