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Le jardin potager en décembre

Beaucoup de traités de jardinage nous assurent qu’en ce mois il n’y a presque rien à faire au jardin ; votre expérience vous a appris qu’il en est tout autrement dans la réalité.

Noël au balcon
Pâques aux tisons.

Presque toujours ce dicton populaire se trouve justifié par les faits ; les grands froids ne commencent guère que dans la semaine qui précède le premier de l’an, et même plus tard. Ne nous leurrons pas cependant ; nous ne perdrons rien pour attendre, l’hiver déclenchera bientôt son offensive.

Travaux généraux.

— Votre terrain doit être débarrassé des cultures qui demandent un abri ; rentrez et abritez vos derniers légumes ; vous aurez ainsi un sol libre et ne serez pas gêné pour les bêchages et les défoncements.

Mettez donc ces légumes dans un hangar, une cave ou un cellier, sain et bien abrité. Quelques planches retiendront de la terre légère ou du sable, celui-ci étant réservé de préférence aux carottes et autres légumes racines, alors que la terre sera utilisée pour les choux, salades, céleris, etc.

Surveillez aussi, pour les préserver de la pourriture, les légumes mis à l’abri le mois dernier : céleris, cardons, bettes, particulièrement sensibles sous ce rapport.

Continuez les bêchages ; non par petites planches, mais par grands carrés ; le travail sera mieux fait, plus régulier, le fumier et les engrais répartis plus judicieusement.

N’hésitez pas à faire un défonçage à deux fers de bêche ou de fourche à bêcher si votre terrain reçoit des cultures potagères depuis une dizaine d’années. Il est acide par suite des apports de fumier et de terreau ; il est bon d’y incorporer de la chaux agricole en le défonçant, à la dose de 50 kilogrammes aux 100 mètres carrés. Cette chaux, en activant la décomposition des engrais organiques, permettra la nitrification et la formation de l’humus.

En défonçant, vous êtes obligé de laisser le terrain à plat, mais, alors que vous briserez consciencieusement les mottes à l’intérieur du sol, laissez la surface en mottes grossières que les gelées effriteront.

Si vous bêchez seulement, faites-le en « billons » ou en « dos d’âne » ; vous « affaîtez » chaque billon, en laissant toujours de grosses mottes, et en enterrant fumier et engrais. Vous aurez une terre en parfait état au printemps, les eaux de pluie ou de fonte des neiges s’écoulant facilement par les sillons ainsi ménagés. Au moment de la plantation ou des semis, un simple coup de croc à fumier suffira pour préparer le terrain si, par hasard, vous ne disposiez pas du temps matériel à ce moment pour lui donner un coup de bêche grosso modo. C’est une chose qui arrive au printemps.

Si le temps se met au froid, brassez les vieux tas de terreau, passez celui-ci au crible, mettez-le à l’abri pour l’avoir en parfait état au moment des empotages et des semis. Démolissez les vieilles couches, mettez de côté le terreau et le fumier pailleux non consommé. Celui-ci vous servira encore.

Êtes-vous amateur de légumes hâtifs ? Commencez les premières couches ; mélangez à votre fumier les feuilles que vous avez ramassées le mois dernier, et faites de bons réchauds jusqu’au niveau des châssis.

Votre potager est sans doute entouré de murs garnis d’arbres fruitiers en espalier que vous désirez renouveler, en les remplaçant par d’autres de même essence ? C’est le moment de changer la terre ; surtout, ne remettez pas la même essence au même emplacement : un échec à peu près certain s’ensuivrait. Faites une tranchée profonde de 80 centimètres, large de 60 centimètres, comblez-la avec de la terre levée dans une plate-bande voisine ; laissez tasser ; vous planterez vos arbres au printemps et sèmerez ensuite.

Si vous avez de grands arbres autour de votre potager, bien gênants par leur ombre et par les hannetons et insectes divers qu’attire leur feuillage, élaguez-les ; vous vous constituerez en même temps une provision de rames.

Profitez enfin de ces froids pour remettre en état tout votre matériel de jardin : châssis et cloches qui serviront bientôt, outils à réparer, manches à changer, paillassons à refaire, tuteurs et rames à préparer, toute une série de petits travaux pour lesquels le temps a manqué jusqu’ici. Sans oublier le nettoyage des graines récoltées : ce n’est pas une des moindres occupations ; une recommandation : étiquetez-les soigneusement, ne comptez pas sur votre mémoire et vos capacités.

Pensez aussi à vos futures semences de pommes de terre, mettez-les dans des caissettes à claire-voie, le bout arrondi en haut.

Semis en plein air et sur couches.

— En terrain bien sain, dans le Midi, le Sud-Ouest, l’Ouest, vous pouvez semer des pois hâtifs, Caractacus, Prince-Albert, Surpasse, Annonay, Express, Petit Provençal, des épinards, des fèves, l’ail et les échalotes ; mettez en stratification le cerfeuil tubéreux.

Sur couche, semez les laitues à forcer du Bon Jardinier, Tom-Pouce de Milly, Gotte. Des carottes hâtives, courte à châssis, Parisienne, Bellot, Davanture, etc. ; des choux cabus ou Milan de printemps ; semez clair, évitez l’étiolement et n’oubliez pas le repiquage. Faites aussi des choux-fleurs d’été, ne confondez pas, pas de brocoli.

Dans tous ces semis, jetez quelques graines de radis à forcer, à courtes feuilles, vous en avez des rosés à bout blanc, des écarlates et des rouges à bout blanc.

Prenez des précautions à cette époque, doublez les paillassons si cela est nécessaire, renouvelez les réchauds, ne laissez pas vos jeunes semis s’étioler, donnez de l’air et faites sécher le feuillage.

M. E.

Le Chasseur Français N°604 Décembre 1941 Page 603