Les familles FAVRAT sont alliées indirectement aux Pasquier par Séraphie Constance née en 1840 qui a épousé Ferdinand Favre né en 1843. Le grand-père maternel de ce dernier était Jacques Laurent Favrat baron de Bellevaux.
Les Favrat, familles de notaires entre autres, ont une relation avec une autre famille de notaires du Chablais, les NAZ, avec lesquelles nous avons des relations de proche parenté par alliance.
Comme ces familles Naz, les familles Favrat ont une relation de parenté avec la famille du Général d'Empire Dessaix.
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Extrait du livre de Claude Chatelain et Georges Baud :
HISTOIRE DE LA VALLEE DE BELLEVAUX
Le nom de Favrat est lié intimement à l'histoire de Bellevaux ; cette famille a marqué la vie paroissiale et communale par la suite de ses fermiers, notaires, châtelains, avant de mettre le sceau à cette ascension par l'attribution du titre seigneurial de baron de Bellevaux. Deux lignées vont surtout retenir notre attention, mais dès le départ et à chaque génération les cadets qui n'entraient ni en cléricature ni dans l'armée reprenaient le travail ancestral d'artisan, de commerçant ou de cultivateur ; seul l'aîné gardait la succession du père.
Les familles étant chargées d'enfants, il s'en est suivi un éparpillement du nom patronyme, tant sur le territoire de Bellevaux qu'au-delà vers Orcier, Armoy, Thonon, Evian, mais tous ressortent du même ancêtre, Jeannet Favrat, qui habitait à Gembaz autour de 1320. La recherche la filiation est facilitée par le fait que leurs descendants, en hommes de loi experts, ont consigné par écrit leurs successions, leurs partages, leurs contrats
de mariage et leurs testaments ; alliés aux plus vieilles familles de la bourgeoisie et de la noblesse savoyarde, ils étaient fiers de leur origine rurale et voulaient le prouver.
Que faisait ce Jeannet Favrat ? Comme son nom l'indique (faber) il devait être un artisan de village, charron, maréchal-ferrant, mais c'était déjà un rang social supérieur aux simples laboureurs. On suppose que, mieux que ces derniers qui réglaient leurs dettes en nature, il eut l'occasion de percevoir de l'argent en bonne monnaie, principalement quand il travaillait pour le compte du prieuré. Astucieux probablement et ambitieux, ce qui ne gâtait rien, il mit ses relations à contribution pour obtenir des religieux bénédictins une reconnaissance en bonne et due forme pour son fils Perret. Celui-ci, en effet, passe une reconnaissance entre les mains de Maître Jacquemet d'Avullier (ou Avully) le 21 décembre 1377 ; on verra plus loin l'explication de ce terme. Ainsi il devient homme-lige du prieuré, acquiert une certaine liberté d'action, pourra laisser à son fils sa succession et, sans être encore un notable, il a déjà une notoriété dans la paroisse. Ses enfants en profiteront quand l'occasion leur en sera donnée.
Son fils Jean passe reconnaissance entre les mains de Maître Curtet de Bellossier. La suite donne Jean vivant autour de 1466, Mamert (ou Mermet) vivant dans les années 1495-1523. Ce Mamert a trois garçons appelés les frères " Perrod " : Claude (ou Martin), mort avant 1545 et qui sera la souche de la branche notariale ; Pierre, encore vivant en 1544, qui sera la souche de la branche seigneuriale ; Henri, prêtre, vivant en 1556 et ardent défenseur de la foi catholique au moment de l'expansion du protestantisme en Chablais.
Mais déjà des Favrat ont quitté la maison paternelle pour prendre une propriété ailleurs ; à la génération suivante, Jacques feu Pierre sera l'ancêtre des Favrat de la Côte et son frère Mamert ira s'établir à Evian.
A quelle date peut-on situer l'implantation des Favrat sur Orcier de l'autre côté du col du Feu ? II est impossible de le dire, mais la genèse de l'affaire semble être celle-ci. De tout temps ce col a été le lieu de passage entre les vallées de Bellevaux-Lullin et le Chablais ; on a vu le tracé des chemins qui y conduisaient.
