Les œufs marocains.
— Un militaire de Médiana, sur le point d’être libéré,
m’écrit :
« Pensez-vous qu’il serait intéressant de s’occuper
de l’exportation des œufs marocains pour la biscuiterie et les pâtes
alimentaires ? Connaissez-vous un moyen pratique de conserver ces œufs,
jaunes et blancs séparés, ou le tout ensemble, avec la coquille, dans des
récipients ! »
Le Maroc, sans doute, est un grand producteur d’œufs ;
mais leur introduction en France est présentement contingentée à 1.000 tonnes.
Comme les œufs cassés en bidons ne peuvent se conserver que s’ils sont
fortement salés et additionnés de 2 p. 100 d’acide borique, vous ne
pourrez pas les introduire à cet état pour l’alimentation, puisque l’emploi des
antiseptiques autres que le sel est interdit.
Le seul moyen légal de présenter les œufs marocains cassés
sur le marché français serait d’adopter le procédé américain qui consiste à
soumettre les œufs à une température quelque peu inférieure à leur point de
congélation, qui est de -3°. Il suffit donc de les mettre en frigorifique,
entre -1° et -2°, pour que leur conservation soit parfaite ; mais on devra
les consommer le plus vite possible au sortir de la chambre froide. Bien
étudier le projet avant de l’entreprendre. C’est une affaire qui exige beaucoup
de capitaux.
La diphtérie oculaire.
— « Je possède un élevage de volailles assez
prospère, écrit un abonné du Rhône. Mais, depuis quelque temps, les
coqs, jamais les poules, meurent successivement en présentant les symptômes
suivants : crête passant du rouge vif au noir, gonflement des yeux genre
conjonctivite, cornée boursouflée, cécité complète, dépérissement et mort.
Cette maladie ne paraît pas contagieuse. Y a-t-il un remède ? ... »
Les symptômes sont ceux de la diphtérie oculaire. C’est une
affection très contagieuse qui a son siège dans les yeux, les narines et même
la gorge. Soyez certain, que, si vous ne l’enrayez pas, elle se propagera
également sur les poules. Emparez-vous des sujets manifestement atteints, pour les
traiter à part, en leur badigeonnant tous les jours, yeux, narines et gorge à l’aide
d’un pinceau trempé dans une solution d’acide sulfurique (6 grammes dans
un litre d’eau).
À toutes vos volailles sans exception, distribuez du grain
plâtré, c’est-à-dire du grain recouvert d’une mince pellicule de plâtre cuit,
par saupoudrage et pelletage, après une légère humidification. Acidulez en
outre leur eau de boisson avec 2 grammes d’acide sulfurique par litre. On
compte 26 gouttes d’acide au gramme.
Mensualités de 300 francs avec les lapins.
— « Propriétaire de trois petits champs, et
ayant construit 18 cabanes en ciment armé, pensez-vous que je puisse vendre des
lapins pour 300 francs par mois, sans quitter mes occupations ? Comment
conduire l’élevage et quelles denrées produire, quantités et qualités ?
Quels sont les meilleurs débouchés pour la viande et les peaux ? »
Je dirai à M. Serge Pioret qu’il ne m’est pas possible
de traiter en détail, dans une correspondance limitée par la place, de la
conduite de son clapier, de l’alimentation, des débouchés, etc. Chacune de ces
questions fait l’objet d’un chapitre spécial sur le livre Les Lapins de
mes collaborateurs, MM. C. Arnould et M. Morel (I).
À vrai dire, au lieu d’un élevage strictement encabané, il
vaudrait mieux adopter la méthode semi-libre, qui exige bien moins de main-d’œuvre.
De toutes manières, en admettant que l’on produise toute la nourriture, il
faudrait, pour réaliser un net de 300 francs par mois, entretenir constamment
en production 6 lapines portières, que l’on ferait procréer tous les trois
mois. En comptant 6 lapereaux par portée, ceux-ci étant vendus dans le poil, à
six mois, 25 francs la pièce, le rapport net pourrait être de 300 francs par mois.
