Pour l’amateur modeste désireux de décorer son jardin de
façon un peu coquette et ne disposant, pour cela, d’aucune serre, ni d’aucun
moyen de chauffage, mais seulement de quelques cloches et de quelques châssis
vitrés quand ce n’est pas, tout simplement, d’une des pièces de son habitation,
un problème assez ardu se pose, celui de l’obtention des plantes
nécessaires ! ...
Une solution favorable pourra cependant intervenir, s’il
veut bien s’imposer un choix parmi les végétaux à cultiver; mais il lui faudra
le limiter strictement à celles de ces plantes qui, possédant des qualités
incontestables au point de vue décoratif, ont, en outre, le mérite de pouvoir
se conserver aisément pendant l’hiver et se multiplier avec facilité.
Les géraniums à corbeille comptent, très
certainement, parmi les plus remarquables. Il en existe de nombreuses variétés,
dérivant de deux espèces principales et possédant des coloris très riches en
même temps que fort divers : blanc, rose, saumon, rouge vif, rouge
violacé, etc., les unes à fleurs simples, d’autres demi-doubles, d’autres
encore à fleurs doubles, à feuillage coloré, etc.
Leur culture est des plus facile. On en fait, vers la fin de
la belle saison, c’est-à-dire dans la dernière semaine d’août ou la première
semaine de septembre, des boutures, soit directement dans les pots où elles
seront conservées l’hiver, soit dans une planche bien ameublie et bien exposée
du jardin, en plein air, où elles sont piquées à 10 centimètres
d’intervalle. Ces boutures s’enracinent vite si on les bassine de temps à autre
par temps sec et, dès le début d’octobre, quand elles ont été faites en pleine
terre, on les empote dans des godets de 8 à 9 centimètres de diamètre et
on les laisse encore quelques jours à l’air libre dans un endroit demi-ombragé.
Vers le 10 octobre, on les rentrera dans un local aussi
éclairé que possible, à température plutôt basse, mais ne descendant jamais
au-dessous de + 2 ou + 3°. Les arrosages seront extrêmement modérés
et très rares pendant la période hivernale. Ils deviendront un peu plus
nombreux et copieux à l’approche du printemps.
C’est surtout dans les corbeilles bien ensoleillées que les
géraniums donneront d’excellents résultats.
Si le jardin est assez ombragé, les géraniums seront moins
indiqués. D’autres plantes le seront davantage ; au nombre de celles-ci se
trouvent les fuchsias. Il en existe aussi beaucoup de variétés dont
plusieurs, fort jolies, dérivent du Fuchsia globosa. Dans un certain
nombre de ces variétés, le calice présente une coloration nettement différente
de celle de la corolle. Les fleurs sont, tantôt simples, tantôt doubles et même
parfois pleines, par suite de la transformation des étamines en pétales.
Si, dans le Midi de la France, où le fuchsia retrouve le
climat de son pays d’origine, ce petit arbuste passe l’hiver sans aucun abri,
il n’en va pas de même sous le climat parisien et sous celui du Nord, où
presque toutes les variétés doivent être abritées en octobre, soit en
orangerie, soit dans une cave saine ou simplement un cellier.
Les fuchsias se multiplient par boutures, faites à
l’étouffée sous cloche, en juin ou juillet. Dès qu’elles ont quelques racines,
les boutures sont empotées dans des godets et conservées ainsi, sous châssis,
jusqu’au printemps suivant. Mais, en général, et en raison de leur extrême
facilité de conservation, un n’emploie guère que des fuchsias déjà un peu âgés
pour garnir les milieux de corbeilles et les rangs intérieurs des
plates-bandes.
