Bienvenue sur le Site du Collectif des Orphelins
de Saint Pierre de Clairac
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INTERLOCUTEURS:
Alain DOSTES (contact), fils de Gabriel DOSTES l'une des victimes à Saint Pierre de Clairac (47270), de l'opération nazie
Michel SERCAN (contact), fils de Jean SERCAN l'une des victimes, à Saint Pierre de Clairac (47270), de l'opération nazie.
CRIMES DE GUERRE ET BARBARIE NAZIE en Lot et Garonne
Tragédie du 7 juin 1944
Le 7 juin 1944, à CASTELCULIER puis SAINT PIERRE DE CLAIRAC - 17 victimes de la barbarie nazie-
1- Les documents de référence:
F Crimes de guerre en Agenais - Jacques Brissaud - Preambule de l'ouvrage
F CORPS FRANC POMMIÉS (Tome 1 & 2) - Général Marcel CERONI -
F Plaquette du Lieutenant-Colonel BISWANG - A LA MÉMOIRE DE MON FILS - Capitaine "BÉRANGER" au maquis -
F Journal La Nouvelle République du 4 octobre 1944 - André BUSQUET -Voir -
F Journal La Nouvelle République du 24 juin 1945 - André BUSQUET -Voir -
F Journal La Nouvelle République du 26 octobre 1945 - André BUSQUET -Voir -
F Journal Le Patriote des 19 et 20 octobre 1944 - Arthur ADER - Voir
F Autres ouvrages: Collaboration et Epuration en Lot et Garonne -JP KOSCIELNIAK-; La DAS REICH -Guy PENAUD-.
F Journal QUARANTE QUATRE du 16 octobre 1945 - Condamnation contumace - Voir
F Journal QUARANTE QUATRE du 18 octobre 1945 - Inauguration monument - Voir
2- Les dossiers des archives départementales du Lot et Garonne:
F Dossier 1W444, témoignages et rapport de la P.J Bordeaux, domaine public
F Dossier 1738W34, dossier n° 488 (procès HANACK), communicabilité 100ans, dérogation nécessaire
F Dossier 1738W81, dossier 836 (instruction GUICHARD Raymond), communicabilité 100ans, dérogation nécessaire
F Dossier 1738W80, dossier n°836 (procès LANGE Jean), accès de communicabilité 100ans, dérogation nécessaire
3- Témoignages actuels:
F Mme ELLERO Dorino ex Mlle SERCAN Josette - Mes souvenirs -
F Mme POLONI Bruno ex Mlle LASJUNIES Jeanine - Témoignage -
F M. CASTELNAU Etienne - Témoignage -
Lire le rapport établi par la P.J en mai 1946 - Rapport PJ Bordeaux - ou pour le lire plus aisément - Rapport transcrit -
Voir liste des victimes - Victimes du 7 6 44 - pour en savoir plus et pour tous morts pour la France - http://www.memorial-genweb.org/
Voir les dépositions faites à la P.J par:
ASTE Gaston BELON Vve AFFLATET Marie BERANGER Vve BALSAN Suzanne CABAUD épouse GUICHARD Blanche CASTEX Omer
CAZOTTE Antoine COUSY Vve ROUTABOUL Irma ELMER épouse BONENFANT Agnès ESCH Paul ESPINASSE Justin
FEYT Vve SERCAN Ida FRISCHMANN Pierre FROSSARD Euchariste GAYRAL Andre GUICHARD Raymond
JACQUEMIN épouse JACQUES Jeanne JACQUES Eugene LACLAVERIE Vve DOSTES Jeanne LACLAVERIE épouse RIVAL Emilie
LAJEUNIE Charles LANGE Georges MAINGUET Maurice MAINGUET Yvette MAUREL Pierre MAZEAU Robert
MOYNIE Marcel PRECHEUR Vve GAENTZLER Marie RABOIS Ernest ROUX Antoine SAJUS Lucien SALON René
SALON Vve BOE Marcelle SAURIN Alfred SIMON Louis SIMONITTI épouse SAURIN Thérèse SOULAGE épouse LANGE Marcelle
VAYSSIERE épouse LANGE Juliette VINCENT Vve DOUMIC Anne
Prendre connaissance du PV de la gendarmerie et des dépositions relatives à LANGE Jean - voir le PV
Des articles du journal Le Petit Bleu de l'Agenais: 8 juin 2000; 7 juin 2005; 6 juin 2006 (1); 6 juin 2006 (2); 8 juin 2006; 18 juin 2007.
