Les conditions de la vie moderne favorisent l’inaction
physique, car le machinisme a permis de réduire considérablement l’antique
peine des hommes ; et si c’est là, dans beaucoup de domaines, une
magnifique conquête de l’intelligence humaine, c’est, d’un autre point de vue,
une menace pour notre vigueur et notre santé. Car l’exercice corporel est
indispensable à l’entretien de la vie, et une médiocre activité physique ne
peut déterminer qu’une vitalité amoindrie, un manque de résistance contre toutes
les maladies.
Il est puéril, mais fréquent, de considérer la maladie comme
le fait de la malchance, comme un accident qui tombe au hasard sur n’importe
qui et le fait mourir prématurément. Cette conception simpliste porte à
accorder une importance primordiale aux médicaments qui rétablissent les
fonctions organiques troublées ou qui détruisent les microbes infectants. Mais
ces troubles et ces infections n’atteignent que ceux dont le corps affaibli et
les humeurs mal élaborées ont réduit la vitalité.
Ainsi l’hygiène essentielle consiste à se construire et à se
conserver un corps robuste, puis à lui assurer l’activité nécessaire à la
perfection de ses échanges nutritifs.
De la naissance à l’âge adulte, l’éducation physique a pour
but de mener à bien la croissance, de faire en sorte que le corps s’épanouisse
dans sa forme normale, harmonieusement équilibré dans toutes ses parties, avec
une poitrine large et souple, un dos droit, un ventre plat et bien sanglé, une
tête noblement érigée, des membres musclés. Dans un corps ainsi bâti, les
organes, bien logés, fonctionnent à l’aise, alors qu’ils fatiguent et
périclitent dans un corps chétif ou difforme. Or il n’y a que l’exercice
pratiqué régulièrement et assez énergiquement qui puisse assurer cette
croissance parfaite. Le nombre déplorable de nos enfants déficients et
malingres est une conséquence certaine du manque d’éducation physique.
Mais c’est une grande erreur, et très répandue, de croire
que l’exercice n’a plus d’efficacité quand la croissance est terminée ;
qu’adultes et vieillards s’en peuvent passer sans inconvénients. Car ce n’est
que par le mouvement, par le travail de nos muscles, que toutes nos grandes
fonctions organiques, respiration, circulation, nutrition, sont stimulées et
équilibrées. L’insuffisance d’exercice ne permet qu’une vie au ralenti :
respirations courtes qui ankylosent la poitrine et rétrécissent le champ
pulmonaire ; circulation lente qui amollit le cœur ; désassimilation
médiocre et assimilation difficile qui assurent mal la rénovation des cellules
et la bonne composition des humeurs ; en outre, affaiblissement des
muscles eux-mêmes et enraidissement progressif des articulations. Faute
d’exercer son corps, l’adulte perd inéluctablement sa vigueur et sa
santé ; il marche volontairement à toutes ces infirmités et maladies
chroniques qui empoisonnent la fin de tant d’existences.
Si l’on se soumet si généralement à de telles déchéances, ce
n’est pas qu’on ignore tout à fait que l’exercice serait un bon moyen de lutter
contre elles ; mais on croit qu’il serait nécessaire de consacrer beaucoup
de temps à cet exercice ; et l’on pense que ni les études des jeunes, ni
la profession des adultes ne peuvent s’accommoder des exigeantes pratiques de
la gymnastique et des sports.
À notre avis, c’est là le point crucial de la question. Ce
que nous voudrions démontrer et faire savoir, c’est que l’exercice, à la dose
où il est nécessaire, indispensable, peut être pris aisément par tous, sous une
forme condensée qui n’exige qu’une demi-heure trois fois par semaine, tout en
étant d’une grande efficacité. Et c’est à cette méthode que nous initierons nos
lecteurs.
Dr RUFFIER.
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