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Éléments
sur les discours des médias Crise humanitaire/discours médiatique. Le réel existe mais il n'est pas connaissable. Nous ne faisons que tenir des propos sûrs. La crise n'existe pas par elle-même. Elle n'existe que par les yeux de quelqu'un capable d'en témoigner à quelqu'un d'autre. Il faut identification et déclaration de la crise. On est dans l'ordre du discours sûr et non pas de la réalité. Le discours médiatique est construit, il ne rapporte pas de faits : c'est un méta-discours. Cette construction est faite à partir de matériaux hétéroclites, de sources diverses. Le journaliste en fait une logique propre, un discours « neuf ». M. Bakhtine : « nous parlons un monde déjà dit ». Nous parlons de notre héritage par rapport à d'autres discours. Un discours unique dépend des conditions de production de celui-ci. Moscovici : le discours se forme dans les conversations quotidiennes. Le produit de ses conversations est l'opinion publique. Le discours effectue une transformation pour être lu ou regardé. Ce discours va instituer une forme de réalité. Il transforme le méta-discours en faits auprès de l'opinion publique. C'est un discours indirect avec multiplication des voix qui se font entendre. La crise du Biafra opère un tournant dans les relations entre la presse et l'humanitaire : liberté de la forme d'action et droit d'ingérence. Conséquence : naissance de l’épopée humanitaire. L'action humanitaire bafoue le droit international de l'époque. Ceux qui se déclarent libres dans l'action due à l'urgence sont les « French Doctors » : ils transforment durablement les acteurs humanitaires en héros, et placent la victime en face de vous. Il n'y a pas de héros sans victimes. Travail d'instauration de la victime qui justifie la publicisation pour provoquer la pitié. Il s'agit de provoquer une réaction émotionnelle : il faut sortir du local pour aller vers le général tout en montrant des exemplaires précis des victimes. La victime doit être innocente (qui ne peut pas nuire) et doit désigner un bourreau qui permettra aussi l'émergence du héros : on arrive à une dramatisation (action). Le héros répare les crimes du bourreau. Il doit avoir des moyens d'action différents : le courage de la morale humaniste. Mise en scène de la souffrance pour restaurer le triangle victime/héros/médias pour le meilleur et pour le pire. Instrumentalisation politique et médiatique des victimes. L’innocent devient un enjeu politique, de même pour le héros : échiquiers politiques dont les pions sont les opinions publiques. L’innocent est exhibé pour devenir un motif de pitié et d'indignation pour l'opinion publique. Le journaliste qui doit être objectif manifeste alors ses émotions, se montre lui-même indigné. L'émotion est une maladie de l'âme : elle est un frein à l'action, mais il y a pire que l'émotion, c'est le manque d’émotion. Le journaliste sort de l'objectivité, de la neutralité, pour entrer dans l'implication. La neutralité passe pour de la complicité à l'égard du bourreau. Les médias s'adaptent à la situation : l'humanitaire pour provoquer la mobilisation. L'émotion est le moteur de l'action, mais elle fonctionne dans un régime de fusion : confusion entre moi et la victime. Il y a aussi décontextualisation de l'image humanitaire qui enlève les causes de l'image pour ne laisser place qu'à l'émotion qu'elle suscite. Quand la crise est médiatisée, tout contre-discours devient irrecevable. Réduction de l'humanité de la personne en la voyant comme une victime (et seulement cela). Ce qui se joue c'est le passage de la pitié à la recherche la justice si on prend comme indicateur les tentatives chaotiques des tribunaux pénaux internationaux et de la cour pénale internationale. Mais il faut faire attention à la vision manichéenne que l'on a : les victimes peuvent être bourreau et vice-versa. |
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