Il serait bon de lire dans le Chasseur Français un
article sur le tremblement des mains, m’écrit un lecteur qui m’expose les
ennuis qu’occasionne ce symptôme : la fatigue et l’énervement causés par
ce tremblement plus ou moins apparent, la difficulté de soulever un objet sans
l’agiter, la difficulté pour porter quelque chose à la bouche, la crainte
d’accepter un verre ou une tasse de thé quand on se trouve en société pour ne
pas montrer son tremblement, etc. Après quoi, il me demande d’indiquer les
causes du tremblement et les moyens d’y porter remède.
À cette dernière question, il est difficile de répondre, car
il existe un grand nombre de causes qui peuvent occasionner le tremblement et,
si certaines bénéficient d’un traitement, d’autres sont beaucoup plus
difficiles à améliorer.
Pour trouver l’origine du tremblement, il faut un examen
très complet du sujet et une observation minutieuse des caractères du
tremblement.
Tout d’abord il existe, chez de nombreux sujets, un
tremblement dit physiologique, survenant chez des sujets normaux ; il
s’agit d’un mouvement à type vibratoire, très léger et très rapide, siégeant
aux mains, aux paupières et à la langue ; il se manifeste chez des sujets
jeunes.
Laissons de côté les tremblements passagers qui surviennent
à la suite d’une émotion ou au cours d’une fièvre, accompagnés de frisson.
Éliminons aussi le tremblement simulé et le tremblement
hystéro-traumatique, survenant après un accident chez un sujet qui réclame une
indemnité et qui, consciemment ou non, a tendance à exagérer les conséquences.
Le tremblement sénile, qui peut survenir à un âge
relativement peu avancé, est généralement d’origine héréditaire ; il
frappe les deux membres supérieurs et se manifeste surtout à la mâchoire et aux
lèvres.
Ces diagnostics étant en général facilement éliminés, il
reste trois ordres de causes à discuter : les tremblements dus à une
intoxication, ceux qui relèvent d’une lésion organique du système nerveux et
ceux qui ont pour cause un état névropathique fonctionnel.
Parmi les tremblements d’origine toxique, les plus fréquents
sont les tremblements alcooliques : il s’agit d’un tremblement des deux
mains, fin, menu, vibratoire ; il atteint souvent la langue et les
lèvres ; aux mains, il est facile à déceler, dans l’attitude du serment,
les doigts écartés, il devient encore plus visible si on pose une feuille de
papier sur la main. En même temps, on trouve d’autres signes d’intoxication
alcoolique : pituites matinales, pyrosis (brûlure le long de l’œsophage),
cauchemars, augmentation de volume du foie, souvent douloureux à la pression,
de la rate, etc.
Dans la maladie de Basedow ou goitre exophtalmique, le
tremblement constitue un des signes caractéristiques ; c’est un
tremblement vibratoire, de petite amplitude, généralisé, existant au repos,
mais exagéré par les émotions. Il existe en même temps un goitre plus ou moins
volumineux, de l’exophtalmie, les yeux semblant sortis de l’orbite, et une très
forte accélération du cœur.
Lorsque le tremblement est dû à une lésion du système
nerveux, il faut distinguer s’il est intentionnel, c’est-à-dire si, n’existant
pas au repos, il apparaît au cours des mouvements volontaires et s’exagérant au
cours de ceux-ci ; le tremblement est alors généralement à grandes
oscillations ; on songe alors à une affection de la moelle épinière, comme
la sclérose en plaques ou du cervelet (atrophie, ramollissement, tumeur).
Le tremblement statique, au contraire, se manifeste au repos
et disparaît ou diminue lors des mouvements ; tel est le cas, en particulier
du tremblement dans la maladie de Parkinson ; c’est un tremblement lent,
de faible amplitude, souvent localisé au pouce et à l’index qui frottent l’un
sur l’autre comme dans l’acte d’émietter du pain ou de rouler une boulette. Ce
tremblement, qui siège presque toujours d’un seul côté, peut s’étendre au
membre inférieur du même côté ; il s’accompagne de divers autres signes,
surtout d’un état de rigidité musculaire qui donne aux mouvements une apparence
saccadée et aux traits un aspect figé caractéristique.
La maladie de Parkinson vraie survient dans un âge assez
avancé ; mais il en existe une forme se manifestant chez des sujets
jeunes, à la suite d’une encéphalite léthargique, dont on retrouve les
symptômes dans l’histoire du malade.
D’autres affections du système nerveux s’accompagnent encore
de tremblement : en premier lieu, la paralysie générale progressive et
aussi l’hémorragie cérébrale après la période d’hémiplégie ; les signes
concomitants sont assez nets pour en permettre le diagnostic facile.
Enfin, il est une dernière forme de tremblement, qualifié de
« post-commotionnel », survenant après une chute et liée sans doute à
de faibles altérations cérébrales : on en a observé un certain nombre de
cas à la suite de la dernière guerre.
Cette longue énumération montre qu’il est impossible
d’indiquer un traitement qui convienne à tous les cas et, si, dans les cas de
tremblement toxique, la suppression de l’agent causal amène la guérison, il
faut avouer qu’on est souvent désarmé ou insuffisamment armé lorsqu’il s’agit
d’une lésion organique du cerveau ou de la moelle. Certains médicaments, comme
l’atropine ou la scopolamine peuvent souvent atténuer fortement ce désagréable
état de choses, mais ils doivent être maniés prudemment et toujours sous la surveillance
d’un médecin.
Dr A. GOTTSCHALK.
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