Exécution d'Henri HANACK journal Sud-Ouest: 9 février 1946
Le journal " L'Echo de Saint-Pierre - récit de la tragédie -": décembre 2006
Le journal " Sept en Lot & Garonne ": 18 juin 2007
Inauguration du monument de SAINT PIERRE de CLAIRAC le 17 juin 1945
Deux veuves GAENTZLER Marie et SERCAN Ida au premier plan
4 - Le récit:
Tragédie de SAINT PIERRE de CLAIRAC du 7 juin 1944
A la suite de la dénonciation par Jean LANGE (
condamné à mort par contumace (0)) et ses amis miliciens auprès de la Gestapo d’Agen dans la soirée du 6 juin 1944, le 7 juin 1944, vers 15 heures des troupes allemandes envahissaient le village de ST PIERRE DE CLAIRAC, situé près d'AGEN (Lot-et-Garonne), procédaient à l'arrestation de 9 patriotes et les exécutaient par balles, sous l'accusation de détention d'armes et d'actes "terroristes".L’expédition punitive, véritable acte de barbarie, perpétrée à SAINT PIERRE DE CLAIRAC par une colonne SS n’était pas un acte isolé. Elle constituait l’aboutissement d’une opération plus large faisant suite à une série d’arrestations et de tortures précédemment exécutées par la Gestapo d’Agen. Celles-ci devaient d’abord mener les Allemands au CHATEAU DE LA CLOTTE, commune de CASTELCULIER où ils firent 6 victimes, puis au château de CASTELCULIER, avant de se rendre au village de SAINT PIERRE DE CLAIRAC où ils firent 11 victimes.
Ce document retrace le déroulement des évènements survenus à SAINT PIERRE DE CLAIRAC ce 7 juin 1944. Il est le résultat de nombreux témoignages obtenus auprès de survivants de la tragédie et recoupe les dépositions et enquêtes officielles réalisées à la Libération (voir les Références).
Dans la matinée, le chef local de la résistance, MAINGUET, est informé, de l’opération menée par les Allemands au château de La Clotte, commune de Castelculier, distant de 5/6kms, mais il n’en tire aucune conséquence. Il continue, avec son adjoint JUTEAU venu par trois fois chez lui ce matin du 7 juin, les préparatifs des actions que devra mener la résistance, suite au débarquement survenu la veille en Normandie. Des instructions ont été données la veille, vers minuit, par le chef de la compagnie du CORPS FRANC POMMIÉS (Fred STREIFF, son chef, avec ses officiers les abbés Pierre FRISCHMAN et Pierre MAUREL, réunion à laquelle participaient également Raymond GUICHARD, André MAZEAU et Maurice MAINGUET).
Vers 15H, un premier véhicule de SS stoppe précisément devant l’épicerie MAINGUET, chef du groupe local. Cette colonne SS est conduite par Henri HANACK
(*) dit le « balafré » de la gestapo d’Agen. Mme MAINGUET qui est dans l’épicerie, les voit et dit à son mari qui est avec JUTEAU, dans la cuisine « les voilà ». Aussitôt MAINGUET entraîne JUTEAU vers la porte qui donne dans la salle de bal et s’échappent par une fenêtre arrière s’ouvrant sur la petite place du puits public. Tous deux s’enfuient par les champs bordant le petit ruisseau qui descend du vallon en direction du lieu-dit ROUGÈRES. C’est là, qu’ont été, suite à réquisition, logés JUTEAU et BALSAN son beau-père (beau-père car il est le second mari de sa mère), réfugiés de la MAYENNE.Les Allemands trouvent dans l’épicerie une liste des résistants portant en clair leur nom véritable et l’arme correspondante attribuée à chacun d’entre eux. Les armes ont été distribuées par JUTEAU à ROUGÈRES, la veille, en début de nuit. Antoine ROUX venu recevoir la sienne, rapporte dans sa déposition
(2) que JUTEAU a établi une liste au crayon à papier.C’est donc munis de la liste trouvée dans l’épicerie, décrite par Mme Yvette MAINGUET et vue vers 14Heures par Albert REYSSAC résistant du groupe local, que les Allemands, prennent en otage Pierre DOUMIC (
beau-père de Mme MAINGUET Yvette, car troisième mari de sa mère), qui habite l’épicerie avec son épouse, sa belle-fille son mari Maurice MAINGUET et leur deux jeunes enfants. Ils décident alors de se faire piloter chez chacun des répertoriés et, en priorité, chez JUTEAU.Le chef et son second, dans leur fuite, sont passé à quelques mètres de Georges GAENTZLER et Marie son épouse qui sont dans leur jardin, situé aux abords immédiats du village – Témoignage de Marie
