UNE FAMILLE DE VERRIERS
Sophie Greiner (mon arrière-arrière-grand-mère paternelle)
née le 02.11.1823 à Lemberg (Allemagne)
décédée le 28.04.1883 à Trois-Fontaines (57 France)
LA FABRICATION DU VERRE
La pâte de verre, c’est à dire la silice fondue grâce à des fondants tels que la soude ou la potasse qui abaissent la température de fusion, est connue depuis le 4e millénaire avant J.C. en Egypte et en Mésopotamie.
Jusqu’à notre ère, les corps creux étaient réalisés suivant la méthode du moulage de la fonte, dans le sable. Ce n’est qu’au 1er siècle avant J.C. que les Romains surent se servir de cannes de souffleurs de verre encore en usage aujourd’hui. La reconnaissance de la fabrication du verre n’est citée en France qu’en 1330.
LES VERRERIES VOLANTES
A l’origine, les ateliers de verreries, composés seulement de quelques verriers, s’installaient en pleine forêt de hêtres. Une fois le bois consommé, l’équipement était transporté ailleurs d’où la dénomination de verrerie ambulante ou volante.
L'OPPOSITION DU VOISINAGE
Ces installations semblent ne pas avoir toujours pu se réaliser sans difficultés. Les seigneurs qui avaient alloué des forêts critiquaient les verriers. L’Abbé de Lucelle déclare en 1693: « qu’il faudra s’en prendre à nos coquins de verriers qui gâtent tous nos bois. Quand je les voudrais chasser à coups de bâton, ils s’en moquent et empirent la dégradation, contre tout accord ».
LA VERRERIE DE MATTSTALL
Cette verrerie a été fondée en 1556 d’après le bail accordé par le Baron de Fleckenstein à Ulrich Greiner de Finsternroth de la région du Mainhardt Wald à l’est de Heilbronn.
Acte d’acensement du 23 avril 1556 :
« Moi, Ulrich Greiner de Finsternroth, reconnaît et déclare que Notre Henri de Fleckenstein, baron de Dagstul, mon bien-veillant Seigneur, m’a autorisé à construire une verrerie dans sa forêt de hêtres de Mattstall, le tout conforme à l’accord suivant: »
« Moi, Henri de Fleckenstein, baron de Dagstul, reconnaît et déclare avoir autorisé Ulrich Greiner de Finsternroth et ses héritiers à construire une verrerie dans ma forêt de hêtres de Mattstall et à l’exploiter dans son ensemble de façon ordonnée pendant 20 ans à dater de ce jour. Un accord pourra prolonger ce délai. Ils auront le droit de couper et de brûler pour leurs propres besoins et leurs fours tout le bois nécessaire sauf le bois de chêne. Personne d’autre ne pourra couper du bois hormis mes héritiers pour leur propre usage.
Pour cela, Ulrich Greiner et ses héritiers paieront comptant chaque année à dater de la Saint Georges, 23 avril 1557, 50 florins valeur de Strasbourg et ainsi chaque année pendant 20 années. En outre, ils paieront pour chaque acre de prés ou de champs 3 kreutzer, une mesure de blé et la dîme. De même, pour chaque habitation construite par le verrier ou par son aide, ils paieront annuellement un schilling de Strasbourg comme impôt foncier. Ils livreront une poule à carnaval, une au temps de la moisson et une à la Saint Martin ainsi que le font tous les habitants.
En outre, pour ma maison, ils livreront à moitié prix 200 verres à vin fabriqués dans leur verrerie ainsi que les vitres dont mes héritiers ou moi-même auront besoin pour nos bâtiments.
Il est aussi entendu que, pendant l’époque de la glandée, les verriers s’abstiendront de brûler du bois dans la forêt pour ne pas gêner la menée des porcs à la glandée par ceux auxquels ce droit aura été accordé.
Ulrich Greiner, ses héritiers, ses domestiques, ses valets devront être soumis, obéissants et respectueux envers mes héritiers.
Si le bailleur ou ses héritiers devaient arrêter la verrerie faute de bois de hêtre ou pour une autre raison, ils continueront à payer la dîme foncière des cents acres de terres allouées et livreront comme précédemment les poules.»
Pour certifier la loyauté de cet acte, le baron Henri de Fleckenstein appose son sceau le jour de la Saint Georges de l’an 1556.
Ulrich Greiner a juré devant Dieu de respecter tous les articles du bail et y appose également son sceau.
Lorsqu’il signa ce contrat, Ulrich Greiner était encore propriétaire de Finsternroth; il ne le vendit qu’au jour de la Saint Urbain en 1559 pour 3500 florins au Seigneur Casimir de Hohenlohe.
Anne Ott, l’épouse d’Ulrich Greiner, appartenait à la bourgeoisie de Heilbronn.
De ses enfants, nous ne connaissons que Balthasar (Balthes) qui resta au Wurtemberg dans la forêt de Mainhardt et Agathe qui se maria avec Jean Wild de Wissembourg.
En plus de la verrerie de Mattstall, près de Lembach (67), qu'Ulrich Greiner créa pour lui et ses descendants, il acheta à son neveu Christophe Greiner, maître verrier, la verrerie de Kreenberg également près de Lembach.