Ayant acquis des droits sur la montagne d'Hermone les chartreux, infatigables défricheurs et non moins infatigables marcheurs, y avaient installé des colons pour faire valoir ces terres sous la conduite de quelques religieux, des frères lais (laïques non prêtres) ; au bout de quelques années de travail ils avaient coutume d'abandonner à ces familles de travailleurs la jouissance d'une partie du sol, les aidaient dans la construction de leurs maison et contribuaient ainsi à l'éclosion d'un nouveau village, en l'occurrence le hameau " Les Favrat ". En général les biens qu'ils recevaient en fief étaient des forêts situées sur les hauteurs, contrées non encore habitées. C'était d'ailleurs ce qu'ils faisaient à Fessy, dans leur domaine de Vallon et où ils installaient Jehan Volland, de Gembaz lui aussi, et à peu près en même temps soit vers 1450-1500.
Les années ou vivent les trois frères " Perrod " sont des années troubles : Genève a secoué l'autorité de son évêque, le pays de Vaud, celle du duc de Savoie, les troupes bernoises passent le lac et le Chablais devient protestant. Ce bouleversement politique, économique et religieux entraîne des fils des familles Favrat à quitter la maison paternelle pour aller tenter leur chance sur l'autre rive, soit qu'ils aient été attirés par l'administration bernoise, soit qu'ils aient choisi de garder la religion protestante, préférant l'exil à la tutelle monastique.
Les révolutions ont toujours provoqué de ces remous dans les familles. En 1579, un Thivent Favrat, de la paroisse de Bellevaux, se marie au temple de Villeneuve ; un Favrat de Bellevaux se marie à Saint-Saphorin en 1599 et devient bourgeois de Chardonne en 1634 ; un autre mariage à Vevey en 1619 ; un Pierre Favrat, de Bellevaux, est reçu sujet de LL.EE. les seigneurs de Berne le 23 mars 1606 et prête le serment de fidélité devant le bailli de Lausanne.
D'autres Favrat sont venus de Thonon dans les mêmes années à Morges, à Corsier, à Etoy, près d'Aubonne. Le livre d'or des familles vaudoises indique de nombreux Favrat habitant le pays de Vaud en 1574, bourgeois de différentes villes en 1600, portant parfois le "Z" final.
Claude (ou Martin) Favrat dit " Perrod " a deux fils : Nicod restera protestant et quittera le pays pour s'établir dans le canton de Vaud ; Claude est affranchi de toute taillabilité par le duc de Savoie en 1567 et abjure le protestantisme. Ses descendants garderont le surnom de " Perrod ", ou comme on dit encore aujourd'hui : les Favrat-Pour. Son arrière-petit-fils, Claude, épouse la fille de Philippe Favrat sa cousine éloignée ; la descendance va donner trois notaires dont les actes ont marqué la vie du pays et dont les minutes dorment au rayon des archivées départementales : Michel (1647-1691), André (1674-1744), François-Louis (1720-1808). .
Ce dernier résidait à Gembaz, dans l'ancien chosal ou dîmerie du prieuré qui fut la première maison des Favrat. Du fait d'une vie assez longue, il fut mêlé aux événements de la Révolution, devint notaire de la République et s'associa à la " Banda nère " pour acquérir une part des biens de la chartreuse. Marié deux fois — comme il arrivait souvent autrefois — il n'eut pas moins de 14 enfants, dont Jean-Pierre-Marie appelé " le révolutionnaire ", receveur général des finances à Genève, destitué et retiré par la suite à Ville-la-Grand.
Cette branche notariale s'est éteinte à Bellevaux quant au nom de Favrat.
Jacques-François, frère de François-Louis, s'était établi notaire et bourgeois de Thonon ; de ses filles, l'une, Marie-Philippine, épousa le docteur Dessaix et fut la mère du général Dessaix, et l'autre, Marie-Josephte, épousa Nicolas Chastel et fut la mère du général Pierre Chastel, baron d'Empire.
