Parfois,
nous avons la chance de rencontrer des personnalités rares dont
la sensibilité exacerbée épanouit leurs facultés
de perception et qui sont dotées en
plus d'une immense envie de partager avec le commun des mortels ces
découvertes qui les emplissent de bonheur et leur confèrent
une assurance paisible.
Loin de l'agitation citadine, nous célébrons la convention
de Ramsar, signée en 1971 en Iran par de nombreux pays, et plus
tard, en 1986, par la France, qui reconnaît ainsi politiquement,
sinon dans les faits, l'importance primordiale des zones humides et
la nécessité de les protéger, de cesser de les
détruire, et même de
les restaurer. De quoi s'agit-il donc ? On nous a toujours appris depuis
notre tendre enfance que les marais étaient sources de miasmes
et d'exhalaisons fétides, générateurs de maladies,
lieux de reproduction et de propagation des moustiques et autres insectes
déplaisants, bourbiers dangereux
où les pieds s'enfonçaient dans une succion inquiétante,
où le bétail
se noyait et les gens se perdaient... Régions hantées
où dansaient
des feux follets et régnaient des génies malfaisants,
inspiration séculaire
de contes effrayants.
A
chaque accroissement de population,
par prolifération ou immigration, il devenait nécessaire de trouver
de nouveaux lieux à cultiver pour
survivre, il n'y avait alors que deux solutions, les meilleures
terres arables étant déjà occupées, soit
on défrichait la forêt,
soit on drainait et comblait les étendues pauvres de landes
et de marécages.
C'était une pratique largement soutenue et accompagnée
depuis le Moyen-Age en France par le clergé et la noblesse,
les politiques du XIXe siècle
n'ont fait en cela que perpétuer une tradition au moins millénaire.
Une région sauvage, sagement occupée sans la détériorer
par les paysans landais
regroupés en airials, était considérée
par les intellectuels des
"hautes sphères" sous Napoléon III comme un
lieu désertique habité
d'êtres dégénérés qu'il fallait conquérir
et civiliser. Voici, à l'heure
actuelle, la description qu'en fait la communauté
de communes de Mimizan.
"A
l'origine, la région des landes de Gascogne était un vaste
marécage insalubre. La forêt et l'élevage constituaient
l'essentiel des activités des populations, et seuls étaient
cultivés et boisés les bords de ruisseaux. Les villages perdus
se serraient au milieu d'immenses surfaces stériles. A la
fin du 18ème siècle, il y avait à peine 250 000 hectares
boisés. Mais sous la menace permanente du sable, puis de l'eau,
des hommes cherchèrent à arrêter les dunes poussées
par le vent et l'océan."
J'ignore
si les importants dommages causés par les deux dernières
tempêtes
de 1999 et du 30 janvier 2009 à la forêt artificielle
de pins dits "des Landes" vont amener les populations, et
surtout les décideurs, à changer
d'attitude par rapport à la domestication de la nature et ses
limites. En effet, il devient indispensable de changer radicalement
notre regard sur le monde du vivant qui a émergé sur
Terre. Nous découvrons à peine
les multiples interdépendances entre tous ces êtres,
la capacité de cette combinaison de végétaux,
d'animaux et d'hybrides, unicellulaires ou pluricellulaires, à s'adapter à des
changements d'environnement et de climat, et leur interaction avec
les substrats dits "inertes"
tels que le sol, l'air et l'eau, aussi nécessaires à leur
existence que la distance de la Terre au Soleil et la présence
de la Lune ou de Jupiter.
Ce
n'est pas nier l'intérêt des sciences que d'en accepter
les limites. La nature est tellement complexe que nos cerveaux, même
unis et relayés par des ordinateurs, ne peuvent en appréhender
la totalité.
Jean-François
Terrasse, militant écologiste de la première heure,
propriétaire
depuis les années soixante d'une propriété d'une
dizaine d'hectares
à Arcangues, en a lui-même fait l'expérience, malgré toute
la conscience qu'il en avait déjà. Errota Handia, le
Grand Moulin, avait été construit
au XVIIe siècle (il figure sur une carte de Cassini),
par la mise en oeuvre de moyens très importants
(c'était l'époque de Colbert, sous Louis XIV). Ces terres
appartenaient au comte de Saint Pée, qui possédait toute
cette région et dont les descendants sont la famille Lagrolet,
qui réside
encore à
Arcangues. Un barrage de pierres de taille extraites
d'une carrière de la colline de Sainte Barbe à Arcangues,
liées avec de
la chaux venant d'Aïnhoa, avait été érigé en
travers de la vallée, une muraille très longue, très
haute, dans laquelle était
inséré un grand moulin dont subsistent des murs épais
et les chutes bruyantes qui s'exhalent par de larges ouvertures dans
l'édifice, et dont les trois meules servent de tables à l'auberge
Achtal sur la place du fronton près de l'église du
village. Dans les collines boisées avaient été creusés
des puits circulaires de quelques
mètres de profondeur qui servaient de fours à chaux.
