1870-1914
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Un nouveau nom : « La Jeune France »

         Les circonstances exactes dans lesquelles la « Société Musicale de la Ville d’Harnes » a changé de nom ne nous sont pas connues, pas plus que les raisons qui ont précédé au choix du nouveau nom « Fanfare la Jeune France ».

Le seul document à notre disposition relatif à ce changement est un arrêté préfectoral ( émanant curieusement du « Bureau Militaire » ), en date du 24 Novembre 1891, autorisant la constitution régulière de la société musicale « La Jeune France ».

C’est la première fois que cette dénomination apparaît dans les archives municipales : contrairement à ce qui a longtemps été affirmé dans les historiques successifs de l’Harmonie, « La Jeune France » n’a pas été le premier nom de la société musicale harnésienne, le document pré-cité en fournit la preuve indiscutable

 « La Jeune France » devient « Fanfare Municipale »

         Même si la fanfare « La Jeune France » n’est pas reconnue municipale, elle reçoit des élus une subvention convenable et parfois même, comme à l’occasion du Festival de Musique du 23 Juin 1895, un soutien moral et administratif : la fameuse « affaire des droits d’auteurs » en témoigne.

Voici les faits : « La Jeune France » avait organisé le 23 Juin 1895 un Festival de Musique dans la ville ; ayant pris contact au préalable avec le représentant régional de la Société des Auteurs-Compositeurs de Musique ( l’ancêtre de l’actuelle SACEM ), le Président de la Fanfare (André DEPREZ, à l’époque Sénateur ) avait acquitté une somme forfaitaire de Droits d’Auteurs correspondant aux maigres ressources de la Société. Cette somme ayant été jugée insuffisante, il fut fait interdiction au Festival de se tenir : la Municipalité d’alors, saisie par le Président de la Fanfare, lui apporta son total soutien et le Festival put avoir lieu sans poursuites pour la Fanfare.

        Pour éviter toute déconvenue de la sorte à l’avenir, la Fanfare « La Jeune France » sollicite en Mai 1900, en plus d’une augmentation de la subvention visant à la porter de 760 à 1000 Francs, la reconnaissance du titre « Fanfare Municipale ».

Un essor florissant pour donner naissance à une harmonie

         La Société traverse une période d’accalmie sous les directions successives de Messieurs NAST ( 1892 à 1895 ) et Victor HULEUX (1895 à 1897 ) : les musiciens vont acquérir par un travail individuel et collectif très poussé, des aptitudes musicales plus marquées qui ne tarderont pas à se traduire en réalisations éclatantes.

         Présidée par Messieurs JAMBART ( 1889 à 1896 ) et Alcide PLATEAU ( 1896 à 1905 ) et dirigée habilement par Florimond HOOGSTOEL ( 1897 à 1914 ), la Fanfare « La Jeune France » ( dont les musiciens ont adopté depuis 1893 la tenue d’artilleurs de Brandebourg ) peut alors donner la mesure de ses possibilités :

-         en 1897 : Concours de Nogent sur Marne : 3 Premiers Prix

-         en 1899 : Concours d’Eu : 3 premiers prix

-         en 1902 : Concours très disputé de Lille : 1er Prix de lecture à vue, 1er Prix d’exécution, 2ème Prix d’Honneur, 3 Prix de direction au Chef

Ces trois victoires chèrement acquise par la Société lui permettent de se hisser en 2ème Division, 1ère Section.

         Toujours sous la même direction et les présidences de Messieurs Ernest RABOUILLE ( 1905 à 1909 ) et Henri BEAUVAIS ( 1909 à 1914 ), les musiciens dans la tenue modernisée d’artilleurs de l’époque qu’ils portent depuis 1903, vont enregistrer de nouveaux succès :

-         en 1907 : Concours de Pantin

-         en 1910 : Concours de Clichy où s’affirme leur supériorité

 Après ces brillants résultats, la Fanfare « La Jeune France » se transforme en 1912 en une harmonie. Elle compte alors une soixantaine de membres

La naissance de la « Fanfare Ouvrière »

         Profitant de la nouvelle loi du 1er Juillet 1901 qui consacre le principe de liberté d’association, une nouvelle société musicale est créée à Harnes en 1903.

