Il est indispensable pour obtenir le jus des pommes que les
cellules dans lesquelles il est renfermé soient très divisées pour que son
extraction donne le plus grand rendement avec facilité sous la moindre
pression.
Il est entendu que les pommes doivent être bien mûres et
propres.
100 kilogrammes de pommes contiennent environ 95 kilogrammes
de jus et 5 kilogrammes de matières solubles : ces 95 kilogrammes,
d’une densité moyenne de 1.055, représentent 90 litres. Mais les
pressoirs, même les plus perfectionnés, sont loin d’extraire tout ce jus, ce
qui explique pourquoi l’intervention de l’eau est nécessaire pour extraire de
la pomme ses principes solubles. On peut procéder de diverses façons :
1° Par pressurage ;
2° par diffusion ;
3° par pressurage et diffusion combinés.
Seules la première et la troisième méthode intéressent la
généralité des producteurs de cidre ; la seconde étant appliquée par
l’industrie cidricole.
La méthode par pressurage comprend les opérations
successives suivantes :
1° Broyage des pommes ;
2° Cuvage ou macération des fruits broyés ;
3° Premier pressurage ;
4° Rémiage du marc pressé ;
5° Second pressurage ;
6° Deuxième rémiage ;
7° Troisième pressurage.
Broyage des pommes.
— La condition primordiale d’obtention d’un cidre de qualité
et de bonne conservation étant la propreté la plus minutieuse dans toutes les
phases de la fabrication, le producteur intelligent aura bien soin avant de
mettre au travail les appareils de fabrication de les rendre propres, exempts
des germes dangereux, par des lavages à l’eau bouillante additionnée d’un
désinfectant, le bisulfite de chaux, à raison d’un litre de solution pour cinq
litres d’eau ; il lavera ensuite à l’eau froide ordinaire.
Macération de la pulpe.
— Le cuvage de la pulpe broyée est utile ou nuisible
selon la manière dont on l’exécute. Pour qu’il soit utile, c’est-à-dire
facilite la dissolution dans le jus des principes indispensables et augmente la
coloration du cidre, il faut qu’il ait lieu, autant que possible, à l’abri de
l’air, et que la pulpe, légèrement tassée dans des cuves ou des récipients
étroits et profonds, soit recouverte d’une toile, afin d’éviter la chute de
microgermes nuisibles, surtout des bacilles acétiques. On évite aussi
l’oxydation de tanin et des tissus en arrosant la surface de la pulpe avec une
solution d’acide sulfureux à 1 gramme par litre. La durée du cuvage varie
entre 10 et 15 heures au maximum. Le cuvage à l’air est nuisible, surtout
parce qu’il fait disparaître le tanin ; nous avons constaté une diminution
de 80 p. 100 de son poids primitif.
Pressurage.
— On doit accorder la préférence aux pressoirs à claies
de drainage et toiles. Voici comment on procède : l’ouvrier pose une claie
et une toile par-dessus, puis une couche de pulpe de 10 à 15 centimètres
d’épaisseur ; il relève les parties de toile qui dépassent et en recouvre
cette couche, puis il pose une nouvelle claie surmontée d’une toile et
confectionne une seconde couche semblable à la première. Il monte ainsi 12 à 14 couches,
presse ensuite, lentement d’abord, afin de laisser au cidre le temps de
s’écouler ; en 50 minutes on peut assécher la motte en tirant 60 à 70
p. 100 du jus.
On dispose au-dessous de la goulotte de la maie un tamis en
crin pour retenir les impuretés entraînées par le jus qui s’écoule et tombe
dans un récipient placé au-dessous.
Soins au pressoir.
— Avant de commencer le pressurage, on graissera toutes
les parties flottantes du pressoir : vis, écrou, surface de contact de
l’écrou et du crapaud, bielles, clavettes et guides. On lavera les pressoirs
comme nous l’avons dit pour les broyeurs. Il importe aussi d’empêcher les
combinaisons chimiques que produirait le contact prolongé des organes en fer
avec la pulpe et le jus des fruits, et d’autant plus qu’ils seraient très
acides ou tanniques. Les différents sets de fer en solution dans le jus
donneraient naissance à des cidres ou des poirés plus ou moins brunâtres ou
verdâtres, au détriment de leurs propriétés physiques et organoleptiques et,
par suite, de leur valeur marchande.
Le remède consiste dans un copieux graissage ou vernissage
de ces pièces avec de la vaseline, de la paraffine ou de la gomme laque. Quant
aux toiles, claies et tuyaux, il faut les laver tous les jours à grande eau et
chaque semaine avec une solution très chaude de cristaux de soude, puis avec
une autre de bisulfite de chaux froide, afin d’éviter l’obstruction.
Rémiage.
— Lorsque la motte a été asséchée aussi complètement
que possible sous le pressoir, on la démonte, le marc est émietté et repassé au
broyeur ; il retient encore de 25 à 40 p. 100 de jus. On le met à
macérer avec de l’eau pendant vingt-quatre heures. On emploie généralement 20 à
25 litres d’eau pour le marc provenant de 100 kilogrammes de pommes,
et, par une nouvelle pression, on en tire 20 à 25 litres d’un second cidre
moitié moins fort que l’autre. Après ce deuxième pressage on peut encore broyer
à nouveau le marc, le faire macérer avec 15 à 25 litres d’eau, puis
presser. Cette boisson dosera 1° à 1°,5 d’alcool.
Ce troisième cidre peut avantageusement être utilisé en
guise d’eau pure pour faire le deuxième cidre. En mélangeant les deux premiers
cidres ensemble on obtient un cidre marchand ou cidre de consommation courante.
Lorsqu’on pouvait se procurer facilement du sucre on faisait
des seconds cidres par sucrage. Ceux-ci dosent un degré alcoolique convenable
pour une boisson courante, sachant qu’il faut 1 kilogramme de sucre pour
élever de 1° le titre alcoolique de 1 hectolitre de boisson. Toutefois il
convient d’ajouter également 50 à 100 grammes de tanin par hectolitre et
25 à 40 grammes d’acide citrique.
LANEUVILLE.
|