Après
un temps de cohabitation avec l'homme de Néandertal (-250 000,
-28 000), l'homo sapiens sapiens (l'homme de Cro-Magnon),
apparu en Afrique il y a 200 000 ans et parvenu depuis 40 000 ans en
Europe
à
raison
de 30 kilomètres
de progression par génération, demeure seul en
place et subit des changements
climatiques majeurs.
La dernière
glaciation du Quaternaire prend
fin (12 000 B.P.) avec un cortège
de manifestations, le niveau
de la mer remonte (il avait baissé d'environ 120 mètres
et la côte
s'était éloignée jusqu'à
plusieurs kilomètres de l'emplacement actuel vers le large),
la circulation océanique se modifie, jusqu'à la réinstauration
du Gulf
Stream qui contribue
à améliorer
les
températures
en Europe. Les grands animaux acclimatés
au froid remontent vers le Nord qui se libère progressivement
de sa chape de glace, suivis par une partie des humains.
Jacques
Blot, médecin
ORL de Saint Jean de Luz à la retraite qui a parcouru des milliers
de kilomètres
dans les Pyrénées basques et y a découvert, répertorié
et analysé cromlechs, dolmens et menhirs durant son temps
libre, est invité par Dimitri Marguerat à animer une
visite guidée
pour une quinzaine de personnes dans le cadre des activités
proposées
par le Centre Permanent d'Initiatives à l'Environnement (CPIE)
Pays basque basé à St Etienne de Baïgorry. Suite à cette
présentation de
la fin de la dernière glaciation, il rapporte qu'un ouvrier
bascophone travaillant dans une papèterie à Mimizan est parti avec
son patron en Scandinavie (Norvège ?) où il a découvert avec surprise
en parcourant les journaux que certains mots ne lui étaient pas étrangers.
Renseignements pris, le sens qu'il leur attribuait était le même en
basque et en norvégien. Jacques Blot, apprenant cela, en déduit
que cela pourrait signifier que le protobasque était une
langue parlée
depuis des milliers d'années, au néolithique, et même
au paléolithique, au moins sur une aire allant de l'Ebre à la
Garonne, et qu'une partie de cette population migrant vers le Nord
à la fonte des glaciers aurait conservée. Wikipedia
: " La
seule certitude, que personne ne conteste, est que le basque est une
langue
agglutinante : Lilias
Homburger a écrit
qu'à ce titre, elle est plus proche de l’égyptien
ancien, des langues dravidiennes (parlées aujourd’hui
en Inde du Sud), et des langues africaines du groupe sénégalo-guinéen
(wolof, serer, peul), que des langues indo-européennes. Ce
qui laisse penser qu’au néolithique, avant l'extension
de l'indo-européen, les langues agglutinantes recouvraient probablement
l’Afrique, l'Europe méridionale et l’Asie méridionale
[2]. Toutefois, la longue cohabitation avec les langues indo-européennes
voisines a donné au basque actuel les deux tiers de son vocabulaire
usuel." - Photo ci-contre : ancolie, en
pleine floraison sur le bord du chemin. -
Jacques Blot fait une digression pour évoquer les migrations vers le continent américain qui auraient pu se faire à l'époque où la glace figeait encore la mer, permettant à des hommes de Cro-Magnon d'investir ces terres par cabotage dans des sortes d'oumiak (grande embarcation en peau de phoque). Il y aurait des similitudes entre la culture Clovis d'Amérique du Nord et la culture des Solutréens qui occupaient l'actuel sud de la France, l'Espagne et le Portugal, il y a environ 19 000 ans. Elles seraient confortées par des ressemblances entre les langues pré-indoeuropéennes que sont le basque et l'algonquin (Joseph Greenberg)... - Carte Wikipedia ci-dessous : En hiver, au dernier maximum glaciaire, la banquise s'étendait jusqu'à la pointe de la Galice en Espagne (en haut et au centre). -
En un raccourci saisissant, Jacques Blot déclare qu'après l'époque du renne, pendant 6000 ans, il pleut (de -10 000 à -4 000, au mésolithique). L'Europe se couvre de forêts de plus en plus diversifiées. Les humains qui étaient majoritairement chasseurs en sont réduits à consommer en quantités des escargots dont on retrouve les coquilles en couches épaisses dans les grottes des alentours pyrénéens (à Urdax par exemple). Pendant cette époque calamiteuse, les mentalités changent. Les hommes inventent les flèches, les pièges. Des vestiges de la dernière glaciation subsistent au Nord du Spitzberg (île de Norvège à 500 Km à l'Est du Groënland) sous la forme d'un glacier d'une quarantaine de mètres de haut. - Météoromandie : 6'000 BP (4000 av.JC): Bel optimum climatique. Début du « millénaire ensoleillé ». Climat 2 à 3° plus chaud qu’actuel. Le niveau de la mer est 3 à 5 m plus haut que l’actuel. Le chêne vert monte vers le Nord jusqu’en Normandie, les glaciers sont très réduits. Grandes civilisations néolithiques du Croissant fertile. En revanche le Sahara devient de plus en plus aride. Les populations se sont sédentarisées et cultivent les terres, c’est l’optimum du Néolithique au Proche Orient. -
Avec
le réchauffement
du climat, celui-ci devient plus sec. Le Néolithique, caractérisé par
les prémices
de l'élevage
et de l'agriculture, débute en Europe, entraînant
une vie plus sédentaire,
des habitats plus solides en pierres sèches, la pratique de la poterie. La
bien meilleure efficacité d'une
hache en
pierre polie, qui coupe trois fois plus vite, devient manifeste.
