Faisans et perdrix.
— Je réponds avec un long, très long retard, à un
correspondant d’Ambert qui, après avoir acquitté le montant de sa consultation,
a omis de me donner son adresse, de sorte que je n’ai pas pu lui écrire
directement. Voici de quoi il s’agit :
« Je voudrais élever des faisans et des perdrix dans
un parquet de 10 mètres sur 24 mètres. Quelles constructions, quels
semis et plantations dois-je effectuer pour réussir mes
élevages ? ... »
Ne réunissez pas dans un même parquet des faisans et des
perdrix : ils ne feraient pas très bon ménage. Aux premiers, pour une
population d’un coq et de quatre poules faisanes, il faut un parquet de 20 mètres
carrés, dont 4 mètres carrés couverts, plus un abri ou auvent de 2 mètres,
pour le placement de la mangeoire. Le terrain choisi doit être sain, légèrement
en pente, protégé du Nord par des murs, des panneaux ou des boqueteaux. La
logette peut être construite en briques de champ, en carreaux, en plaques de
fibrociment, en pisé, en clayonnage, etc., autant que possible avec couverture
de chaume. Le sol de la hutte sera décapé d’un fer de bêche, pour être remplacé
par du sable ou du mâchefer tamisé, additionné de 2 à 3 kilogrammes de
fleur de soufre.
Le pourtour et le dessus de chaque parquet, haut de 2 mètres,
seront fermés par du grillage galvanisé à simple torsion, d’un centimètre de
maille. Un sentier serpentant, partant de la logette pour y retourner, après
avoir fait le tour du parquet, sera décapé d’un fort fer de bêche, recouvert de
sable graveleux pour permettre aux faisans de cheminer les pieds au sec, en se
dissimulant. Quant au reste du terrain, il devra être engazonné de longue date.
Les jeunes semis ne résistant pas, on découpera du gazon par bandes, et on
activera sa reprise par des battages et des arrosages. Enfin, les arbustes à
repiquer, sapins, thuyas, seringas, boules-de-neige, etc., ne devront pas être
trop rapprochés, afin de ne pas gêner la pousse de l’herbe, leur but étant
d’ombrager et d’agrémenter le paysage.
Les parquets pour perdrix peuvent être établis de la même
manière ; mais, comme il s’agit d’oiseaux monogames, et que les femelles
sont assez capricieuses, on devra surveiller de près la pariade, car la
réussite des couvées n’est pas toujours certaine.
Rachitisme des poulets.
— M. Auguste Castel, à Murviel-les-Béziers
(Hérault), m’écrit :
« Lisant vos chroniques avec intérêt, je pense que
tous les petits éleveurs, comme moi, auront leur attention attirée par la mort
de mes poussins. Ayant mis à couver 17 œufs au début de l’hiver, sous une
poule placée dans un hangar froid, je n’ai eu que 5 poussins. Ceux-ci, au
bout de quinze jours, ne tenaient plus sur leurs jambes, leurs doigts se
recroquevillèrent et ils basculaient en avant. Tout en continuant à manger, ils
faisaient peine à voir. Finalement, ils sont morts les uns après les autres.
C’est navrant, car j’aurais bien voulu des poulettes précoces. »
Lorsque, comme vous, on entreprend des incubations en
décembre-janvier, il ne faut pas trop charger les couveuses naturelles, car une
poule de moyenne taille aurait assez de 12 ou 13 œufs. En effet, au cœur
de l’hiver, l’ambiance n’est jamais bien bonne pour la réussite des
couvées ; le froid contrarie le cochage, ainsi que le défaut de
vitamines ; il y a beaucoup d’œufs clairs, et ceux qui ont été fécondés ne
sont pas toujours bien embryonnés, d’où les morts en coquille. Ajoutons à cela
les refroidissements alternatifs et prolongés des œufs imparfaitement couverts
par la mère poule, les coups de froid pendant l’élevage, les courants d’air et,
surtout, l’alimentation défectueuse des poussins.
Tous ces facteurs réunis ont une influence
désastreuse ; mais 5 poussins rachitiques sur 17 œufs mis en
incubation, ce n’est pas un rendement. Une autre fois, si vous entreprenez des
couvées d’hiver, ne mettez pas plus de 12 œufs à vos poules et placez-les
dans un local tempéré. Ayez soin, en outre, de donner à vos reproducteurs une
nourriture équilibrée pour la ponte et, à défaut de verdures, distribuez-leur
du grain germé pour les revigorer.
Aux poussins, donnez une pâtée contenant de la farine de
viande ou de poisson, pour remplacer les proies vivantes absentes, et ajoutez
un peu de poudre d’os, ainsi que des verdures hachées (feuilles de chou, de
salade, etc.). En additionnant l’eau de boisson de 3 grammes par litre de
sulfate de fer, au titre de tonique et de désinfectant, vous serez à peu près
certain d’empêcher le rachitisme, ou tout au moins d’en limiter les dégâts à un
pourcentage infime de sujets mal venus ou estropiés à leur naissance.
Lapin à fourrure ou à viande ?