La branche seigneuriale, descendante de Pierre " Perrod ", débute avec son fils Claude, affranchi en 1567, notaire et fermier du prieuré en 1571 ; il abjure le protestantisme en 1598. Cette famille est bien en place à Bellevaux quand Philippe, le petit-fils de Claude, épouse Zonine, fille du notaire Pierre Rey résidant aux Contamines. Il sait conduire ses affaires avec dextérité et profiter de la situation : c'est lui dont il est parlé au chapitre VIII. Il avait fondé la chapelle réservée à sa famille dans l'église où le clan venait assister à la sainte messe dans un banc réservé.
Philippe Favrat avait quitté Jambaz et habitait les Contamines ; il y avait acquis une propriété d'un de ses oncles en dédommageant sa veuve en 1628. Cette propriété restera dans la famille jusqu'au jour où le baron Frédéric la vendra par pièces à des habitants du chef-lieu.
Un de ses fils, Claude, va lui succéder, mais il mourra jeune.
Un autre, Jean-Jacques, épouse Jeanne de Seyssel et va s'installer à Talonnet ; Scipion, un de leurs enfants, fit carrière militaire au régiment du Chablais, et cette branche s'éteindra vite.
Jacques- François (1645-1725), fils de Claude, fit probablement construire le bâtiment de la Cour puisqu'il y demeure et qu'il y exerce sa charge de châtelain. Parmi ses enfants, Claude-Louis lui succédera, mais il faut en mentionner deux autres pour un fait qui défraya la gazette de l'époque et qui fut longtemps la source d'un malentendu retrouvé même sous la plume du général Bordeaux à propos du général Favrat : Jean-Antoine et Bernard. Jean-Antoine était entré en religion et avait prix l'habit des barnabites à Thonon ; Bernard s'était engagé dans l'armée et était capitaine au régiment du Chablais. L'officier avait eu un enfant naturel d'une jeune fille de Bellevaux, Monique Buinoud ; ce sont des choses qui arrivent, surtout quand on est militaire, mais dans une famille considérée, où l'aîné était prêtre et curé de Perrignier et où deux filles étaient entrées chez les Ursulines de Thonon, il n'en allait pas de même. L'honneur de la famille Favrat était en jeu, car il avait été bafoué, et le barnabite se crut désigné pour le venger. Le 1er janvier 1716, après avoir célébré la messe à l'église de Bellevaux, Jean-Antoine s'apprêtait à regagner Thonon ; son frère lui tenait l'étrier pendant qu'il montait à cheval, tout semblait aller pour le mieux, lorsque soudain, tirant un pistolet de sous sa soutane, il fit feu à bout portant sur Bernard, piqua des deux et au galop de son cheval courut se mettre à l'abri chez les protestants du pays de Vaud. Personne n'eut le temps de se mettre à sa poursuite, tant le coup avait été rapide et bien calculé, et désormais la frontière le mettait à l'abri de la justice.
Quant à Bernard, il fut relevé mort et enterré à Bellevaux le 5 janvier.
Voilà l'histoire authentique d'un fait divers qui, hélas, n'est pas l'apanage d'une seule famille. Quoiqu'il en soit, il fallut bien tourner la page ; ni le supérieur des barnabites de Thonon, ni le juge-mage du Chablais ne pouvaient poursuivre le meurtrier. Le rapport établi à cet effet n'eut pas de suite, et la vie continua à Bellevaux. Claude-Louis eut comme remplaçant son fils Jacques-François-André, époux de Marie-Jacqueline Vignet de Thonon.
Comme on l'a dit au chapitre IX, ce couple eut quatorze enfants, dont André, substitut à Turin, Jean-Pierre, l'aide de camp de Frédéric II (2), Philippe, prêtre, et François-Marie.
Ce dernier, né en 1738, devint à 26 ans avocat au Sénat de Savoie et sénateur en 1775. En ce riche propriétaire terrien, toute la lignée des Favrat trouvait son couronnement. Plus ou moins intrigant, il mit à profit les relations qu'il avait, tant à Chambéry qu'à la Cour de Turin, pour faire ériger en baronnie le fief de Bellevaux, au moment de l'affranchissement du prieuré par les SS barnabites, et se faire attribuer, en 1783, le titre de baron de Bellevaux " en raison des services qu'il avait rendus à la couronne " (3).
