FONCTION. 

ACCUEIL REMONTER

 

 

ACCUEIL
REMONTER
CONTACTS
CALENDRIER
LIENS
DOCUMENTS
RECHERCHE
DISCUSSIONS

 

le fonctionnement de l_ONU-JF Muracciole-L_ONU_depuis 1945_ellipses_editions_marketing_SA_1996_p22-28  et 42


du gouvernement de la République populaire de Chine comme « seul repré­sentant légitime de la Chine » (résol. 2758, 26 octobre 1971). De cette déci­sion, il ne faudrait cependant pas conclure que l'ONU considère qu'une nation doit nécessairement être représentée par un unique gouvernement. En 1973, l'ONU a admis en son sein les deux républiques allemandes et, en 1991, les deux républiques coréennes. Il convient toutefois de préciser que, dans ces deux derniers cas, l'admission à l'ONU avait été précédée de la reconnaissance mutuelle par les États concernés, reconnaissance qui n'est toujours pas survenue entre les deux Chine. L'ONU a également admis en son sein la présence, à titre d'observateurs, d'États qui ne sont pas membres officiels de l'Organisation1. Enfin, l'ONU a reconnu le statut d'observateur à certains mouvements de libération nationale - ainsi l'Organisation de Libération de la Palestine (résol. 3237, 22 nov. 1974) - ou à des organisa­tions internationales à vocation économique (CAEM et CEE en 1974) ou politique (Conseil de l'Europe en 1989).

1     A ce jour, outre Taiwan, exclu de fait, seuls six États demeurent volontairement en dehors de l'Organisation : Kiribati, Nauru, la S^se, Tonga, Tuvalu et le Vatican.


L'un des principes fondamentaux de l'ONU est le respect de « l'égalité souveraine » de ses membres (I, 2, § 1 ). La Charte n'impose aux États que de « remplir de bonne foi » les obligations qu'ils ont souscrites en la rati­fiant, de s'engager à régler leurs différends par des moyens pacifiques et de s'abstenir de recourir à la force contre l'intégrité ou l'indépendance d'un autre État. La Charte reconnaît la souveraineté intérieure de chaque État : « Aucune disposition de la présente Charte n'autorise les Nations Unies à intervenir dans les affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un État » (I, 2, §7). Ce respect de la souveraineté intérieure, défini d'ailleurs en des termes très flous, constitue une entrave à l'action internationale, dans la mesure où il permet aux États de dénier à l'ONU le droit d'interférer dans ce qu'ils estiment relever « essentiellement de leur compétence ». Ainsi aujourd'hui, la Russie, imitant l'attitude de la France à l'égard de la question algérienne dans les années 1950, refuse tout débat sur la Tchétchénie. Cette contradiction générique s'aggrave à mesure que l'ONU élargit son domaine d'intervention et aborde les questions politiques comme le respect des droits de l'homme ou administre certains États tombés en déliquescence (chap. IV).


La Charte et la résolution des conflits

L'article premier de la Charte fixe à l'Organisation la mission de « maintenir la paix et la sécurité internationales et à cette fin de prendre des mesures collectives efficaces ». Les deux chapitres les plus importants de la Charte - VI : « Règlement pacifique des conflits » et VII : « Action en cas d'acte d'agression » - organisent les modalités pratiques de cette sécurité collective nouvelle manière.

Le chapitre VI oblige les États membres de l'Organisation à régler leurs différends par la conciliation et l'arbitrage. La conciliation peut se dérouler en dehors des Nations Unies, en particulier dans le cadre de conférences ou d'organisations régionales. Le CS aide les États engagés dans cette voie en leur recommandant des « procédures appropriées » (VI, 36). En cas d'échec de la conciliation, les États ont la possibilité de porter leur différend devant le CS qui constitue ainsi un organe de dernier recours. Si les États concer­nés l'acceptent, le CS peut alors « faire des recommandations en vue d'un règlement pacifique du différend » (VI, 38).

