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Les agriles

Ennemis de nos arbres et arbrisseaux fruitiers.

Les agriles, coléoptères serricornes de la famille des Buprestidés, constituent un genre comptant un grand nombre d’espèces réparties sur toute la surface du globe. Ces espèces sont souvent différentes les unes des autres par des caractères si peu marqués que les entomologistes n’ont pas encore réussi à les classer de façon définitive.

Leur structure rappelle bien celle de tous les buprestes des autres genres, mais ce qui les en distingue, ce sont la petitesse relative de leur taille, l’étroitesse et l’allongement de leur corps. Leur tête s’orne d’antennes dentées en scie, et leur écusson, en général, se détache nettement du sommet des élytres. Comme chez beaucoup d’unités de cette importante famille, le revêtement de certains agriles se colore richement de bleu, de vert, de mordoré, de tons bronzés ou de couleur feu, à reflets plus ou moins métalliques. Telles les larves du Capdonis tenebrionis, celles de ces élégants insectes ne prospèrent qu’au détriment du bois vivant, mais sur une bien plus grande échelle, aussi quantité d’essences fruitières, ornementales et forestières, connaissent leurs attaques.

Deux espèces assez fréquentes sous notre climat, l’agrile sinueux du poirier et celui du framboisier vont parfaire notre entretien.

1. Branche d’une pyramide de poirier William attaquée par le bupreste du poirier. Insecte parfait et larve.

2. Gale fusiforme produite par l’attaque d’une larve de bupreste du framboisier et cheminement de cette dernière dans une tige.

Agrile sinueux ou bupreste du poirier.

— De 7 à 10 millimètres de long, l’agrile sinueux est un joli insecte teinté de violet pourpre à reflets brillants. Sa présence dans les cultures se manifeste fin mai - début de juin. Trois semaines, un mois après cette venue, mâles et femelles s’accouplent.

Par temps favorable, l’incubation ne dure, semble-t-il, qu’une dizaine de jours. Un petit nombre de larves vont sortir des coques. Beaucoup d’entre elles ont-elles été parasitées ? La chose est possible. Ce qui paraît fort probable, c’est que, parmi les larves normalement écloses, quelques-unes seulement pourront entreprendre leur travail d’excavation, car de nombreux ennemis les guettent. La rareté d’invasions d’importance, à mon sens, le prouverait.

Suivons maintenant les évolutions d’une rescapée en son entreprise. Des divergences de vue à ce sujet partagent les avis. La jeune larve, déjà pourvue de mandibules résistantes, entame un point de l’écorce et, petit à petit, atteint la zone cambiale. Sous la couche corticale, elle commence alors sa galerie. Cette dernière, sinueuse, décrit sur la branche attaquée des courbes sur une même face, ou la contourne en spires de plus en plus allongées. Ce sillon s’enfonce progressivement dans l’aubier jusqu’au point terminal, lequel est une logette dans laquelle s’opérera la nymphose.

Dans quel sens la mineuse chemine-t-elle ? Quelques entomologistes disent : de haut en bas, d’autres de bas en haut, d’autres, enfin : indifféremment dans les deux sens. Je ne saurais me prononcer, n’ayant eu que deux fois l’occasion de m’en assurer.

En mon jardin, sur une branche de l’étage inférieur d’une pyramide à quatre pans de William, à 70 centimètres du point de départ voisin du tronc, j’ai réussi à capturer une larve en voie de transformation. À quelque temps de là, sur une première branche externe d’une palmette à quatre branches de Passe-crassane, vers le haut, capture d’une nymphe cette fois et presque évoluée. Grâce à des soins voulus, les deux branches attaquées s’en sont tirées sans trop de mal.

Exceptions ? peut-être.

Les larves d’agriles ont des segments mous. Leur tête enfouie sous un large protothorax laisse poindre des mandibules noires de consistance cornée. Sur le dernier anneau, une paire de légères pinces leur permet sans doute de refouler en arrière les résidus de leurs digestions.

En septembre, la larve du bupreste du poirier atteint son complet développement : 15 à 22 millimètres.

Elle ne va pas tarder à confectionner le berceau dans lequel, enclose, elle changera d’état dans le cours de la mauvaise saison.

En mai-juin, l’insecte parfait, après avoir pratiqué son orifice de sortie, ira s’ébrouer dans l’air. Ainsi, sous ses deux premières formes, l’agrile aura vécu une année.

TRAITEMENT.

— Il consiste à rechercher la larve ou la nymphe en décortiquant à la serpette toute la traînée s’imprégnant dans l’écorce et le bois. La ravageuse mise à nu, il n’y aura qu’à l’occire. Cela fait, toutes les parties corticales détériorées seront enlevées jusqu’au bois sain. Après avoir frotté fortement ce canal avec une poignée d’oseille, il n’y aura plus qu’à calfeutrer la plaie avec une couche de mastic à greffer. Si le mal est irrémédiable, une ablation s’impose.

Agrile du framboisier.

— Ce bupreste étudié tout spécialement par M. le professeur Vercier, en Côte-d’Or, peut causer de sérieux ravages dans les plantations. L’adulte, visible en juillet, pond en août sur les pousses herbacées. C’est un insecte d’environ 7 à 8 millimètres de longueur, large à peine de 2 millimètres, de teinte vert-olive à reflets bronzés. Les larves blanches, aplaties, ont de 12 à 15 millimètres de long.

TRAITEMENT.

— Toutes les tiges porteuses de galles seront taillées en dessous de ces dernières. Fin mai-début de juin, les tiges flétries devront disparaître. Après chaque opération, les débris iront au feu. De plus, dans le but d’éviter la contagion, il faudra avoir soin de détruire par le feu toute plantation que l’on aura cessé de cultiver.

O. FOUCHER.

Le Chasseur Français N°602 Octobre 1941 Page 478