En 1790 il est procureur général du roi à Turin. Mais cette noblesse toute récente ne lui monte pas à la tête, car il a senti le vent et va tourner sa veste sans trop de scrupule. Il est nommé président de l'administration centrale du département du Léman en 1793, en bon sans-culotte, et en 1800, membre du conseil général du département. Il retrouve ensuite sans difficulté son titre de baron, maintenant paré des couleurs impériales. La Restauration sarde ne le trouble nullement ; à l'image de Talleyrand, il a appris à connaître les hommes et à juger leurs institutions.
Il meurt en 1817, à I'âge de 79 ans. et se fait enterrer à Amphion ; il y avait une propriété où il se plaisait beaucoup.
Il eut de son mariage avec Marie du Fresne. de Cognin : Ferdinand, décédé à 29 ans, Jacques-Laurent Frédéric ; Francoise-Léontine, dite Nina, qui épousa le comte Alexandre de Castelbourg ; Hortense-Francoise, mariée au comte Riccardi, gendres de bonne noblesse piémontaise.
Jacques-Laurent-Frédéric, né en 1783 à Chambéry. hérita de son père le titre de baron de Bellevaux ; il fut un temps maire de sa commune et voulut jouer un certain rôle auprès de ses concitoyens. Mais soit qu'il n'ait pas eu un tempérament à la hauteur des circonstances politiques, soit que les Ballavauds n'aiment pas qu'on leur marche sur les pieds (4), le baron Frédéric ne put avoir l'emprise qu'il aurait désirée. On a vu qu'au moment de la Restauration sarde, les habitants ne voulurent pas de lui comme syndic. Il vivait d'ailleurs la plupart du temps à Amphion. Son souvenir reste attaché au grand Crucifix placé à l'entrée de l'ancien cimetière, héritage de sa famille qu'il avait donné à la paroisse à l'occasion d'une mission. Ses armes, ornant le linteau d'une porte de grange à la Cour, ont disparu il y a déjà quelques années. Il avait épousé Caroline, fille du général Dessaix, mais ce ménage resta sans enfant.
Il meurt à Amphion en 1849.
L'héritage passa entre les mains de son beau-frère M. de Castelbourg ; celui-ci vendit la ferme dite " la Baronnie ", soit la Cour, aux frères Rey feu François-Marie, en 1861. Le reste de la propriété des Favrat fut vendue par parties à différents acquéreurs en même temps. Il fallait évoquer le passé de cette famille avant que tout ne retombe dans l'oubli ; elle a marqué la vie du pays, contribué à son évolution, permettant ainsi aux générations nouvelles de prendre en mains à leur tour leur destinée. L'homme n'est pas fait pour vivre dans un musée.
Francois-Marie Rey dont il vient d'être parlé avait reçu le sobriquet de " Petré ". D'un premier mariage, il avait eu deux garçons : Joseph, prêtre et secrétaire de Mgr Rey, sans être pour autant parent avec lui, et François, dit " Pic ". Des quatre enfants du second mariage, Ferdinand fut maire de sa commune peu après l'annexion et Jean avait épousé Justine Converset-Cousin des Contamines. La descendance de ce ménage est connue ; il y eut un garçon, Basile, devenu notaire, qui exerça quelque temps avant d'aller établir son étude à Samoëns où il avait pris femme. "-
Cette mention nous amène à parler des notaires à Bellevaux.
Les familles Volland, Meynet, Favrat, entre autres, ont connu dans leur lignée de nombreux notaires. En milieu rural, ce notable avait sa place pour codifier tous les actes de la vie : vente, partage, testament, legs, reconnaissance de dette, affranchissement, émancipation, contrat de mariage. On trouve encore, dans bien des maisons, ces paniers jaunis par le temps où l'homme de loi s'était appliqué à écrire consciencieusement :
" par-devant moi notaire collège soussigné... " le tout achevé par une signature qui en elle-même était un sceau.