Sa dénomination en basque
contient la racine aitz (pierre) qui fait suggérer que ce mot remonte
à une époque antérieure à l'usage des métaux
(Aizkolariak - les bûcherons). Le
défrichement des forêts (à
partir de 4000 B.P.) se généralise par le feu, la hache, la
dent (du bétail
d'élevage). Déjà à cette
époque commence la coutume du pâturage
en estives où se rejoignent dans les Pyrénées les bergers
du sud de la Garonne et ceux du Nord de l'Ebre. Le four en
terre réfractaire,
grand consommateur de bois, est inventé pour cuire le pain. Aux époques
ultérieures, il permettra de fondre les métaux
(le cuivre, -2500, puis le bronze, -1800, alliage de cuivre et d'étain,
puis le fer, -700) - mine de Banca -. L'aspect
des montagnes ne doit pas être
bien différent de celui
d'aujourd'hui.
Le
respect des morts et la ritualisation de leur enterrement se poursuit
(présents déjà chez l'homme de Néandertal,
ainsi que chez l'homme de Cromagnon du paléolithique), mais
avec une innovation, la constitution d'un tombeau à inhumation en
forme de dolmen,
constitué des
mots bretons "dol" (table)
et "men" (pierre). Ces monuments apparaissent
à peu près simultanément sur toute la côte
atlantique (au 5ème millénaire avant J.-C.) (Portugal, Espagne, Bretagne,
Grande
Bretagne),
et le rituel
se propage
assez
rapidement.
En effet, il y avait beaucoup d'échanges à longue distance
dès ces époques
reculées, pour se fournir les matières premières
comme le silex, et dans le cadre des grandes migrations saisonnières
liées à la transhumance.
Bien plus tard s'y ajoutera le commerce des métaux. Ces déplacements
multiples favorisent les échanges culturels
de toutes sortes et en particulier linguistiques, jusques et y compris
les rites funéraires.
C'est la première
fois qu'une innovation ne provient pas du Moyen Orient : les dolmens européens
ont été construits
entre la fin du Ve millénaire av. J.-C. et la fin du IIIe millénaire
av. J.-C., ceux d'Extrême-Orient au Ier millénaire av.
J.-C. Les plus anciens des Pyrénées remontent à -3500.
Le terme basque "trikuharria" qui les désigne remonte peut-être
à l'époque de leur introduction dans cette population qui a pu se faire
par l'intermédiaire des Autrigons, dont la localisation est incertaine,
mais de toute façon vers la bordure atlantique dans le Nord-Ouest
de l'Espagne, et la traduction en serait la "pierre des Autrigons.
Jacques
Blot nous emmène voir un premier dolmen
(d'Artxuita) sur un flanc du Jara,
non loin de Saint Jean Pied de Port et d'Irouléguy. Situé dans
une zone herbeuse parsemée de grosses pierres, il est constitué d'une
boîte
de pierre dont la dalle de chevet, au fond, bloquait la pierre
posée
sur le dessus. Le poids de la dalle supérieure ne pouvait
qu'appuyer sur les montants latéraux qu'elle maintenait en
place. Choisies dans l'environnement
tout proche, les
pierres les plus lourdes ont pu être déplacées
sur des rondins de bois, haussées par le tumulus de pierres
recouvertes de caillasses formant un plan incliné,
puis mises en place à l'aide de leviers. Dans les régions
de plaine où étaient érigés des monuments beaucoup plus massifs et
imposants, il ne fallait pas plus que quelques dizaines de personnes,
d'après
les expériences
qui ont été faites.