(2): « mon mari et moi avons vu passer ou plutôt courir MAINGUET avec JUTEAU, semblant tous deux complètement affolés. Mon mari a alors crié à MAINGUET qui était à quelques mètres de lui : « Qu’est-ce qu’il y a ». Ni MAINGUET ni JUTEAU, non seulement pas tourné la tête vers nous et se sont enfuis sans répondre » !...Sur le trajet vers ROUGÈRES, Etienne CASTELNAU qui charge le foin dans le pré face à leur ferme de l’autre côté de la route de PUYMIROL, rapporte :
« Nous chargions le foin, avec mon père et ma mère. Est apparu JUTEAU, seul, débouchant du chemin venant du village, qui courrait vers son domicile et qui nous a crié « partez les boches arrivent ». Dans la minute, les boches arrivaient, déposaient sur la petite butte un soldat avec une mitrailleuse qui prenait position et poursuivaient vers le domicile BALSAN. Il n’y a pas eu de combat, tout au plus quatre coups de feu. Très vite, les Allemands repartent. Mon père s’est rendu chez BALSAN où la maison avait été incendiée. JUTEAU et BALSAN avaient été abattus. Plus tard, les deux malheureux ont été récupérés par deux villageois, GALAN Marcel sûr, le second il ne sait plus ».JUTEAU qui a eu le temps de faire fuir la grand-mère avec sa fille (18mois) à l’arrivée des Allemands, a tenté de s’échapper en dévalant le pré à l’arrière du domicile. Il n’était plus qu’à quelques mètres du bois. Il est abattu, puis achevé sur le bord du chemin où le trouveront René CERATO accompagné de sa sœur Germaine et sa cousine Marcelle, rentrant chez eux au retour de l’école. René se souvient d’avoir été arrêté avec Germaine et Marcelle par un soldat qui les a fait se tapir à la Croix de Passères dans le fossé et qui, une fois l’opération terminée, les a laissés repartir. C’est donc vers 16H/16H30 que les trois enfants trouvent JUTEAU tué, couché sur le ventre la tempe trouée par le coup de grâce sur le bord du chemin.
De là, les Allemands, conduits par DOUMIC leur otage, foncent chez LASJUNIES. Mme Bruno POLONI (Ex Mlle Jeanine LASJUNIES, citée par La Nouvelle République du 4/10/1944) se souvient parfaitement des évènements. Voici son témoignage reçu en novembre 2004:
Nous étions encore à table ce 7 juin 1944 avec Mme CARRITA et sa fille, qui était venue nous aider à épamprer la vigne, quand vers 14H-15H est arrivé Louis MOYNIÉ. Il venait nous informer de l’investissement du village par les Allemands. Aussitôt mon père a décidé de partir travailler avec sa paire de vaches à la vigne hors de vision de la ferme. Il doit ainsi sûrement à Louis MOYNIÉ d’avoir échappé aux boches.
Un véhicule est arrivé peu de temps après à notre domicile, en sont descendus les Allemands. Elle se souvient de l’extrême pâleur de DOUMIC dans la voiture.
Avec ma mère, alors enceinte de ma future sœur, madame CARRITA et sa fille, nous avons été sommées de dire où était le père terroriste possédant une arme. Nous ignorions qu’il possédait une arme et puisse appartenir à un groupe de résistants. J’affirmai que mon père n’avait pas d’arme et qu’il était parti travailler on ne savait où, un Waffen SS énervé me « colle » sous les yeux une page de cahier d’écolier, en prenant soin de ne laisser apparaître qu’une ligne – les autres restant cachées par ses mains - où est manuscrit en écriture attachée le nom « LASJUNIES » et en face « mitraillette ».
Pendant que terrorisées nous sommes gardées sous la menace d’une arme, ma mère est brutalement conduite à l’intérieur de la maison pour une fouille à la recherche de la mitraillette.
Je me rappelai alors, qu’en prévision d’une « battue au sanglier » mon père conservait dans sa chambre des cartouches dans une boîte en métal sur le dessus de l’armoire. Armoire très haute, sur le dessus de laquelle on ne pouvait accéder même avec une chaise et qui frôlait le plafond. Je garde en mémoire la peur de cette découverte, qui imaginai-je, aurait été catastrophique pour nous. Les Allemands repartiront sans avoir rien trouvé. Aussitôt partis, je me suis précipitée dans la chambre, me suis constituée un échafaudage, ai récupéré les cartouches et le cœur battant ai été les jeter dans le puits en contrebas de la maison.
Pendant ce temps, madame CARRITA est partie à la vigne informer mon père de la venue des boches chez nous, et a ramené les vaches.
Mon père n’est revenu à la maison, qu’après la libération d’AGEN, deux mois plus tard environ. Il était parti vers ST ROMAIN se réfugier auprès d’un oncle de MAINGUET, car telle devait être la consigne en cas de problème. Oncle, ami de notre famille, qui est revenu plusieurs fois à la maison chercher de la nourriture pour mon père.
