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La législation d’exception de guerre

sur les baux à loyer d’habitation et locaux commerciaux (1).

A. Avantages accordés aux locataires.

3° Termes et délais.

— Les locataires qui bénéficient d’une réduction de loyer en vertu de l’article 9 de la loi (huit cas de réduction analysés dans un précédent article) peuvent obtenir termes et délais pour se libérer, soit en totalité, soit par fractions.

Ces termes et délais peuvent être renouvelés jusqu’à la fin de l’année qui suivra la date du décret fixant la date de cessation des hostilités.

Pour les locataires rappelés sous les drapeaux par ordre de l’autorité militaire pendant une durée d’au moins quinze jours et dont le loyer a été réduit par application des dispositions de l’article 9, ils bénéficient de plein droit, à moins que leurs ressources n’aient pas été diminuées du fait de leur mobilisation, pour le payement des loyers échus et non acquittés et pour le payement des loyers venant à échéance pendant la durée de leur présence dans les formations, d’un moratoire qui prendra fin à l’expiration d’un délai de six mois à dater du jour ou ils auront cessé d’appartenir aux dites formations.

4° Prorogation de location et relèvement de forclusion.

a. Les locataires de bonne foi.qui bénéficient d’une réduction de loyer par application de l’article 9 de la loi sont maintenus de plein droit dans les lieux loués jusqu’au terme d’usage qui suivra la date du décret fixant la cessation des hostilités ; mais ils doivent occuper effectivement les lieux loués (sauf motif légitime) par eux-mêmes ou par des personnes vivant habituellement à leur foyer, antérieurement au 2 septembre 1939, et se conformer aux décisions de justice ou aux accords amiables intervenus en ce qui concerne, le cas échéant, les termes et délais.

b. De même, les locataires de bonne foi, appartenant aux formations de l’armée et du territoire, et aux formations visées par l’article 11 (1er al., par. 2) de la loi du 11 juillet 1938, sont maintenus de plein droit, aux conditions fixées par la convention, dans les lieux loués, alors même qu’ils continuent d’acquitter intégralement le prix de leur loyer, sous réserve d’occuper effectivement les lieux loués ou de les faire occuper par des personnes vivant habituellement à leur foyer antérieurement au 2 septembre 1939.

c. Les locataires de bonne foi autres que ceux visés aux deux précédents paragraphes, occupant effectivement les lieux loués, par eux-mêmes ou par des personnes vivant habituellement à leur foyer antérieurement au 2 septembre 1939, peuvent demander leur maintien dans les lieux, soit à l’amiable, soit en justice. Cette prorogation peut être accordée d’année en année à dater du jour de l’expiration de la convention ou de la décision, sans qu’elle puisse excéder le terme d’usage qui suivra le décret fixant la date de cessation des hostilités.

Toutefois, il peut être renoncé par les locataires au maintien dans les lieux qui leur a été accordé ou qu’ils ont obtenu après un congé donné par eux suivant le délai fixé par l’usage des lieux.

À cette prorogation de location, on peut assimiler le relèvement de forclusion.

d. Aucune forclusion encourue postérieurement au 2 septembre 1939, pour ne pas avoir demandé le renouvellement de leur bail dans le délai fixé par l’article 2 de la loi du 30 juin 1926 sur la propriété commerciale, ne peut être opposée au locataire d’un local à usage commercial ou industriel pendant la durée de son bail et celle de son maintien dans les lieux consécutif audit bail tant qu’il bénéficie des deux premiers alinéas A et B du présent titre relatif à la prorogation.

e. Il en est de même à l’égard des locataires de locaux à usage commercial ou industriel ; pendant toute la durée du bail tant qu’ils sont susceptibles d’invoquer le bénéfice de l’alinéa c. ci-dessus, pendant toute la durée de leur maintien dans les lieux s’ils bénéficient dudit alinéa c., pourvu que les demandes de maintien dans les lieux aient été régulièrement formées avant l’expiration du bail, et renouvelées avant la date fixée pour l’expiration de l’occupation.

f. D’autre part, le président du tribunal peut, en tenant compte de toutes circonstances résultant de l’état de guerre, relever le locataire d’un local à usage industriel ou commercial des échéances et forclusions encourues au titre de la législation sur la propriété commerciale (lois du 30 juin 1926 et suivantes).

g. Enfin, la loi du 24 juin 1941 prévoit dans un article 6 un autre cas de relèvement de forclusion qu’il serait trop long d’analyser. Cet article 6 est ainsi conçu : « Nonobstant les décisions de justice intervenues à la date de publication de la présente loi, les dispositions des alinéas 10 et 11 de l’article 9 et de l’article 17 bis susvisés sont applicables aux loyers échus et impayés. Les locataires bénéficiaires des dispositions de l’alinéa 9 de l’article 9 sont relevés de la forclusion inconnue. »

B. Avantages accordés aux bailleurs.

— En compensation des restrictions que le décret-loi du 26 septembre 1939 apporte ainsi à leurs droits, les propriétaires reçoivent quelques avantages.

C’est ainsi que l’article 23 dispose que, pour l’attribution des allocations, secours, indemnités ou avantages de cette nature qu’elles solliciteraient en application des lois et règlements en vigueur, toutes personnes qui figurent au rôle des contributions foncières ne pourront se voir opposer une fin de non-recevoir tirée de leur seule qualité de propriétaire.

En second lieu, lorsque, par suite de circonstances résultant de l’état de guerre et survenues postérieurement à la naissance de la dette, le propriétaire se trouvera privé d’une notable partie des ressources sur lesquelles il pouvait compter pour faire face au payement de ses dettes hypothécaires ou privilégiées, le président du tribunal civil pourra lui accorder des délais pour se libérer, tant pour le principal de la dette que pour les intérêts.

Enfin, les impôts frappant les immeubles dont les recours sont atteints par les dispositions de la présente législation peuvent faire l’objet soit de remises ou de modérations, soit de délais de payement.

Le propriétaire d’un immeuble dont tout ou partie fait l’objet d’une résiliation bénéficie de dégrèvements d’impôts fonciers (impôts d’État, centimes additionnels et taxes locales).

De même, le propriétaire qui, par suite de réduction du prix des baux à loyer, a subi une perte sur le revenu de ses immeubles est admis à demander une modération de la contribution foncière, des centimes additionnels et des taxes locales grevant lesdits immeubles. La demande en modération doit être adressée au directeur départemental des contributions directes.

Les demandes en remise ou modération d’impôts présentées pour résiliation du bail ou réduction du prix du bail comportent effet suspensif de payement jusqu’à la décision du directeur des contributions directes.

De plus, le propriétaire qui, par suite de résiliation de bail ou de réduction du prix du bail, a perdu tout ou partie du revenu de ses immeubles peut obtenir, pour le payement de ses impôts fonciers, des délais qui pourront s’étendre jusqu’au terme de la période de douze mois qui suit la mise en recouvrement du rôle. La demande de délai est adressée chaque année au percepteur.

CROUZATIER.

(1) Voir Chasseur français de novembre 1941.

Le Chasseur Français N°604 Décembre 1941 Page 626