Cours 5.2
enseignant Marcin Sobieszczanski
2008/2009
Cybernétique (d’après l’article de Wikipédia, l'encyclopédie libre)
La cybernétique est une modélisation de l'échange, par l'étude de l'information et des principes d'interaction. Elle peut ainsi être définie comme la science des systèmes autorégulés, qui ne s'intéresse pas aux composantes, mais à leurs interactions, où seul est pris en compte leur comportement global.
Le terme cybernétique fut formalisé en 1947 par le mathématicien Norbert Wiener et sera plus tard désigné comme « la science des analogies maîtrisées entre organismes et machines »1.
Le mouvement dont il est issu fut dès son origine largement interdisciplinaire et eut une influence considérable sur des domaines aussi variés que les sciences cognitives, l'intelligence artificielle, la modélisation économique, le constructivisme radical ou encore certains domaines de la psychologie au travers d'un autre mouvement proche, celui de l'École de Palo-Alto.
Aujourd'hui, on définit la cybernétique comme « la science constituée par l'ensemble des théories sur les processus de commande et de communication et leur régulation chez l'être vivant, dans les machines et dans les systèmes sociologiques et économiques ». Elle a pour objet principal l'étude des interactions entre « systèmes gouvernants » (ou systèmes de contrôle) et « systèmes gouvernés » (ou systèmes opérationnels), régis par des processus de rétroaction ou feed-back. D'où le terme « cybernétique » qui provient du mot grec « kubernesis », et qui signifie au sens figuré l'action de diriger, de gouverner.
Histoire du mouvement cybernétique
Représentation du gouvernail sur un bateau romain datant du premier siècle
Platon utilisait kubernêtikê (grec, Κυβερνητική) pour désigner le pilotage d’un navire. Les mots gouverne, gouvernail et gouvernement ou gouverneur partagent cette racine avec le mot cybernétique.
Wiener déclare avoir fait dériver le mot cybernétique « du mot grec kubernetes, ou pilote, le même mot grec dont nous faisons en fin de compte notre mot gouverneur »4.
L'utilisation des logiques qui seront décrites par la cybernétique ne peut être datée puisque l'on peut déjà la voir dans des mécanismes antiques.
Des précurseurs emblématiques de celle-ci sont le régulateur à boules de James Watt 1788, qui a été l'un des premiers mécanismes de rétroaction utilisé dans le domaine industriel, et le servomoteur pour les machines à vapeur crée par de Joseph Farcot en 1859 (appliqué au mécanisme de gouvernail des navires).
Représentation de la thermorégulation chez les mammifères
Les travaux sur la Machine de Turing d'Alan Turing (1936).
La physiologie lui a également apporté de nombreux éléments, notamment le principe d'homéostasie mis en place par Walter Cannon en 1932, et qui est une base directe des réflexions préliminaire à la cybernétique.
L'homéostasie est la capacité que peut avoir un système quelconque à conserver son équilibre de fonctionnement en dépit des contraintes qui lui sont extérieures. Selon Claude Bernard, « l’homéostasie est l’équilibre dynamique qui nous maintient en vie. »
Le premier mouvement cybernétique
Norbert Wiener
La première cybernétique s'établit dans le cadre des conférences Macy qui réunissent entre 1942 et 1953 un groupe interdisciplinaire de mathématiciens, logiciens, anthropologues, psychologues et économistes qui s'étaient donné pour objectif d'édifier une science générale du fonctionnement de l'esprit. Parmi les participants les plus illustres, on trouve le neurophysiologiste Arturo Rosenblueth, les mathématiciens John von Neumann et Norbert Wiener, l'ingénieur Julian Bigelow le neurophysiologiste Warren McCulloch, le logicien Walter Pitts, le psychanalyste Lawrence Kubie et les anthropologues Gregory Bateson et Margaret Mead. Ce qui rapproche les différents participants est leur intérêt commun pour les mécanismes de causalité circulaire (notamment le concept de feedback) qu'ils étudient dans leurs disciplines respectives.
Suite à la première conférence de 1942, sont publiés en 1943 les deux articles fondateurs de la cybernétique: « Behavior, Purpose and Teleology » dans lequel Arturo Rosenblueth, Norbert Wiener et Julian Bigelow étudient les modèles d'organisation sous-jacents aux comportements finalisés et « A Logical Calculus of Ideas Immanent in Nervous Activity » dans lequel Warren McCulloch et Walter Pitts étudient les modèles d'organisation sous-jacents à la perception.
aussi appelé « processus de Wiener »).
En 1948, Wiener décide d'introduire le néologisme Cybernétique dans sa théorisation scientifique. Il définit la cybernétique comme une science qui étudie exclusivement les communications et leurs régulations dans les systèmes naturels et artificiels5.
À partir de 1949, un autre groupe interdisciplinaire, le Ratio Club (le terme ratio fut suggéré par Albert Uttley, étant la racine latine de la « faculté de l'esprit de calculer, planifier et raisonner »), commence une série de rencontres informelles pour discuter de sujets ayant trait à la cybernétique. On compte parmi eux William Ross Ashby, William Grey Walter et Alan Turing.
