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Nos oiseaux de cage

Oiseaux de pays (1).

Le serin des îles Canaries (Serinus Canarius) ou canari sauvage n’est pas le canari que nous voyons en cage, mais son ancêtre. Ces deux oiseaux, d’ailleurs, n’ont pas le même plumage. Buffon et d’autres naturalistes s’étaient lourdement trompés en prétendant le contraire, à savoir que l’oiseau sauvage descendait de l’oiseau domestique. A priori, cela paraissait déjà plus qu’étrange, parce que complètement opposé aux lois de la nature : ces messieurs avaient simplement mis la charrue avant les bœufs.

Le serin des Canaries ressemble à notre serin méridional avec moins de jaune et un ton plus uniforme. Les Espagnols l’appellent Canario.

La taille du serin des Canaries est intermédiaire entre celles du cini et du canari domestique. Nous avons là, encore une fois, la constatation d’un fait souvent remarqué : la domesticité grandit l’animal. Et cela est vrai pour les animaux les plus divers, sauf exceptions, souvent voulues d’ailleurs.

Dans l’ensemble, le serin des Canaries est vert et jaune ; le front, la gorge, le haut de la poitrine tirent plus franchement sur le jaune d’or ; quelques plumes du ventre sont blanches, celles de la queue sont bordées de blanc. Le vert, chez la femelle, tire sur le gris-brun. Nous avons, du reste, en captivité, des canaris dits gris, ou verts, qui ressemblent beaucoup à leur ancêtre sauvage.

Dans les îles Canaries, surtout à Madère, à Palma et à Ténériffe, on voit fréquemment en cage des canaris sauvages. Mais le plus souvent, ces oiseaux se sont reproduits en captivité depuis plusieurs générations, et ils commencent déjà à s’éloigner du type sauvage.

À l’état de nature, le serin des Canaries, tout comme la linotte, se rencontre souvent dans les vignes, mais le nid du serin est autrement haut perché que celui du linot. Il est, en général, à 2m,50 du sol, au minimum, et souvent plus haut.

Le chant du serin sauvage ne diffère pas, à vrai dire, de celui du canari domestique ; cependant, chez les mâles bons chanteurs, on trouve souvent des notes plus hardies et plus pures que celles de nos canaris privés.

Le canari domestique (Serinus domesticus) est aujourd’hui le véritable prototype de l’oiseau de cage chanteur. Mais cet oiseau a été soigné, sélectionné selon le goût de chaque éleveur, en sorte qu’il s’est produit ce que l’on est convenu d’appeler des races et, plus exactement, des variétés. Il y a des canaris blancs, des jaunes, des cannelles, des panachés, des verts ; il en est de frisés, de bossus, etc., etc. Sélection la plupart du temps sur le type, et non sur le chant. Et c’est pour cela que, dans toutes ces variétés, les mauvais chanteurs ne sont pas rares. Il est cependant, bien heureusement, des particuliers et aussi des sociétés qui s’occupent uniquement du chant et organisent des concours. Il est de ces sociétés en France, en Allemagne et en Italie.

Les races de canaris les plus connues, en France, du moins, sont : la race commune, le frisé parisien, le bossu belge, le hollandais, le saxon. J’ai eu de bien agréables canaris communs et, comme oiseaux (tous les goûts sont dans la nature), je les préfère nettement aux parisiens. Je n’aime pas la construction anormale du belge ; je ne parle pas de son chant. J’admire le hollandais et j’écoute religieusement le saxon. Ceci demande une explication.

Le canari saxon est le résultat d’une longue sélection, mais il subit aussi une véritable éducation. Voyez-le : il n’est pas extraordinaire, il est même assez quelconque. Écoutez-le : c’est autre chose ...

Après avoir parcouru toute l’Allemagne, le naturaliste Lenz nous déclare que c’est dans le Hartz qu’on élève le mieux les serins. Dans ce pays, à Andréasberg, on a vendu, en 1860, pour 45.000 francs de serins ; il y a près de cent ans de cela ! À Andréasberg, presque chaque famille a son élevage et, presque toujours, une chambre particulière est consacrée aux serins. On recherche presque exclusivement les oiseaux d’un beau jaune unicolore. De Braunswick à Duderstat, on fait aussi beaucoup d’élevage, mais les oiseaux, quoique fort appréciés, ont un chant nettement inférieur à ceux d’Andréasberg.

