D epuis que l’homme dort, sous le regard des étoiles, il rêve. Et il n’a eu de cesse, par l’intermédiaire d’un chaman, d’une sibylle, d’un prêtre ou de lui-même, d’interpréter ses visions nocturnes, ses rêves comme ses cauchemars, ses fantaisies comme ses hallucinations.

 

Le songe est l’une des archaïques méthodes de divination, qui continue à faire….rêver. Les anciens étaient persuadés que pendant la somnolence, les dieux, les fantômes et les esprits profitaient de la léthargie des dormeurs pour les visiter et leur transmettre des messages.

 

Les Grecs malades allaient dormir dans les temples d’Asclépios (dieu de la médecine) et le matin, ils confiaient leurs visions aux prêtres - médecins attachés au temple. Ils plaçaient aussi une branche de laurier près de leur tête avant de s’endormir afin d’éviter les rêves fâcheux.

 

Selon Homère et Virgile , les rêves ne pouvaient sortir que par deux portes : la porte d’ivoire qui ne laissait passer que des rêves sans valeur et la porte de corne qui au contraire s’ouvrait sur des visions prémonitoires.

 

Pour Aristote , les rêves n’étaient pas des communications divines en langage symbolique mais des impressions du dormeur grossies dans l’état de veille par son imagination.

 

Saint Thomas d’Aquin en a fait une synthèse : il existe des « rêves naturels » et des « rêves inspirés par Dieu ». Homme d’église, il suggéra une troisième voie celle suscitée par le Diable. Car la religion chrétienne qui pourtant se défia des superstitions, fit la part belle au rêve, au point d’imposer le silence aux scolastiques qui prétendirent, en citant Aristote, que les rêves étaient des chimères.

 

La Bible ne manque pas de patriarches (Joseph, fils de Jacob, et le Pharaon) ou de prophètes (Jacob et son échelle, Moïse…) dévoilant l’avenir en interprétant des songes. Joseph, époux de Marie, est averti de sa paternité et est invité à fuir en Égypte par des songes. L’épouse de Pilate intervient en faveur de Jésus à la suite d’un cauchemar. Deux rêves du pharaon sont célèbres : dans le premier, le pharaon se trouvait sur les rives du Nil d’où surgirent 7 vaches maigres qui dévorèrent 7 grasses en train de brouter l’herbe, sur les rives du fleuve. Dans le second il vit 7 beaux épis qui avaient poussé à partir d’une seule tige : puis 7 autres épis brûlés par le soleil germaient difficilement et dévoraient les épis murs, Joseph interpréta ces rêves au pharaon : les 7 vaches grasses et les 7 épis mûrs représentaient 7 années d’abondance, tandis que les 7 vaches maigres et 7 épis vides annonçaient 7 années de famine. Le pharaon ordonna que l’on fit des réserves en blé en prévision de la famine qui survint, sauvant ainsi son peuple de la famine.

 

 

L’interprétation moderne des rêves a ses racines dans la classification arabe. Les Arabes divisèrent les rêves en deux classes : les « rêves mentaux » qui avaient un contenu prophétique et les « rêves de milieu » qui étaient dus à des stimuli externes ou à des malaises internes. Pour les Arabes, la science des rêves a donc une valeur d’ordre psychanalytique. Avec eux commencent les premières classifications basées sur l’expérience millénaire et sur l’intuition. Cependant l’interprétation des Arabes est encore strictement liée au mystère divin, puisque Allah et ses anges agissent directement en donnant de bons rêves aux prophètes et aux hommes droits, et des rêves confus aux infidèles.

 

Il se trouva toutefois des théologiens pour avertir les bons chrétiens que bien des songes pouvaient venir du démon, surtout quand il s'agissait de phantasmes nocturnes d’où la chair n’était pas absente…

 

Les rêves « historiques  », ceux de Marie de Médicis qui la veille de l’événement vit son mari Henri IV assassiné, celui d’Henri III qui trois jours avant d’être poignardé par le moine Clément entrevit tous les ornements royaux, comme camisoles, sandales, tuniques, dalmatiques, manteau de satin azuré, le sceptre et la main de justice, tout ensanglanté et foulé aux pieds par des moines.

 

En 1530 l’astrologue Lyonnais Jean Thibault, s’inspirant peut être de l’ouvrage Grec du 1 er siècle Artémidore, première méthode d’interprétation écrite, édita « la physionomie des songes et visions fantastiques des personnes » qui devint la bible des oniromanciens. Nombre de ses sentences, inspirées par la vie rurale, sont devenues dictons, et ont servi de références à ceux qui cherchaient à interpréter des rêves trop sulfureux pour être confiés à des devins, ou curés bien – pensants. Artémidore, étudia les rêves durant toute sa vie et les divisa en cinq catégories :

 

  • Les rêves symboliques  : du genre des 7 vaches maigres et des 7 épis du pharaon.

 

  • Les rêves oracles  : dus à des révélations divines et que nous appelons aujourd’hui « paranormaux »

 

  • Les rêves dus à l’imagination  : ils émanent de désirs non réalisés ou irréalisables (théorie principale de Freud).

 

 

 

C’est la première interprétation qui se réfère aux rêves d’imagination ; il s’agit donc de la première approche psychanalytique.

 

Le monde des rêves était et est encore, pour l’homme un monde parallèle, fait de choses belles et laides, de bonheur et d’horreur, de paix et d’angoisse. Une chose est certaine, tout ce qui est présent dans la création a son utilité. C’est pourquoi, chacun de nous doit découvrir l’utilité de ses rêves.