Leurs parois de terre ont été cuites par la fournaise
et sont encore nettes et lisses, comme vitrifiées.
Le
moulin est resté en activité jusque dans les années
trente et un ancien paysan, qui participe à la visite, évoque
ses souvenirs.
"J'avais
dix ans alors, mon grand-père amenait à pied
le grain à moudre par le chemin de Saint Pée, qui existe
toujours, dans
de
grands sacs déposés sur l'échine des ânes.
Il déclarait qu'il n'y avait
pas
meilleure farine à des lieues à la ronde ! En haut
de la colline, il y avait une petite chapelle..." Les paysans
passaient à gué le
ruisseau qui s'écoulait par le déversoir taillé
à l'extrémité du barrage et dans les plaques
de
schiste
de la colline latérale avant de rejoindre le cours principal
qui prend sa source à Sainte
Barbe et se jette dans l'Uhabia dont l'embouchure est à Bidart
(c'est maintenant la
plage la plus polluée de la Côte basque). Il ne devait
pas faire bon traverser lors des crues qui emportaient les arbres
et laissaient
la roche
à nu. C'est sans doute la raison pour laquelle l'ancienne
maison du meunier, qui se trouvait à côté du
moulin, au pied de la digue, a été démolie et
reconstruite à quelques
mètres du barrage sur une
butte. Il reste un tableau qui en garde la mémoire. Malgré tout,
aux dernières
crues très violentes de mai 2007, le déversoir était
impuissant à réguler
le niveau
de l'étang
qui
dépassait
d'un mètre
le sommet du barrage sur toute sa longueur. L'eau s'écroulait
en cascade destructrice, creusant la terre au pied du barrage jusqu'à
ses fondations et immergeant
la maison de Jean-François
Terrasse dans un mètre cinquante de boue liquide.
Par chance, il était absent ce jour-là.
Le
moulin avait été abandonné après une énième
crue et les modernisations du XXe siècle
l'avait remisé aux
oubliettes après la seconde guerre mondiale. L'étang
s'était
envasé,
la végétation
l'avait envahi, le dernier propriétaire,
passionné par les arbres, avait planté des peupliers
carolins dans ce fond de vallée entouré de saules et
d'aulnes dans les marécages et de chênes sur les collines,
le barrage se défaisait
pierre à pierre...
Jean-François
Terrasse a déployé une énergie titanesque pour
le rendre à sa vocation première
et restaurer l'étang. Cependant, de crainte d'inonder le voisinage,
il a baissé le seuil du déversoir et la retenue d'eau
occupe une surface bien inférieure, elle est passée de
9 à 4
ha. Sans penser à mal,
il y a introduit des carpes qui, imaginait-il, réguleraient
la végétation
aquatique.
Mais,
sans prédateurs, elles se
sont tellement multipliées qu'elles ont tout dévoré et
qu'elles rendaient l'eau bourbeuse à force d'en remuer le fond
en quête de nourriture. Il dut vidanger l'étang et toutes
les supprimer, il y en avait des quantités !
Il a tiré la
leçon de cette expérience. L'étang s'est à
nouveau rempli par l'action conjuguée des pluies et du ruisseau,
et il a laissé faire la nature : sans intervention aucune,
il y a de nouveau des poissons, de la végétation, et
tout un écosystème en équilibre. On
y trouve des vairons, des gougeons, des loches, des gardons, quelques
anguilles, des lamproies, assez pour le héron, mais pas assez
pour le vorace cormoran ou la cigogne. Une fois l'an, il passe le
girobroyeur sur la digue où pousse
une mégaphorbiaie
très
riche en insectes, pour éviter
l'envahissement des aulnes et des saules, capables de pousser de
2-3 mètres en un an. L'idéal, regrette Jean-François
Terrasse, aurait
été de laisser pâturer des vaches rustiques,
comme les écossaises. Celles
du voisin s'échappaient parfois et venaient brouter autour
de l'étang.
