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Les ennemis de nos arbres fruitiers

La mouche à scie du poirier ou Lyda

La mouche à scie du poirier (Lyda pyri Schrk ou Tenthredo clypeata Klug.) est une tenthrède dont les larves ou fausses chenilles affectionnent le système foliacé du poirier, de l’aubépine. La trouver sur d’autres rosacées ne se rencontre pas fréquemment. Le nid représenté par cette image a été trouvé dans un jardin de mes voisins sur bigarreau Napoléon, le 29 juin 1937 ; vingt larves exactement étaient encore en leur domicile au moment où je l’ai recueilli.

Comme la mouche à scie du groseillier, précédemment décrite, comme toutes ses congénères, la Lyda met sa double scie en action pour pratiquer l’incision dans laquelle elle encastre et agglutine chaque œuf de ses pontes successives de 40 à 60 unités par ponte continue. Ses larves n’ont que six pattes, tandis que les vraies chenilles en possèdent de dix à seize, pattes membraneuses comprises.

L’insecte parfait fait son apparition en mai-juin. On peut alors le surprendre voletant dans les jardins, les vergers et plus facilement sur les haies d’aubépine, lissant ses ailes au soleil. De forme trapue, mesurant de 12 à 14 millimètres de longueur sur 2 centimètres d’envergure, sa tête noire, élargie, se marque de jaune entre les yeux. Le thorax, noir, se trouve parsemé de jaune sur les parties latérales. Le mâle, de taille légèrement inférieure à celle de la femelle, a l’abdomen jaune, tandis que celui de cette dernière tire plutôt sur le bleu noir.

La pariade effectuée, la future mère met son délicat appareil en action, travaillant sur la face inférieure des feuilles et à leur extrémité, où les œufs se trouvent disposés en rangées régulières.

Elliptiques, jaune brillant, de ces œufs sortent les larves, après une dizaine de jours d’incubation, si la température ambiante ne se trouve contrariée.

À peine écloses, les fausses chenillettes se mettent à brouter le parenchyme de leur support. Grâce à leurs nombreuses glandes séricigènes, disposées sur tout le long de leur corps, abondamment elles tissent une toile aux mailles très larges, laquelle ira grandissant au fur et à mesure que les fileuses prendront du corps. Quelques feuilles englobées d’abord, puis des paquets de limbes, le tout fixé aux rameaux voisins. Ce nid, dont l’ensemble rappelle celui des fines tisseuses que sont les chenilles d’Hyponomeutes, mais construit avec beaucoup moins d’art, suivant l’importance de la colonie constructive, arrive parfois à envelopper une grande partie de la frondaison.

Groupées sous ces tentes légères, les fausses chenilles y restent calfeutrées, immobiles pendant une partie de la nuit, n’en sortent que le jour venu pour aller brouter la provende du voisinage et procéder à l’extension de la demeure quand les vivres commencent à s’y épuiser. Et cela va vite, la masse de leurs déjections, assemblées surtout dans la partie centrale de la toile, les vides dans le feuillage malmené témoignent de l’activité digestive des dévorantes. À leur complet développement, elles mesurent 2 centimètres ; leur corps, composé de six à huit articles, se teinte de jaune orangé ; début d’août, la fringale diminue dans la colonie, un malaise s’y manifeste. L’heure de la recherche de l’abri hivernal approche. Ce moment arrivé, toutes les larves gagnent le sol, suspendues au bout du fil qu’elles sécrètent. Arrivées à terre, elles s’y enfoncent de 8 à 10 centimètres et s’enferment dans une coque dont elles lissent la paroi intérieure. En ce berceau, douillettement elles passent l’hiver. La nymphose ne s’opère que quelques semaines avant la sortie de l’insecte parfait. D’après M. Paillot, qui a longuement étudié les mœurs de la Lyda pyri, certaines larves resteraient deux années en terre avant de se métamorphoser.

Traitement.

— Les nids étant faciles à découvrir, le moyen le plus pratique de faire disparaître la colonie est de choisir le moment où le domicile est au complet, pour l’enlever avec ses habitants. Sinon, il sera bon d’utiliser au printemps des pulvérisations d’insecticides à base d’arsenic (arséniate diplombique ou d’alumine en pâte à 1 p. 100) par exemple, en prenant les précautions d’usage. Si je m’en rapporte à mes observations personnelles, il me semble que les oiseaux insectivores répugnent à détruire ces fausses chenilles. Cette toile, pour eux, ne serait-elle pas un piège ? C’est possible.

O. FOUCHER.

Le Chasseur Français N°606 Février 1942 Page 98