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Lettres de ma plate-bande

Destruction de l’oxalis
Le boubour
Culture des endives
Culture de la morille
Cultures dans l’eau
Les lentilles d’eau
Destruction des moustiques

Destruction de l’oxalis.

— En envoyant son 48e abonnement au Chasseur Français, M. Leyrisse, de Pamiers (Ariège), demande si un lecteur ne pourrait pas indiquer un moyen radical de détruire l’Oxalis Crenata, autrement que par les sarclages, car cela rendrait de signalés services à nombre de personnes dans son cas.

« Cette mauvaise herbe, pourvue de racines tubéreuses, infecte les terres et les jardins de notre région, où elle se reproduit avec une déplorable ténacité. L’arracher, c’est la multiplier ... »

L’oxalis est, en effet, une plante nuisible passablement encombrante, surtout dans les jardins, car ses modes de reproduction multiples, par graines, racines et tubercules, rendent les moyens mécaniques peu efficaces, à moins que l’on n’effectue cultures sur cultures, sans interruption, afin d’empêcher la plante de se soutenir par sa chlorophylle, en la tranchant entre deux terres à la rasette, avant qu’elle se montre. Enfin il y a les procédés chimiques ayant pour but d’empêcher l’oxalis de végéter, pendant un an au moins, en effectuant des pulvérisations de chlorate de soude à 2 p. 100, ou d’un bon herbicide, comme on en trouve dans le commerce, à l’apparition de ses organes foliacés. Mais, alors, on devra renoncer à effectuer des cultures pendant toute la durée du traitement.

Si l’on veut continuer à emblaver le terrain, on appliquera 25 à 30 kilogrammes de chaux vive à l’are, pour l’enfouir aussitôt par un labour, si le sol est acide. S’il est calcaire, on attendra la réapparition des oxalis et, le matin, à la rosée, on épandra 10 kilogrammes de sylvinite finement pulvérisée, et bien sèche, à l’are. Dans le cas où la destruction ne serait pas complète, on répéterait le même traitement l’année suivante,

Le boubour.

— M. Lurat, à Phulam, Cholen (Cochinchine), m’adresse une note rectificatrice, au sujet d’une rubrique paru en novembre 1939 sur les « haricots exotiques » en réponse à M. André Charles.

« Il ne s’agit pas du Phaseolus lunatus, mais du Phaseolus radiatus, appelé doo xahn par les Annamites, lequel a la forme d’un petit pois. On le vend dans les épiceries comme les pois cassés, et les indigènes le consomment également germé, ce qui le rend très digeste. Si le Phaseolus lunatus est légèrement toxique, le boubour ne l’est nullement. Il paraîtrait même, d’après le journal Guérir, que c’est le seul farineux pouvant être consommé par les diabétiques. »

Remerciements sincères à M. Lucat pour son intéressante communication, qui met au point une question pendante, culturale et gastronomique.

Culture des endives.

— Un abonné du Var, M. Henri Furt, écrit judicieusement : « J’ai souvent constaté sur les marchés que les endives, vendues 12 francs le kilogramme, venaient de Belgique, malgré les frais élevés de transport. Comment se fait-il que la Belgique ait le « monopole » de cette culture ? Pouvez-vous nous fournir les directives à suivre pour arriver à produire de la belle Witloof ? Ça ne doit pas être impossible. »

Assurément, la réussite dépend de la technique. Ne semez pas trop tôt, les racines pourraient monter. Attendez le début de juin pour semer en terre meuble, assez riche, bien approvisionnée en acide phosphorique, sans fumier frais, de la graine d’endive sélectionnée, en lignes espacées de 35 centimètres. Éclaircissez à 8 centimètres et binez tout l’été, sans toutefois couper les feuilles, ainsi qu’on a recommandé de le faire, pour les lapins. Arrachez les racines en novembre et mettez-les en jauge, en attendant le forçage.

Pour obtenir de belles endives, il faut des racines de bonne venue, ne mesurant pas moins de 25 millimètres de diamètre au collet. Raccourcissez-les en biseau, à la longueur uniforme de 15 centimètres, puis enlevez les feuilles, en conservant seulement l’œil du milieu. La mise en place se fera dans des tranchées creusées en cave, en silo, en pleine terre abritée, ou encore dans des châssis de couche. Piquez les racines verticalement, dans un lit constitué par un mélange intime de terreau et de sable gras, en laissant entre elles 1 à 2 centimètres de distance, afin de pouvoir y couler le même mélange que celui du fond, jusqu’à 20 à 25 centimètres au-dessus du collet. Ainsi toutes les racines seront emprisonnées sans qu’elles se touchent dans des matériaux favorables à l’émission des radicules et à la formation des belles pommes blanches.

Le jour même de la mise en stratification des Witloof dans le terreau et le sable gras, mélangez à la fourche du fumier chaud et du fumier frais, en quantités à peu près égales. Attendez dix à douze jours avant de mettre ce fumier sur les racines stratifiées, pour constituer la couche de forçage sous une épaisseur de 30 à 35 centimètres. Au bout de vingt à trente jours environ, les pommes ont les trois quarts de leur développement. Retirez alors le fumier passé pour le mélanger à du fumier chaud, afin de pouvoir charger de nouvelles couches. À la place, mettez une litière longue et sèche et vous pourrez bientôt commencer à récolter pour la vente. La durée complète du forçage varie entre vingt-cinq et cinquante jours, suivant la température de la couche et le lieu où l’on opère.

