Le prix des loyers d’habitation est momentanément réglementé
par l’ordonnance du 28 juin 1945.
Cette ordonnance établit à ce sujet une distinction entre
les loyers régis par la loi du 1er avril 1926 et les loyers
soumis à la loi du 28 février 1941.
La réglementation établie par la loi du 1er avril
1926 et les lois qui l’ont modifiée consiste à assurer, pour les loyers
rentrant dans son champ d’application, le blocage des prix et des charges au
taux qu’ils ont atteint le 30 juin 1943. Toutefois les prestations et
fournitures particulières assurées au locataire peuvent être intégralement
recouvrées par le propriétaire et ne sont pas soumises à ce blocage.
L’ordonnance du 28 juin 1945 dispose que les loyers
assujettis à la réglementation de la loi du 1er avril 1926,
modifiée, et bloqués au prix qu’ils avaient atteint (charges comprises) au 30 juin
1943 sont majorés de 30 p. 100.
Mais, encore une fois, les prestations et fournitures
particulières faites au locataire ne sont pas limitées à ce taux de majoration
de 30 p. 100 et peuvent être intégralement récupérées sur celui-ci.
L’article 3, 2e alinéa, de l’ordonnance
précise que ne sont pas considérées comme charges, au sens du présent article
(et par suite limitées à la majoration de 30 p. 100), mais comme
prestations et fournitures particulières faites au locataire (et dont le
remboursement peut par conséquent être intégralement réclamé par le
propriétaire) : l’eau, le gaz, l’électricité, le chauffage, la taxe
d’enlèvement des ordures ménagères, la taxe de déversement à l’égout et la taxe
de balayage.
La loi du 28 février 1941, modifiée, a pour but de
bloquer, jusqu’à la publication du décret fixant la date de cessation des
hostilités, le prix des loyers d’habitation rentrant dans son champ
d’application, sur le taux qu’ils avaient atteint au 1er septembre
1939. Quant aux prestations et charges, le propriétaire peut récupérer sur le
locataire le montant des majorations qu’elles ont subies depuis le 1er septembre
1939.
L’ordonnance du 28 juin 1945 prévoit également que le
prix des loyers d’habitation régis par la loi du 28 février 1941 et bloqué
conformément aux prescriptions de cette loi est majoré de 15 p. 100.
Les majorations de 30 p. 100 et de 15 p. 100 dont
il est question ne s’appliquent pas cependant aux loyers d’habitation pour
lesquels les locataires ont obtenu une réduction en se prévalant du décret-loi
du 26 septembre 1939 réglant en temps de guerre les rapports entre
bailleurs et preneurs de baux à loyers d’habitation.
Cette majoration ne joue donc pas pour ces loyers tout
autant que dure la réduction accordée en vertu du décret-loi précité, mais elle
porte sur les charges, à l’exception de celles ci-dessus qui sont considérées
comme prestations et fournitures particulières au locataire, dont la dépense
peut être intégralement réclamée.
Les majorations de 30 p. 100 et de 15 p. 100 sur
les loyers et charges s’appliquent de plein droit, c’est-à-dire sans que le
propriétaire ait à adresser de demande ou de notification au locataire.
Elles ont commencé à courir à partir du 1er juillet
1945, sauf pour les loyers peu élevés.
En effet, les majorations en question ne devaient jouer qu’à
dater du 1er janvier 1946 pour les loyers qui, charges
comprises, étaient inférieurs :
À 2.500 francs par an pour le département de la Seine et
dans un rayon de plus de 50 kilomètres des fortifications de Paris ;
À 1.500 francs par an pour les villes de plus de 100.000 habitants
et dans les communes limitrophes ;
À 1.000 francs par an pour les villes au-dessous de 100.000 habitants.
Les chiffres des valeurs locatives indiqués ci-dessus
s’appliquent au prix :
Du 30 mai 1943, pour les loyers soumis à la loi du 1er avril
1926, modifiée ;
Du 1er septembre 1939, pour les loyers
soumis à la loi du 28 février 1941.
Mais ne sont pas considérées comme charges, pour la
détermination de ces valeurs locatives et en ce qui concerne seulement les
loyers soumis à la loi du 1er avril 1926, les prestations et
fournitures particulières faites au locataire.
La date du 1er janvier 1946 prévue par l’article 6
de l’ordonnance du 28 juin 1945, pour la majoration à faire subir aux
loyers à prix relativement faible, a été reportée au 1er juillet
1946 par l’article 161 de la loi de finances du 31 décembre 1945.
On pourra peut-être s’étonner que la majoration du prix des
locations prévue pour les loyers régis par la loi du 28 février 1941 soit
la moitié (15 p. 100 au lieu de 30 p. 100) de celle accordée pour les
loyers soumis au régime de la loi du 1er avril 1926.
Cela tient très probablement à ce que les locaux rentrant
dans le champ d’application de la loi de 1926 sont généralement loués à un prix
moindre que ceux relevant de la loi du 28 février 1941.
Quels sont les loyers d’habitation régis par la loi du 1er avril
1926 et ceux régis par la loi du 28 février 1941 ?
Rentrent dans le champ d’application de la loi du 1er avril
1926 :
Les locations prorogées dans le cadre de ladite loi du 1er avril
1926. Au point de vue territorial, cette loi s’applique en principe : à
Paris, dans le département de la Seine et dans un rayon de 50 kilomètres
des fortifications de Paris, dans les communes d’une population totale
supérieure à 4.000 habitants ou distantes de moins de 5 kilomètres
d’une ville de 10.000 habitants, et dans toutes celles ou le dernier
recensement accuse un accroissement de la population municipale d’au moins 5
p. 100 sur le précédent recensement ;
Les locations expirées dans le cadre de cette loi du 1er avril
1926 ;
Les locations faites dans les immeubles construits et
achevés avant le 1er août 1914.
Sont, au contraire, soumis au régime de la loi du 28 février
1941, modifiée :
Les locations faites dans les immeubles dont la construction
a été achevée après le 1er août 1914 ;
Les loyers des immeubles situés dans les localités exclues
de la loi du 1er avril 1926 ;
Les loyers de locaux commerciaux en 1914, mais transformés
depuis en locations d’habitation.
L. CROUZATIER.
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