La nourriture consommée par les 6 femelles et leur
progéniture serait approximativement : fourrages verts, 6.000 kg. ; betteraves
fourragères, 6.000 kg. ; foin, 1.500 kg. ; carottes, 1.500 kg. ;
avoine, 375 kg. ; orge, 375 kg. Dans le cas où l’on achèterait le grain,
il faudrait une lapine de plus pour payer cette nourriture. Présentement, la
viande du lapin étant très demandée, la vente est facile en faisant des offres
aux pensions, restaurants, maisons de comestibles, ou en expédiant aux
mandataires des villes. Pour les peaux, s’adresser aux grossistes ou aux
pelletiers fourreurs.
Des oies pour 10.000 francs.
— « Dans ma localité où je possède une maison
en bordure d’un grand pâturage communal, bien pourvu d’eau, et où la volaille a
libre accès, pensez-vous que je puisse m’adonner à l’élevage des oies ?
Combien faudrait-il de reproducteurs pour gagner une dizaine de mille francs
vers la Noël ? »
Vous êtes dans des conditions privilégiées pour produire de
la viande d’oie à bon marché, puisque ce palmipède est avant tout un herbivore,
et qu’il trouvera sur votre pacage gratuit la majeure partie de sa nourriture.
En dehors du premier mois, les oisons pourraient, à la rigueur, se contenter du
régime de l’herbe. Cependant, si vous voulez obtenir des sujets étoffés, gras
et dodus à souhait, vous devrez prévoir une ration de complément, aussi
économique que possible, obtenue en pétrissant ensemble à l’eau, ou mieux au
lait écrémé, des pommes de terre cuites avec un peu de tourteau et beaucoup de
verdures hachées, en ajoutant, vers la fin, un peu de farine de maïs.
Une telle pâtée économique, donnée en supplément, vous
permettra de produire de la viande d’oie à très bon compte. Celle-ci valant au
bas mot 12 francs le kilogramme vif, il suffira d’élever tous les ans 150
oisons pour réaliser un profit net de 10.000 francs.
Sachant que la ponte d’une bonne oie est de 25 œufs environ,
les 200 œufs nécessaires à l’incubation seront fournis par une dizaine de
femelles, accompagnées de 2 jars, lesquels ne seront pas d’un bien gros
entretien, surtout si on se donne la peine de cultiver à leur intention un
petit champ de choux cavaliers pour l’hiver.
Les romains n’ont pas une bien bonne presse.
— « J’ai fait l’acquisition de trois couples de
gros romains. Quelle nourriture faut-il leur fournir pour qu’ils me donnent
beaucoup de pigeonneaux ? »
Les romains sont plutôt des sujets d’exposition que des
pigeons de rapport. Malgré leur envergure, qui atteint 1m,10 chez
les mâles et 1m,06 chez les femelles, leur poids variant entre 1.100
et 1.300 grammes, suivant le sexe, ils ne sont pas aussi avantageux que les
pigeons moyens, tels que les carneaux, lorsqu’on travaille pour les petits
pois. En effet, les romains sont assez tardifs et peu prolifiques, puisqu’il
est fréquent de voir les femelles pondre un œuf unique, ce qui n’empêche pas l’éclosion
d’être souvent laborieuse, l’élevage des jeunes difficile.
Pour obtenir des résultats passables avec ces gros pigeons,
il faut éviter de les empâter, en leur distribuant une nourriture stimulante,
riche en protéine, par exemple un mélange par quarts de sarrasin, petit maïs,
vesce et pois bisaille. Donner en outre des verdures (oseille, salade, choux)
et du pain minéral complet gâché avec du plâtre.
Les gobeuses de raisins.
