Accueil  > Années 1940 et 1941  > N°602 Octobre 1941  > Page 472 Tous droits réservés

Navigation d’amateur

Un yacht mixte de douze mètres.

Parmi les études récemment terminées et dont l’exécution doit être bientôt entreprise dans divers chantiers, nous avons remarqué celle d’un yacht mixte de 12 mètres de longueur, 3m, 42 de largeur et 1m,50 de tirant d’eau. On peut voir, par la réduction partielle des plans qui illustrent cet article, que ce yacht a des formes élégantes et puissantes à la fois, qui rappellent celles d’Anahita (1), mais avec des fonds plus plats et une largeur un peu plus forte. Le propriétaire désirait, en effet, une grande stabilité de formes. C’est pourquoi l’architecte a dessiné un bateau raide sous la toile, qui ne gîtera pas à la moindre brise et qui permettra à une famille de cinq personnes, sans matelot, de vivre à bord dans les meilleures conditions de commodité et de confort que puisse offrir un yacht de cette dimension.

Le tracé des lignes a été influencé par les nécessités de l’échouage dans un mauvais havre de la côte bretonne, et le tirant d’eau était limité par la perspective de passer en Méditerranée par les canaux. La construction prévue est des plus robuste : pièces maîtresses en chêne, membrures en acacia, bordés de carène et de pont en pitchpin, accastillage en teck.

Le gréement choisi est celui de cotre marconi, pour sa grande simplicité de manœuvre et son rendement. Le mât, qui porte deux barres de flèches, traverse le rouf. Cette solution nécessite des équerrages en fer pour renforcer les barrots du rouf et du pont et empêcher toute déformation. Mais elle présente le gros avantage d’améliorer le confort intérieur. Le mât est tenu à l’avant par deux étais, et à l’arrière par un patara fixe et deux bastaques. La voilure comprend un foc-trinquette bomé amuré sur l’étrave et une grand’voile marconi de 42m2,91. Par brise portante, un grand foc de largue de 32m2, 91 a été prévu. La surface des voiles est relativement faible par rapport au déplacement qui atteint 9.650 kilogrammes. Mais l’élément vitesse a été ici légèrement sacrifié en faveur des éléments sécurité de mâture et facilité de manœuvre. Rappelons, au risque de nous répéter, que l’architecture navale est faite de compromis et que toute qualité se développe au détriment d’une autre.

Le pont de ce yacht est bien dégagé, avec des coursives de 0m,60 de large et des pavois surmontés de chandeliers qui donneront une sécurité maximum à l’équipage. L’arrière du rouf comporte un deck de 1m,90 de large sur 1m,50 de long. Ce deck, mis à la mode par Anahita, peut abriter quatre personnes par mauvais temps. Il est ouvert sur l’arrière, mais, suivant le genre de navigation, on pourrait prévoir une fermeture mobile. Entre le deck et le mât prend place un youyou de 2m,80 sur 1m,45.

À partir de l’arrière, on trouve : un cockpit de 1m,35 sur 0m,70 avec deux réservoirs à essence dans les soutes ; le deck, dont le plancher mobile donne accès à un moteur de 22 CV ; puis la descente, qui mène dans la vaste cabine centrale. On y trouve, à droite, une couchette fixe, la cuisine avec réchaud butane à deux feux, évier, casiers à ustensiles ; à gauche, les w.-c.-toilette avec armoires diverses et penderie ; puis c’est une vaste table pliante qui occupe le centre de la cabine, entre deux banquettes-couchettes surmontées d’étagères et d’armoires. Cette cabine-salon a 3m,30 de long et une hauteur de 1m,85.

La cabine du propriétaire lui fait suite avec deux grandes penderies dont les portes se rabattent sur le mât et isolent pour la nuit les deux cabines. Les deux couchettes fixes ont 1m,90 sur 0m,80 avec tiroirs et placards. Dans la pointe avant on trouve un coqueron à matériel et le puits à chaînes. Ces dispositions classiques choisies avec un grand sens pratique donneront un yacht confortable où les passagers trouveront leurs aises. Le jour, le salon et la cabine formeront une vaste pièce de 5m,70 de long bien éclairée et aérée par dix grandes glaces ouvrantes et une claire-voie.

Ce yacht, prévu pour recevoir cinq passagers pendant les croisières d’été, pourrait être habité toute l’année par une famille de deux ou trois personnes, les trois couchettes utilisées étant exclusivement celles de la cabine avant et celle de l’arrière. La grande cabine centrale servirait uniquement de salle à manger et de salon. Quant au prix de revient d’une telle construction, il est difficile actuellement de l’évaluer. Mais nous pouvons prendre comme base d’approximation une équivalence à peu près constante : c’est le prix moyen d’une villa d’été au bord de la mer, villa destinée à recevoir avec le confort moderne une famille de cinq personnes.

A. PIERRE.

(1) Voir Le Chasseur français, no 571.

Le Chasseur Français N°602 Octobre 1941 Page 472