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La culture des anémones

D’après la mythologie grecque, Adonis, fils de Myrrha, était d’une beauté si éblouissante que Vénus, fortement éprise de lui, quittait l’Olympe pour le suivre à la chasse. Malheureusement, le bel Adonis fut tué par un sanglier et de sa dépouille naquit une fleur anémone. Mais il fut rendu à la vie par la volonté de Jupiter et de Proserpine, avec la permission de quitter les enfers pendant six mois chaque année pour les passer auprès de Vénus.

Les anémones (famille des Renonculacées, tribu des Anémonées) ne sont pas des bulbeuses, car elles sont pourvues de griffes et de pattes, noms donnés aux sujets de leur aspect, aux rhizomes ou racines de certaines plantes, telles que les anémones, les renoncules, les asperges, etc.

On rencontre les anémones à l’état sauvage dans les bois, les prairies et au bord des rivières. Plantes vénéneuses, elles perdent leur âcreté par la dessiccation et sont alors mêlées aux foins.

Il y a de nombreuses espèces dans le genre anémone, telles que l’anémone des montagnes, l’anémone pulsatile, l’anémone des bois ou sylvie, l’anémone fausse renoncule, l’anémone couronne des fleuristes, etc.

L’anémone des montagnes (Anemone montana) ressemble beaucoup à la pulsatile, avec une fleur violet noirâtre et veloutée.

L’anémone pulsatile (Anemone pulsatilla), appelée aussi vulgairement pulsatile ou coquelourde, se trouve un peu partout dans les bois, les plaines et les coteaux. Sa floraison va de mars à mai, les fleurs, grandes et légèrement penchées, ayant le périanthe d’un violet pâle et lilacé.

L’anémone des bois (Anemone nemorosa), que l’on appelle plus fréquemment sylvie, jolie et élégante, petite plante vivace répandue dans les bois et dans les prairies, à tige haute de 0m,15 à 0m,25 et supportant une fleur à six pétales ovales, allongés, blanche à l’intérieur, purpurine ou rosée au dehors. Elle fleurit, suivant la température, de mars à mai. On la rencontre dans les bois des régions tempérées de l’Europe et du nouveau continent, principalement la variété à fleurs doubles. Comme la pulsatile, elle possède un poison vénéneux, nommé l’anémonine, qui fait des victimes parmi les bestiaux qui en mangent une certaine quantité, si l’on tarde trop à les secourir.

L’anémone fausse renoncule (Anemone ranunculoides) ne diffère de la précédente que par la couleur de ses fleurs qui sont jaunes, ce qui lui vaut aussi le nom de sylvie jaune.

L’anémone couronne des fleuristes (Anemone coronaria), originaire de l’Orient, qui est la plus estimée, a fourni plus de trois cents variétés, ayant des formes, nuances et couleurs différentes.

Les anémones peuvent se multiplier par graines ou par la séparation de leurs racines, appelées pattes ou griffes. Mais on opère généralement par la séparation des racines, système qui d’ailleurs donne de meilleurs résultats.

Les anémones sont de culture très facile et pas délicates du tout sur la nature du terrain, mais il est préférable, pour obtenir de beaux sujets, de les placer dans une terre légère. On peut planter les griffes à 6 ou 8 centimètres de profondeur, en observant une distance de 15 à 20 centimètres entre les plantes, depuis septembre jusqu’à mars. Évidemment la plantation automnale est meilleure, car elle donne une floraison plus belle et de plus longue durée, qui se montre de mars à mai-juin, tandis que les plantations faites trop tardivement à la fin de l’hiver ne donnent des fleurs qu’en juin. Mais, opérant en juillet-août avec des pattes ou griffes de plus d’une année de conservation, on peut déjà obtenir une floraison en décembre-janvier dans des terrains bien préparés. Ne pas oublier surtout de protéger les griffes contre les gelées par des pailles ou des feuilles mortes.

C’est surtout au moment de l’arrachage que l’on peut faire la division des griffes et chaque portée ayant un œil formera un futur plant. Veiller au moment de la plantation pour disposer les griffes d’anémone ; pour les jeunes plants d’une année, cela va tout seul, mais, pour ceux de deux années, il faut placer au-dessus le côté ayant des yeux, chose aisée à voir par les petites écailles qui se trouvent autour.