Les dalles ont été
préalablement choisies et taillées au besoin. Si
la dalle supérieure est si souvent brisée,
c'est qu'elle est davantage exposée que les autres aux pluies
et à l'humidité qui
s'infiltre et gèle en hiver, provoquant des fentes qui la
fragilisent jusqu'à la rompre en deux ou plusieurs parties.
La
majorité des
dolmens ont leur entrée orientée vers l'Est, le soleil
levant. Comme tout élément de culture préhistorique,
il ne demeure que les objets les plus pérennes, le reste a disparu,
et les pensées et
motivations profondes qui les ont inspirés ne peuvent qu'être
suggérées
sous la forme d'hypothèses. En matière de dolmen, du
moment qu'il inhume ses défunts, on suppose donc que l'homme
de l'âge du bronze
a la notion de la résurrection
ou d'une forme de survie après la mort, se fondant peut-être
sur l'analogie avec l'agriculture, où il observe que
les jeunes pousses jaillissent des graines enterrées.
Il pense peut-être de même du soleil
qui
semble renaître chaque matin au Levant. D'autre part, la difficulté
de construction de ces monuments massifs suppose l'existence d'une
hiérarchie au sein des tribus capable de coordonner le travail.
Par ailleurs, un dolmen, c'est un lieu d'inhumation multiple, qui
a été utilisé environ deux millénaires d'affilée.
Pour y enterrer un nouveau mort, on creusait au besoin le tumulus
pour l'insérer
dans l'espace ménagé entre la dalle antérieure
moins haute que les autres et la supérieure.
C'est
un monument qui était
conçu pour
durer, pour être vu. Un péristalithe (cercle de pierres
autour du dolmen) symbolisait le lieu du mort, effectuait une contention
mécanique
qui l'enfermait et
protègeait les vivants du mort. Les dolmens sont érigés
sur une aire plus limitée du Pays basque que
les cromlechs qui sont souvent groupés.
Jacques Blot nous fait remarquer la forme triangulaire de la dalle
de chevet
du deuxième dolmen (d'Arrondo
ou Arrodondo), façonnée à la masse. Il est situé un
peu plus haut dans la montagne, dans un petit bois. En effet, l'emplacement
des dolmens des Pyrénées obéit à une
logique : en général,
ils sont érigés
sur un terrain à peu près plat, rarement dans un bas-fond,
et ici,
à flanc de montagne, entre 320 m et 860 m. Dans la langue
basque, des mots rappellent ces
lointains
usages funéraires. Des
toponymes paraissent
liés au contenu archéologique des sites concernés, "Ilharreko
lepoa" (le
col des pierres des morts), "Ilharreko
ordoki" (la petite plaine des pierres des morts), alors que
les monuments auxquels ils se réfèrent sont difficiles à discerner,
sont tombés en désuétude et ont été totalement
oubliés de la population.
En
Espagne, certains très grands dolmens contenaient des offrandes, haches
de pierre polie, perles, colliers, et des ossements.
Les squelettes ont souvent une affinité anatomique, ce qui
laisse
à penser qu'ils appartiennent à une même tribu, ou à une
même famille. Un dolmen peut marquer aussi
l'affirmation d'un territoire, c'est une borne de
propriété, il manifeste la prise de possession d'un
terrain. En
montagne, ils sont de taille moyenne, mais ils peuvent atteindre
des tailles bien supérieures
en plaine, où il y avait d'une part davantage de monde pour
les ériger
et d'autre part plus de morts à enterrer. Par exemple,
dans la commune de Charnizay (Indre-et-Loire) se trouve un dolmen
géant de 50 mètres de longueur construit à la
même époque que les pyramides,
les « palets
de Gargantua ».
Par contre, la Rhune (de larra ona, le bon pâturage) est truffée
de tout petits dolmens (1mx0,50m) enfouis dans les ajoncs et les touyas.
- Photo ci-contre : silène enflé, à côté des
ancolies.
-
Chemin
faisant, Jacques Blot explique la signification la plus récente
des baratz,
jardins, dénomination basque des cromlechs appelés également
harrespil. Ce terme de baratz a été attribué à la
coutume d'enterrer près de la maison les
enfants
morts-nés,
que
l'on
enfouissait
dans un site repéré par un cercle de pierres.