Il ne m’a pas été possible de déterminer les circonstances qui précédèrent à cette création ni ses acteurs, on sait seulement que la Présidence était assurée par M. Alfred POULAIN et la Direction par M. Emile DAUTRICOURT. Néanmoins, on peut affirmer sans se tromper que cette nouvelle association est très marquée politiquement, en opposition avec l’Harmonie « La Jeune France ».

         En effet, très vite les heurts se multiplient entre cette fanfare dont les membres portent la tenue de sapeurs pompiers et la Municipalité, plutôt conservatrice que dirige à l’époque M. Anatole BAILLIEZ.

Reconnaissance de la « Fanfare Ouvrière Municipale »

             En Mai 1912, la victoire socialiste aux élections municipales va permettre à la Fanfare ouvrière d’être reconnue « municipale ».

         Une lettre du président BEAUVAIS de la Fanfare Ouvrière est à cet égard assez édifiante : elle évoque sans ambages « l’indifférence dédaigneuse de la ( précédente ) municipalité »  et rappelle que la « Fanfare Ouvrière » avait été « traitée (jusque là) en paria ». Elle constitue le témoignage des luttes politiques dont les deux sociétés musicales furent les acteurs et les hérauts.

         La vitalité de la « Fanfare Ouvrière Municipale » lui permit d’envisager la participation à un premier Concours : à Suresnes, prévu pour le 26 Août 1914, que la guerre déclenchée un mois auparavant empêcha de se tenir

Le cinquantenaire de « La Jeune France »

         Parallèlement à la création de « La Fanfare Ouvrière », la « Jeune France » poursuit son ascension. Elle sollicite en 1908 l’ouverture d’un premier cours de solfège qui devrait permettre aux jeunes musiciens ainsi formés d’obtenir des avantages lors du Service Militaire ainsi qu’à l’embauche dans les Compagnies Minières. Le seul document disponible quant à la création de ce cours, ancêtre de l’Ecole Municipale de Musique ne nous donne hélas aucune indication précise : où se tenait-il ? qui assurait les cours ?…

         Après l’élection en 1912 de la Municipalité socialiste, c’est à son tour de rencontrer quelques difficultés avec les nouveaux élus, alors qu’elle vient de prendre le nom d’ « Harmonie La Jeune France ». Il semble en effet que la société n’ait pas voulu participer à une réception officielle du député lensois Emile BASLY, venu à Harnes en Octobre 1912. Cette prise de position engendrera une scission avec la Municipalité, l’un des adjoints en viendra même à démissionner.

            Néanmoins, malgré ces petits incidents, l’Harmonie « La Jeune France » pourra organiser le 4 Mai 1913 son cinquantième anniversaire

1914 : le cataclysme

C’est la Grande Guerre et l’invasion qui vont détruire ce que 50 ans d’efforts constructifs ont pu réaliser, et risquer d’anéantir le sentiment artistique que l’on avait su créer à Harnes.

 Ces quatre années de guerre provoquent la dissociation et la dispersion complète des éléments qui animaient les sociétés. La plupart des musiciens sont sous les armes : 17 des leurs ne reverront plus le sol natal. Une grande partie de la population civile se trouve placée sous l’administration allemande dés le début de la guerre ( 3 Octobre 1914 ) et vit dans un état continuel d’angoisse et d’anxiété. Dans les premières années de la guerre, Harnes est considérée comme un lieu de repos pour les régiments ennemis tenant le secteur du plateau de Lorette, elle eut à subir de fréquents bombardements par obus et par avions. Aucune maison ne fut épargnée par les événements : Harnes fut classée parmi les 47 communes du Pas de Calais les plus gravement endommagées.

         En 1917, la population est évacuée et il faut abandonner à l’ennemi biens et souvenirs. C’est cet épisode qui marque la disparition de la bannière, des partitions et des instruments en cuivre. Malgré les dangers encourus, l’épouse d’Henri MIDAVAINE, futur Président, réussit à enfermer dans des caisses les instruments en cuivre ( pour éviter leur saisie ) et à les faire enterrer dans le terroir de Harnes … en un endroit qu’il fut impossible de retrouver après les hostilités !

         A la fin des hostilités, tout semble indiquer que rien ne pourra renaître des ruines que la guerre a accumulées dans la ville ; la Victoire assurée sous l’égide de l’Union Sacrée va permettre, sous ce même signe, de grouper des bonnes volontés qui, unissant leur action, susciteront bientôt un renouveau musical.


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