Accueil  > Années 1940 et 1941  > N°598 Avril 1940  > Page 216 Tous droits réservés

Aéronautique

Les progrès de la normalisation de l’aviation.

Lorsque, il y a plusieurs mois, un aviateur britannique dressa une liste des réalisations qu’il aurait aimé voir exécuter par l’industrie aéronautique, il appuya particulièrement sur la nécessité de favoriser la standardisation. Il fit ressortir l’importance, non seulement de la normalisation des moteurs, des trains d’atterrissage, du radiateur et des hélices, mais encore de celle des différentes commandes.

Il ne se doutait point que quelques-uns de ses désirs se réaliseraient presque immédiatement en accord avec la rapidité avec laquelle s’accomplissent actuellement les progrès dans le domaine de l’aviation. Avant la guerre, la « Deutsche Lufthansa » employait des moteurs normalisés construits par les usines Junkers. C’était un commencement sérieux qui fut bientôt suivi par d’autres standardisations, par exemple celle de l’hélice et du train d’atterrissage.

C’est la conflagration mondiale qui fit que l’aéronautique quitta la phase des essais et tâtonnements, pour entrer dans la période de la production industrielle.

On ne put, certes, brusquer son développement. Cependant, l’Allemagne, avec sa tendance à systématiser bien connue, et l’Amérique, suivirent, dans leurs constructions aéronautiques un tracé qui permit déjà de soupçonner la normalisation future de certaines parties d’un avion.

Cependant, directement après la guerre, la construction des avions subit un temps d’arrêt, ce qui entraîna automatiquement un retard dans le développement de la normalisation.

C’est seulement trois ou quatre ans plus tard qu’on reprit plus intensément les travaux dans ce domaine. Les Anglais, par exemple, poussèrent leur normalisation, plutôt du point de vue national : le gouvernement y contribua par des prescriptions sévères de réception des appareils et en réglementant la normalisation. En Allemagne et aux États-Unis, ce furent les grandes organisations techniques qui s’employèrent activement en faveur de la standardisation. Les Allemands créèrent en 1925 une commission d’experts pour la normalisation dans l’aviation, commission dans laquelle les Usines Junkers, qui, déjà à cette époque, avaient une renommée internationale, jouaient un rôle prépondérant.

La normalisation reçut donc un premier élan par la livraison du matériel de guerre. Il va de soi que l’industrie de guerre trouva un gros avantage à une telle normalisation, parce que la production en masse et le remplacement des pièces de rechange n’est possible que par la standardisation.

Mais l’aviation commerciale en profita également, car la normalisation montra comment l’aviation et tout le trafic aérien pouvaient être organisés sur un pied international.

Cette normalisation internationale concernait, avant tout, la standardisation de la grandeur des roues, des dimensions des pneus et des instruments de bord, ainsi que la régularisation des inscriptions sur cadrans. On peut signaler ensuite cette même unification de certaines parties de la direction, des moyeux et des hélices. La normalisation est particulièrement importante pour les raccords de remplissage, soit pour l’air comprimé, soit pour le carburant et l’huile, et pareillement pour les câbles électriques.

Il en est de même pour le tableau de bord et les commandes des manœuvres du poste de pilotage. C’est ici que la normalisation peut faire du travail utile. Il est, en effet, inadmissible qu’un aviateur, obligé de piloter plusieurs types d’appareils — par exemple, le pilote préposé à la réception des avions — soit forcé d’étudier, pour chaque cas particulier, un règlement spécial, parce que le levier d’incidence se trouve tantôt à gauche, tantôt à droite.

Par une organisation appropriée, on est arrivé à tenir en stock, dans les aérodromes des divers pays, des pièces de rechange pour les avions commerciaux.

Par une standardisation plus poussée, il sera possible que l’équipe d’un avion se familiarise, dans un délai excessivement bref, avec les appareils d’autres types, ce qui signifiera une simplification et une économie dans l’exploitation, en même temps qu’une sécurité plus grande dans le trafic aérien tout entier.

Le monde de l’aviation a déjà formulé une quantité de desiderata concernant la normalisation. Elle serait absolument insuffisante, si on n’arrivait pas à la normalisation groupée, c’est-à-dire à la standardisation de groupes entiers de la construction.

Ce désir naquit de la conviction qu’il ne suffit point d’unifier seulement les dimensions principales des postes de pilotage pour permettre un emploi international des appareils, ou, du moins, pour le faciliter.

Il faut, en outre, que les proportions et relations entre le siège du pilote, les leviers de commande, les instruments et les commandes des autres manœuvres soient si bien conditionnées que leurs mesures forment un type modèle universel pour ce groupe déterminé. Il en est de même pour le train d’atterrissage, l’empennage, etc.

Les événements actuels ont placé le problème de la normalisation à l’ordre du jour, et nous pouvons faire entièrement confiance à la compétence et à l’énergie de nos chefs de l’industrie aéronautique, parmi lesquels je me plais à citer M. Gilles, président du Syndicat des pièces détachées, pour sa réalisation totale.

Armand AVRONSART.

Le Chasseur Français N°598 Avril 1940 Page 216