Accueil  > Années 1940 et 1941  > N°597 Mars 1940  > Page 173 Tous droits réservés

Aménagement des intérieurs

Les alcôves.

En parlant d’alcôves, vous revoyez dans votre esprit les estampes du XVIIIe siècle imageant des scènes de vie privée dont Moreau le jeune et Fragonard se sont faits les interprètes. Vous vous représentez ces alcôves avec toute leur intimité et leur discrétion. N’a-t-on pas parlé des secrets d’alcôves où le décor, avec ses draperies et voilages, jouait son rôle ?

Dans le home moderne, ces alcôves ont été supprimées. Hygiène, ventilation, tels sont les motifs invoqués pour les supprimer. Mais, dans beaucoup d’appartements du siècle précédent et même dans quelques constructions récentes, ces alcôves existent. Il faut donc les aménager avec autant de goût que le faisaient les architectes d’autrefois. Toutes les draperies et tentures seront supprimées, et ces nids à poussière remplacés par des motifs nouveaux et moins tarabiscotés, sans toutefois ôter la fantaisie.

L’alcôve d’aujourd’hui sera plus sobre que celle de jadis, mais son intimité en sera conservée. Tout sera conçu pour créer l’état de repos et de rêve, depuis l’éclairage qui commencera à plonger dans l’ambiance voulue jusqu’au plus petit détail qui retiendra l’œil par sa grâce et sa distinction.

Fig. 1.

— Qu’il fera bon dormir dans ce coin charmant que les voilages sépareront de la pièce où il se situera. Les murs seront tendus de satin rose capitonné. Le divan sera aussi recouvert en satin de ton vieux rose. Sur le côté, dans un renfoncement, une très haute glace, éclairée indirectement, avec sa tablette en verre dépoli, complétera la destination de cette alcôve. Les parties de mur non revêtues seront peintes à l’huile pochée mate. Une épaisse moquette viendra amortir les pas dans ce petit espace réservé aux rêves roses, tout spécialement étudié et destiné à une jeune fille.

L’ensemble pourra être garni de mille bibelots, et l’éclairage réalisé par de multiples lampes que les jeunes filles savent très bien choisir. Sur le croquis, une grosse boule de verre réfléchira sa lumière sur les moires chatoyants du satin.

Fig. 2.

— Voici une alcôve qui aura, en plus d’être originale, la franchise d’interpréter une idée dont le thème a été : « l’intérieur d’une tente ». Le parti a été très nettement affirmé. Lambrequin sur le pourtour : aux quatre angles des tentures à rayures disposées en équerres formeront des pilastres. Le ciel, depuis le lambrequin jusqu’au plafond, formera dais et sera de même étoffe que le lambrequin ; le tout sera relié au centre de l’alcôve, où deux ou trois boules en verre viendront terminer en cul de lampe. Des peintures représentant des paysages dans les parties non tendues de tentures pourront, si on le désire, donner plus ample vérité au sujet choisi. Le divan ainsi que le traversin seront dotés de housses en tissu à rayures de même couleur que celui des pilastres. Un vase monté sur une colonne torse laissera diffuser sa lumière sur cet ensemble amusant

Fig. 3.

— Cette alcôve sera particulièrement affectée à un jeune homme. Un grand bahut en érable gris contournera le divan de velours grenat. Dans l’angle, une pile ronde lumineuse en papier huilé ou en parchemin répandra sa lumière diffuse sur les planisphères disposées contre les murs et au-dessus du bahut. Cette pile semblera supporter un linteau à hauteur de la partie libre sur la pièce et sa largeur correspondra à celle du bahut. Celui-ci sera percé de niches où quelques bibelots ajouteront une note gaie.

Sur le côté suivant la longueur de cette alcôve, on pourra prévoir une tablette formant secrétaire.

Louis DUPLAY,

Architecte E. D. B. A.

Le Chasseur Français N°597 Mars 1940 Page 173