Quant aux semis, ils seront préservés des gelées par des châssis ou des paillis. Les graines d’anémone étant très légères, l’on pourra les semer en les mélangeant avec un peu de sable humide pour les maintenir au sol et ensuite les recouvrir d’une fine couche de terreau bien tamisé.

Les anémones et les adonis, transportés des bois et des prairies dans les parterres, ont fourni aux horticulteurs un grand nombre de jolies variétés. Les anémones possèdent des propriétés vireuses semblables à celles des renoncules ; l’anémone pulsatile (Anémone pulsatilla) est employée dans la thérapeutique.

Parmi les nombreuses variétés intéressantes, l’on peut citer comme anémones simples :

Anémone simple des fleuristes (Anemone coronaria), avec fleurs du violet passant par le rouge jusqu’au blanc et tiges florales de 25 à 30 centimètres. La fiancée : blanc pur. Anémone écarlate, anémone bleue, anémone de Caen, de coloris très variés et très nombreux, avec tiges florales de 30 à 40 centimètres.

Hollandia : très grandes fleurs rouge vif, centre blanc. Éclatante (Anemone fulgens) ; simple, écarlate d’un rouge magnifique.

Saint-Bavo : fleurs de coloris variés du rouge violacé au blanc.

Parmi les anémones à fleurs doubles, l’on peut recommander les variétés suivantes :

Sainte-Brigitte à fleurs semi-doubles, avec tiges de 30 à 40 centimètres, variété très vigoureuse. Coloris : blanc, mauve, rosé et rouge-ponceau.

Gouverneur : teinte écarlate.

Amiral : rose foncé.

Anémone double de Caen à tiges très rigides de 20 à 25 centimètres. Coloris : rose, rouge et violet

Hepatia triloba : fleurs bleues, hauteur 0m,10 à 0m,15. Anémone très recommandée pour bordures.

Hepatica angulosa : bleu foncé.

Apennina : bleu foncé.

La Bouillante, à fleurs d’un rouge éclatant ; variété très intéressante pour ses fleurs doubles.

Anémone double rose de Nice, à fleurs très volumineuses et tiges de 20 à 25 centimètres.

Anémone double à fleur de chrysanthème, à fleurs doubles et semi-doubles, avec de nombreux coloris : blanc, rose, rouge éclatant, saumon, violet, bleu foncé, et tiges de 30 à 40 centimètres.

Perle angevine, à fleurs de chrysanthème blanc pur.

Chapeau de Cardinal (Anémone capellana), rouge.

À citer, parmi les anémones du Japon qui servent à faire de très jolies bordures à 0m,50 pour arriver, la deuxième année, à 0m,75 et 1 mètre de hauteur (les sujets d’un an atteignent 0m,40 avec une floraison qui dure jusqu’en octobre en toute exposition) :

Japonica rubra (type), à grandes fleurs simples, rose foncé.

Japonica alba (Honorine Jabert), à fleurs simples, blanc pur.

Japonica Reine Charlotte, rose.

Japonica rosea (elegans), à fleurs simples, teinte rose.

Japonica Beauté parfaite, fleurs semi-doubles blanc pur.

Japonica Alice, fleurs semi-doubles, rose-carmin.

Japonica hupehense, rose lilacé, de floraison très hâtive.

Les anémones de Caen, simples ou doubles, à fleur de chrysanthème, sont très recommandées pour le commerce de la fleur coupée et il en existe des cultures importantes dans la région de Nice et en Anjou. La floraison étant très abondante, cette petite plante peut donc être considérée comme d’un très bon rapport. Les griffes ou pattes se trouvent partout dans le commerce, mais, naturellement, il est toujours préférable de s’adresser à une maison sérieuse sans avoir recours à la Hollande ou au Japon.

On peut rattacher à cette famille les Adonis ou Adonides (Adonis œstivalis), qui ressemblent aux anémones par leurs fleurs et aux renoncules par leur fruit. Jolie petite plante, ayant des fleurs rouge-sang marquées d’une tache noire à l’onglet, mais aussi vénéneuse, comme toutes les renonculacées ; ses fleurs servent aussi pour le commerce de la fleur coupée.

Eugène LECHEVIN.

Le Chasseur Français N°603 Novembre 1941 Page 542