La vie, plus difficile qu'aujourd'hui, et l'argent plus rare, mais aussi un droit moins précis et l'éventualité d'une mort rapide, tout cela amenait les gens à faire dûment authentifier le moindre acte d'entente avec leur prochain. Sans doute qu'en bons Savoyards, ils se défiaient des bonnes paroles et n'attribuaient une valeur sûre qu'à ce qui était écrit sur le papier.
Etre notaire situait son homme dans la hiérarchie sociale : il était auréolé de la science du savoir et de la confiance de son client. Son nom s'accompagnait d'une épithète qui exprimait le respect : Spectable, Discret, Egrège, Messire. C'était un notable rural. Et tout naturellement, celui qui savait faire ses affaires pouvait être appelé à gérer les biens d'une communauté ou d'une seigneurie ; il pourra devenir châtelain de cette collectivité ou fermier du seigneur.
Les Favrat useront largement de cette possibilité pour asseoir leur puissance.
Il fallait être déjà homme libre, affranchi et non serf. Après avoir appris à lire et à écrire, ce qui n'était pas donné à tout le monde, le jeune homme entrait au service d'un notaire, faisait sa formation " sur le tas " et pouvait par la suite acheter la charge de son patron ou se mettre à son propre compte. Moyennant le serment obligé, il devenait notaire collégié ou notaire juré, et pouvait exercer.
Le premier que l'on rencontre à Bellevaux est Egrège Claude Volland, en 1544, notaire juré par les seigneurs de Berne. Etienne Meynet, du Borgel, né vers 1525, devint notaire et fermier des moines d'Ainay après le départ des Bernois. Claude Favrat s'affranchit en 1567 et devint notaire et commissaire ; il lui revient l'honneur de conduire la procession des Ballavauds qui vont abjurer à Thonon en 1598. Jacques Meynet, fils d'Etienne, quitte le Borgel pour s'installer à la Clusaz où il a épousé Pernette David : sa veuve se remarie avec Claude Clavel, notaire lui aussi à la Clusaz et qui avait également abjuré le protestantisme. Il faut croire que pour exercer la fonction, il fallait être de la religion du prince et fournir, en Chablais tout au moins, un certificat d'abjuration.
Claude Favrat, quant à lui, a porté ses vues sur une propriété des Contamines appartenant à Jacques Rey, dont le fils, Pierre, est notaire en 1631. Il achète la propriété et s'y installe. Son petit-fils Philippe va épouser la fille de Pierre : Zonine. Mais Philippe ne poursuivant pas dans le notariat, son étude passera aux enfants de sa fille, Jeanne, mariée à Claude Favrat-Perrod, l'autre branche de la famille : Jean-Jacques et Michel. André, fils de Michel, se trouve notaire et châtelain de Bellevaux et Vallon au moment de l'établissement du cadastre en 1730. Parmi ses enfants, François-Louis le remplacera dans la charge et exercera dans la maison familiale de Jambaz ; on y voyait, il y a encore peu de temps, une pièce habillée d'une porte en fer où l'on serrait les minutes et les archives.
L'autre enfant d'André, Jacques-Francois, exerçait le notariat à Thonon, où il avait épousé Marie-Thérèse de Ruphy : en 1747, il achète la propriété de Talonnet de François-Philippe de Seyssel. seigneur de la Charniaz, et la léguera à sa fille Marie-Francoise, épouse de Spectable Claude-Francois Naz, notaire lui aussi. Veuve et sans enfant, elle vend Talonnet à Jean-Baptiste Meynet dont les ancêtres, on l'a vu, avaient déjà exercé dans la branche notariale et dont le fils, François, sera notaire.
Ainsi, des Volland jusqu'à ce dernier, la maison de Talonnet aura passé entre les mains de toute une lignée de notaires de l'ancien régime. François Meynet habitera le chef-lieu, à l'emplacement de l'école publique actuelle, avant de s'installer à l'Abbaye.
André David, de Vallon, était notaire ducal et commissaire d'extentes (5) en 1640 ; il était bourgeois de Thonon et résidait à Mieussy. Il vend à Philippe Favrat le moulin sous l'église avec le battoir et la scie.