Le chapitre VII expose les moyens par lesquels le CS œuvre pour main­tenir ou rétablir la paix. Après avoir constaté « l'existence d'une menace contre la paix » ou d'un « acte d'agression » (VII, 39), le CS peut décider des mesures n'impliquant pas le recours à la force armée à rencontre de l'État reconnu agresseur : rupture des relations économiques, des communi­cations ou des liens diplomatiques (VII, 41). Si ces mesures sont insuffi­santes ou inadéquates, le CS peut décider d'entreprendre « toute action qu'il juge nécessaire au maintien ou au rétablissement de la paix » (VII, 42). A cette fin, les États membres s'engagent, après la conclusion d'accords spé­ciaux avec l'Organisation, à mettre des forces armées à la disposition du CS (VII, 43). En outre, est institué un comité d'état-major (CEM) composé des chefs d'état-major des membres permanents du CS et chargé de « conseiller et d'assister le CS » en matière militaire. Le CEM est « responsable, sous l'autorité du CS, de la direction stratégique des forces armées mises à la disposition du CS » (VII, 47). L'exécution des décisions prises par le CS est obligatoire pour tous les États membres. Enfin, la Charte admet le « droit naturel de légitime défense », du moins jusqu'à ce que le CS se soit saisi de l'affaire (VII, 51).

Le fonctionnement de l'ONU |


| Le fonctionnement de l'ONU


 


Le mécanisme ainsi conçu par la Charte souffre d'évidentes faiblesses structurelles. En premier lieu, les fondateurs n'ont pas voulu que l'ONU, comme la SON, dispose d'une force armée permanente : si le CS peut enga­ger et diriger des actions militaires, il ne peut le faire qu'au moyen de forces fourmes par des États membres. En second lieu, la guerre froide est venue ruiner la belle ordonnance du chapitre VII : les accords spéciaux visés à l'article 43 n'ont jamais été conclus et le CEM, qui incarnait particulière­ment l'esprit de Yalta, est demeuré une coquille vide, Américains et Sovié­tiques ne pouvant accepter que leurs troupes pussent être placées sous le commandement d'un général « ennemi ». En outre, le maintien de la paix exigeait une définition précise de l'agression. Dans les faits, malgré bien des discussions et le vote, en 1974, d'une définition (au reste passablement floue), le CS a dû improviser et agir au coup par coup. Les qualifications expresses d'agression ont été très rares (moins d'une dizaine depuis 1945) et les interventions militaires décidées par l'ONU (comme dans le cadre de la guerre de Corée, voire de la guerre du Golfe) ont été le résultat de montages juridiques qui s'éloignaient de l'esprit de la Charte. Enfin, l'exercice du droit de veto a souvent empêché le CS de mettre en œuvre ces procédures.

Plus profondément, la Charte, dominée par la conception traditionnelle de la sécurité collective (règlement pacifique des conflits, lutte contre l'agression) s'est révélée mal adaptée aux missions de maintien de la paix qui constituent l'essentiel de l'activité de l'ONU depuis la fin des années 1950. Même si l'expression apparaît plusieurs fois dans la rédaction du chapitre VII, certains ont pu dire qu'entre les chapitres VI (prévention de la guerre) et VII (rétablissement de la paix), manquait un chapitre « VI et demi » spécifiquement consacré au maintien de la paix.

Le maintien de la paix

Tenue éloignée par les deux Grands du conflit Est-Ouest et des négocia­tions sur les armements stratégiques, l'ONU a été amenée à intervenir dans des conflits périphériques où il s'agissait, pour elle, non pas de prévenir la violence (déjà déclenchée), ou d'imposer par la force le rétablissement de la paix (hors de sa portée du fait du veto des grandes puissances), mais d'or­ganiser les modalités du maintien ou du retour vers la paix : interposition, application de cessez-le-feu, respect d'accords de désarmement, organisa-


tion de scrutins démocratiques, enfin, plus récemment, organisation de secours humanitaires aux populations civiles. Pour mettre en œuvre ces missions, non prévues par la Charte, l'ONU a dû improviser et l'affaire égyptienne de 1956 a constitué un précédent considérable. Le 2 novembre 1956, l'AG décrétait un cessez-le-feu rapidement accepté par les parties. Le 4 novembre 1956, elle votait la constitution d'une « force internationale exceptionnelle des Nations Unies aux fins d'assurer et de surveiller la cessa­tion des hostilités ». La FUNU (Force d'Urgence des Nations Unies), déployée dans le Sinaï, devait instaurer une zone tampon entre les belligé­rants et faire respecter le retrait du territoire égyptien des forces israé­liennes, françaises et britanniques, retrait dont l'AG vota le principe le 7 novembre. Ces premiers Casques bleus, placés sous les ordres d'un « com­mandement des Nations Unies » (et non du CEM), n'avaient pas pour mis­sion de lutter contre un agresseur, mais, par leur seule présence, de dissua­der les parties de s'affronter et de faciliter le rétablissement de la paix.