Il doit être l’un des rares, sinon le seul, porté sur « la liste que j’ai vue », à avoir échappé à l’exécution, grâce à Louis MOYNIÉ d’abord et Mme CARRITA ensuite. L’arme je n’ai jamais su où elle était.
Pendant ce temps, tous les hommes à l’intérieur du périmètre établi par les Allemands autour du village, sont arrêtés et systématiquement regroupés devant l’épicerie. Emile ROUTABOUL et Gabriel DOSTES ensemble dans l’atelier du premier sont immédiatement arrêtés. De même Jean SERCAN, lui aussi dans son atelier, et GAENTZLER dans son jardin sont parmi les premiers, à être rassemblés. Un peu plus tard, Raymond FROSSARD et Gabriel DOSTES répertoriés sur la liste, sont ramenés chez eux, pour qu’ils restituent leurs armes. Ainsi, Mme TUFFAL de Puymirol (ex Mlle Agnès CASTELNAU, sœur d’Étienne) a été témoin de l’arrivée par le pont de St Pierre, de la colonne, alors qu’elle sarclait du maïs. Sa réaction a été de se réfugier chez les FROSSARD, leurs locataires. Elle a donc été témoin de l’injonction faite à Raymond de restituer son arme et qu’ainsi il ne lui arriverait rien !... ce qu’il a fait. Il a donc été ramené avec son père vers l’épicerie. Mme BOURGADE (ex Mlle Annie GALAN) se rappelle le véhicule allemand, roulant très lentement, et le jeune Marcel CASTEX à l’arrière que les allemands amenaient vers son domicile aux fins de perquisition. Ils l’avaient trouvé porteur de deux grenades.
Guy DUPRAT, qui ayant obtenu son certificat d’études, n’allait plus à l’école, aidait dès lors aux champs, garde mémoire de la longue halte de Marcel FONTAINE discutant avec son père et qui plusieurs fois a déclaré :
« il faut que j’aille à St Pierre prévenir le chef ». A l’approche du village, FONTAINE est arrêté. De quoi était-il porteur ?... Dans le journal LE PATRIOTE d’octobre 44, Arthur ADER auteur de l’article, indique que, comme CASTEX, il a été giflé par HANACK (*), pourquoi ?... GUICHARD qui avait été sorti du véhicule d’HANACK et regroupé avec les hommes de St Pierre l’a bien sûr reconnu, il est membre de son groupe et il rapporte le fait dans ses dépositions (2-3).Mme Dorino ELLERO (ex Mlle Josette SERCAN 9ans1/2 à l’époque) raconte : nous étions en classe avec M. ADER; vers 15H, un camion stationne sous le tilleul face à la classe. Peu de temps après trois allemands en tenue viennent brutalement arrêter notre instituteur (
voir ses récits dans le journal LE PATRIOTE des 19 et 20 octobre 1944), qui nous dit : « les enfants, rentrez chez vous ». Dès lors, je vais me déplacer dans le village, sans être interpelée, à la recherche de maman et de mon petit frère pendant une heure. Je vais de la maison à l’épicerie, devant laquelle les hommes ont été rassemblés, tandis que les femmes ont été regroupées face à eux sous le marronnier. Je revois toujours papa, livide ; ce sera ma dernière vision de lui. Je réentends Marie GAENTZLER, les deux ou trois fois où je suis retournée près d’elle, me dire : « Josette ne reste pas là va retrouver maman ». Après avoir erré une heure environ, j’ai enfin pensé à rejoindre ma petite sœur dans la classe des petits de madame ADER.Marius BAZILLE, future victime, est venu à St Pierre ce 7 juin 44, accompagné de son frère Léon. Marius était réfugié avec sa femme et ses trois enfants à St Caprais de Lherm. Il était sous lieutenant FFI (une rue porte depuis son nom), à Séte. Il avait dû fuir, car recherché par les Allemands; son frère Léon, arrêté sur dénonciation avait été expédié prisonnier en Allemagne. Ils étaient venus se réfugier sur St Caprais, car ils y avaient des cousins, la famille FORNER. Léon a bénéficié de l’aide d’un officier allemand antinazi (un ancien de 14/18) et a pu s’évader. Il est alors venu rejoindre son frère et sa famille, alors locataires de M. Mitadié. Ils viennent d’apprendre l’affaire de La Clotte, ils connaissent bien Antoine ROUX de St Pierre avec qui ils sont en rapport. Ils décident donc d’aller en informer l’épicier MAINGUET dont ils connaissent le rôle. A l’approche du domicile du maire de St Pierre, ils aperçoivent des Allemands. Aussitôt Bazille intime l’ordre à son frère, sans papier, de plonger dans le fossé bien que broussailleux. Léon se cache sous le pont derrière « Malgat » où il retrouve un homme qu’il ne connaît pas. En fait, il s’agissait de M. FONTANAC (son fils Jean m’a confirmé l’anecdote) qui, travaillant sur un toit des bâtisses du maire, a vu la colonne arriver et a donc cherché un abri. Marius, se croyant porteur de ses papiers, a donc continué seul. Conscient d’être contrôlé, il met ses mains dans sa veste et réalise qu’il ne les a pas sur lui. Alors, il va essayer de fuir à travers champ, face au domicile MOYNIÉ, il est grièvement blessé, une balle lui a traversé l’abdomen. Les Allemands le récupèrent et l’amènent au camion arrêté devant la mairie. Il y est soigné dans un premier temps puisqu’il sera retrouvé avec un bandage autour du ventre.