À partir de 1950, le mot cybernétique est inclus dans le titre des conférences Macy. La même année, Wiener popularise les implications sociales de la cybernétique, en figurant l'analogie entre les systèmes automatiques et les institutions humaines dans son best-seller Cybernétique et société sous-titré De l'usage humain des êtres humains.
La cybernétique désigne d'abord un moyen de connaissance, qui étudie l'information au sens de la physique, dans la définition qu'en donne Norbert Wiener: « De même que l'entropie est une mesure de désorganisation, l'information fournie par une série de messages est une mesure d'organisation »6. Dans cette acception première, la cybernétique est une approche phénoménologique qui étudie l'information, sa structure et sa fonction dans les interactions systémiques. Ce qui peut être traduit par la science générale de la régulation et des communications dans les systèmes naturels et artificiels.
exemple de représentation du feed-back (ou rétroaction)
La cybernétique décrite par Norbert Wiener est un moyen d'expliquer et de comprendre tous les mécanismes rencontrés avec quelques briques logiques simples :
- La boîte noire : un élément relié à d'autres, dont on ne soucie pas de savoir ce qu'il contient (ou son fonctionnement d'après sa structure interne, inaccessible de façon momentanée ou définitive), mais dont on déduit la fonction apparente à partir de ce qu'il envoie ou reçoit.
- L'émetteur, qui agit sur l'environnement, donc envoie de l'information, sorte de porte de sortie.
- Le récepteur, qui en intègre depuis l'environnement, donc capte les informations, comme une porte d'entrée de la boîte noire.
- Le flux d'information : ce qui est transmis, donc envoyé et effectivement reçu, autrement dit l'information efficace.
- La rétroaction (feedback) : C'est l'information en retour de l'état.
Ce feedback est mis en évidence par cette approche car il est indispensable pour concevoir une logique fonctionnelle. On voit donc apparaître des boucles de rétroaction ou mécanismes circulaires ou plus simplement des systèmes. Si ces systèmes sont mis en évidence par cette cybernétique (parfois dite du premier ordre), il ne le sont que par voie de conséquence d'une étude strictement limitée aux échanges d'information et à l'évolution de ces échanges dans le temps.
Portés par les participants du mouvement cybernétique, pour la plupart des auteurs majeurs dans leur discipline, les concepts de la cybernétique se diffusent rapidement. La cybernétique marque le moment d'une rupture épistémologique majeure qui a profondément influencé tous les domaines de la science et ses retombées sont innombrables.
William Ross Ashby
Marvin Minsky présente la première cybernétique comme un tronc commun qui se serait divisé en trois branches: la « simulation cognitive » à la Allen Newell et Herbert Simon, l'« intelligence artificielle » et la « seconde cybernétique » ou théorie des systèmes auto-organisateurs7.
Alors que la première cybernétique étudie comment les systèmes maintiennent l’homéostasie (morphostase) par des mécanismes d'auto-régulation, la « deuxième cybernétique » du psychiatre William Ross Ashby et des biologistes Humberto Maturana et Francisco Varela étudie comment les systèmes évoluent et créent des nouvelles structures (morphogenèse). Ashby parle d'auto-organisation, Varela d'autopoïèse. Cette étude des systèmes éloignés de leur point d’équilibre se rapproche des travaux sur les structures dissipatives du prix nobel de chimie Ilya Prigogine. Au lieu de se demander comment se maintient un certain équillibre, on observe comment un nouvel équillibre peut émerger d'une situation de déséquillibre. Prigogine a montré que contrairement à ce que l’on croyait, dans certaines conditions, en s’éloignant de son point d’équilibre, le système ne va pas vers sa mort ou son éclatement mais vers la création d’un nouvel ordre, d’un nouvel état d’équilibre. Les situations extrêmes recèlent la possibilité de créer une nouvelle structure. On voit ici la possibilité de recréer du vivant, de l’organiser là où il n’y avait plus que du chaos.
Dans la cybernétique de deuxième ordre, qui prend forme avec Heinz von Foerster à partir de 1950-1953 avec les dernières conférences Macy, l’observateur s’inclut lui-même dans le système observé. Comme le rappelle von Foerster, « pour écrire une théorie du cerveau, il faut un cerveau ». En ce sens, cette conception de la cybernétique est une composante importante du constructivisme radical. Cette cybernétique de deuxième ordre vise à l'élaboration d'une méthode de description « universelle » commune aux différents champs de la science. Foerster précise que « L'effort d’unification entrepris par les cybernéticiens ne se situe pas au niveau des solutions, mais à celui des problèmes. Certaines classes de problèmes, définies par une même structure logique, traversent les disciplines les plus variées. La cybernétique s’est édifiée autour de deux de ces classes : les problèmes de communication, et les problèmes posés par l’étude des mécanismes qui produisent eux-mêmes leur unité (self-integrating mechanisms) ». Pour William Ross Ashby, « la cybernétique se situe comme une approche indépendante de la nature des éléments qu'elle étudie ».