Ainsi a perduré
une coutume très ancienne, remontant à l'époque
d'une deuxième innovation,
après celle du dolmen, qui est celle de l'incinération
des morts au début de l'âge du bronze, doublée
de la création
d'une nouvelle architecture, le cromlech ou cercle
de pierres. Ceux-ci
ont attiré bien des convoitises au cours
des siècles postérieurs, et bien souvent leur ordonnancement
a été détruit
par des chercheurs de "trésors" dont la mentalité était
fort éloignée des constructeurs
de ces monuments funéraires. En effet, Jacques Blot fait le
lien entre les emplacements des cromlechs, les axes de transhumance
et "les
camis saliès", voies du sel, indispensable aux
hommes comme aux troupeaux. La seule richesse qu'avaient possédée
ces défunts, c'était du bétail.
Nous
avons quitté le Jara pour nous rendre sur le plateau d'Ilarrita,
situé sur
un flanc du mont Occabé,
sur la commune de Lecumberry près d'Iraty, qui comporte 32 cromlechs
groupés par catégorie : tumulus simple, de terre ou de
pierres, tumulus-cromlechs
,
cromlechs. Cependant,
il peut y avoir 800 ans d'écart entre
les dates de construction de deux cercles voisins.
Ici, le plus ancien remonte à 2310 avant notre ère, et
le plus récent,
à 767 avant notre ère. Ils ont un diamètre de
5 à 6
m, le plus grand va jusqu'à
10 m. Il semble qu'une hiérarchie préside à l'élaboration
de ces monuments qui
se traduit
par son emplacement, son architecture. Les plus beaux sont établis
en des lieux qui offrent la plus belle vue. De cet endroit, malgré
le temps bouché, nuage dessus, nuage dessous, nous apercevons
la cime enneigée du Pic d'Orhy. Des langues de neige subsistent à proximité
dans les versants nord ombragés. On suppose que les dispositions
de ces monuments traduisent une hiérarchie
sociale des individus dans une société différenciée
(à l'âge du bronze ou du fer). Jacques Blot
évoque à ce propos les termes "abere" (bétail
en basque) et "aberats" (le
riche, celui qui possède des troupeaux) et rappelle l'importance
du statut du forgeron, spécialisé dans le travail des
métaux, capable
d'évaluer à sa couleur, sans thermomètre, le stade
de fusion du métal. Il rapporte que cette hiérarchisation
peut se refléter
aussi dans la structure du village en plaine qui sépare les
fonctions de ses habitants.
Par contre, en montagne, pendant l'estive,
chaque habitat constitué d'une tente ou d'argile sur claies, est
situé
sur un
tertre
d'environ 2 m de haut, à l'abri des vents, près d'un
pâturage et d'un
point d'eau. Le
terrain est choisi en pente légère pour favoriser l'écoulement
des eaux pluviales et avoir les pieds au sec. Jacques Blot signale par
exemple à une quarantaine
de mètres au nord-est du tumulus
Belchou 2, et à 10 m du nord-est de la bordure de la
cuvette, une série de
12 tertres d’habitat, allongés selon un axe nord-ouest sud-est,
avec parfois à leur sommet des pierres disposées en rectangle
ou en ovale.
Il
nous parle, sans nous en montrer, du menhir, expression même
de la vie pastorale, qui peut être
dressé ou
couché,
sert de bornage aux pâturages dont la répartition fait
l'objet d'accords qui sont renouvelés régulièrement
(comme encore de nos jours entre les communes de Sare et de Vera
de Bidasoa). A La Pierre St Martin,
la
borne
262 a remplacé un menhir brisé par des bergers
lors d'une contestation. A Arette, un contentieux avec Roncal a provoqué le
massacre réciproque
des populations des deux villages, femmes, enfants, vieillards, dont
le souvenir reste consigné dans les archives et se traduit
par des coutumes d'affirmation de non agression entre les deux vallées
qui perdurent encore aujourd'hui.
Au col de Lizuniaga, la Table éponyme
est
coincée
entre la Rhune et l'Ibanteli, emplacement étonnant,
quand on sait que les troupeaux marchent plus volontiers en hauteur.
En réalité, un menhir se trouve à l'aplomb de cette
table, près d'une
piste le long de laquelle se trouve tout un chapelet de cromlechs
et dolmens. Le menhir d'Argibele aux Aldudes et celui près
de l'Artzamendi n'ont jamais été dressés, on
a pu retrouver de part et d'autre de leurs flancs les débris
de taille de la pierre.