Il était à chaque fois furieux, car il craignait qu'elles
ne se noient. Il éradique
la jussie, une plante invasive originaire d'Amérique du Sud à jolie
fleur jaune qui aurait tôt
fait d'asphyxier la pièce d'eau si on la laissait se développer,
il essaie de créer une roselière sur la berge en
pente douce peu immergée, qu'il protège
par des grillages contre un autre envahisseur
étranger, le
ragondin, dont il limite la prolifération. Il s'étonne
de la difficulté, en Aquitaine, à faire pousser des
roseaux dans l'eau, on ne les voit que sur les berges, alors qu'au
contraire ils prolifèrent
en Camargue sans difficulté malgré leurs racines immergées.
- Lors de ma visite dans les barthes de Villefranque, trois jours
après,
je découvrirai à quelques kilomètres à vol
d'oiseau d'Errota Handia une magnifique roselière, immergée, épargnée
des agriculteurs et autres
investisseurs
terriens
par la
présence
de
lignes à haute
tension qui la surplombent sur toute sa longueur -. Depuis la fenêtre
du grenier de sa maison qui pointe au-dessus du barrage, l'ornithologue
observe les oiseaux à la
lunette sans les déranger.
Presque depuis l'origine, il a fait inscrire
sa propriété en réserve de chasse, et après
avoir reçu quelques
années des plombs dans ses volets par les autochtones en colère,
une paix
relative s'est instaurée qui offre à toujours plus
d'oiseaux résidents
et migrateurs la possibilité de se reposer, se restaurer
et nicher. Le héron cendré s'installe dans les arbres,
la fauvette se cache dans la roselière. Il
a découvert que sa réserve contenait aussi une grande
richesse de papillons, libellules et amphibiens, grâce aux
mares qui se sont formées autour de l'étang, dans
le sous-bois et le jardin. Le vison d'Europe, espèce très
rare et protégée, a également
été
repéré une ou deux fois dans le bosquet marécageux,
du côté opposé à sa maison. Une biodiversité
se développe, dont on n'a pas fini de découvrir les
richesses, au fur et à mesure des inventaires faits par
des spécialistes extérieurs,
comme Pierre-Camille
Leblanc, de l'association Paon du Jour de Cambo,
qui a décelé un papillon de nuit que l'on n'imaginait
pas vivre au Pays
Basque. Malheureusement, la France ne forme plus que des gens très
spécialisés en université, et les naturalistes
régressent (contrairement
à ce qui se passe en Espagne). Il est donc très difficile
de trouver des personnes compétentes pour réaliser
ces inventaires, si ce n'est des passionnés autodidactes
- et bénévoles -.
Seulement,
ces dernières années, la situation alentour s'est dégradée.
D'abord, les pratiques agricoles ont changé. Du
pâturage extensif en prairies naturelles entourées de
bosquets d'arbres et de haies, on s'est tourné vers la
monoculture du maïs, intensifiée par force engrais et pesticides,
pratiquement une culture hors sol pour laquelle l'agriculteur ne voit
plus la
nécessité d'enfouir la paille ni d'alterner avec une
autre culture en hiver. Résultat,
étant donné le niveau de pluviosité en Pays basque,
les sols laissés à nu en hiver s'érodent
à une vitesse accélérée, et la pluie qui
ruisselle sur des sols tassés et durcis par le poids des lourdes
machines agricoles entraîne inéluctablement vers la mer
le limon chargé des produits
dont la majeure partie n'a pas été assimilée par
le maïs. En novembre 2008, il est tombé 270 mm de pluie,
en décembre,
350, et en janvier 2009, théoriquement un mois sec, 300 mm !
Parallèlement,
la concentration des exploitations associée à l'exode
rural a gonflé
les villes dont les banlieues s'étendent de plus en plus loin,
en un
"mitage" destructeur qui nécessite des kilomètres
de routes secondaires. Le corollaire est une pollution accrue des sols
avec les effluents
humains et l'accumulation de déchets divers et variés,
ainsi que la stérilisation et l'imperméabilisation d'une
surface toujours plus importante. En 1873, un scientifique avait fait
l'inventaire de
la faune du ruisseau d'Errota
Handia, dont
l'eau
bien
sûr était
totalement
potable, et il y avait trouvé des espèces qui ont maintenant
disparu d'Europe, notamment ces moules d'eau douce qui produisaient
une perle
noire très
appréciée à la Cour et ne peuvent vivre qu'en
eau parfaitement pure.