De ce Christophe Greiner, descend une lignée de Greiner de Brumath en Alsace, dont Albert Greiner de Paris, Président de l'Eglise luthérienne de France.
C’est Jean-Pierre Greiner, né à Mattstall, mari de Sybille Katherine Schmoll, née à Speyer, qui construisit en 1663 l’imposante maison de Mattstall. Elle porte toujours au-dessus de la porte les inscriptions suivantes :
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Der Herr bewahre Unsern Eingang und Ausgang von nun an bis in Ewigkeit Que Dieu protège notre entrée et notre sortie maintenant et pour l’éternité |
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Ich Johann Peter Greiner Glashüttenmeister allhier geboren-1663 Moi Jean-Pierre Greiner propriétaire de verrerie né ici, hab. ici en 1663 |
Ich Sybille Katherine Greinerin Glashüttenmeisterin allhier geboren in Speyer-1663 Moi Sybille Katherine Greiner née à Speyer, hab. ici en 1663 | |
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Retour aux sources des descendants de Sophie Greiner
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La tour du milieu a été ajoutée par la suite.
C’est Jean-Louis Greiner, né le 24.4.1769 à Mattstall, qui fut le créateur de la Verrerie de Lemberg (Palatinat). Il se maria en 1789 avec Sophie Catherine Stutz, fille d’un maître verrier.
La Verrerie de Lemberg fabriquait du verre à vitre, des verres pour lunettes et des verres de montres.
Friedrich Greiner, le fils de Jean-Louis Greiner, construisit en 1835 la maison de Lemberg.
Le dernier propriétaire de la Verrerie de Lemberg fut Louis Nicolas Greiner. Faute de bois de hêtre, la verrerie périclita sous sa direction (Louis Nicolas était le frère de Sophie Greiner, épouse de Heinrich Stengel, parents de Françoise Stengel).
En 1797, Jean Christian Licht, dont le père était maître en partie de la verrerie de Lemberg (Palatinat), épousa Concordia Greiner et fut ainsi copropriétaire de la Verrerie de Mattstall.
Le lieu dit « La Verrerie » resta leur propriété jusqu’à son transfert à la famille de Bussière à laquelle succéda la famille de Pourtalès.
Les raisons qui ont poussé les derniers Greiner de Mattstall à vendre leur imposante verrerie ne sont pas connues. Est-ce pour des raisons politiques ou par suite de manque de bois de hêtre ?
La tradition voulait que les verriers s’unissent au sein de leur profession, certainement pour que ne soient pas divulgués les secrets de fabrication du verre.
Cette tradition fut respectée dans ma famille.
Mon arrière-arrière-grand-père, Heinrich Stengel, originaire d’une famille de verriers du Palatinat depuis plusieurs générations (parmi eux, Johann Gottfried Stengel, décédé le 20.10.1783, maître verrier à la Cour du Prince héritier Ludwig IX de Hessen Darmstadt), travailla à la verrerie de Lemberg (Allemagne). Il épousa Sophie Greiner, dont j'ai relaté l'histoire de ses ancêtres ci-dessus.
A la fermeture de la verrerie de Lemberg, il s’établit avec sa famille à Trois-Fontaines (57) où il trouva du travail.
Joseph Hirtz, initié à la fabrication et à la vente du verre par Monsieur Portal à Paris, y fut nommé sous-directeur. Il fit la connaissance de la fille de Heinrich Stengel, Françoise, qu’il épousa en 1879. Il s’associa avec son beau-père pour acheter le moulin de Bettling-Buhl (57) qu’ils transformèrent en verrerie.
Les ouvriers de la verrerie HIRTZ-STENGEL (Bettling-Buhl vers 1919) avec leurs enfants
Heinrich Stengel partit à trois reprises aux USA pour y monter des fours à bomber les verres.
En 1910, les ateliers de Bettling-Buhl étant devenus trop exigus, la Société acheta le moulin de Sarrewerden (67) pour y construire d’autres fours et une taillerie de verres.
Heinrich Stengel décéda en 1918 à l’âge de 99 ans.
Entre les 2 guerres, l’entreprise fut dirigée par Joseph Hirtz et ses fils dont mon grand-père Léon Hirtz.
En 1944, l’usine fut gravement endommagée par la guerre.
En 1956, Robert Hirtz, mon père, devint président-directeur-général. C’est lui qui lança une nouvelle fabrication : l’argenture du verre et la fabrication de miroirs pour rétroviseurs.
Robert Hirtz et son père Léon quittèrent la société en 1962 reprise par Ernest Hirtz.
Son fils, Bernard, lui succéda en 1983 à la tête du directoire.
Verreries HIRTZ (Sarrewerden)
REFERENCES :
Verreries et verriers au pays de Sarrebourg (Antoine Stenger)
Verreries et verriers à Mattstall et Lembach (Antoine Stenger)
Chronique «Greiner» (Robert Greiner, petit-fils de Louis Nicolas Greiner, et fils de Gottfried Greiner et Louise Hostberger qui peuvent être considérés comme les seconds créateurs de la Verrerie de Lemberg dans le Palatinat.)
Dossiers généalogiques (Robert Hirtz , ° 18.5.1917 + 29.6.1997)