Lorsque, il y a plusieurs mois, un aviateur britannique
dressa une liste des réalisations qu’il aurait aimé voir exécuter par
l’industrie aéronautique, il appuya particulièrement sur la nécessité de
favoriser la standardisation. Il fit ressortir l’importance, non seulement de
la normalisation des moteurs, des trains d’atterrissage, du radiateur et des
hélices, mais encore de celle des différentes commandes.
Il ne se doutait point que quelques-uns de ses désirs se
réaliseraient presque immédiatement en accord avec la rapidité avec laquelle
s’accomplissent actuellement les progrès dans le domaine de l’aviation. Avant
la guerre, la « Deutsche Lufthansa » employait des moteurs normalisés
construits par les usines Junkers. C’était un commencement sérieux qui fut bientôt
suivi par d’autres standardisations, par exemple celle de l’hélice et du train
d’atterrissage.
C’est la conflagration mondiale qui fit que l’aéronautique
quitta la phase des essais et tâtonnements, pour entrer dans la période de la
production industrielle.
On ne put, certes, brusquer son développement. Cependant,
l’Allemagne, avec sa tendance à systématiser bien connue, et l’Amérique,
suivirent, dans leurs constructions aéronautiques un tracé qui permit déjà de
soupçonner la normalisation future de certaines parties d’un avion.
Cependant, directement après la guerre, la construction des
avions subit un temps d’arrêt, ce qui entraîna automatiquement un retard dans
le développement de la normalisation.
C’est seulement trois ou quatre ans plus tard qu’on reprit
plus intensément les travaux dans ce domaine. Les Anglais, par exemple,
poussèrent leur normalisation, plutôt du point de vue national : le
gouvernement y contribua par des prescriptions sévères de réception des
appareils et en réglementant la normalisation. En Allemagne et aux États-Unis,
ce furent les grandes organisations techniques qui s’employèrent activement en
faveur de la standardisation. Les Allemands créèrent en 1925 une commission
d’experts pour la normalisation dans l’aviation, commission dans laquelle les
Usines Junkers, qui, déjà à cette époque, avaient une renommée internationale,
jouaient un rôle prépondérant.
La normalisation reçut donc un premier élan par la livraison
du matériel de guerre. Il va de soi que l’industrie de guerre trouva un gros
avantage à une telle normalisation, parce que la production en masse et le
remplacement des pièces de rechange n’est possible que par la standardisation.
Mais l’aviation commerciale en profita également, car la
normalisation montra comment l’aviation et tout le trafic aérien pouvaient être
organisés sur un pied international.
Cette normalisation internationale concernait, avant tout,
la standardisation de la grandeur des roues, des dimensions des pneus et des
instruments de bord, ainsi que la régularisation des inscriptions sur cadrans.
On peut signaler ensuite cette même unification de certaines parties de la
direction, des moyeux et des hélices. La normalisation est particulièrement
importante pour les raccords de remplissage, soit pour l’air comprimé, soit
pour le carburant et l’huile, et pareillement pour les câbles électriques.
Il en est de même pour le tableau de bord et les commandes
des manœuvres du poste de pilotage. C’est ici que la normalisation peut faire
du travail utile. Il est, en effet, inadmissible qu’un aviateur, obligé de
piloter plusieurs types d’appareils — par exemple, le pilote préposé à la
réception des avions — soit forcé d’étudier, pour chaque cas particulier,
un règlement spécial, parce que le levier d’incidence se trouve tantôt à
gauche, tantôt à droite.
Par une organisation appropriée, on est arrivé à tenir en
stock, dans les aérodromes des divers pays, des pièces de rechange pour les
avions commerciaux.
Par une standardisation plus poussée, il sera possible que
l’équipe d’un avion se familiarise, dans un délai excessivement bref, avec les
appareils d’autres types, ce qui signifiera une simplification et une économie
dans l’exploitation, en même temps qu’une sécurité plus grande dans le trafic
aérien tout entier.
Le monde de l’aviation a déjà formulé une quantité de
desiderata concernant la normalisation. Elle serait absolument insuffisante, si
on n’arrivait pas à la normalisation groupée, c’est-à-dire à la standardisation
de groupes entiers de la construction.
Ce désir naquit de la conviction qu’il ne suffit point
d’unifier seulement les dimensions principales des postes de pilotage pour
permettre un emploi international des appareils, ou, du moins, pour le
faciliter.
Il faut, en outre, que les proportions et relations entre le
siège du pilote, les leviers de commande, les instruments et les commandes des
autres manœuvres soient si bien conditionnées que leurs mesures forment un type
modèle universel pour ce groupe déterminé. Il en est de même pour le train
d’atterrissage, l’empennage, etc.
Les événements actuels ont placé le problème de la
normalisation à l’ordre du jour, et nous pouvons faire entièrement confiance à
la compétence et à l’énergie de nos chefs de l’industrie aéronautique, parmi
lesquels je me plais à citer M. Gilles, président du Syndicat des pièces
détachées, pour sa réalisation totale.
Armand AVRONSART.
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