Pascal Blaise.1

Le talent de Pascal, nourri de son expérience de géomètre et de juriste, a été de voir se dessiner la possibilité d'une mathématique du hasard, proprement unoxymore à son époque, et d'avoir approché ainsi la question des décisions équitables et justes, fondamentalement d'ordre juridique. Mis au courant de ces travaux au cours d'un voyage à Paris en 1655, Christian Huygens rédige alors le premier traité sur le calcul des chances, le De ratiociniis in ludo aleae (« Sur le calcul dans les jeux de hasard », 1657), ou des probabilités, dans lequel il introduit explicitement la notion d'« espérance », plus précisément de « valeur de l'espérance » d'une situation d'incertitude.

Ce travail mathématique sera utilisé à des fins théologiques, dans ce qu'on appelle le « pari de Pascal », évoqué dans Les Pensées. Celui-ci suggère l'avantage de la croyance en Dieu et de la pratique des vertus. Cet argument repose sur une utilisation de son calcul du problème des partis permettant d'évaluer le poids probable (son « espérance » dira Huygens) d'une situation incertaine et ainsi de prendre une décision « rationnelle ». On ne peut dire avec certitude si Pascal a choisi cette approche pour susciter habilement l'intérêt de nobles sceptiques en religion, mais rompus aux jeux de hasard, ou comme fondement effectif d'une théorie des comportements.

Après l’expérience mystique de 1654, Pascal abandonne presque complètement tout travail de mathématique. Il envisage un temps de publier un Promotus Apolloniis Gallus sur le mode

de ce qu'avait réalisé François Viète, mais le manuscrit s'en est égaré.

Pascal Blaise

Ses derniers travaux scientifiques concernent les cycloïdes. Cependant, en 1658, il offre anonymement un prix pour la résolution de la quadrature du cercle et la rectification de la cycloïde et autres problèmes liés.

Des solutions sont proposées par Wallis, Huygens, Wren et d’autres ; Pascal, sous le pseudonyme de Dettonville, publie alors très vite sa propre solution Histoire de la roulette (en français et en latin) avec une Suite de l’histoire de la roulette à la fin de l’année. En 1659, sous le même pseudonyme, il envoie à Huygens une Lettre sur la dimension des lignes courbes.


Philosophie des mathématiques

Axiomatique


La contribution majeure de Pascal à la philosophie des mathématiques est De l’Esprit géométrique, écrit originellement comme une préface d’un manuel Éléments de géométrie pour les célèbres petites-écoles de Port-Royal, à la demande d’Arnauld.

Ce travail n’a été publié qu’un siècle après sa mort. Pascal y examine les possibilités de découvrir la vérité, argumentant que l’idéal pour une semblable méthode serait de se fonder sur les propositions dont la vérité est déjà établie.

Toutefois, il affirmait que c’était impossible parce que pour établir ces vérités, il faudrait s’appuyer sur d’autres vérités et que les principes premiers ne pourraient être atteints.

De ce point de vue, Pascal affirmait que la procédure utilisée en géométrie était aussi parfaite que possible, avec certains principes énoncés mais non démontrés et les autres propositions étant développées à partir d’eux. Néanmoins, il n’existait pas de possibilité de savoir si ces principes étaient vrais.

Dans De l’Esprit géométrique et de l’Art de persuader, Pascal étudie plus encore la méthode axiomatique en géométrie, particulièrement la question de savoir comment le peuple peut être convaincu par les axiomes sur lesquels les conclusions sont fondées ensuite. Pascal est d’accord avec Montaigne qu’obtenir la certitude à propos de ces axiomes et des conclusions grâce aux méthodes humaines était impossible. Il assurait que ces principes ne pouvaient être saisis que par l’intuition et que ce fait soulignait la nécessité de la soumission à Dieu dans la recherche de la vérité.

Dans De l’Esprit géométrique et de l’Art de persuader, Pascal fait l’épistémologie des mathématiques. Les mathématiques reposent d’abord sur des principes évidents connus par intuition

(malheureusement, Pascal comme Descartes ignore ce mot et le remplace par : cœur, sentiment ou instinct).


Il serait vain de vouloir démontrer ces principes évidents en utilisant des affirmations moins évidentes. Mais les mathématiques reposent aussi sur des principes conventionnels, non évidents, non démontrés, et qui une fois admis, ont autant de force que les précédents (ce qui ouvrait la porte aux géométries non-euclidiennes).

Pascal développe aussi dans De l’Esprit géométrique… une théorie de la définition.