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Le massacre de la famille Henri LEFEBVRE et Bibiane PLACE en Argentine

 

Bibiane est la fille de Claude PLACE et Marie Ursule PASQUIER la sœur de :

à Eugène ayant épousé Colette Voisin, les parents de Eugénie Rose (Samoëns), de Séraphie, Marie-Anne, Alphonsine (les 3 parties en Argentine ayant épousé des Favre), de Michel Hilarion, de Jean Joseph etc.

à André ayant épousé Geneviève Cornier, les parents de Polycarpe épouse Françoise Converset  parents de : François, Cyrille, Marie Léonie (époux Eugène Pasquier) etc.

à Marie Clotilde ayant épousé Louis Ferdinand Tornier, les parents de Louise Céline (époux Elie Meynet), de Marie-Anne (époux de Basile Paul Place) etc.

à et autres frères et sœurs

 

La famille Marie Ursule Pasquier et Claude Place sont partis en Argentine en 1859 soit 8 ans avant Séraphie et Marie-Anne (époux Favre Ferdinand et François).

 

Ces familles parties de Bellevaux, se sont établies à San Carlos à coté de la ville de Santa Fe dans la province du même nom.

 

Le récit de ce massacre est rapporté par Célia Favre dans une lettre écrite en février 1950 à Ernest Lefebvre demeurant à Poitiers (79500-F) , époux de Simone Gieger. Célia Favre est une petite-fille de Séraphie Pasquier et Ferdinand Favre cités plus haut.

Simone Gieger est la fille de Mathilde Lefebvre, la fille de Henri et Bibiane Place. Mathilde avait survécu au massacre.

 

source : Cécile Hugon née Félisaz

 

 

            "Je réponds à votre lettre aimable lettre reçue hier et qui nous surprit agréablement car c'est toujours un motif de joie de recevoir des nouvelles de personnes résidant au pays lointain, quoique inconnues jusqu'à aujourd'hui. Peut-être un jour pourrons-nous nous serrer la main pour un salut cordial.

            Effectivement notre cousin Armand Félisaz a écrit à papa (Eugène Favre) sur cette affaire et je crois que mon père lui a répondu. Je ne sais si Armand aura déjà reçu la dite lettre parce que papa l'a envoyée par voie maritime et logiquement elle a mis plus longtemps ; nous n'avons pas encore reçu les photos dont vous parlez. A présent je vais vous donner tous les détails que nous connaissons sur cette affaire.

            De la descendance de Monsieur Joseph Place (de Bellevaux) il reste seulement deux enfants : Helena, célibataire, âgée de 64 ans résidant à San Carlos Norte à 500 m de chez moi et Henri Place habitant à Isla Verde (province de Cordoba) marié à Serafina (Séraphie) Cormes fille de Jean et de Serafina Voisin ; les autres enfants sont décédés : Josefina, Luisa, et José qui est décédé il y a à peine 2 mois ; il était célibataire et âgé de 62 ans. Francisco Place frère de Bibiane Louise Place était établi à Isla Verde et est aussi décédé ; ce monsieur marié à Maria Vuagnoux, était l'oncle de votre belle-mère (Mathilde Lefebvre), et donc frère de la maman Bibiane tuée par les Indiens.

            La famille Lefebvre habitait à 200 mètres de chez mon grand-père maternel Javier (Xavier) Rey.

            Quand survint la tragédie mon grand-père était encore célibataire. Ce fût dans la nuit du 15 octobre après dîner ; un oncle de ma mère, Vincent Rey, vivait avec mon grand-père ; il entendit des bruits étranges qui parvenaient de chez Lefebvre. Tout d'abord  il ne prêta pas attention ; mais comme les bruits se succédaient, il résolut d'aller voir ce qui se passait. Pendant le trajet il rencontra Henri Lefebvre tombé sur le chemin qui se dirigeait chez mon grand-père pour demander de l'aide. Il prononça seulement deux mots : Bon Dieu, il les répéta souvent mais mon oncle et mon grand-père n'y prêtèrent pas attention, le croyant abruti par l'ivresse puisqu'il était tombé.