Mentionnons encore : Jean Bernaz, demeurant au village de " Chez le Rey " ; François-Marie Gougain, qui exerçait autour de 1862 et qui, par la suite de mauvaises affaires, partit pour l'Amérique du Sud en 1885 avec sa femme et ses deux enfants ; Charles Besson, dans les années 1886 ; Basile Rey, de la Cour.
Et le dernier de cette longue liste des notaires résidant à Bellevaux : M Pierre Buet. Il quitta la vallée en 1912 pour Morzine, d'où il était originaire.
Moins nombreux furent ceux qu'attirèrent la carrière des armes ; au temps de l'ancien régime, il fallait une certaine richesse pour obtenir un brevet d'officier, et à défaut de quartiers de noblesse, posséder suffisamment de relations, à moins que la chance ne vous sourit. C'est dire que seule la famille Favrat ait pu compter des officiers parmi sa descendance.
En ce temps-là, les armées nationales n'existaient pas, on louait ses services auprès de tel souverain ou de tel général selon la gloire du moment et la qualité de la solde. C'est ce qui explique que nous ayons comme gouverneur des pages du duc de Bavière en 1678 André Favrat, fils de Claude Favrat-Perrod et que son petit-neveu Henri soit devenu officier au service du roi d'Espagne en 1760, après avoir fait des études de théologie à Rome. Comme quoi la théologie mène à tout, à condition d'en sortir ! Scipion- Gabriel, cousin germain d'André, fut capitaine et ensuite acheta
le brevet de maréchal-des-logis dans l'escadron de Savoie.
M. Sage signale un Gachet Joseph, de Terramont, soldat dans les invalides de France et demeurant au fort de l'lsle Sainte-Marguerite en Provence ; en 1736, il vend tous ses biens à Pierre
Bèchevet.
Mais un Ballavaud, à qui des circonstances mal définies mirent le pied à l'étrier, eut une destinée peu banale.
Le 5 septembre 1804, mourait dans son palais de gouverneur militaire de la ville de Glatz, en Silésie, à l'âge de 71 ans, le général François-André Jacquier de Bernay von Favrat, général de
l'infanterie, décoré du cordon de l'aigle noir de Prusse. Histoire extraordinaire que la sienne, car celui qui était parvenu au faîte
des honneurs du royaume de Prusse eut pu, s'il était né un peu plus tard et s'il s'était engagé dans les armées de la Convention,
devenir maréchal d'empire de la lignée des Ney et des Murat.
Histoire étrange même, car un mystère enveloppe une partie de sa vie où le destin joua en sa faveur.
Il était né à Bellevaux le 4 septembre 1733 de Francois Jacquier, dont le père était venu de Bernex, et de Josette
Gantin, dont le père était d'Ayse. Un ménage tout simple qui était employé comme domestique chez les Favrat à la Cour ; elle
a un frère qui entre en religion chez les barnabites de Thonon, frère Alexandre, et elle meurt à Bellevaux à l'âge de 90 ans,
après avoir reçu des nouvelles de ce fils qu'elle n'avait pas revu depuis son départ aux armées étrangères.
Comment ce Jacquier est-il devenu un Favrat, et de noble famille ? That is thé question. A la Cour s'installe un jeune ménage: Jacques-François-André Favrat, fils de Claude Louis,
vient d'épouser en 1730 une demoiselle de bonne famille de Thonon, Marie-Jacqueline Vignet. Ils furent certainement heureux et ils eurent beaucoup d'enfants puisqu'on leur en connaît
quatorze, dont deux nous intéressent particulièrement : Jean-Pierre, né en 1734, et François-Marie, né en 1738. Ce dernier deviendra le baron de Bellevaux, père du baron Frédéric.
Quant
à Jean-Pierre, il s'engage dans l'armée prussienne, devient capitaine puis aide-de-camp, et meurt à Berlin en 1774. Qu'il ait attiré son camarade et aîné d'un an, François Jacquier, c'est fort
possible : ils étaient tous les deux en Prusse au temps de Frédéric II, tous deux appréciés à des titres divers, dit le général Bordeaux, et se traitaient de frères. Jean-Pierre devait avoir bon
cœur, car il était joyeux viveur et même panier percé.
