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La truite aux lèvres molles
 
L'endroit où elle a été capturée
(détail)

L'endroit où elle a été capturée
La truite aux lèvres molles capturée dans la Neretva, en Bosnie et Herzégovine,
The soft mouth trout "Salmothymus obtusirostris" captured in Neretva

Ce qui est intéressant en lisant les livres et les articles en France (il me semble que c’est pareil dans les autres pays d’Europe d’après les textes traduits de l’anglais) sur la truite c’est pratiquement l’ignorance de l’existence de la truite aux lèvres molles dans les pays de l’ex-Yougoslavie. Je dois avouer que mes lectures sont limitées à celles sur la pêche à la mouche dont je suis grand amateur.

Ainsi dans le Hors série Plaisir de la pêche du journal Pêche à la mouche - la Truite, on lit : « Si l’on excepte la truite aux lèvres molles qui est surtout une espèce asiatique assez peu répandue, qu’on rencontre, paraît-il, dans certaines rivières albanaises et la truite marmorata qui atteint des tailles considérables dans quelques rivières slovènes et italiennes, toutes les truites d’origine européennes sont des farios… » !?

Mais, c’est très superflu ! On rencontre la truite aux lèvres molles ainsi que la marmorata en Bosnie, Croatie, Monténégro...

Tout cela m’a incité cet été à acheter un appareil photo numérique avec, à vrai dire, un faible espoir d’attraper un exemplaire de truite aux lèvres molles dans la rivière de mes rêves - la Neretva, en Bosnie-Herzégovine. Durant ma carrière, assez modeste, de pêcheur à la mouche, cela m’est arrivé, il y a une dizaine d’années. D’autre part, les photos de ce poisson rare, que je n’ai pas réussi à trouver sur internet, pourraient argumenter la lutte contre la grande menace qui pèse sur cette rivière : la construction des barrages.

En bref, j’ai eu de la chance, car, un beau soir, j’ai attrapé une truite aux lèvres molles avec la technique locale de la pêche à la mouche, dite « à la boule ». Et ce qui est important surtout, j’ai réussi à la photographier le 22 juillet cet été, vers 20h 20, après le combat acharné de quelques minutes qu’elle a livré. Elle s’était trompée sur une oreille de lièvre 16 que j’avais mis dans mes bagages de pêcheur par pure curiosité – tant pis pour les mouches locales. Il faut dire que les pêcheurs du coin sont habitués à les attraper de temps en temps – pour eux ce n’est pas un événement exceptionnel. Également, avec tout le respect qu’ils ressentent envers la rareté de l’espèce, le poisson est régulièrement condamné à l’assiette.

*

Vous ne me croirez pas, mais, une semaine plutôt, j’avais attrapé au cœur du canyon de la Neretva l’autre truite très rare, la marmorata, qui vit, elle aussi, dans la Neretva. Cependant, oh quelle tragédie ! - pendant le transfert des fichiers de l’appareil numérique sur le portable, tous les fichiers avec la marmorata et son retour à l’eau se sont effacés avec ce message que je n’oublierai jamais : « error reading data… ». J’ai failli en avoir une crise cardiaque.  On dit qu'aujourd’hui un pêcheur sur mille attrape une marmorata. Elle est devenue beaucoup plus rare que la truite aux lèvres molles à cause de la pêche sauvage, à la dynamite...

(24 octobre 2004)          
Petar Magazin