Culture de la morille.

— M. J. Joyau, aux Ormes (Vienne), écrit : « Ayant puisé des tas de renseignements sur Le Chasseur Français, ne connaîtriez-vous pas un moyen efficace de cultiver la morille ? »

La morille est beaucoup plus lunatique que le champignon de couche, aussi sa culture est-elle assez aléatoire, limitée à des procédés empiriques, car on ne connaît pas encore les exigences de ses spores, pour proliférer en mycélium d’abord, et pour fructifier ensuite.

On peut multiplier la morille avec des chances sérieuses de succès en opérant sur une artichautière ou dans une plantation de topinambours ou d’autres plantes vivaces. Pour cela, on jette de-ci de-là, à l’époque où on récolte le champignon sauvage, des morilles bien mûres, commençant à perdre leurs spores. On compte qu’il en faut une tous les 2 ou 3 mètres carrés pour obtenir un bon ensemencement du terrain. Dans le but de favoriser la germination du cryptogame, il est recommandé d’arroser modérément pendant l’été, et à plusieurs reprises, avec de l’eau salpêtrée à 2 grammes par litre, plus particulièrement pendant les périodes de sécheresse.

Quand vient l’automne, on épand un peu partout à la pelle sur le terrain ensemencé du marc de pommes qui apporte les principes acides et le tanin favorables au développement du mycélium. Par-dessus, on ajoute une petite couche de feuilles mortes, que l’on retirera en partie au sortir de l’hiver, en mars-avril. Si les conditions climatiques et agrologiques ne viennent pas contrarier la croissance des morilles, on ne tardera pas à les apercevoir et la récolte se poursuivra jusqu’au 15 mai. Une fois les parcelles en production, il suffira d’humidifier de temps à autre avec une solution de nitrate de potasse à 2 p. 100 et d’épandre à l’automne une couche de marc de pommes et des feuilles, celles-ci étant ramassées au râteau au printemps.

Cultures dans l’eau.

— M. Decorse demande : « Y a-t-il un ouvrage qui traite des cultures dans l’eau, c’est-à-dire des plantes repiquées, non dans la terre, mais dans des bacs ou des bassins ? »

Mon correspondant veut sans doute parler des cultures sur cadres, tendus de liteaux ou de grillages flottants, au-dessus d’une eau fertilisée. Il s’agit là d’une spécialité ne concernant que les plantes aquatiques ou amphibies, lesquelles sont relativement peu nombreuses et sans grand intérêt légumier, si on en excepte les cultures d’amateur du cresson de fontaine et de la macre. Tous les végétaux aquatiques pouvant prospérer sur cadres, dans le genre des nénuphars, des trèfles d’eau, des aponogétons, etc., n’ont qu’un but décoratif. Comme ils viennent tout aussi bien, sinon mieux, dans la vase des pièces d’eau, ce n’est que par exception qu’on se donnera la peine de fertiliser l’eau avec des solutions salines pour les cultiver sur cadres.

Dans le cas où l’on voudrait s’adonner à la production du cresson dans des baquets ou des culs de bouteille, l’eau d’immersion serait fertilisée très légèrement avec 1 gramme de nitrate de potasse et 1 gramme de superphosphate par litre.

Les lentilles d’eau.

— Un vieil abonné de la Vendée, M. Le Boteif, écrit : « Vous est-il possible de m’indiquer le moyen de détruire les lentilles d’eau qui recouvrent en été toute la surface de mon étang ? »

Les lentilles d’eau, de même que les algues, sont des végétaux inférieurs, dits de « lumière », c’est-à-dire qu’ils poussent vigoureusement dans les pièces d’eau largement éclairées. Ces plantes meurent invariablement dans les bassins rendus obscurs par des couvercles ou des voûtes. Bien entendu, ce procédé n’est pas applicable aux étangs ; mais on peut néanmoins les assombrir, ou les ombrager, en plantant sur les rives des arbres touffus tels que saules, aunes, épicéas, etc.

Il y a bien le procédé chimique, qui assure la destruction des lentilles et des algues, en faisant dissoudre dans l’eau une petite dose de sulfate de cuivre, 2 à 3 grammes par mètre cube. Malheureusement, on ne peut guère l’appliquer qu’aux eaux mortes de faible volume, mais non aux étangs de grande capacité, où l’eau se renouvelle constamment.

Le seul moyen de destruction pratique, c’est l’empoissonnement en cyprins (vandoises, chevesnes et gardons), qui sont friands de lentilles, et le peuplement des pièces d’eau en palmipèdes, principalement les cygnes et les canards, qui sont des gobeurs de plantes flottantes.

Destruction des moustiques.

— D’après M. Raoul May (Annales de l’Institut Pasteur), on serait maintenant en possession d’un puissant insecticide, beaucoup plus efficace pour la destruction des larves de moustiques que tous les produits préconisés à ce jour, et d’un emploi plus commode, sans danger aucun pour les plantes aquatiques et les poissons. Ce produit, dénommé hexachlorétane, s’emploie en saupoudrage, mélangé à du talc, à la surface des pièces d’eau peuplées de moustiques.

Adonis LÉGUME.

Le Chasseur Français N°603 Novembre 1941 Page 539