Contrairement à la Bretagne, l'Alsace ou la Région Rhône Alpes, l'Aquitaine n'a pris conscience que très tardivement de la nécessité de protéger l'environnement. Des militants ont commencé à agir seulement depuis 20-30 ans (depuis le début du XXe siècle ailleurs) et les professionnels ne s'activent que depuis une époque très récente. A Capbreton, rappelle un visiteur, beaucoup d'insectes ont disparu depuis 1960-1970 avec l'épandage massif d'insecticides sur les roselières pour éradiquer les moustiques et sur la forêt contre les chenilles processionnaires. Du coup, on n'entend plus le chant des cigales. De même s'est raréfié le lucane, si répandu auparavant. Je me souviens du nid récurrent dans le grand chêne devant la maison. De sa plaie béante suintait un liquide noirâtre. Nous apprenions, enfants, à saisir les grands mâles noirs luisants par le torse rigide, juste derrière les pinces hypertrophiées, et nous nous menacions mutuellement avec cette arme gigotante que nous laissions tomber de peur, nos doigts déstabilisés par les pattes crocheteuses. Parfois, la mort n'est pas immédiate. Les insectivores telles que les chauve-souris ou les hirondelles conservent les polluants fixés dans leurs graisses, qui les minent à la longue. En contrepartie, d'autres espèces se développent, corneilles, pies, hérons, aigrettes garzette, pour occuper les niches écologiques délaissées.
Tangi Le Moal explique le tournant pris dans la gestion
des sites dont il a la responsabilité au sein du CREN, et qui
correspond justement au thème choisi cette année pour
la Journée
des Zones Humides, "D'amont
en aval". En effet, si l'on veut faire oeuvre utile dans une réserve
- il en est de même pour les plages -, il est important de prendre
en compte son environnement, car une zone
humide, par définition, est le réceptacle
des terres alentours.
Il
a donc entrepris depuis deux ans une campagne d'information auprès
des voisins, des communes, des chasseurs, des agriculteurs et éleveurs,
par le biais d'un bulletin et de réunions. La semaine dernière,
une dizaine
ou une
quinzaine d'agriculteurs ont accepté de réfléchir
avec lui sur des mesures à envisager pour réduire la
pollution : ils en ont assez d'être
pris comme bouc émissaire et veulent changer leur image en même
temps qu'ils comprennent qu'on ne peut pas continuer dans cette même
logique productiviste quel qu'en soit le prix. Avant la prochaine
réunion de septembre, Tangi Le Moal essaiera de monter un dossier
pour que ces agriculteurs puissent être accompagnés dans
leur conversion et qu'ils reçoivent des subventions pour subsister
le temps d'un rééquilibrage
de leurs terres et de leurs cultures.
Echoué en bordure de digue, un oiseau blanc flotte, ventre en l'air : c'est une mouette tridactyle, ainsi nommée car sa patte palmée ne comporte que trois doigts. Comme beaucoup de ses congénères, elle a été repoussée vers l'intérieur des terres par la tempête qui faisait rage. Elle est morte d'épuisement et de faim. Elle a perdu toutes ses réserves de graisse et n'a plus que la peau sur les os. Hegalaldia, le centre de sauvegarde de la faune sauvage basé à Ustaritz, en a recueilli de très affaiblies sur la plage ces derniers jours, pour les aider à se reconstituer une santé. Ces mouettes, très nombreuses dans le Nord de la France et en Bretagne, bénéficient peut-être de la surpêche car elles se contentent de poissons de petite taille. De la même façon, le petit rorqual profite de la raréfaction du grand rorqual, dont la population est fragilisée par le pillage des bancs de grands poissons par la pêche industrielle.
Le
moulin de Chourroumillas (mille petits cours d'eau) figurait également
sur une carte de Cassini. L'étang qui l'actionnait
couvre environ deux hectares, alimenté par un canal de dérivation
qui le protège davantage des inondations qu'Errota Handia, en
prise directe sur le ruisseau. Un autre petit lac existe sur la propriété,
sur le trajet d'un autre ruisselet. L'activité de meunerie s'est
interrompue au début du XXe siècle. Une meule sert de
table dans la cour et une aube rouillée orne la pente qui mène
au barrage. Michel Guilhous, son propriétaire, visite Errota
Handia en voisin, accompagné de
Jean Michaud, tous deux anciens chasseurs reconvertis à l'écologie
et à la réfection du patrimoine
ancien des moulins. Afin de pérenniser son oeuvre de protection,
Michel Guilhous suit l'exemple de Jean-François Terrasse et
s'apprête à faire
inscrire Chourroumillas dans la liste des réserves naturelles
régionales.
Quant à Jean Michaud, il n'en est qu'au stade de l'observation.
Il possède un ancien moulin à marée désaffecté
et il a restauré une
digue équipée
d'une porte-à-flot pour éviter que les eaux saumâtres
ne pénètrent dans les barthes. Il réfléchit à l'aide
que pourrait lui apporter le Conservatoire Régional des Espaces
Naturels (CREN), et a déjà pris
contact avec Tangi Le Moal pour voir ce qu'il propose.
