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Pour entreposer vos pommes de terre

Vous avez à hiverner deux catégories de pommes de terre : celles que vous avez sélectionnées et triées comme tubercules-plants et les pommes de terre de consommation. Éliminez, parmi ces dernières, les tubercules qui ont été abîmés au cours de l’arrachage, pour les consommer en premier, de façon à ne conserver que des pommes de terre saines et indemnes de tout ce qui peut déterminer de la pourriture.

Classez ces dernières en trois catégories : les grosses, les moyennes (de la taille d’un petit œuf de poule), les petites. Ce calibrage vous permet de prélever la catégorie que vous désirez pour telle préparation culinaire au lieu d’avoir à les choisir une à une dans le tout venant. Si vous disposez trop de petites pommes de terre pour votre cuisine, vous avez aussi la facilité de les faire cuire avec les épluchures des autres au fur et à mesure des besoins pour les rations de vos poules et de vos lapins. Une recommandation : lavez toujours ces petites pommes de terre avant de les faire cuire, de même que les grosses avant de les éplucher. Ainsi les pâtées de vos bêtes ne comporteront pas la moindre particule de terre.

Le meilleur local de conservation est une cave, un sous-sol, ou tout autre local froid et sec dans lequel la gelée ne pénètre pas. La température la plus favorable s’échelonne entre 1 à 6 et même 8 degrés au-dessus de zéro. Local obscur pour que les pommes de terre de consommation ne verdissent pas.

Au contraire, un local éclairé convient fort bien pour les pommes de terre-plants : un grenier par exemple, dans la zone méditerranéenne, lorsque la gelée ne risque pas de pénétrer dans ce dernier, et d’autant plus que les plantations y sont effectuées dès Janvier-février. Étalez-les sur le sol ou sur le plancher.

Si vous disposez de clayettes pour assurer la prégermination de ces tubercules, ranger ceux-ci directement dans les clayettes, sur une seule épaisseur, les yeux à la partie supérieure ; ainsi il vous est possible de les manutentionner à volonté, également de les superposer et de les couvrir si, étant entreposées dans un grenier, vous craignez telle gelée fugace. Ces clayettes vous facilitent également le rangement de vos pommes de terre-plants dans tout autre local et une conservation parfaite.

Vous avez intérêt à ne pas disposer vos pommes de terre de consommation en tas épais, car vous pouvez difficilement les surveiller. En tas, les tubercules s’échauffent, quelques-uns pourrissent et contaminent les autres. J’ai adopté pour conserver mes pommes de terre de consommation un dispositif commode dont vous pouvez vous inspirer. J’ai acheté une série de caisses à œufs, lorsqu’il était facile de s’en procurer. Ces caisses uniformes, standardisées avant le mot (légères et suffisamment solides pour être utilisées nombre d’années), mesurent 1m,30 de longueur, 0m,52 de largeur, 0m,23 de hauteur. Elles sont établies avec des planches étroites et minces, séparées par des claires-voies de 1 à 3 centimètres. Chacune d’elles est divisée en deux compartiments dans le sens transversal par une séparation jumelée.

Je destine chaque compartiment de ces caisses, qui peut contenir 80 à 100 kilogrammes, à une sorte ou à une grosseur de pomme de terre. Je superpose ces caisses par trois ou quatre, en les séparant par de gros tasseaux, ce qui assure une bonne circulation d’air.

La caisse du bas est réservée aux pommes de terre les phis tardives, plus lentes à germer. Dans les autres caisses, sont mises les pommes de terre à consommer en premier ; les moyennes et les grosses ont leurs compartiments séparés. Les vides ménagés par les tasseaux entre les caisses sont assez hauts pour permettre de passer la main et de prendre des pommes de terre dans une des caisses inférieures si cela est nécessaire, encore que la caisse du dessus soit vidée en premier.

Comme il est facile de superposer quatre caisses et plus, 1.000 kilogrammes sont ainsi entreposés, dans les meilleures conditions qui soient pour une parfaite consommation, sur une surface inférieure à 80 décimètres carrés.

Si vous ne pouvez vous procurer de telles caisses, il vous est facile d’en établir, même plus hautes, avec n’importe quelles planches. Au fur et à mesure qu’elles sont vidées, vos caisses sont remontées au grenier ; leur service est longuement assuré ainsi. J’ajoute que les petites pommes de terre, qui ne font qu’un faible volume et dont nombre d’entre elles s’échapperaient par les interstices du fond et latéraux, sont logées dans une ou deux caisses ordinaires.

À défaut d’un agencement de cet ordre, prenez les dispositions suivantes, surtout si la cave de conservation est humide. D’abord, blanchissez les murs à la chaux, tout au moins de la partie où vous entreposez vos pommes de terre. De préférence, ne mettez pas celles-ci en contact direct avec le sol, si celui-ci est en terre battue ou pavé, mais humide.

Établissez un plancher légèrement surélevé et un revêtement contre le mur avec des planches et des couvercles de caisse (à défaut avec de la paille, des fascines), ces derniers recouverts de genêts ou de papiers très secs. Étaler dessus, d’un côté, vos grosses pommes de terre ; de l’autre, les moyennes, sur une hauteur maximum de 50 à 60 centimètres, en dressant encore au centre un faisceau de branchages, dans le but de faciliter l’aération de la masse et de modérer l’échauffement.

S’il survient une période de froid intense et que vous craigniez la pénétration de la gelée dans le local, recouvrez momentanément le tas de feuilles de fougères, de paille ou de sacs.

Enfin, vérifiez vos pommes de terre toutes les trois à cinq semaines, pour éliminer celles qui se gâtent. Vous aurez ultérieurement à procéder à l’égermage manuel ou chimique ; nous vous dirons comment.

A. DE BRETEUIL.

Le Chasseur Français N°610 Octobre 1946 Page 298