Un peu avant 17H, HANACK porteur de la liste et qui avait exigé la restitution des armes de cinq arrêtés listés (Gabriel DOSTES, Raymond FROSSARD, Georges GAENTZLER, Émile ROUTABOUL et Jean SERCAN) va y ajouter DOUMIC Pierre (
leur otage) et CASTEX Marcel (trouvé porteur de grenades) – ces deux derniers n’appartenaient pas au groupe(3) et aussi Marcel FONTAINE. Ainsi, comme le rapportait André BUSQUET dans La Nouvelle République du 4 octobre 1944, ce sont bien huit hommes qui sont emmenés de l’épicerie. Au passage, y sera ajouté Marius BAZILLE qui va être le neuvième des exécutés du village. Quand ADER, GALAN et d’autres… iront ramasser les victimes, DOSTES et CASTEX qui ont essayé de fuir dans le champ (sur le côté du monument érigé depuis à leur mémoire), seront également retrouvés morts et massacrés de la pire des façons.Pendant ce temps, le bâti « domicile épicerie » a été incendié. Seuls les domiciles de MAINGUET –chef du groupe de St Pierre- et de JUTEAU son subalterne auront été incendiés. GUICHARD est ramené, dans la voiture d’ HANACK, à AGEN.
Qu’est devenu le « chef local» Maurice MAINGUET?...
A la tombée du jour, son épouse Yvette MAINGUET inquiète, demande à Louis SIMON
(2) , André BOUYSSÉS (5) et Marie GAENTZLER (2), elle qui les a vus s’enfuir, de partir à sa recherche. Sans doute a-t-il été tué, comme son adjoint?...Ils vont le retrouver
(2) resté caché, depuis sa fuite, dans le lit du même ruisseau qui descend du vallon, proche du pont de la route de PUYMIROL, face au domicile de Mme Zélia AUVERGNON. Celle-ci, vers 18H s’est retrouvée face à lui, alors qu’il esquivait une sortie – le fils de Zélia, Guy, a rapporté le fait – lui demandant : « qu’est-ce que vous faites là », il avait replongé dans sa cache.MAINGUET n’avait pas accompagné son second jusqu’à son domicile, alors que des armes y étaient encore cachées dans la grange où avait eu lieu la distribution la veille au soir.
Il partira ensuite se réfugier à ST URCISSE, chez un oncle M. COSTES, à la ferme « Combe Maurelle », où il restera caché avec Charles LASJUNIES jusqu’au départ des Allemands du département. La déposition du cousin
(4) explique tout cela.Au soir de ce 7 juin 1944 les crimes perpétrés par la colonne SS auront faits 11 victimes à SAINT PIERRE DE CLAIRAC :
BALSAN Eugène
BAZILLE Marius Louis
CASTEX Marcel
DOSTES Gabriel Eloi Jean
DOUMIC Pierre
FONTAINE Marcel Clément Julien Romain
FROSSARD Raymond
GAENTZLER Georges
JUTEAU Marcel
ROUTABOUL Emile
SERCAN Jean
et 6 victimes au CHATEAU DE LA CLOTTE ( Commune de CASTELCULIER):
AFFLATET Emile
AFFLATET Raymond Roger
BOE Jean Clovis
BOE Marcel
GOERIG Charles
MAZEAU André
La totalité de l’affaire est parfaitement rapportée dans les diverses dépositions à la Police Judiciaire
(2) du dossier disponible aux Archives Départementales du Lot & Garonne.Ce récit est dédié à la mémoire de toutes les victimes civiles de la barbarie nazie.