En
effet, il y a urgence. Notre région est affligée d'une frénésie immobilière,
non pas tant par la croissance de notre
population indigène, que par l'attraction qu'elle exerce sur des populations
extérieures qui, soit viennent y résider (pour y travailler, mais surtout
comme
lieu de retraite), soit pour y établir une résidence secondaire, que
je considère comme une lèpre et une véritable plaie : des quartiers
entiers sur toute la côte sont stérilisés par des maisons et des appartements
vides 90% du temps, qui enchérissent le prix de l'immobilier et empêchent
les locaux de résider près de leur lieu de travail. Les municipalités
ne se donnent aucun moyen de lutter et imaginent que le tourisme est
la panacée pour développer l'économie locale (il suffit d'écouter les
discours de M. Borotra, maire de Biarritz). Résultat, il n'est pas
rare de voir des espaces théoriquement protégés où s'érigent
des
bâtiments dotés d'un réglement d'exception à leur égard (sur la côte,
les zones inondables, Natura 2000...). Le danger le plus récent provient
de Bruxelles, où les décideurs européens ont résolu de relier les grandes
villes d'Europe par un TGV. Des études ont, soit-disant, démontré l'impossibilité
de simplement élargir les voies actuelles de chemin de fer. Résultat,
les technocrates tracent des traits sur la carte, détruisent des propriétés,
séparent des biotopes, sans se préoccuper des perturbations sociales
ni écologiques (tout ça pour gagner quelques minutes dans l'emploi
du temps des quelques personnes qui le prendront).
Pour l'instant,
on nous laisse dans un flou artistique pour la liaison Bordeaux-Irun,
c'est le moment des grandes manoeuvres, ceux qui sont formellement
contre, ceux qui jugent que l'emplacement de la future gare sera un
enjeu majeur de développement local, ceux qui bloquent tout projet
d'aménagement de leur commune en attendant de savoir si leur territoire
sera amputé ou coupé en deux par le futur (éventuel) tracé. Le classement
en réserve naturelle régionale devrait (théoriquement) protéger ces
espaces de tout empiètement arbitraire.
Qu'on
ne me fasse pas dire ce que je n'ai pas dit : le train, c'est bien.
Au contraire, je trouve que le frêt ne devrait être transporté que
par rail ou bateau sur les longues distances. Lorsque nous visitions
les barthes de Villefranque, c'est à peine si nous réussissions à nous
entendre, à plusieurs
centaines de mètres de la chaussée, en pleine nature,
tant la circulation sur l'autoroute était
dense, et, à chaque fois que nous
y jetions un
oeil, énervés, c'était pour voir un défilement
ininterrompu de camions.
Ce
problème ne sera pas résolu par le TGV, et je n'ai pas
l'impression qu'il fasse souci à grand monde. Là aussi,
il y a une autre façon d'examiner
le problème. Imaginons (ce n'est pas si théorique) un
prix du carburant devenu tellement excessif qu'il faille reconsidérer
tous les échanges européens et mondiaux. Il faudrait
alors déterminer
ceux qui nous sont vraiment indispensables, et ceux dont on pourrait
faire l'économie. Dans le domaine alimentaire par exemple, chaque région
devrait devenir plus autonome (pour limiter les acheminements devenus
trop
onéreux),
chaque habitant ne devrait plus manger que des aliments locaux de saison
ou
des conserves
effectuées
localement.
Si
le gaz
naturel
se raréfie, que l'électricité thermique et nucléaire
deviennent trop onéreuses, là aussi, il faudra reconsidérer
notre mode de vie. Les problèmes qui se posent périodiquement à l'Ukraine
devraient nous faire réfléchir.
Ce n'est pas une reconversion qui peut s'effectuer en un instant. Et
je ne parle pas du réchauffement planétaire, bien trop
abstrait pour influer sur nos habitudes, tant que les tempêtes
ne deviennent pas d'une fréquence intolérable et que
la mer ne démolit pas trop notre
trait de côte.
SOMMAIRE | 1/2 |
Journées mondiales des zones humides Cathy, Jean-François Terrasse, le CREN (Tangi Le Moal), le CPIE Littoral Basque (Pascal Clerc), le CPIE Pays basque (Dimitri Marguerat), l'association Laminak (Elodie Larralde et Stéphane Connole) |
Errota Handia,
Chourroumillas et les barthes de Villefranque |
30 et 31 janvier et 2 février 2009 |