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Utilisons le linge usagé

Dans la nécessité actuelle d’utiliser les moindres bouts d’étoffe qui, par un judicieux emploi, un minutieux assemblage, peuvent encore produire un objet utile, depuis la mignonne coiffure destinée au nouveau-né jusqu’aux moelleux chaussons douillets aux pieds du vieillard frileux, nous allons examiner quel parti nous pouvons tirer du linge en trop mauvais état pour être raccommodé, et vous allez convenir avec moi que nos armoires renferment sur ce point de véritables ressources ignorées.

Et, tout d’abord, tirons de ces rayons toutes ces choses mises de côté en un temps plus prospère, avec la secrète et vague arrière-pensée que cela pourrait peut-être, un jour, nous être encore utile à quelque chose. Or ce jour est venu, et il ne sera jamais plus opportun de nous en servir.

Quelques exemples suffiront à vous démontrer qu’il n’est rien dans ces trouvailles qui ne puisse avoir un emploi, et les quelques indications que nous allons vous donner vont ouvrir un champ très vaste, nous en sommes sûre, à bien d’autres inventions de votre part, et tout aussi heureuses.

Il s’agit, non seulement d’approprier la nature des tissus aux diverses pièces que l’on se propose d’exécuter, mais aussi de choisir, entre les adaptations nouvelles à donner au vieux linge dont on dispose, celles qui, tout en faisant tomber les parties usées, n’occasionnent qu’une perte minime de bonne étoffe.

Il n’est pas nouveau que, dans le dos d’une chemise d’homme (c’est toujours le devant qui s’use le premier), on peut tailler d’une seule pièce une chemise de fillette ou de garçonnet ; dans les corps de manches, une autre de plus petite taille, avec couture et fermeture aux épaules (fig. l). Ne perdez pas votre temps à garnir ces chemises d’une dentelle ou d’un feston qui peut se déchirer. Un simple point d’épines à l’encolure et au bord des ouvertures des manches suffit à orner.

Les tissus chauds étant les plus recherchés pour l’hiver, c’est aux sous-vêtements de jersey ou d’indémaillable — caleçons, gilets, tricots pour homme, culottes et combinaisons pour dames, — que nous demanderons les dessous confortables, si nécessaires à la santé des enfants.

Dans le haut d’une culotte pour dames, qui reste toujours en bon état, on trouve largement une autre culotte pour fillette de six à sept ans. Une petite combinaison en utilisera également les moindres parties bonnes (fig. 2).

Toutes les coutures sont faites, dans ce cas, à points arrières très serrés, puis ouvertes par des points de chaussons, comme les coutures de flanelle. Bords d’encolure et de manches sont rabattus à l’endroit, à points de chaussons, faits en coton à broder, mais les bords de fermeture sont bordés d’un ruban et les ceintures sont en percale.

Les bas, qu’ils soient de laine, de fil ou de coton, sont également de grande ressource. Tout le monde sait que l’on peut trouver une brassière dans une seule paire de bas (fig. 3), mais si, par chance, on en possède deux paires de la même série et d’une jolie couleur, on pourra, en combinant un jupon et une brassière, confectionner une robe entière (fig. 4).

Pour utiliser ces bas, on en ouvre les coutures avec précaution, afin de ne pas entamer les mailles. Ainsi que vous le voyez sur le croquis, l’ourlet du haut des jambes est ménagé et termine le bas de la brassière et du jupon.

En coupant, avoir soin de donner 1 centimètre de plus sur tous les contours, sauf celui du bord inférieur, puisqu’il est bordé par l’ourlet du haut de la jambe. Pour assurer la croisure des dos, il est nécessaire de les border d’une bande de tissu de 4 centimètres de largeur environ qui, posée à cheval, se réduit à 1 centimètre et demi. Organiser la fermeture par des boutons-pression.

Faire les coutures à points arrière très rapprochés, puis les ouvrir et les rabattre de chaque côté à points de chausson très petits. Rabattre au contraire à l’endroit et sans repli le bord de l’encolure et des manches et les retenir par un point de chausson de couleur formant garniture.

Dans les jambes de bas qui sont bonnes, on peut encore fort bien tailler des bas d’enfants avec semelles rapportées (fig. 5). Et si les coutures à points arrière toujours ouvertes à points de chausson sont bien faites, elles ne doivent aucunement blesser le pied des enfants.

Pour utiliser les bas dont le pied seul est mauvais et les mettre en état de servir encore à de grandes personnes, on peut les ressemeler. On supprime, en ce cas, toute la partie usée ainsi que le montre le croquis 6, puis, après avoir rendu les bords coupés bien nets, en supprimant les demi-mailles et en dégageant bien les mailles, on coupe dans d’autres bas pour chaque pied trois parties : A, pour le bout du pied ; B, pour le talon ; C, pour la semelle. On commence par remmailler le bout du pied et le haut du talon au bas même. À cet effet, on bâtit les bords à rapprocher en regard l’un de l’autre sur une toile d’architecte ou sur un papier fort plié en quatre, et l’on opère avec une aiguille enfilée de coton à broder de grosseur proportionnée à celui du tricot du bas.

On conduit l’aiguille dans un mouvement de va-et-vient allant d’une maille à l’autre. Les mailles que l’on doit rejoindre doivent se trouver directement opposées les unes des autres. Ce travail se fait à l’endroit et l’on ne serre le fil qu’autant qu’il le faut pour que la maille nouvellement faite soit égale aux mailles du tricot.

Tourner alors le bas à l’envers et faire les coutures d’assemblage des différentes pièces entre elles et avec le bas, là où aucun remmaillage n’a pu être fait, puis les ouvrir et en fixer les bords à points de chaussons.

J. M.

Le Chasseur Français N°603 Novembre 1941 Page 561