Sur le modèle de cette première intervention, un cadre empirique s'est peu à peu dégagé, même si chaque opération est définie par la ou les résolu­tions qui l'organisent. Une opération de maintien de la paix est mise en œuvre après un vote du CS et avec l'accord des parties liées au conflit. Elle peut déployer, sous le commandement exclusif des Nations Unies, des contingents fournis par des États membres. Ces contingents doivent respec­ter une stricte neutralité ainsi que la souveraineté des États sur les territoires desquels ils sont engagés. Ils n'ont le droit d'employer la force que dans le cadre de la légitime défense et, en conséquence, ils sont faiblement armés. I ,e paradoxe veut que les conditions mêmes des opérations de maintien de la paix (et en particulier la nécessité d'obtenir l'assentiment des parties) réduisent leur efficacité1. De fait, bien avant l'affaire yougoslave, nombre d'opérations de maintien de la paix ont été réduites à l'impuissance (comme l'UNFICYP, créée en 1964, et qui assista passivement au coup de force turc de 19742) ou engagées dans des missions que leurs moyens ne leur permet-

En mai 1967, Nasser exigea et obtint le départ de la FUNU. Le secrétaire général de l'époque, U Thant, fut d'ailleurs sévèrement critiqué pour avoir accédé à la demande égyptienne sans en référer au CS et pour avoir ainsi porté une responsabilité dans le déclenchement de la guerre des Six Jours. United Nations Force in Cyprus, force chargée du maintien de la paix à Chypre.


|24


•ement de l'ONU

'accomplir. Ainsi la FINUL (Force Intérimaire des Nations 'an) devait, aux termes de la résolution 425 de mars 1978, jjaix et la sécurité internationale » dans la région. Incapable ..cter la guerre civile libanaise, ni d'empêcher l'invasion de ce pays par Israël en 1982, la FINUL paya de près de 200 morts le prix d'une mission irréaliste.

3. La « nébuleuse onusienne »

L'ONU se retrouve aujourd'hui au centre d'un impressionnant réseau d'organisations et d'organismes internationaux. La Charte, qui engage l'ONU à résoudre « les problèmes internationaux d'ordre économique, so­cial, intellectuel ou humanitaire » (I, 3), autorise la création d'organes subsi­diaires et la coopération avec les institutions internationales spécialisées.

Les organes subsidiaires sont des organismes internationaux créés par l'ONU et placés sous sa tutelle. Il peut s'agir d'organes aux fonctions très spécialisées (comme l'UNWRA1, chargé d'organiser l'aide aux réfugiés pa­lestiniens après 1949, ou l'Université des Nations Unies, installée à Tokyo) ou beaucoup plus larges, comme le Haut-Commissariat aux Réfugiés (HCR, 1951) ou la Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Dévelop­pement (CNUCED, 1964). Les fonds spéciaux et les programmes d'assis­tance que l'Organisation a développés dans le cadre de l'aide technique -Programmes des Nations Unies pour le Développement (PNUD, 1965) et pour l'Environnement (PNUE, 1972), Fonds des Nations Unies pour l'En­fance (UNICEF, 1946), Programme Alimentaire Mondial (PAM) - peuvent également être rangés dans la catégorie des organes subsidiaires. Théori­quement, ces organes dépendent entièrement de l'ONU. Dans la pratique, certains, comme le HCR ou la CNUCED, ont acquis une grande autonomie et se comportent comme des organisations internationales de fait.

La Charte a imposé à l'ONU de se lier aux organisations internationales spécialisées dans les domaines économique, social, de la santé publique, de

1     Office de Secours et de Travaux des Nations Unies pour les Réfugiés de Palestine dans le Moyen Orient, créé en 1949 et installé à Beyrouth.