            L'oncle de ma mère, Vincent Rey, continua son chemin jusqu'à la maison. Là l'aîné des enfants qui avait quatre ans lui ouvrit la porte et lui raconta que les Indiens étaient venus demander à boire et à manger et que sa maman et la bonne étaient endormies ; mon oncle devant ce massacre fut tellement impressionné qu'il partit à la recherche de mon grand-père pour les secourir mais tous étaient morts à coups de poignard. Henri reçut le premier coup dans le dos pendant qu'il suspendait une lampe pour faire de la lumière. en se traînant il réussit à sortir pour demander des secours.

            Les murs étaient couverts de sang. La maman avait dans ses bras une petite fille de sept mois (Mathilde votre belle-mère). L'aîné des enfants se cacha sous le comptoir pour ne pas être tué ; il était tout ébahi.

            En même temps que mon grand-père arriva à la maison Lefebvre, un ouvrier de la famille Place retourna prévenir ses patrons. Mon grand-père emmena la toute petite (Mathilde votre belle-mère) chez lui où on la soigna quelques jours jusqu'à ce qu'on l'emmena en France. La famille Place indignée, communiqua ce cruel assassinat au consul français qui vint sur place et s'occupa des enfants qui furent embarqués avec ceux de Marguerite. Les Français de cette colonie, furieux, voulurent se venger de cette horrible tuerie. Ils se dirigèrent, armés jusqu'aux dents, aux baraquements indiens. Mais ceux-ci étaient à la chasse, sans cela ils les auraient tous tués. Ils rencontrèrent seulement le chef de la tribu qui se réfugia dans l'église (qui existe telle que la construisirent les Indiens pacifiés et un prêtre franciscain).

            Le prêtre ne voulait pas permettre l'entrée aux colons français, mais ceux-ci le firent quand même. Ils prirent le chef de la tribu par les cheveux et le traînèrent par terre et le tuèrent avec une "winchester", arme que mon oncle Vincent Rey frère du grand-père, conserva et qu'il a donné au collège Salésien de Cordoba pour son musée.

            Le village où se trouvait la tribu indienne se trouve à deux ou trois lieues d'ici , mais maintenant tous sont pacifiés. Ce sont des descendants qui conservent seulement la couleur noire.

            Le petit-fils du chef vit encore (1950) ; il est aveugle et a plus de 90 ans. Il y a beaucoup d'Allemands dans ce village qui s'appelle San Jeromino del Sauce.

            Dans la maison où habitait la famille Lefebvre, habite une nièce de mon père. Cette maison a été presque toute démolie et une autre été construite à coté.

            José Place marié à Marie Sarayoud (celle-ci est restée vingt ans démente), avait établi un commerce d'épicerie. La maison qui existe encore est habitée partiellement par Elena Place ; elle loue le reste, occupé actuellement par un commerce toutes branches générales et approvisionnement de céréales. J'y travaille une demi-journée à la comptabilité et l'autre demi-journée à la comptabilité des propriétaires laitiers.

            Pour tous renseignements dont vous auriez besoin écrivez-moi sans crainte ; nous sommes à vos ordres. Vous pouvez écrire en français, papa le lit et l'écrit plus ou moins correctement car il a été en France. Maman le lit mais ne l'écrit pas et je vais bientôt l'étudier. Il se peut qu'un jour je visite la France ainsi que tous les parents et amis. Mon grand-père (maternel) était français : Xavier Rey de Savoie (ainsi que son grand-père paternel Ferdinand Favre le mari de Séraphie Pasquier cités plus haut).

            Je vous envoie les adresse d'Elena Place et de Henri Place.

            Vous ne nous devez aucun remerciement et je vous répète que nous essaierons de vous être agréable pour tout de dont vous aurez besoin et cela pour toujours et … pardonnez-moi vous et le traducteur car c'est un peu long n'est-ce pas ?

            Amitiés de ma famille et cordialement à vous

 

            Célia Favre-Rey

 

Célia est décédée en 1998. Depuis 1950, date de cette lettre, elle a appris le français et nous pouvons constater à la lecture de ses nombreuses lettres aux cousins de Bellevaux et à l'abbé René Pasquier qu'elle maîtrisait parfaitement cette langue. La dernière fois qu'elle est revenue en France, à Bellevaux surtout, c'était en 1994 avec sa filleule et nièce Beatriz (Béatrice) Favre.

 

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