Ces
nécropoles d'incinération sont
demeurées
sacrées pendant des siècles, et l'usage de l'incinération
en cromlechs a perduré pendant
1500 ans et plus en période historique, quasiment jusqu'à la
christianisation complète
de la population, parfois jusqu'à la fin du Moyen-Age (jusqu'à François
1er). L'incinération
se faisait à quelques mètres (dans un lieu appelé ustrinum
chez les Romains), souvent avec du bois de chêne à feuilles
caduques spécialement
apporté
à cet
effet
depuis une altitude plus basse, en aval de la hêtraie. Dans
les Pyrénées, les personnes incinérées
étaient, semble-t-il, en général des hommes adultes (femmes
et enfants demeuraient dans les vallées). Les pierres externes
du cromlech étaient
calées
par de petits cailloux à la
base. Le centre
était souvent creusé pour y étaler une
couche d'argile trouvée à proximité. Sur cette
sole était répandue
une couche de charbon de bois parfois mêlé à des
fragments d'ossements incinérés.
Un dôme pierreux recouvrait les cendres, sur lequel était
remise la terre fine qui avait été initialement ôtée.
Enfin, des pierres pouvaient
être "semées" en surface en une sorte d'offrande
cachée désormais par
les herbes (qui pouvaient être remplacées par un semis
de charbon de bois). Jacques Blot insiste sur le fait que ces monuments
sont des
cénotaphes, érigés
"en
mémoire"
d'une
personne. Bien entendu, cela suppose que les constructeurs connaissaient
la géométrie
(cercle tracé à l'aide d'une corde fixée à un
piquet). Au col
de Méhatze,
aux Aldudes, les dalles de grès rose sont plantées sur
chant. Au centre se trouve un coffre entouré de dalles posées à plat,
qui contient du charbon de bois, le tout surmonté d'une couverture
en plusieurs couches.
Parfois
s'y ajoutent un ou deux galets de poudingue en forme d'oeuf ou très
ronds, posés sur les pierres plates. Jacques Blot n'en comprend
la signification que lorsqu'il visite l'île de Pâques en
compagnie d'une spécialiste. Il y découvre alors, outre
les Moaï bien connus, un oeuf
de pierre de un mètre de hauteur. Il apprend qu'il s'agit d'un
oeuf traditionnel, symbolique, qui contient tout le futur, exprime
l'éternité,
l'au-delà. Ainsi, le cromlech s'oppose en bien des points au
dolmen. C'est un monument modeste, discret. Le dolmen est une tombe,
par contre,
c'est à peine si une partie des restes du mort incinéré à côté du
cromlech est placée à l'intérieur
du cercle de pierres. Les ossements paraissent même
se trouver accidentellement parmi les morceaux de charbon de bois.
- Photo : un longicorne. -
Dans
un cromlech, tout est symbole. La boîte parfois disposée
au centre est symbolique, les dépôts le sont, selon la
formule et l'idée que "la partie vaut le tout". Contrairement
aux dolmens au sein desquels pouvaient être inhumées
successivement de nombreuses personnes, un cromlech n'est jamais
construit que pour une personne. On en compte environ 500 pour 3000
ans (230 cromlechs, 65 tumulus-cromlechs, 220 tumulus simples), ce
qui
permet de déduire
la conclusion évidente que tout le monde n'en a pas bénéficié.
Le lieu choisi se trouvait communément près d'une piste
pastorale, dans un endroit inhospitalier (en plein vent), cols, hauts
plateaux, à
1000 m d'altitude en moyenne. Pendant cette période, la
population s'est beaucoup accrue, raison pour laquelle ont été défrichées
les cimes pour en faire des pâturages d'altitude (aux époques
du bronze, du fer), lieux d'érection des cromlechs. En raison
du colluvionnement (érosion des pentes alentour et remblais
des parties inférieures), certains cromlechs se trouvent enfouis
et difficiles
à distinguer.
A
l'aide d'une paire d'électrodes entre
lesquelles on fait passer un courant, on examine la résistivité du
sol en interprétant
le graphe qui en résulte : les anomalies correspondent à des
obstacles (pierres) et donc à la présence possible d'un
cromlech. En vallée,
on a surtout trouvé des tumulus, et parfois des tumulus-cromlechs,
mais la plaine a été trop travaillée depuis cette époque
pour garder la trace de la plupart des édifices qui, s'ils
ont existé, ont disparu. - Photo
: amadouvier (champignon) -
Nota : Comment reconnaître une ancienne voie romaine ? Il s'agissait d'une voie créée ex nihilo (sinon c'était une voie traditionnelle aménagée par les Romains). Elle n'était jamais dallée (sauf la via Appia et dans les villes). Elle était de forme bombée, en terre battue, empierrée pour éviter la formation d'ornières, et flanquée de deux fossés de drainage latéraux.
VACHERIE |
Cathy, CPIE Pays basque, Dimitri Marguerat et Jacques Blot | Cromlechs |
Jeudi 21 mai 2009 |