Au cours des douze mois de l’année qui vient de s’écouler,
nous avons exposé les premières notions que doit s’assimiler le débutant
photographe pour être en mesure d’aborder avec quelques chances de succès la
représentation des objets qui s’offrent à sa vue. En raison de la concision que
nous imposait l’ampleur de la tâche entreprise, ce premier aperçu n’a pu qu’effleurer
un certain nombre de questions dont l’importance appelle un examen
supplémentaire ; d’autres éléments de réussite, d’intérêt moins immédiat,
ont été passés momentanément sous silence, parce qu’ils auraient surchargé
notre essai de première initiation. Le moment est venu de reprendre les unes et
d’aborder les autres dans une étude élargie du même programme, pouvant
constituer un cours complémentaire, visant l’élévation du lecteur au titre d’amateur
de photographie, car il n’est plus tout à fait un débutant s’il a mis à profit
les conseils que nous lui avons donnés dans nos premières leçons.
Sans doute, si, avant même que d’y être convié, il a déjà
fait le bilan de sa première campagne, il a déjà eu le souci d’en interpréter
les résultats en examinant surtout ses clichés au point de vue de leur
exécution technique. Il aura probablement constaté que sa production n’est pas
tout à fait irréprochable, mais que, dans l’ensemble, elle se montre
suffisamment satisfaisante pour stimuler son zèle et son application à mieux
faire. Pour progresser sensiblement, il lui faudra mettre à profit les
indications que lui fournit l’examen critique de ses clichés, en remontant par
la pensée aux circonstances qui ont présidé à chaque opération, autant qu’il a
pu en garder le souvenir. C’est en effet dans l’origine du mal que l’on trouve
l’indication des précautions à prendre pour l’éviter à l’avenir, en même temps
que la spécification de la médication susceptible d’en atténuer les
conséquences.
Le souci de perfection et l’esprit de recherche, dont ont
toujours fait preuve les amateurs photographes, s’exerçaient volontiers, il y a
quelques années encore, dans la conduite prudente et raisonnée de ce qu’on
appelle les opérations correctives, dont l’usage était fréquent. Sous
cette appellation collective, on range tous les procédés, méthodes ou artifices
qui permettent, soit en premier lieu d’améliorer les clichés plus ou moins
défectueux, soit plus généralement de combattre la banalité de négatifs
quelconques afin de les approprier à des fins exceptionnelles, en vue d’applications
particulières. À ce compte, on conçoit aisément qu’un grand nombre de clichés d’amateurs
fournissaient matière à des interventions raisonnées.
Si nous en parlons au passé, ou d’une façon conditionnelle,
ce n’est pas que l’utilité de ces interventions soit maintenant contestée ou
révoquée en doute ; mais la réduction progressive des formats photographiques
rend plus aléatoire le résultat d’opérations relativement délicates, et qui ne
peuvent être commodément surveillées que dans des images d’une certaine
étendue.
La pratique de ces manipulations est relativement simple et
facile ; elle n’exige qu’un minimum d’efforts et de soins, à la seule
condition — est-il besoin de l’ajouter ? — que l’intervention
soit motivée et guidée par un diagnostic éclairé, et qu’elle ne se manifeste
pas au rebours de ce qui pourrait être utile.
Au premier rang des insuccès pouvant provoquer une
intervention corrective, on peut mentionner les erreurs commises dans l’appréciation
du temps de pose convenable pour telle ou telle catégorie d’opérations ;
elles peuvent avoir des conséquences regrettables, lorsque l’écart est assez
considérable pour fausser les rapports qui existent dans les valeurs lumineuses
du sujet ; leur gamme normale est étirée et distendue en cas d’excès, ou
bien elle est resserrée au point de ne plus rendre sensibles les demi-teintes
les plus indispensables à la traduction d’un modelé admissible, en cas d’insuffisance.
Il convient de noter au surplus, que l’un et l’autre de ces
inconvénients sont aggravés quand la température des bains de développement
exerce son influence dans le même sens. Une émulsion largement surexposée,
surtout lorsqu’elle est plongée dans un révélateur dont la température dépasse
25° C., se développe rapidement : l’image apparaît d’un seul coup
dans son ensemble sous forme de grisaille générale à peine nuancée ; elle
monte uniformément sans accuser l’opposition des valeurs nécessaire à l’obtention
d’images rendant les effets de lumières et d’ombres du sujet, avec le degré
requis de brillant, de contraste. Si l’on pousse le développement au delà de
certaines limites, on obtient un cliché opaque, bouché, c’est-à-dire
imperméable à la lumière, et dont le tirage s’avère laborieux.
La sous-exposition se manifeste par des défauts inverses :
l’image est lente à se dessiner dans le révélateur (surtout lorsqu’il s’agit d’un
bain usagé, chargé de bromure ou employé à basse température) ; les
demi-teintes s’amorcent difficilement et sont inexistantes dans les grandes
ombres ; l’émulsion n’enregistre qu’un canevas squelettique dont tout
modelé est absent. On conçoit qu’un développement prolongé ne peut qu’accroître
et aggraver le manque d’équilibre entre les lumières et les ombres, et
cependant c’est la seule planche de salut qui s’offre à l’amateur rompu à la
pratique des opérations correctives, ainsi que nous le montrerons par la suite.
Une autre source de déboires se trouve dans l’admission
accidentelle de lumière active, soit dans le laboratoire (voiles généraux),
soit dans l’appareil lui-même, où il peut exister des fissures, et où, de
surcroît, l’objectif peut introduire des reflets d’objets blancs ou fortement
éclairés : neige, glaciers, etc., quand ce ne sont pas les rayons directs
du soleil dans des effets un peu risqués de contre-jour ; les voiles sont
alors localisés en zones, fusées, taches de formes irrégulières.
Viennent ensuite les accidents matériels : rayures,
abrasions par pression ou par égratignure, empreintes digitales, qui sont d’autant
plus néfastes que les clichés sont de dimensions plus réduites. Les quelques
catégories d’insuccès que nous envisageons sommairement font l’objet de
médications appropriées, qui mettent en œuvre des influences variées parmi
lesquelles on peut distinguer :
1° l’intervention au tirage, par habillages, grattages,
surimpressions locales, auto-retouche, etc. ;
2° les méthodes correctives proprement dites, par traitement
chimique : affaiblissement et renforcement, avec les modalités qui
permettent d’accentuer l’effet d’opposition ou de l’atténuer quand il est
exagéré ;
3° le maquillage et la retouche manuelle, au crayon, au
pinceau, à l’estompe, etc. La mise en œuvre de ces divers moyens de correction
et d’amélioration des résultats fera l’objet d’un exposé que nous comptons
aborder un peu plus tard. En cas d’urgence, les lecteurs habituels de cet
organe retrouveraient facilement dans leur collection une documentation assez
complète, où ils puiseraient tous les détails d’exécution de ces opérations.
Jacques BÉRYL.
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