— « Pouvez-vous m’indiquer le moyen d’empêcher
les poules de manger la vendange, soit verte, soit mûre ? Les poules d’un
voisin, au nombre d’une centaine, sont en permanence dans un vignoble d’un
hectare, où elles ne touchent jamais à un grain de raisin. »
J’ai répondu de mon mieux, en son temps, à Mme Devèze,
mais ne suis pas certain d’avoir dit tout ce qu’il fallait. Peut-être des
lecteurs mieux informés voudront-ils compléter et rectifier ma réponse.
Pourquoi les poules du voisin de Mme Devèze ne
vont-elles pas grappillonner avant vendange ? Est-ce parce que le raisin
ne leur dit rien, le pinot ayant été remplacé par du plant direct ? En l’occurrence,
je crois plutôt que c’est l’alimentation qui joue. Le raisin, en effet, peut
paraître affriolant à des poules assoiffées, surtout si elles ne mangent pas
leur saoul, tandis qu’il sera négligé des volailles dont la gave est bien
pleine de pâtée humide, additionnée de verdures hachées rafraîchissantes,
telles que oseille, chou, salade. Logiquement, ce régime de remplissage
méthodique devrait inciter les poules à respecter la vendange et à se contenter
des vers et des insectes qui pullulent dans les vignobles.
Les dindes de la Noël.
— Une vénérable aïeule, mère d’une nombreuse
descendance, m’écrit :
« Il me faudrait, tous les ans, une dizaine de
dindes grasses et dodues pour les fêtes de fin d’année. Ne disposant que d’un
enclos ombragé par des arbres fruitiers, pensez-vous que je puisse réussir et
comment m’y prendre ? »
Deux solutions s’offrent à vous :
1° entretenir un mâle et deux dindes qui vous fourniront
plus d’œufs fécondés qu’il ne vous en faudra pour faire une couvée ;
2° acheter tous les ans, dans une ferme, une quinzaine d’œufs,
avec une dinde tenant le nid pour l’incubation et l’élevage. Les dindonneaux
sont seulement délicats dans leur jeune âge. Pour la nourriture et le reste,
voyez l’article de mon collaborateur M. C. Arnould, paru dans le
présent numéro.
La ration passe-partout.
— « Disposant de capitaux et d’une grande
propriété, je voudrais créer un élevage mixte assez important de poules et de
canes pour la production intensive des œufs, tout en pratiquant l’élevage du
porc en plein air. Puis-je établir, sans rien acheter, une ration passe-partout
pouvant servir à tous mes pensionnaires, disposant des denrées ci-après :
orge, avoine, féveroles, son et lait écrémé ? »
Du fait que, parmi vos ressources vivrières, il y a des
aliments surazotés tels que lait écrémé et farine de féverole, vous pouvez
constituer une ration normale convenant à la fois pour la production des œufs
et celle de la viande de porc, les besoins de ces omnivores étant sensiblement
les mêmes. Il est inutile d’acheter quoi que ce soit.
Je propose la provende passe-partout ci-après :
Farine d’orge |
20 |
kilogrammes. |
Farine d’avoine |
20 |
— |
Farine de féverole |
10 |
— |
Son de froment |
10 |
— |
Lait écrémé |
40 |
— |
Avec les poules, pour avoir une pâtée plus ferme, on
remplacera le lait écrémé par son équivalent de coagulum égoutté à moitié. Le
sérum sera donné en supplément aux canes et aux porcs.
Compléter cette ration de base par des herbes vitaminées,
des grains germés diastasés et des minéraux composés, pour avoir la certitude
que tout ira pour le mieux dans toutes les branches de l’exploitation. Avec les
bêtes à l’engrais, on doublera la dose de farine d’orge dans la pâtée.
Mondiage d’ARCHES.
(1) Les lapins, par C. Arnould et M. Morel,
prix, franco : 14 fr. 50. En vente aux bureaux du Chasseur
Français.
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