Pour conclure, nous citons, et faisons nôtre, l’extrait de Jacques Brissaud qui dans la « Genèse de ces récits » issu de « Crimes de guerres en Agenais » notait :
« En plein accord avec mes amitiés, je n’ai point écrit ce récit pour ranimer, exciter, attiser des haines. Il est assez en terre de France, de colères, de rancoeurs sans souffler sur ces mille feux. Je ne suis le serviteur d’aucune idéologie. Très attentif seulement, je me suis penché sur un passé récent, sans haine, mais aussi sans crainte, pour l’élaboration d’une page d’histoire locale, souhaitant que ce récit des horreurs de la guerre fortifie notre amour de la paix ».
(*) Henri HANACK dit « Le balafré », jeune gestapiste, il n’a pas 20ans, né à Valenciennes de père allemand et qui sera l’ordonnateur de cette sinistre journée.
Pour plus de détails sur ce sinistre tortionnaire au service de la Gestapo d’AGEN, voir l’excellent ouvrage de J.P KOSCIELNIAK – COLLABORATION et EPURATION en Lot et Garonne.
Références :
(0) Journal Le QUARANTE QUATRE du 16 octobre 1945
(1) livres du général Marcel CERONI « CORPS FRANC POMMIÉS – Tome1 La clandestinité
; Tome2 La lutte ouverte - ».(2) dossiers d’archives du (47) – cote de classement 1W444 - « Enquête Police Judiciaire »
(3) dossiers d’archives du (47) 1738W34 - dossier 488 - « Procès HANACK »
(4) dossiers d’archives du (47) 1738W81 – dossier 836 - « Instruction GUICHARD Raymond »
(5) dossiers d’archives du (47) 1738W80 – dossier 836 - « Procès LANGE Jean »
Livre du magistrat Jacques Brissaud – «CRIMES DE GUERRE EN AGENAIS »
Journal La Nouvelle République des 4 octobre 1944 et 24 juin 1945 – articles d’ André BUSQUET
Journal Le Patriote des 19 et 20 octobre 1944 – articles d’ Arthur ADER –
Ce récit constitue le travail de mémoire du collectif des orphelins de St Pierre de Clairac membres adhérents ou sympathisants de l’association ADAODF :
Mme CHALLANCIN (ex Mlle SERCAN France)
Alain DOSTES
Bernard DOSTES
Mme ELLERO (ex Mlle SERCAN Josette)
Michel FONTAINE
Mme PIOCHELLE (ex Mlle BAZILLE Yvonne)
Emile ROUTABOUL
Michel SERCAN
Mme TARBOURIECH (ex Mlle BAZILLE Léone).
N.B: Nous sommes à disposition de toute personne qui souhaiterait des compléments d’information ou d’autres précisions.
Ce RECIT A éTé PUBLIé DANS LE JOURNAL du village martyr de
SAINT PIERRE de clairac
"L Echo de Saint-pierre" Décembre 2006
5 - Manuscrit du Général Marcel CÉRONI, avril 2007
6 - Récit de Paul DENIS, résistant présent à La Clotte lors de l'attaque par les allemands:
Manuscrit de son parcours patriotique, par Monsieur Paul DENIS
Le collectif des orphelins tient à exprimer sa gratitude à Madame Gervaise DENIS, veuve de Paul, qui a bien voulu lui transmettre copie du document et en accepter sa publication sur son site.
7 - Le Corps Franc Pommiès en 1944:
Le C.F.P au printemps 1944 sur AGEN
Comme l’explique le général Marcel CERONI, dans le tome 2 « La lutte Ouverte » CORPS FRANC POMMIÈS, le groupement Nord-Ouest est aux ordres de Désiré ERNST – alias Marion, Blanc -.
Le 10 juin 1944, LE MAGNY – alias colonel Derines – remplace Désiré ERNST
Reste comme adjoint, Adrien DARDENNE – alias Vase –
Désiré ERNST a confié à Michel RIBOURT – alias Riche -, au mois de mars 1944 le commandement du bataillon d’ AGEN
Le bataillon d’AGEN, rassemble trois compagnies, dont celle du Sud-Est d’AGEN aux ordres du Lieutenant Alfred STREIFF – alias Fred –
Lui sont associés deux adjoints avec rang d’officier :
L’abbé Pierre FRISCHMANN L’abbé Pierre MAUREL
Affectueusement surnommé « Pierre le belliqueux » par ses amis de la Brigade Indépendante « Alsace Lorraine ».
