Qualité et quantité.
— Le lait de la vache, comme celui de toutes les autres
laitières, est sécrété en quantité très variable, suivant les aptitudes des
galactogènes des races, des soins et surtout de la nourriture. Mais, de même
qu’il y a fagot et fagot, il y a des laits de qualité très différente.
D’aucuns, à l’état de pureté, pèsent 1033 à la température de 15°, tandis que
d’autres ont une densité ne dépassant pas 1029. Évidemment, les premiers sont
beaucoup plus profitables, surtout quand on les destine à la fromagerie, parce
que leur teneur en matières sèches est bien plus élevée, à tel point qu’avec 7 litres
de lait on peut fabriquer 1 kilogramme de fromage affiné, dans le genre du
camembert, tandis que d’autres exigent au moins 9 litres par kilogramme de
même fromage.
Plus souvent encore, on compare les laits d’après leur
richesse en matière grasse. Certains laits fournissent 1 kilogramme de
beurre par 20 litres, tandis qu’il faut 28 et même 30 litres de lait
pauvre pour en obtenir la même quantité.
Si la nourriture influe sur la sécrétion lactée, elle agit
encore davantage sur la qualité du lait, lequel peut être acide ou alcalin,
deux anomalies fréquentes, qui influent sur sa conservation et sa
digestibilité.
En principe, les enfants et même les grandes personnes ne
devraient consommer que des laits normaux, ayant un titre acidimétrique compris
entre 17 et 19° Dornic, ce qui correspond à une teneur de 1gr,7
à 1gr,9 d’acide lactique par litre. Un lait qui, au sortir du
pis, contient plus de 2 grammes d’acidité, est impropre à tous les usages,
parce qu’il se coagule rapidement au repos et précipitamment à la chaleur, au
point de tourner sur le feu. Au contraire, les laits alcalins, dosant moins de 1gr,7
d’acide lactique, n’obéissent pas à l’action de la présure, ni des sucs
gastriques ; aussi ne conviennent-ils pas non plus aux fabrications
laitières, ni à l’alimentation, du fait qu’ils sont déjà altérés au sortir de
la mamelle.
Quant aux laits pauvres en extrait sec (caséine, graisse,
lactose, sels minéraux), ils sont le reflet de la santé des bêtes, de même que
les laits manifestement malades (filants, bleus, rouges, malodorants,
amers, sableux, etc.).
Origine des anomalies.
— Si on en excepte les affections mammaires, qui
viennent troubler l’afflux du sang dans les glandes galactogènes, on peut dire
que la nourriture est le facteur qui influe le plus sur la qualité du lait et
sur le rendement.
On comprend sans peine qu’une vache recevant une nourriture
insuffisante, en quantité et en qualité, ne puisse fournir qu’un lait pauvre,
tandis que, si on lui distribue une ration bien équilibrée en tous les
principes (protéine, graisse, hydrates de carbone et sels
minéraux), elle fournira un lait normal, également équilibré.
En ce qui concerne la qualité, une vache peut être
abondamment nourrie et fournir un lait exécrable. Dans ce cas, on doit
attribuer le fait à la nature des aliments. En premier lieu, on examinera les
fourrages, qu’ils soient verts ou secs, les uns et les autres pouvant
occasionner des troubles de lactation, surtout lorsqu’ils contiennent une
proportion élevée de plantes âcres, telles que renoncules, carex,
laîches, prèles, gratiole, lobélia, ail, colchique,
aconit, euphorbes, staphisaigne, morelle, belladone,
arnica, ciguë, feuille d’aune, de buis, de
fusain, de cytise, de troène, et d’autres plantes plus ou
moins vénéneuses.
Comme la mamelle des mammifères est un organe d’excrétion
pour les poisons, les vaches qui ont consommé des plantes toxiques peuvent
fournir un lait également toxique, dangereux pour les personnes qui le
consomment.
Pour toutes ces raisons, on surveillera de près la
nourriture des laitières, et l’on supprimera les aliments suspects, capables de
modifier le goût et la nature des laits, décelés par l’analyse et la dégustation.
Puisque, le plus souvent, les laits amers et malodorants
proviennent des fourrages fournis par les terrains humides ou marécageux, où
croissent des plantes peu nutritives et cellulosiques, contenant des principes
nuisibles à la qualité du lait, qu’il s’agisse de prairies de fauche ou
d’embouche, on devra les assainir par des travaux à déterminer sur place. Il
est toujours possible d’assurer l’évacuation des eaux stagnantes et de
neutraliser le marais en faisant une application à haute dose d’amendements
phosphocalciques.
C. ARNOULD.
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