Vers le 10 octobre, on déplante les pieds qui viennent
de passer en plein air la belle saison ; on supprime la partie extrême des
pousses herbacées et presque toutes les feuilles, on raccourcit aussi quelque
peu les racines et on empote les plantes dans des pots plutôt étroits que l’on
rentre dans un local à l’abri de la gelée. Parfois, on réunit un certain nombre
de pieds, serrés les uns contre les autres, dans des caissettes plates de
faibles dimensions qui peuvent être facilement et rapidement déplacées. On les
met dans l’endroit le plus convenable à leur conservation : au cellier ou
au sous-sol en période de froid, au dehors pendant une période de temps doux et
pluvieux, mais on a soin de les tenir plutôt au sec. Lorsque le printemps
arrive, de petites pousses naissent sur les branches. Peu à peu, ces pousses
s’allongent. Les arrosages sont alors augmentés progressivement et les plantes
peuvent, sans inconvénient, être replantées en plein air dès la fin d’avril ou
le début de mai. Elles refleuriront peu de temps après leur mise en place à
mi-ombre.
Dans les pentstémons hybrides à grandes fleurs,
l’amateur a encore d’excellentes plantes pour les corbeilles et, surtout, pour
les plates-bandes où elles fleurissent pendant toute la belle saison. Hauts de
60 centimètres environ, ils présentent plusieurs hampes florales portant de
jolies fleurs en clochettes, de coloris très divers.
On peut fort bien semer les pentstémons, en mars, sous
châssis ; mais il est beaucoup plus recommandable de les multiplier par
boutures faites sous châssis à froid, dans un emplacement bien exposé, dès les
premiers jours d’octobre. Ces boutures s’enracinent pendant l’hiver et peuvent
rester sous les châssis jusque vers le début de mars. Elles sont alors enlevées
en petites mottes, puis plantées en planches bien ameublies ou on leur fait
subir deux ou trois pincements pour en faire de belles plantes bien étoffées
qui seront mises en place en mai, reprendront promptement et commenceront à
fleurir dès le mois de juin.
On reproduira de la même manière les calcéolaires
rugueuses, jolies plantes de 40 à 50 centimètres de hauteur, aux
nombreuses petites fleurs jaunes, brunes, parfois même rouges, ponctuées ou
tigrées de couleurs diverses et ressemblant à de petites bourses. Cependant, on
a intérêt à ne pas pratiquer avant le 20 octobre, au moins, le bouturage
des calcéolaires et on peut même le faire bien après cette date et jusqu’au 10 novembre,
sous châssis à froid. La terre dans laquelle on pique les boutures comportera
une certaine proportion de sable, qui la rendra aussi saine et perméable que
possible.
L’enracinement se fera, tout doucement, pendant la période
hivernale. On couvrira les châssis par temps de gelées et on mettra des
réchauds de feuilles sèches le long du coffre. Vers fin février, les plantes
enracinées seront mises en pots de 9 centimètres de diamètre et laissées
encore quelques jours sous les châssis, fermés et ombrés pour en faciliter la
reprise ; puis on commencera à donner de l’air pour laisser les plantes en
plein air à partir de la mi-avril, en couvrant seulement de claies ou de
paillassons pendant quelques jours encore. La plantation dans les corbeilles
s’effectuera, aussitôt qu’on le voudra, à partir du commencement de mai.
C’est également par bouturage de rameaux semi-herbacés, vers
la fin de l’automne, que se multiplie la santoline petit-cyprès, plante
intéressante par son feuillage argenté, léger, et par la facilité avec laquelle
on peut la maintenir basse par des pincements répétés, ce qui permet de
l’utiliser en mosaïculture, ainsi que pour faire des cordons et des bordures.
Les boutures sont faites, soit sous cloches, soit sous
châssis à froid, en novembre, dans un sol rendu léger et perméable par
adjonction de sable. Elles s’enracinent au cours de l’hiver et, dès mars, les
jeunes plantes peuvent être plantées en pépinière à l’air libre pour y rester
jusqu’en mai, époque où l’on s’en servira pour la plantation des corbeilles et
des plates-bandes, concurremment avec les autres plantes de garniture estivale.
E. DELPLACE.
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