Note établie par Christian REGAT, historien et guide-conférencier à Annecy
A l'abbaye cistercienne de Tamié, deux religieux dont la famille est originaire de Scionzier, Pierre et Jean-François Cornuty,
connaissent bien les Pasquier du Reposoir.
Devenu cellérier (économe) de l'abbaye, le Père Pierre Cornuty recherche un fermier qui sache fabriquer un fromage de bonne
qualité et s'adresse tout naturellement aux Pasquier du Reposoir.
Ceux-ci font alors venir de Gruyères un de leurs parents Claude (1) de la branche des Pasquier de Dessous-Vif, frère de Georges et de
Marie Pasquier de Dessous-Vif. En mars 1677, il s'installe avec sa famille à la ferme de la Cassine, tout près de l'abbaye de Tamié.
A la ferme de la Cassine (de l'italien cassina qui signifie ferme) les Pasquier ne se contentent pas de fabriquer du fromage
pour les moines : ils ouvrent une auberge bien vite florissante, où font étape les voituriers qui empruntent le col de Tamié.
En novembre 1677, l'abbé de Tamié, Dom Jean-Antoine de la Forest de Somont, introduit dans son monastère la réforme trappiste, avec
le concours du Père Jean-François Cornuty, frère cadet du Père Pierre Cornuty.
Nommé sous-cellérier et père maître des novices, le Père Jean-François Cornuty prend en affection les enfants de la famille
Pasquier et entreprend, à partir de 1679, de leur donner lui-même une solide formation intellectuelle.
En 1689, deux d'entre eux, Jacques (2) et Jean-Joseph (3), âgés respectivement de 25 et de 19 ans, nés l'un et l'autre à Gruyères,
demandent à entrer au monastère. Dom Jean-Antoine de la Forest de Somont leur donne l'habit au mois de mars.
L'année suivante, ils prononcent leurs voeux et reçoivent les ordres mineurs dans l'église de Tamié.
Jacques (2) sera ordonné prêtre à la cathédrale de Moûtiers, en mai 1692, par l'archevêque de Tarentaise François Amédée, Milliet de
Challes.
Jean-Joseph (3), trop jeune, devra attendre quelques années encore : il recevra le sous-diaconat à la cathédrale d'Annecy,
en 1694, des mains du prince-évêque de Genève Jean d'Arenthon d'Alex, puis le diaconat, en 1695, et la prêtrise, en 1696, à la
cathédrale de Grenoble, des mains du cardinal Le Camus.
En raison de sa belle voix et ce ses compétences musicales, le Père Jean-Joseph Pasquier (3) remplit au monastère la charge de chantre.
Quant au Père Jacques Pasquier (2), en 1.708 il est nommé sous-prieur par le nouvel abbé de Tamié, Dom Arsène de Jougla.
Jean-Joseph Pasquier (3) meurt en 1719, à l'âge de 49 ans.
Son frère Jacques (2) sera nommé abbé de Tamié par Victor-Amédée II en 1727, à la mort de Dom Arsène de Jougla.
Dom Jacques Pasquier (2) entreprend, en 1733, de faire éditer à Annecy le Traité de l'Institution d'un Prince, de Jacques-Joseph
Duguet, célèbre ouvrage mis à l'Index par le Saint Office et qui, en définitive, paraîtra en Hollande et à Londres.
Mais l'abbatiat de Dom Jacques Pasquier sera bref, puisqu'il meurt en 1734, à l'âge de 70 ans.
En 1725, un autre membre de la famille était entré à Tamié. Il s'agit de Claude Pasquier (4), né à la ferme de la Cassine en 1707,
neveu des Pères Jean-Joseph et Jacques Pasquier. En 1726, il prononcera ses voeux entre les mains de Dom Arsène de Jougla et sera
ordonné prêtre en 1736, à la cathédrale de Moûtiers, par Mgr Milliet d'Arvillars.
En 1727, semble-t-il, le fermier de la Cassine, Théodule Pasquier (5) entre lui aussi à Tamié, mais simplement comme oblat.
Déjà âgé, il est le père du jeune Claude Pasquier et le frère de Jacques et de Jean-Joseph Pasquier, tous moines à Tamié.
A la même époque, un autre membre de la famille, Philibert Pasquier, entre également à Tamié en tant qu'oblat. Mais nous n'avons pas
pu établir son degré de parenté avec les précédents.
Etonnante famille Pasquier qui, pendant plusieurs siècles, a vécu en symbiose avec l'institution monastique, que ce soit à la
Valsainte ou à la Part-Dieu dans le pays de Gruyères, au Reposoir ou à Vallon, ou encore à Tamié où pas moins de cinq Pasquier ont
embrassé la vie religieuse.
C'est encore les Pasquier qui, le 2 janvier 1797, constitueront cette association de 17 chefs de famille du Reposoir pour racheter
une partie de la Chartreuse à celui qui en avait fait l'acquisition comme Bien National en 1795, préparant ainsi le rétablissement
du culte et le retour des Chartreux.
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