Aux
Peñas d'Itsusi, poursuit Dimitri, la
population de vautours est restée stable, avec environ 300 couples,
grâce
au pastoralisme traditionnel qui est pratiqué. Par contre, elle
a baissé
de 30 à 40% à Aste Béon, car elle était là-bas
très dépendante de l'élevage
industriel aragonais. A partir de ces populations pyrénéennes,
des réintroductions
furent faites avec succès dans la vallée de la Jonte (près
de Millau au Sud du Massif central) où résident actuellement
240 couples de vautours fauves
reproducteurs. Assez curieusement, leur présence a provoqué le
retour spontané du vautour percnoptère.
Pareillement,
des vautours ont été réintroduits
dans la Drôme provençale, dans les Baronnies, près
de Remuzat, où se
reproduisent
120 couples, à Die (15 couples) et au Nord de Nice. Bien que le
pastoralisme ait disparu en Provence, ces oiseaux trouvent de la nourriture
grâce à la
présence d'ongulés sauvages. En matière de réintroduction,
c'est la France qui a fait office de leader, grâce notamment aux
frères
Terrasse qui ont été des précurseurs.
Maintenant, on s'attache à réintroduire le vautour moine
et le gypaète barbu.
La présence de ces oiseaux sauvages induit un tourisme spécifique
d'observation naturaliste.
Dimitri
souligne que l'équilibre naturel n'existe pas. C'est le pastoralisme
qui a permis à la population de vautours de se
développer.
Si les hommes n'avaient pas modifié le paysage par ses défrichements
pour accroître les prairies, celui-ci comporterait davantage
de forêts,
et donc
moins de vautours. Leur protection est synonyme du maintien d'une certaine
phase, car le vautour a besoin d'espaces ouverts. Un nouvel intérêt
s'est
éveillé à l'égard de cet oiseau que les chercheurs
du CNRS tentent de mieux connaître. Le logiciel ULM (Unified
Life Models) compare, par exemple, les deux stratégies de réintroduction
du vautour fauve dans les Cévennes, pour savoir s'il vaut mieux relâcher
des vautours adultes, ou bien des jeunes.
Un jeune chercheur étudie
le vautour fauve dans les Grands Causses. Il étudie leur comportement
grâce à des balises GPS
posés sur des oiseaux en
liberté et modélise des mouvements dans des modèles
prédictifs de dynamique des populations.
En complément, il étudie
l’énergétique et la dynamique du vol plané chez
les rapaces sur des oiseaux dressés. Le vol libre
est étudié en détail grâce au couplage de
balises GPS, accéléromètres et électro-cardiogrammes.
Ainsi, au début, tout a commencé au sein
d'un groupe d'amis (dont les frères Terrasse), et maintenant,
on pratique le suivi des vautours en Italie, en Suisse, en Autriche...
Ces Français
ont créé une dynamique qui se répand partout.
Malgré tous les problèmes
actuels
de pollutions, les animaux sauvages se portent beaucoup mieux à notre
époque, en particulier les mammifères petits et grands
ne se font plus systématiquement
détruire comme cela se faisait avant. Pour
les cigognes par exemple, c'est mieux aussi. Là où la situation
reste encore dramatique, c'est
pour toute
la faune visée par les pratiques de chimie intensive dans l'agriculture.
- Photo : Aiguille d'Espalza. -
Alors
que nous pique-niquons face à la falaise, une main prête à lâcher
la nourriture pour nous saisir des jumelles, Dimitri repère
le monticole bleu. Il s'agit d'un mâle de la taille d'un merle,
qui peut atteindre un poids de 60 g. Il reste un moment sur une arête,
s'envole, revient et circule sur un étroit méplat. Il
se nourrit principalement d'insectes et parfois de lézards.
Pour la parade, il effectue des mouvements d'ailes sur un rocher. La
femelle (que nous ne verrons pas) a son plumage dans les bruns, une
tenue de
camouflage
qui
indique
qu'elle est seule à couver les oeufs. La reproduction a lieu
d'avril
à juin. Dans le nid qui occupe une cavité de falaise
sont pondus 4
à 6 oeufs incubés en 15 jours. Les deux parents nourrissent
les oisillons pendant trois semaines. Nous nous trouvons ici dans sa
limite de répartition,
puisqu'il demeure habituellement autour du bassin méditerranéen.
Il est sédentaire, alors que son cousin le monticole de roche,
au ventre rouge-orange, est migrateur, avec un habitat moins rupestre.
Nous entendons
le pépiement (piou-piou) d'un petit vautour. Un rouge queue
noir volète
derrière nous. Devant la paroi rocheuse vont et viennent des
hirondelles de rocher. Peu après, c'est un tichodrome échelette
que certains réussissent
à voir sur un petit rebord de la falaise (pas moi, il est trop
petit, trop brun et trop mobile !). J'espère avoir plus de chance
la prochaine fois. Des chèvres broutent sur une pente un tout
petit peu moins raide et surtout plus herbeuse à quelques mètres
des vautours.
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Dimitri Marguerat, guide naturaliste, avec un groupe | Peñas de Itsusi |
1er avril 2011 |