Faut-il le dire ? J'ai été déçue par notre sortie à la Plaine d'Ansot. Les organisateurs n'y sont pour rien, bien sûr. C'est le site qui m'a déplu. Nous étions allés l'an dernier à une expédition nocturne organisée sur un thème similaire par le CPIE Littoral basque à partir de la ferme Nekatoenea qui est située à Hendaye, en contrebas du château d'Abbadia. Bien que la chouette hulotte soit restée muette, j'avais été séduite par l'ambiance instaurée par l'animateur. Nous nous étions mis en conditions par un assez long trajet dans l'obscurité du parking jusqu'à la ferme. Après la projection d'un très beau documentaire qui nous avait permis d'en savoir plus sur les rapaces nocturnes et d'attendre qu'il fasse vraiment nuit noire, nous nous étions retrouvés dehors avec l'interdiction d'allumer une lampe de poche. Il nous avait assurés que notre vue s'accommoderait et que nos pieds nous conduiraient sans nous faire trébucher. Il avait aussi demandé le silence, pour que chacun s'immerge dans les sons nocturnes parfois voilés par un souffle d'air marin, et que nous soyons tout ouïes à l'écoute des animaux. D'abord en lisière de prairie, puis très vite sur un chemin forestier bien sombre et encombré de racines, nous avons été ensorcelés par cette atmosphère étrange, inhabituelle, inquiétante même pour quelques uns.

A la Plaine d'Ansot, rien de tout cela. La voie large, carrossable, en bordure de berge de la Nive, était éclairée par les lampadaires de la rive opposée où passait parfois une voiture. Un chien aboyait de temps à autre. Un train gronda longuement, un avion aussi passa au-dessus de nous, tandis que le bruit de fond envahissant et déplaisant des camions sur l'autoroute dominait l'espace sonore parfois déchiré par une sirène d'ambulance vers l'hôpital voisin. Nous nous sommes un peu éloignés des nuisances lumineuses, et notre guide de l'association OISO a mis en marche son gros magnétophone sur lequel étaient enregistrés des hululements de chouettes hulotte. Nous avons guetté, les yeux tournés vers le ciel, les grands platanes et le faîte du toit d'un bâtiment voisin où elle était censée venir se percher pour chercher et chasser l'intrus. Pendant un bon moment, rien ne se passa. Le deuxième groupe arriva, bruyant, bavard, nous gênant dans notre écoute. Après une deuxième tentative, une première chouette hulula au fond sur la droite, depuis un bosquet, une deuxième réagit plus faiblement sur notre gauche, à l'autre extrémité du bois, et une femelle cria en continu en s'envolant de la plaine devant nous où elle cherchait pitance pour regagner son nid. Elle mit longtemps à se calmer, puis le silence revint. J'avais toujours cru que cette sorte de cri provenait d'une chouette d'une autre espèce : en réalité, mâle et femelle hulotte ne parlent pas le même langage, au sens propre ! Notre guide refit fonctionner son appareil un peu plus loin, puis encore à l'orée de la forêt, sans que nous puissions percevoir la moindre réaction.

J'avais un peu honte du dérangement que nous provoquions ainsi, et de la perturbation que nous ne manquions pas d'induire, rien que pour les entendre un peu (alors que je les écoute régulièrement hululer depuis chez moi, car elles reviennent nicher chaque année dans le petit bois derrière le lycée Cantau). Nous pénétrâmes sur un sentier souple et large, recouvert d'une épaisse couche d'écorces agréable et silencieuse sous nos pas. Maniant une nouvelle fois son puissant magnétophone, nous eûmes la chance cette fois de voir voler le mâle d'arbre en arbre. Armé d'une lampe torche, l'animateur tâcha de le suivre pour que chacun de nous l'aperçoive. Enfin, l'oiseau se posa sur une branche haute, à proximité de notre groupe, et nous pûmes le voir tout à loisir un long moment. Il nous observa d'abord un peu et nous vîmes luire ses grands yeux ronds puis, ébloui, il détourna son regard en pivotant la tête à 180°. Au bout d'un moment, il s'envola silencieusement. Nous marchâmes vers l'autre mâle et tentâmes de l'appâter pareillement, mais cette fois, il n'y eut aucune réaction. Le guide supposa qu'il s'agissait d'un jeune mâle, peu sûr de lui, qui avait simplement réagi la première fois pour signaler qu'il était toujours à sa place et qu'il n'empiétait pas sur le territoire du couple, mais qui ne se sentait pas suffisamment fort pour monter au créneau et venir intimider l'intrus que notre magnétophone simulait...

Photos prises autour du lac Mouriscot à Biarritz le 14 mars 2012

Réaction d'Elodie Larralde, DPNE - Plaine d'Ansot et Muséum d'histoire naturelle : Vous avez bien ressenti tous les désagréments qu'un site naturel péri-urbain présente ! Concernant le dérangement des chouettes, cela reste, dans un but pédagogique, ponctuel et exceptionnel : c'était la première fois que nous utilisions des repasses pour les attirer car je ne suis pas non plus très favorable à ces pratiques. Je pense donc que notre impact a été minime.La situation de la Plaine d'Ansot est ainsi : c'est avant tout une zone inondable qui joue le rôle de rétention d'eau pour la protection de la ville contre les inondations. Malgré la proximité de la ville et des infrastructures de transport, elle joue également un rôle de plus en plus important de réservoir de biodiversité : de nombreuses espèces végétales et animales y trouvent refuge. Alors, on peut se poser la question : vaut-il mieux protéger un espace naturel en ville, avec ses avantages et ses inconvénients, ou le détruire et y construire des habitations, des parkings, etc. ?

SOMMAIRE

 

Sortie Museum d'histoire naturelle de la Plaine d'Ansot à Bayonne - Parmi les 18 participants : Mag & JJ, Alain, Cathy
Les emplumés du crépuscule
Jeudi 15 mars 2012