Le logement du troupeau de moutons doit préoccuper
sérieusement l’éleveur de bêtes à laine. Dans certaines contrées du Midi, les
moutons, lorsqu’ils rentrent des champs, restent enfermés dans une cour où ils
trouvent de la litière pour se coucher et souvent un hangar pour s’abriter.
Dans le Nord et le Centre, on ne suit point cette méthode et la bergerie y est
regardée comme indispensable ; elle y est considérée comme un bâtiment
destiné à protéger les bêtes à laine contre les intempéries.
Elle doit être assez vaste pour contenir à l’aise les
animaux que l’on veut y renfermer, assez aérée pour que la chaleur ne s’y
maintienne point à un degré trop élevé, et convenablement ventilée pour que les
gaz pernicieux ne puissent jamais y séjourner. Souvent, on pratique au niveau
du sol un certain nombre d’ouvertures destinées à établir un courant d’air pour
expulser les gaz qui résident toujours dans les parties basses d’une bergerie.
Il faut établir des séparations pour mettre à part les
béliers, les mères avec les agneaux et les brebis malades. Si l’espace manque,
mieux vaut construire un bâtiment supplémentaire ; on peut le faire en
appentis contre un des murs de la bergerie principale.
Celle-ci doit être meublée de râteliers et d’auges propres à
recevoir la nourriture du troupeau dans l’arrière-saison ou les jours pluvieux.
Les moutons bien portants redoutent plus la chaleur que le
froid ; par crainte de refroidissement de la température, des cultivateurs
entassent leurs bêtes dans des étables étroites dont ils bouchent toutes les
ouvertures et ils ne font que rarement le nettoyage de la bergerie afin que la chaleur
du fumier en augmente le calorique. Quand on entre dans ces logements malsains
on ressent des picotements aux yeux produits par les gaz délétères, une vapeur
humide et chaude alourdit l’air et les bêtes à laine sont en sueur ; or, il
faut aux moutons un air pur, doux et sec. Il vaudrait certes mieux ne leur donner,
en fait d’abri, qu’un hangar adossé au mur, abrité tout au moins d’un côté, car
les étables trop chaudes affaiblissent les animaux qui y prennent des maladies.
Il faut faire en sorte que la température des bergeries ne diffère pas beaucoup
de la température extérieure.
Pour se débarrasser des gaz lourds on peut laisser les
portes des bergeries ouvertes en les fermant avec des claies ou des portes à
claire-voie.
Plus une bergerie a d’ouvertures, plus les bêtes s’y maintiennent
en bonne santé, pourvu qu’elles soient à l’abri de l’humidité, de la bise, des
rayons directs du soleil.
Les portes d’une bergerie doivent être coupées dans le milieu
et larges (1m,60), s’ouvrir en dehors pour la sortie du troupeau et
en dedans pour sa rentrée ; on évite ainsi les accidents que peut
déterminer le foulement des mères pleines et les toisons déchirées.
On peut aussi établir un seuil de 0m,40 à 0m,50
de hauteur, lequel ne peut être franchi qu’au moyen d’un petit pont sans rampe,
ne livrant passage qu’à deux brebis de front. Le troupeau comprend qu’il serait
inutile de s’y précipiter en plus grand nombre et chaque animal attend son
tour, la sortie est plus lente, mais exempte d’accidents.
La propreté est aussi nécessaire aux moutons qu’aux autres
animaux, car l’urine et les crottes peuvent détériorer les toisons et en
diminuer la valeur. Il faut donc que le fumier des moutons soit enlevé au moins
tous les quinze jours et faire quotidiennement une bonne litière de paille
fraîche. On doit laver les auges et les râteliers assez fréquemment et blanchir
les murs à la chaux au moins une fois l’an.
Les propriétaires de troupeaux doivent se rendre compte de
l’espace à accorder à chaque mouton dans la bergerie d’après la taille et le
sexe de leurs animaux. Il faut plus d’espace à une brebis suitée d’un agneau
qu’à un mouton ; les grandes races demandent un espacement plus grand que
les petites. Les bêtes ovines doivent toutes pouvoir prendre place au râtelier
pour y manger sans être serrées l’une contre l’autre ; on prévoit
généralement par mouton soixante centimètres. Il doit exister un espace libre
entre les râteliers afin que les bêtes puissent se mouvoir et se coucher tout à
leur aise.
Les râteliers les plus simples ne sont autre chose qu’une
échelle très large à barreaux serrés. On la place verticalement le long du mur
de la bergerie ; le bas en est retenu par des crochets scellés dans le mur
et le haut est soutenu par des cordes dont la longueur est égale à l’ouverture
jugée convenable pour le râtelier.
Si la largeur de la bergerie le permet, on place au milieu
un râtelier double, suspendu par des cordes attachées aux poutres, on le pose
sur des chevalets faisant corps avec lui. Au-dessous des râteliers, on met les
auges qui peuvent être faites de deux morceaux de volige cloués l’un au bas de
l’autre, en forme de V. On leur donne la longueur des râteliers et on les
soutient avec de petits chevalets.
Dans la plupart des bergeries du département de l’Aisne, les
râteliers font corps avec la mangeoire ; ils sont suspendus au mur assez
haut pour que les bêtes puissent se coucher dessous sans courir le risque d’y
rester prises. Le fourrage y descend au fond sans tomber sur les toisons, le
bord des mangeoires est construit en prisme de façon que la saillie supérieure
empêche les agneaux de mettre les pattes dedans. Les râteliers accouplés dos à
dos et suspendus à des pieux au milieu de la bergerie sont très pratiques, car
leur construction ne s’oppose point à ce que les animaux se couchent en
dessous. Les barres et les assemblages sont en chêne. Les trois planches de la
mangeoire sont généralement en bois blanc.
Sur la majeure partie du territoire français, on a continué,
ainsi que nous l’avons dit, d’abriter les bêtes à laine et de les protéger par
un toit contre les intempéries.
En Angleterre, quoique l’atmosphère soit constamment
imprégnée d’humidité, on loge cependant les moutons dans des enclos bien fermés
pour qu’aucun animal dangereux ne puisse y pénétrer ; les cours des fermes
y servent surtout à former ce parc permanent ; toutefois, les eaux du
fumier n’y forment pas des mares pestilentielles ; la première nécessité
du parc domestique est, en effet, d’être assis sur un terrain ferme,
s’égouttant facilement et promptement, quand la pluie l’a mouillé.
La litière est abondante et très souvent renouvelée. Des
râteliers sont placés pour éviter le gaspillage de la nourriture et de petits
appentis sont disposés pour recevoir les brebis qui agnellent.
Il n’existe point de bergeries, du moins du genre des
nôtres. Quelques riches propriétaires font quelquefois établir un hangar à
proximité de leur maison d’habitation, mais ces hangars ne ressemblent en rien
à nos bergeries, ils consistent ordinairement en un simple abri de planches
ouvert sur le pare ou sur une cour enclose, dans laquelle les animaux circulent
à volonté, ne se retirant sous l’abri que lorsqu’ils en sentent le besoin.
Dans les parties les plus élevées de la Haute-Écosse, où
l’on élève beaucoup de bêtes à laine, la nécessité de les protéger contre les
ouragans de neige a déterminé les propriétaires à construire des abris ;
on y renferme rarement les brebis pendant la gestation, mais seulement après
qu’elles ont mis bas. Les agneaux se trouvent bien de cette protection de
l’étable contre le froid, la pluie et contre les animaux malfaisants.
L. TESTART.
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