Dans la compagnie STREIFF:
Le groupe de l’adjudant Raymond GUICHARD de Bon Encontre qui a pour adjoint Jacques EUGÈNE est plus particulièrement chargé de l’armement. De façon plus informelle on trouve cités, membres de la résistance appartenant au bataillon ou liés à la compagnie STREIFF, dans les dossiers des Archives Départementales de Lot et Garonne et dans diverses déclarations :
André SUBRA, Lucien SAJUS, Robert VENTURELLI, Paul ESCH, Paul DENIS, Ernest RABOIS, Marcel FONTAINE, Charles FENOT, Hubert FENOT, Albert RIGAUD, André FOUGEROUSSE, adjudant BLASI (corse réfugié à Pont du Casse), Jacques LEVY, Joseph JAEGER, Jean Pierre BURGER, Charles GOERIG, André MAZEAU, Bruno SIVILOTTO, Robert MAZEAU, Félix BARBIER, Marius GIRARD, Eugène WEBER, Paul TORTILLARD, Jean RIBOURT alias Sosthène fils du commandant, Pierre RIGOUSTE.
Le groupe de Saint Pierre de Clairac, avec pour Chef Maurice MAINGUET et pour adjoint Marcel JUTEAU. A la date du 7 juin 1944 on retrouve dans les dossiers des Archives Départementales de Lot et Garonne cités au titre de membres résistants :
Eugène BALSAN, Antoine ROUX, Gabriel DOSTES, Raymond FROSSARD, Georges GAENTZLER, René BISSIÈRES, Camille GAYRAL, BESSE, André GAYRAL, Charles LAJUNIES, Emile ROUTABOUL, Jean SERCAN, Albert REYSSAC, Eugène VATÉ.
En liaison avec Saint Pierre, on trouve cités PONSOLLES (instituteur) pour Saint Caprais de Lherm, DINEY (instituteur) pour La Sauvetat de Savères et PARAT ( greffier) pour Puymirol.
Après la tragédie du 7 juin 1944, les combats du 13 juin 1944 et la libération d’AGEN, un groupe se reconstitue et part, fin août 1944, pour le Gers rejoindre d’autres compagnons du CORPS FRANC POMMIÈS où sera reconstitué une brigade, pour poursuivre la lutte.
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Afin de conserver toute sa rigueur au travail de mémoire entrepris, seuls les noms de personnes cités dans les dossiers consultés aux ARCHIVES auront été retenus dans notre présentation.
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8 - Le Lieutenant Alfred STREIFF alias "Fred"
Groupe Scolaire Alfred STREIFF
MORHANGE (Moselle)
Lucien SAJUS , Bruno SIVILOTTO, Jean Pierre BURGER, Robert VENTURELLI
Résistants de sa compagnie à AGEN, toujours avec lui à la brigade « Alsace – Lorraine », lui rendent hommage sur son lit de mort.
9 - Récit de Jean Pierre BURGER, résistant au sein de la Compagnie d'Alfred STREIFF
POUR APPORTER MA ( petite ) PIERRE A L’ÉDIFICE DU «COLLECTIF DES ORPHELINS DE SAINT PIERRE DE CLAIRAC » JE FAIS, CI-APRÈS, TOUTEFOIS AVEC UNE MEMOIRE PLUS VIEILLE DE 63 ANS, LE RECIT DE MON ENGAGEMENT DANS LA RESISTANCE A AGEN ET DE MON VÉCU DU DRAME DU CHATEAU de LA CLOTTE LE 7 JUIN 1944 :
-Le 5 Juin 1944, à la tombée de la nuit, mon ami FRED STREIFF, également mon chef au CORPS FRANC POMMIES, entre, très agité, par la fenêtre de ma chambre, 17 cours Victor Hugo à AGEN.
Il me trouve alité par une angine phlegmoneuse (?) avec près de 40° de température et m'informe de la réception du message annonçant le débarquement américain pour le 6 juin !
-Il organise pour le lendemain, au château de La Clotte, une réunion d’un premier groupe de la compagnie. Constatant mon état il m’interdit formellement de m'y rendre.
Il enverra le lendemain un véhicule pour enlever l'armement camouflé au sous-sol (11 mitraillettes STEN, chacune démontée dans un petit sac de jute, 3 revolvers anglais à barillet et une vingtaine de kilos de balles de 9m/m.)
Fred repart aussitôt..., je ne le reverrai que 17 jours après, dans un très triste état…
Le lendemain arrive une Peugeot 402, conduite par son propriétaire que je connais,
ce devait être Paul ESCH.Nous récupérons les armes, entre plancher du rez-de-chaussée et plafond du sous-sol et les munitions sous une couche de béton au sol.
J’informe
Paul ESCH que je serai le lendemain au château.-De fait, ce lendemain, mercredi 7 Juin vers midi, je passe outre aux ordres, informe mes parents, fourre la 11ème STEN, que je m’étais « affectée », dans une musette kaki, emprunte le vélo de mon amie et prends la route, dans une forme plutôt « vacillante », pour un parcours que je connaissais parfaitement.
