Nous décrivons ici deux races de chiens à poils longs originaires
de la Chine, qui, en dépit de leur indéniable beauté, ne sont guère connues que
de rares Amateurs.
La première est désignée en France et en Angleterre
sous des noms différents ; les Britanniques dénomment, en effet, terrier
de Lhassa ce que nous appelons chien de Mandchourie. Il y a de quoi déconcerter
les géographes, qui situent Lhassa la métropole religieuse du Thibet, tout au
sud de la Chine, au voisinage de l’Inde, et, comme tout le monde le sait, la
Mandchourie, aux confins nord-est du Céleste Empire, en bordure de la Sibérie
orientale. Mais les convulsions qui ont de tout temps agité ce malheureux pays,
et surtout l’emprise exercée par les conquérants mandchous sur les autres provinces
suffisent à expliquer pourquoi un chien, probablement né dans les lamasseries thibétaines,
est devenu par la suite le favori des palais impériaux.
Encore appelé chien de Mongolie et, comme celui étudié plus
loin, chien Chrysanthème, il est un peu plus long que sa hauteur au garrot,
laquelle va de 23 à 28 centimètres, le poids étant de 6kg,500
environ.
Son aspect général est celui d’un petit barbet, mais
quelques particularités doivent être mentionnées. Le crâne, étroit sans être
trop plat, se continue par un museau plutôt long, avec un nez proéminent et
pointu. Les yeux sont de couleur foncée, petits et enfoncés dans les orbites,
les oreilles plantées bas et tombant le long des joues. Le cou, assez bref, se
soude à un dos un peu voûté et continué par un rein vigoureux. L’arrière-train,
bien développé, porte une queue renversée sur le dos.
La beauté de ce chien consiste surtout dans une fourrure
opulente, dense et assez longue. Les poils, doux au toucher, mais non soyeux,
sans boucles ni ondulations, sont très abondants sur le crâne, où ils sont
séparés par une raie, comme chez le Skye et le Yorkshire ; les pattes en
sont couvertes jusqu’aux doigts, et paraissent de ce fait épaisses et trapues.
Enfin, sur le tronc, ces poils retombent de chaque côté du
corps, mais ne descendent pas jusqu’à terre, comme chez les Terriers anglais
précités.
La teinte de la robe est variable ; si les plus beaux
sujets sont noirs, gris foncé ou gris ardoisé, il en est de teinte plus claire,
et assez souvent de grandes taches blanches sont disséminées sur le fond plus
ou moins sombre du pelage.
Le griffon du Thibet est encore plus remarquable. Il s’agit
également d’un animal à longs poils, mais l’aspect général est assez différent.
Haut de 25 centimètres environ, et pesant de 2 à 4 kilogrammes, il se
présente avec une tête plus globuleuse, un crâne plus arrondi, des yeux
proéminents et un museau très court relié au crâne par une cassure profonde.
La fourrure, d’une magnifique abondance, est
extraordinairement ébouriffée. Ce n’est qu’un amoncellement de mèches
bizarrement dispersées, surtout longues sur la queue, disposées en un riche
panache, au crâne, où elles retombent sur la face, dissimulant, presque
entièrement les yeux et la truffe, sur les pattes, enfin, où les poils sont disposés
en épis et en rosaces du plus étrange effet. La teinte blanc et noir est
particulièrement prisée, mais les sujets blanc et fauve, ainsi que blanc et
gris, sont également acceptés.
Il n’est rien de plus affiné et de plus aristocratique que
ces deux races de chiens d’Asie. Le premier est plus vif et plus enjoué,
parfois un peu batailleur ; le deuxième, plus noble, plus doux, plus
gracieux. Il s’agit d’animaux de haut luxe, qui n’ont guère de chances de se
vulgariser dans nos pays, car ils nécessitent, avec leur abondante fourrure,
des soins assez absorbants, et, au surplus, dans les conditions actuelles de
leur élevage, entièrement tributaire de l’Extrême-Orient, les prix en sont à
peu près prohibitifs.
V. R.
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