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Que faire de nos fils et de nos filles

La profession de vétérinaire.

Dans notre numéro de mars 1937, nous avons consacré une causerie aux Écoles vétérinaires. Force nous est de revenir sur cette situation, puisque son statut a été modifié par une loi du 17 juin 1938. Aussi bien, renverrons-nous à l’article précité ceux de nos lecteurs que cette question intéressera pour tous renseignements concernant les Écoles vétérinaires, leur fonctionnement et l’enseignement qu’on y reçoit, nous réservant d’étudier ici plus spécialement la situation de vétérinaire proprement dite.

Le Parlement a enfin rendu justice aux vétérinaires en votant une loi — loi du 17 juin 1938 — qui tend à réserver à l’avenir l’exercice de la médecine et de la chirurgie des animaux aux seules personnes de nationalité française munies du diplôme d’État français de vétérinaire ou du diplôme d’État français de docteur-vétérinaire. Jusqu’en 1938, l’exercice de la médecine vétérinaire est demeuré libre en France. Concurrencés dans leur clientèle par un nombre considérable d’empiriques grossiers, confondus avec eux dans beaucoup de régions, les vétérinaires ont de tout temps souffert de cette confusion qui a jeté sur leur profession un discrédit certain. Grâce aux dispositions de la loi nouvelle, l’influence néfaste des empiriques va donc disparaître progressivement et assez rapidement pour le plus grand bien de la profession et de l’agriculture. La profession vétérinaire, qui a tant fait pour la médecine et la biologie, et qui tient ses lettres de noblesse de Pasteur lui-même, va donc enfin avoir aux yeux du monde sa place, sa vraie place dans les valeurs sociales et jouir de la considération, de la respectabilité auxquelles, depuis un demi-siècle, elle avait droit.

À leur sortie des Écoles nationales vétérinaires, les élèves pourvus du diplôme d’État trouvent devant eux de nombreux débouchés professionnels :

L’exercice de la clientèle forme la partie principale de l’apanage professionnel. On compte environ 3.000 praticiens en France. Le vétérinaire de clientèle tire l’essentiel de ses bénéfices des soins médicaux et chirurgicaux qu’il donne aux différents animaux. Toutefois, l’exercice de la pharmacie, qui lui est reconnu par la loi en raison de ses études spéciales et des conditions habituelles de l’administration des médicaments, constitue pour le vétérinaire un revenu supplémentaire appréciable. L’exercice de la clientèle offre des situations variables suivant les régions, mais qui en moyenne sont bien rémunérées, l’augmentation considérable de la valeur des animaux ayant beaucoup amélioré les tarifs d’honoraires des vétérinaires. Certaines clientèles rurales, situées dans les centres d’élevage intensif, ou de grandes propriétés agricoles, rapportent annuellement jusqu’à 200.000 francs, parfois même davantage ; mais la moyenne du revenu des bonnes clientèles de campagne varie entre 60.000 et 80.000 francs. Dans les régions pauvres, ce revenu est évidemment moins élevé, mais encore intéressant, en raison du moindre coût de la vie, et l’on pouvait affirmer avant les hostilités que les offres de clientèle étaient supérieures aux demandes.

En dehors de la clientèle, les vétérinaires assurent accessoirement un service d’inspection des viandes dans les abattoirs et tueries particulières, en même temps qu’un service sanitaire dans le rayon de leur exercice professionnel. Ils sont rétribués par les communes et par les départements, et les ressources quelquefois importantes qu’ils tirent de ces fonctions améliorent sensiblement leurs revenus.

Parmi les fonctions administratives compatibles avec l’exercice de la clientèle, il y a lieu de citer également : les vétérinaires inspecteurs des frontières et des ports, dont la charge est de veiller à l’état sanitaire des animaux qui entrent en France ou qui en sortent ; les vétérinaires des haras qui assurent le service des dépôts d’étalons de l’État. Enfin un certain nombre de vétérinaires praticiens sont chargés de cours dans les Écoles pratiques d’agriculture.

Mais les vétérinaires peuvent aussi prétendre à des situations administratives :

Les services vétérinaires sanitaires départementaux sont composés de docteurs vétérinaires, fonctionnaires qui interviennent surtout comme agents de l’autorité dans l’application des lois et des règlements de police sanitaire, pour prévenir et combattre les maladies contagieuses des animaux, pour concourir à la conservation et à l’amélioration du cheptel national, richesse dont il est inutile de souligner, à cette heure toute l’importance, ainsi que dans l’application des lois et règlements relatifs à l’hygiène publique, par l’inspection des produits alimentaires d’origine animale. Ces services forment une organisation très importante qui relèvent directement du Ministère de l’Agriculture. Les traitements s’échelonnent de 22.000 à 75.000 francs auxquels s’ajoutent diverses indemnités.

Le service vétérinaire et sanitaire de Paris et du département de la Seine, — qui a pour attributions principales : l’application des mesures de police sanitaire des animaux (lutte contre les épizooties) ; l’inspection des produits alimentaires d’origine animale (viande, abats, produits de charcuterie, conserves, volaille, gibier, poissons, mollusques, crustacés, œufs, lait) ; le contrôle des prix de viande au détail dans les boucheries et charcuteries en vue de la répression de la hausse illégitime ; la surveillance de certains établissements classés comme dangereux, insalubres ou incommodes, — emploie des vétérinaires sanitaires nommés à la suite d’un concours ouvert à tous les docteurs vétérinaires. Les traitements s’échelonnent de29.000 à 49.000 francs avec indemnités. En dehors de Paris, les villes d’une certaine importance ont un vétérinaire municipal qui se consacre entièrement à ses fonctions et à qui la clientèle est interdite.

Les vétérinaires militaires se recrutent au concours parmi les élèves ayant terminé leurs études ; les candidats admis sont nommés vétérinaires auxiliaires, puis, après un stage de six mois à l’École de cavalerie de Saumur, ils sont nommés lieutenant.

On trouve encore des vétérinaires dans les Écoles nationales d’Agriculture, à l’Institut national agronomique, au Muséum d’Histoire naturelle, partout en un mot où les sciences biologiques appellent des techniciens avertis. Un certain nombre de vétérinaires travaillent également dans des laboratoires privés des produits biologiques, où ils occupent des situations de premier plan. Il en est d’autres qui collaborent avec les Compagnies d’assurances au titre d’experts, d’agents, d’inspecteurs régionaux ou de conseillers techniques. Enfin, si l’on en juge par d’assez nombreux exemples, les études vétérinaires préparent remarquablement à la direction des exploitations rurales orientées vers l’élevage, de même qu’au commerce des animaux ou à la fabrication industrielle des produits alimentaires d’origine animale.

Les conditions matérielles exceptionnellement avantageuses des études vétérinaires et les situations toujours intéressantes qu’elles procurent méritent d’attirer de plus en plus les jeunes gens trop souvent orientés vers des carrières encombrées.

Jean le GUIDE.

Le Chasseur Français N°595 Janvier 1940 Page 57