- Bien après BON ENCONTRE, je vois arriver vers moi un homme en pantalon de travail, poussant un vélo, une roue à plat, qui me demande, je m’en souviens comme si c’était hier :
- « tu vas où mon gars ... »
- « ………… »
- « ne va pas trop loin, ça canarde là haut »
- « où ça ? »
- « certainement au château de La Clotte, ça doit, barder… »
Ne sachant que faire, je continue néanmoins quelques centaines de mètres mais , aussitôt arrivé près du petit bois , au lieu-dit
« Bourisse », je décide de faire demi-tour.Avisant un petit cours d’eau tout proche, je balance, avec un immense regret, la musette avec MA mitraillette, à l’endroit qui me parait le plus profond du ruisseau.
-Revenu à AGEN je me rends chez Agnès SCHURCH, espérant trouver des nouvelles de Fred - Elle ne sait rien et me propose de me cacher dans une petite villa, inoccupée, qu’elle possède sur le Coteau d’Agen .
Après 2 ou 3 jours sans sortir, je reprends contact avec André SUBRA (et RIGOUSTE ?) et nous entreprenons les tractations pour la libération de FRED, que j’ignorai aux mains de la Gestapo.
Le 23 août, AGEN libérée et Fred remis, nous rejoignons en car, réquisitionné, notre CORPS FRANC POMMIÈS à GIMONT (Gers) en compagnie de MAUREL, SAJUS, SIVILOTTO, VENTURELLI, JAEGER, COUTURIER, TAVANO, BOUCHER, DUJARDIN, LEVY -
En août, avant notre départ, me rendant « en pèlerinage » à La Clotte, j’essaie de retrouver Ma STEN, bien sûr, sans résultat...
J'ai par la suite, eu très longtemps du mal à évacuer ma frustration de n’avoir pu être, dès le 6 Juin, avec mes camarades.
Aujourd'hui, l'âge de la raison adulte, dominant, je réalise que la chance m'a souri car, présent à La Clotte je serais resté, avec certitude, aux côtés d’André MAZEAU comme chargeur, lui et moi étant parmi, les présents du moment, les seuls à connaître parfaitement le maniement d’un fusil-mitrailleur (pas la simple « mitraillette »). Ceci, suite à notre présence jusqu'au 11 novembre 1942, dans l'armée d'Armistice - de notoriété la « pépinière » des futurs maquisards -, où fut dispensé une sévère instruction.
Mais cette CHANCE m'a permis de participer, jusqu'à la fin et jusqu'en Allemagne, à la défaite de l’ennemi, ce à quoi je m’étais engagé dès 1942.
Une grande tristesse toutefois, la perte de mon Ami Fred STREIFF, mort pour la France en sautant sur une mine au MONT SAINT ODILE (Bas-Rhin) le 13 décembre 1944, à peine revenu dans nos provinces d'ALSACE-LORRAINE.
Jean-pierre BURGER
Je tiens ici, à remercier Monsieur Raymond DARQUIÉ de CASTELCULIER (47) qui m'aura permis de retrouver Monsieur Jean Pierre BURGER, avec qui j'ai pu échanger de multiples et précieuses informations, documents et photos -M.S-.
11 - Récit de André FOUGEROUSSE, présenté dans la publication 2007 de FOULIGNY (57)
André FOUGEROUSSE né à Fouligny le 20 février 1922, seul résistant retrouvé - toujours en vie - sur les huit résistants présents à La Clotte lors de l'attaque par les S.S le 7 juin 1944 vers midi.
Extrait de la brochure "UN VILLAGE PENDANT LA GUERRE" - FOULIGNY DE 1939 à 1945 - de Christiane PAYOT:
Je tiens ici, à remercier Monsieur André FOUGEROUSSE de m'avoir mis, en cette année 2007, en relation avec Madame Christiane PAYOT. Elle est la veuve de Jean PAYOT réfugié à Pont du Casse avec ses parents cités ci-dessus. C'est à elle que nous devons ces nouveaux et précieux documents qu'elle nous a permis de présenter. - M.S -
Le "Collectif des Orphelins de Saint Pierre de Clairac", tient à remercier tous ceux et celles qui auront apporté leur concours à son travail de mémoire, étendu à une ébauche de travail d'histoire, présenté sur ce site.
Et, comme l'écrivait Jacques BRISSAUD dans la genèse de "CRIMES DE GUERRE EN AGENAIS"
- que ce ne soit que l'avant-coureur d'un récit plus complet -
demain par des historiens.
10 - Diaporama hymne à la paix: Visionner
TOUTE INFORMATION NOUVELLE et vérifiable SUR LE 7 juin 1944 sera la bienvenue
A DISPOSITION DE TOUTES PERSONNES POUR TOUTE PRÉCISION souhaitée