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Il est temps de songer aux pelouses

Aussi loin qu’il est possible de remonter dans l’historique de l’art des jardins, on peut se rendre compte que les pelouses en ont toujours constitué l’un des éléments essentiels.

À la fin du XVIIe siècle, le jardin à la française est en vogue. Les pelouses y sont des tapis verts de grandes dimensions, à contour géométrique, soignés aussi parfaitement que possible.

Un peu plus tard, au XVIIIe siècle, le jardin français a déjà moins d’adeptes. On lui préfère le jardin anglais dont les pelouses, proportionnellement plus étendues, ont des contours arrondis et sont peuplées de végétaux divers : plantes vivaces, arbres, arbustes, qui y constituent des scènes intéressantes autant que variées.

Cette vogue du jardin anglais ne fait d’ailleurs que s’accentuer au XIXe siècle, car il permet d’utiliser le relief du terrain plus aisément que le jardin français et s’accommode, mieux que ce dernier, d’un entretien un peu moins suivi.

La beauté du jardin d’agrément, de style français ou de style anglais, dépend, beaucoup plus qu’on ne le suppose généralement, de la régularité et du bon aspect de ses pelouses, lesquelles forment le cadre naturel des plantations florales.

Il est d’ailleurs facile de créer, dans presque tous les sols, des pelouses bien vertes, Mais il faut, d’une part, choisir avec soin et en connaissance de cause les plantes composant les gazons, d’autre part prendre quelques précautions dans la formation de ceux-ci.

Choix des plantes.

— La plupart des plantes qui composent une pelouse sont des graminées. Mais il existe un grand nombre de graminées et leur aptitude à réussir dans un sol quelconque est fort inégale.

D’une façon générale, on doit, d’ailleurs, rechercher surtout celles qui, ayant des feuilles très fines et très nombreuses, repoussent rapidement après la tonte.

Pour les terrains secs et ingrats, celles qui remplissent le mieux cette condition, sont : l’Agrostis traçante, le Paturin des prés, la Fétuque ovine.

Pour les terrains frais et même humides, ces espèces ne conviennent plus et il faut avoir recours à la Fétuque des prés, au Paturin commun, à la Crételle des prés.

Pour les parties assez ombragées, il est nécessaire de faire choix d’autres espèces encore. Ce sont : la Fétuque hétérophylle, la Flouve odorante, le Paturin des bois.

Ces diverses espèces, qui doivent constituer le fond du gazon, ne s’emploient d’ailleurs jamais seules. On leur associe toujours, au moment de la création de la pelouse, une autre graminée, le Ray-grass anglais, qui a la précieuse faculté de s’adapter, provisoirement tout au moins, à presque tous les terrains.

Cette faculté d’adaptation fait souvent employer exclusivement le Ray-grass anglais par beaucoup de personnes qui pensent, bien à tort d’ailleurs, pouvoir avec lui créer des pelouses régulières et durables.

La première condition est, à l’ordinaire, aisément remplie, en ce sens que le Ray-grass pousse rapidement et donne un gazon fin, qui garnit vite et dure, en endroit ensoleillé, toute la belle saison. Dans les parties ombragées, il vit cependant beaucoup moins et l’on est fréquemment obligé, pour avoir un peu de verdure, de semer plusieurs fois dans le cours de la belle saison.

Mais la deuxième condition n’est jamais remplie. Après le premier hiver, en effet, le Ray-grass disparaît à peu près complètement, étant annuel et l’on se trouve obligé de semer la pelouse à nouveau chaque printemps après avoir, bien entendu, bêché et nivelé toutes les fois le terrain, ce qui nécessite, de nos jours, des frais considérables.

On remédie à cet inconvénient en semant, en même temps que le Ray-grass anglais, les autres graminées susceptibles de s’adapter au terrain sur lequel on veut créer la pelouse. On trouve, dans le commerce, des mélanges tout faits, différents pour chaque sorte de terrain et que l’on nomme des Lawn-grass.

Dans ces mélanges, le Ray-grass anglais entre au moins pour moitié. Comme il germe vite, il garnit le terrain et empêche celui-ci d’être envahi par les mauvaises herbes avant la levée des autres graminées, plus longues à lever et à s’établir.

Suivant l’étendue du jardin, on utilise 1kg,250 de graine de Lawn-grass par are de pelouse, la quantité maxima étant celle à prévoir pour les petits jardins ou la densité du semis est toujours plus grande.

Préparation du terrain et semis.

— Si l’on veut que le gazon soit exempt de mauvaises herbes, il est nécessaire que le terrain des pelouses soit aussi propre que possible. Dans les jardins nouvellement créés, on obtient ce résultat en cultivant, pendant une année, sur le sol où devra se constituer la pelouse, des pommes de terre ou des haricots.

Avant le semis, un labour léger des surfaces à engazonner permettra de terminer le nivellement et la mise au point des vallonnements. Il sera suivi d’un hersage énergique, effectué à l’aide de la fourche crochue. Un coup de râteau assurera le ramassage des pierres et des racines dont les premières pourront être utiles pour la formation des allées.

Il restera à délimiter très nettement le contour des pelouses en traçant, en bordure des allées, à l’aide du râteau ou d’un pieu taillé en pointe, un petit rayon ou filet, de quelques centimètres de profondeur.

La graine sera ensuite répandue régulièrement et un peu plus abondamment dans le filet et sur le talus des bordures. Elle sera aussitôt couverte par un léger hersage à l’aide de la fourche crochue. Un coup de râteau terminera l’opération.

On aura aussi avantage à épandre, sur la pelouse, une petite quantité de terreau fin qui, par la suite, empêchera le sol de se battre sous l’influence des pluies ou des arrosages et procurera, en outre, un peu de nourriture au gazon.

Il ne restera plus qu’à plomber le terrain, dès qu’il sera bien assaini, et sans attendre davantage, à l’aide d’un rouleau de fonte pour les parties de faibles dimensions et pour les bordures.

DELPLACE.

Le Chasseur Français N°606 Février 1942 Page 99