Les canaris du Tyrol sont aussi très renommés ; cependant, si nous en croyons l’auteur déjà cité, on y élèverait assez peu.

Les éleveurs des pays précités ont remarqué : que les canaris verts (nuance ancestrale) sont criards ; que les cannelles et les jaune foncé sont très délicats, — j’ai eu moi-même une femelle cannelle qui ne m’a jamais pondu que des œufs clairs ; — que les sujets à yeux rouges sont faibles. Ceci n’est pas extraordinaire, puisqu’ils ont une tendance à l’albinisme. Enfin les lignées de chanteurs doivent être particulièrement cultivées.

On instruit les jeunes oiseaux, soit avec une serinette, soit avec un moniteur. Ce dernier procédé est infiniment préférable. L’éducation est longue et peut durer jusqu’à deux ans.

J’ai ouï dire que les chardonnerets, les linots et les verdiers s’accouplent avec des canaris femelles. Pour le chardonneret, point de doute : vous connaissez tous les mulets, qu’on en obtient. Je ne sais rien de positif sur les deux autres. Cependant, j’ai, en ce moment, un mâle linot que je me propose d’accoupler avec une femelle canari.

Le canari est un oiseau très doux et très aimable, qu’on peut aussi dresser à mille gentillesses.

Les tarins (Spinus spinus et Spinus viridis) ont le bec plus pointu que les serins. Il en existe plusieurs variétés dont une seule habite l’Europe : le tarin commun. Cet oiseau, d’un ensemble vert-jaune, à tête noire, les ailes rayées de jaune, nous vient des pays nordiques : c’est donc un oiseau de passage. C’est un arboricole, vif, remuant, gai et très sociable. Aussi est-ce un oiseau de cage charmant. Il devient vite très familier, on en fait ce qu’on veut. « C’est le plus familier des petits passereaux », dit J. Delacour, et je l’ai constaté moi-même.

Avant de passer aux linottes, nous dirons un simple mot sur le venturon (Acanthis citrinella) que l’on peut rattacher à ce genre.

C’est un très joli oiseau de la taille du tarin, vert olive mêlé de jaune, marqué de rouge en tête, gris à la nuque et sur les côtés. Il habite les hautes montagnes, et principalement les Alpes. J’ignore absolument quelles sont ses qualités d’oiseau de cage.

Dans le genre « linottes », nous observons : la linotte vulgaire ou linot ordinaire (Acanthis cannabina, Cannabina linota) ; le linot à bec jaune ou linotte de montagne (Acanthis flavirostris, Cannabina montium) ; le sizerin cabaret (Acanthis rufescens) et le sizerin boréal (Acanthis linaria), tous oiseaux d’Europe.

La linotte vulgaire est un oiseau d’apparence très modeste ; mais combien il gagne à être connu ! Le mâle est relativement beau ... à certains moments. Alors son front, sa gorge et sa poitrine deviennent carmins : c’est la linotte à tête rouge, si recherchée des amateurs d’oiseaux du Roussillon. Malheureusement, ces belles couleurs disparaissent en captivité, au moins presque en totalité, et elles n’apparaissent jamais chez les sujets nés en cage. Ce qui charme surtout chez le linot ; c’est son chant doux, discret, sans éclat de voix, harmonieux et musical. L’oiseau est d’ailleurs très doux, très familier, très sociable, très réfléchi.

La linotte de montagne remplace la précédente dans les pays du Nord et a sensiblement les mêmes qualités ; mais son chant, n’est pas aussi agréable et elle est un tantinet querelleuse.

Le sizerin cabaret, ou simplement cabaret, couve dans les Alpes. C’est un joli oiseau marqué de rose en tête, vif, très espiègle et par cela assez ennuyeux pour ses compagnons de cage et même de volière. Son chant est médiocre.

Le sizerin boréal est plus clair ; quoique originaire du Nord, il descend plus au Sud que le précédent. Il est aussi beaucoup plus sociable et fort intéressant en captivité.

(À suivre.)

J. DHERS.

(1) Voir Chasseur Français d’Avril 1940.

 

Le Chasseur Français N°599 Mai 1940 Page 316