Mais le mystère reste entier et pour le moment nous n'avons pu savoir comment ce petit Jacquier a pu devenir François-André Jacquier de Bernay von Favrat au service de S.M. Frédéric-le-Grand, inscrit au catalogue des généraux prussiens.
Toutes les archives consultées n'ont pu nous livrer ce secret, qui ne semble pas un secret d'alcôve ; un dernier espoir s'est évanoui puisque les archives de l'armée allemande à Potsdam ont été détruites
lord du bombardement de 1945.
Le général Bordeaux a écrit sur lui une petite biographie dans les Mémoires de l'Académie Chablaisienne, mais il fait des erreurs quant à sa naissance. Nous lui empruntons ce qui suit : " II a
longtemps fait la guerre avant d'arriver aux grades élevés. Il était d'une intelligence vive, ouverte, doué d'imagination et d'initiative, physiquement il fut toujours étonnant de santé et de force physique. C'était bien " cette âme énergique animant un corps de fer " qui fit la fortune d'un Ney, d'un Murât. Il prend part à la guerre
de sept ans aux côtés des Prussiens, après avoir servi dans l'armée autrichienne ; il aurait même tâté de l'armée française en 1747.
Il lui faut du mouvement et de la gloire ; en 1763 il est major, colonel en 1784 et général-major en 1786, faveur rarement accordée à un étranger. Le successeur de Frédéric II, Frédéric
Guillaume II, le nomme lieutenant-général en 1792 et lui donne le commandement d'une armée en Pologne ; il eut de fréquents rapports pendant plusieurs mois avec l'illustre Souvarof, commandant de l'armée russe.
" Sa force était extraordinaire : il soulevait un cheval avec son cavalier, l'un et l'autre avec leurs armures. Sa moralité ne l'était pas moins, mais il faut se souvenir de l'ambiance extrêmement libre de cette seconde moitié du XVIIème siècle, accentuée
encore par la vie des camps. Nous ne suivrons pas les chroniqueurs dans leurs recherches à ce sujet. Dans la mesure où l'on peut se faire une opinion, il semble qu'il y ait eu seulement deux mariages véritables, séparés par une série d'unions passagères ".
Sur la fin de sa vie il avait repris contact avec sa famille par l'intermédiaire de son oncle, le frère Alexandre, resté à Thonon pour liquider les biens des barnabites mis sous séquestre. Il demande à celui-ci d'agir avec discrétion car à Berlin on ignore
son origine exacte. Il fait venir près de lui, à l'Académie royale militaire, son neveu François-Marie Converset, qui se fit appeler par la suite M. de Verset, officier au service du roi de Prusse,
fils de sa sœur Josette Jacquier, mariée avec Gabriel Converset.
Ce François-Marie était le frère d'Ame Converset, l'agent national de la Révolution, et donc l'oncle de Victor-Amé du chef-lieu ;
le frère aussi d'une sœur aux mœurs légères, Aimée, et ainsi l'oncle de Joseph-Marie Converset dit Cousin. A noter que Victor-Amé et le dit Cousin ont épousé chacun une nièce de Mgr Rey ;
l'histoire a de ces caprices !
Un frère du général, Claude-Joseph Jacquier est la souche desJacquier de Bellevaux. Quant aux Gantin, ils quittèrent le pays
pour s'installer à Sciez ; l'un d'eux, Claude, meurt à Filly en 1758, à l'âge de 44 ans.
A la mémoire de cet illustre compatriote, il convient de joindre le souvenir du général Dessaix, dont la mère était une Favrat de la branche notariale, et qui fut gouverneur militaire de Berlin pour
le compte de l'empereur Napoléon en 1812. Il y avait à peine huit ans que Favrat était mort, et Dessaix eut l'occasion de rencontrer des personnes qui l'avaient bien connu, entre autres le roi Frédéric-Guillaume III, quand il le recevait à Potsdam. Au mois d'avril 1813, quelques semaines après son retour en Savoie, le général Dessaix
mariait sa seconde fille Caroline, au baron Frédéric Favrat, fils du baron François-Marie