AUX BARDES DE LA FRONTIÈRE

 

... Comme si le même désir de côtoyer l’origine empêchait, dans l’un et l’autre cas, entre métamorphose et métaphore. Au point de permettre à Rajak Ohanian, la violence photographique aidant, de saisir l’instant du passage entre ce qui est et ce qui n’est pas, pour nous montrer, en suspend au-dessus du temps, des ravines de lumière plus sculptées à même l’eau que les chemin de la mer s’incrustant dans le sable, un déferlement d’œufs de pierre sur lesquels il ne saurait être question de marcher mais bien de courir, des guerriers-citadelles surgissant pour faire barrage au jour…
Jusqu’à ces rochers — barques des morts ou gisants — pris dans une infinie dérive minérale, semblable à celle dans laquelle le barde Taliesin se laisse emporter vers la splendeur aventureuse du mythe où le temps sombre définitivement....


Annie Le Brun
(février 1994)

Rajak OHANIAN

" Métamorphoses I "

1991 - 1993

Extrait du texte d'Annie Le Brun