Le fonctionnement de l'ONU

la culture et de l'éducation. Les organisations internationales spécialisées sont indépendantes et ont été créées, comme l'ONU, par une convention inter-étatique. Certaines de ces organisations sont d'ailleurs antérieures à l'ONU : ainsi l'Union Postale Universelle, l'OIT (Organisation Internatio­nale du Travail), créée en 1919 par le Pacte de la SON1, la PAO (Food and Agricultural Organisation), créée par la conférence de Hot Springs en 1943, le FMI (Fonds Monétaire International), créé par la conférence de Bretton-Woods en 1944 ou l'OACI (Organisation Internationale de l'Aviation Civi­le), créée par la Convention de Chicago de 1944. D'autres sont postérieures à l'ONU. Citons, parmi les plus importantes : l'UNESCO (Organisation des Nations Unies pour l'Éducation, la Science et la Culture, 1946), l'OMS (Organisation Mondiale de la Santé, 1948), le GATT (General Agreement on Tariffs and Trades, créé en 1946 et auquel a succédé, en 1995, l'OMC -Organisation Mondiale du Commerce) ou l'AIEA (Agence Internationale pour l'Énergie Atomique, 1956)2. Ces organisations, dotées de la personna­lité juridique, disposent de leurs propres règles de fonctionnement, de leur budget et de leurs organes de direction (en général, sur le modèle de l'ONU, une Assemblée générale et un Conseil ou Bureau exécutif). Certaines possè­dent un véritable pouvoir normatif : c'est le cas, par exemple, de l'OACI ou, surtout, de l'OIT qui élabore des « conventions internationales du travail » que les États qui les ont ratifiées sont tenus de respecter, sous la contrainte d'un contrôle international. De même, l'OMS, outre l'élaboration de programmes mondiaux de lutte contre les grandes épidémies et pandémies, a réalisé une importante œuvre de réglementation sanitaire internationale.

Les organisations spécialisées sont reliées à l'ONU par des accords de coopération qui leur imposent de remettre des rapports complets sur leur activité. L'ONU, conformément à la prescription de la Charte, s'efforce de coordonner l'action de cette nébuleuse et d'introduire des règles communes tic fonctionnement. Dans ce but, a été créé un Comité d'Administration et île Coordination qui, se réunissant deux fois par an, sous la présidence du

1     Le Pacte de la SDN avait créé un Bureau International du Travail (BIT), devenu l'OIT en 1946.

2    L'ONUDI (Organisation des Nations Unies pour le Développement Industriel), créée en 1966, était à l'origine un organe subsidiaire des Nations Unies avant de devenir, en 1985, une organisation internationale spécialisée.


 


OLA NÉBULEUSE ONUSIENNE

 

I L'ONU au temps de la guerre froide


 


Parallèlement à la rédaction des Pactes, l'ONU a proposé à ses membres la ratification d'une série de conventions spéciales : Convention sur l'élimi­nation de toute forme de discrimination raciale (1965), Convention sur l'élimination de l'apartheid (1973), Convention sur l'élimination de toute forme de discrimination à l'égard des femmes (1978), Convention contre la torture (1987), Convention relative aux droits de l'enfant (1989). Récem­ment, l'Organisation a franchi un nouveau pas dans la protection des droits de l'homme en votant des résolutions1 : en 1990, ont été votés deux textes qui recommandent aux États d'assurer un environnement salubre à leurs citoyens et d'organiser des élections périodiques et honnêtes.

Rappelons que la résolution, acte unilatéral de l'ONU, s'impose à tout État membre de l'Organisation, même si elle n'est pas obligatoire, alors que la convention, qui est un traité, ne s'impose qu'aux États qui l'ont ratifiée.


On peut, bien sûr, se gausser du contraste entre l'imposante production normative de l'ONU et son inefficacité pratique. Certains considèrent qu'en matière de protection des droits de l'homme, l'ONU est structurellement entravée par le fait qu'elle est composée d'États et que certaines ONG, aux moyen beaucoup plus modestes, sont plus efficaces. Il convient pourtant de rappeler qu'en certains domaines, l'action de l'ONU n'est pas nulle. Ainsi, la condamnation de l'apartheid - assimilé à un crime contre l'humanité - a conduit le CS, en 1977, à voter des sanctions économiques à l'encontre de l'Afrique du Sud. De même, depuis 1970, l'AG autorise la commission des droits de l'homme à enquêter sur des cas de violation flagrante. Ainsi, récemment, des enquêteurs de l'ONU se sont rendus en Afghanistan, à Cuba, en Birmanie ou en Iran. Enfin, la proclamation universelle de grands principes conserve une force morale irremplaçable.