— « À la Société d’aviculture de Nice, on me
déconseille l’élevage du lapin à fourrure, parce que les peaux produites ici
sont peu estimées des pelletiers et que l’on doit attendre huit à dix mois
avant de pouvoir tuer les bêtes. Qu’en pensez-vous ? »
Zoologiquement parlant, les lapins n’acquièrent pas une
fourrure dense et serrée pour orner les épaules féminines, mais tout uniquement
pour se protéger des abaissements saisonniers de température. On comprend
d’ailleurs que, dans les pays septentrionaux et froids, où les hivers sont plus
longs et plus rudes que dans les pays méridionaux et chauds, les lapins y
conservent plus longtemps leur épaisse fourrure d’hiver. C’est sans doute pour
cela que, si l’on a en vue les livraisons pour la pelleterie, il vaut mieux
s’installer dans la zone montagneuse du Centre et du Sud-Est que sur le
littoral méditerranéen. On est plus certain d’avoir de belles toisons, puisque
la mue se produit d’autant plus vite que le climat est chaud. Il en résulte
que, sous les climats froids, les lapins peuvent être sacrifiés pour la
pelleterie pendant cinq à six mois, tandis que les dépouilles perdent déjà de
leur valeur au bout de trois ou quatre mois, sous les climats tempérés et
chauds.
Quoi qu’il en soit, la production des fourrures pour la mode
comporte toujours des interruptions plus ou moins prolongées, d’une durée
variant entre six et huit mois, pendant lesquels les dépouilles ne peuvent être
vendues que comme peaux de coupe.
D’autre part, comme il faut entre six et huit mois, suivant
la précocité des races, pour amener les fourrures du lapin à leur maximum de
valeur pileuse, à condition de les nourrir rationnellement, on comprend qu’il
vaille mieux s’adonner à la production mixte, que de travailler exclusivement
pour la pelleterie. Tout ce que l’on peut faire, c’est de reculer d’une couple
de mois, aux approches de l’hiver, l’époque du sacrifice ; mais il vaut
mieux les abattre pour la viande, quand ils sont au point, que de les conserver
pendant cinq ou six mois de plus. La différence entre la valeur d’une peau à
tanner et celle d’une peau de coupe ne payerait pas le surcroît de nourriture.
Des porcs ou des poules ?
— « Actuellement en traitement en Haute-Savoie,
je serais désireux de troquer, après guérison, mon emploi sédentaire en ville,
contre des occupations plus saines à la campagne. On me conseille l’élevage du
porc ou celui des poules. Lequel conseillez-vous ? »
Ni l’un ni l’autre, ou les deux à la fois, et je m’explique.
Si vous n’êtes pas habitué à la dure, peu apte aux travaux de la culture, et
ignorant des choses de la campagne, abstenez-vous. Les résultats que vous
obtiendriez ne pourraient être que désastreux.
Mais, si vous avez de la constance, beaucoup de volonté, des
aptitudes pour les travaux manuels, de la patience et du goût pour rechercher
et assimiler les connaissances terriennes, indispensables à la réussite des
cultures et des élevages, et que vous trouverez sur les bons ouvrages, vous
pourrez réaliser votre futur projet, avec l’espoir d’y gagner largement votre
vie.
Dans ce cas, au lieu de vous spécialiser dans une branche,
par exemple dans le porc ou la poule, il vaut mieux mener de front les deux
élevages. C’est une double garantie contre les bizarreries de l’adversité, sans
grand surcroît d’ouvrage, puisque les animaux précités, qui appartiennent tous
deux à la catégorie des omnivores, peuvent être nourris absolument de la
même manière. En effet, des poules pondeuses consommeront la même pâtée que des
porcelets, ou des coureurs en accroissement, et les poulets à l’engraissement
feront leurs choux gras de la pâtée des porcs prenant le gras.
En matière d’élevage, ainsi qu’en culture, il vaut toujours
mieux ne pas mettre tous ses œufs dans le même panier, ou avoir plusieurs
cordes à son arc. Si une branche ne donne que des résultats médiocres, il peut
y avoir compensation de la part de l’autre, et c’est pourquoi je reste partisan
des exploitations conjuguées.
Pâtées pour poules et pour porcs.
— « Voudriez-vous m’indiquer une pâtée pour poules
et pour poussins, ainsi qu’une autre formule de nourriture pour porcelets et
porcs à l’engrais ? Je tiendrais à préparer moi-même ces provendes,
disposant d’un petit moulin. »
Les porcs et les volailles ayant les mêmes besoins, ainsi
qu’il a été dit ci-dessus, procurez-vous de l’orge, qui servira de base au
rationnement de ces animaux, pour la mélanger, après son passage au moulin,
avec les autres denrées et produits que vous achèterez d’autre part dans le
commerce. Vous aurez un mélange pulvérulent, de distribution facile dans des
mangeoires automatiques.
Ration pour jeunes poussins, jusqu’à trois semaines, et pour
cochonnets pendant les quinze jours qui suivent le sevrage, si on ne dispose
pas de lait écrémé :
Farine d’orge entière |
50 |
kilogrammes. |
Petit son et remoulages |
25 |
— |
Tourteau de soya ou de coprah |
10 |
— |
Poudre de lait écrémé |
10 |
— |
Minéraux associés |
5 |
— |
Total |
—— 100 |
kilogrammes. |
Aux poules pondeuses et aux coureurs, jusqu’au poids de 75 kilogrammes,
distribuez la même nourriture, mais en remplaçant la poudre de lait écrémé par
des farines de viande et de poisson.
Pour engraisser les poulets et les porcs, modifiez encore la
ration, en réduisant à 5 kilogrammes la proportion des farines animales,
et en mettant 5 kilogrammes de farine d’orge en plus.
Mondiage d’ARCHES.
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