La législation française sur la pêche était restée sans
modifications sensibles depuis la loi du 15 avril 1829 et n’a été
profondément remaniée que par la loi du 12 juillet 1941. Cette loi a
supprimé la banalité de la ligne flottante, a donné un caractère officiel aux
associations locales et aux fédérations départementales de pêche, a rendu
obligatoire à tout pêcheur l’adhésion à une association et le paiement d’une
taxe piscicole, matérialisée par l’apposition d’un timbre sur la carte de
membre de l’association.
Le produit de la taxe, collecté par les associations et les
fédérations, est centralisé par le Comité central de la Pêche.
Quels sont la composition et le rôle du Comité central de
la Pêche ?
— Ils sont définis par le décret du 12 juillet
1941 portant réglementation d’administration publique pour l’application des
lois de 1829 et de 1941, et notamment par son article 5 :
« Il est constitué auprès du ministre secrétaire d’État
à l’Agriculture un Comité central des Fédérations départementales de Pêche et
Pisciculture, comprenant :
» 1° Trois membres de droit :
» Le directeur général des Forêts, président ;
» Le directeur des Eaux et du Génie rural ou son
représentant ;
» Le directeur des Voies navigables et des Ports
maritimes ou son représentant ;
» 2° Neuf membres nommés par arrêtés :
» Un par le secrétaire d’État à l’Intérieur ;
» Un par le secrétaire d’État aux Finances ;
» Un par le secrétaire d’État aux Communications ;
» Six par le secrétaire d’État à l’Agriculture, dont un
inspecteur général des Forêts, un délégué des fédérations pour chacune des
quatre régions piscicoles et un représentant des fabricants d’engins de pêche.
» Ce Comité est chargé de donner son avis sur :
» 1° Les mesures de contrôle et de coordination de
l’action des fédérations départementales ;
» 2° Le programme des grands travaux de mise en valeur
piscicole et les mesures d’ensemble destinées à assurer la protection du
poisson ;
» 3° La répartition du montant de la taxe instituée par
l’article 5 de la loi du 15 avril 1829, modifiée par la loi du 12 juillet
1941.
» Il peut, dans la limite des attributions ci-dessus
définies, proposer au ministre toutes mesures qu’il estimera utiles.
» Il est assisté, au point de vue technique, du
conservateur des Forêts, chef de la commission de Pêche, à qui incombe le soin
de préparer les dossiers qui lui seront soumis et d’organiser et diriger
l’ensemble du personnel de surveillance. »
Il y a lieu d’ajouter que cette composition est déjà
modifiée par l’adjonction de huit présidents de fédérations départementales de
pêche, élus par leurs pairs.
Quelles ont été les sommes collectées depuis
l’application de la loi ?
— Dès le 1er janvier 1942, la loi a été
appliquée et a produit, en 1942 et 1943, environ 10 millions chaque année,
le montant de la taxe étant alors fixé à 10 francs.
À partir de 1944, le montant de la taxe piscicole ayant été
porté à 25 francs en raison de l’augmentation du coût de la vie, le
produit total s’est élevé aux environs de 20 à 25 millions.
Ces deux années ont été inférieures à la normale du fait de
la guerre. On escompte, à partir de l’année 1946, un fort relèvement du nombre
des pêcheurs, qui doit normalement atteindre le chiffre de 1,200.000.
Quels ont été les résultats obtenus ?
— Ces résultats ont porté sur le contre-braconnage, le
repeuplement des rivières et la lutte contre les pollutions industrielles.
Tout d’abord, la création du corps des gardes-pêche, dont
l’effectif s’élève actuellement à 260. Ces gardes ont tous suivi un stage de
six mois à l’École des Gardes-Pêche de Bois-Corbon et y ont acquis une
instruction théorique et pratique portant notamment sur le droit de pêche et la
pisciculture. Ils sont placés sous les ordres des présidents de fédérations et
des inspecteurs des Eaux et Forêts, du service de la Pêche.
Ces gardes jouissent d’un traitement intéressant et
d’indemnités de déplacement. Ils sont dotés d’armes et de moyens de transport
qui leur permettent de lutter contre le braconnage.
Ensuite, les travaux piscicoles, qui ont surtout porté sur
la construction, l’amélioration et le fonctionnement de piscicultures et la
construction d’échelles à poissons.
Enfin, la lutte contre la pollution par des prélèvements et
analyses d’eaux polluées et les poursuites contre les industriels pollueurs.
L’aménagement de la taxe pour l’année 1947.
— Le décret du 26 octobre 1946 prévoit
l’établissement de deux taxes de 40 francs et 200 francs, selon les
modalités ci-dessous :
« Le taux de la taxe versée par les membres des
associations de pêche et de pisciculture pour la surveillance et la mise en
valeur du domaine piscicole national est fixé comme suit :
» Adjudicataires, permissionnaires de grande pêche ou
de petite pêche sur les eaux du domaine public, tous pêcheurs vendant tout ou
partie de leur pêche, pêcheurs au lancer (à l’aide d’un moulinet ou d’un
cadre), pêcheurs à la mouche artificielle à l’aide d’un moulinet, pêcheurs à
lover, pêcheurs à la traîne (aux appâts artificiels ou naturels, à l’aide d’une
canne, à l’aide d’un cordeau fixé à un bateau ou tenu à la main), pêcheurs aux
filets ou aux engins autres que la balance à écrevisses, la petite bosselle à
anguilles, la vermée et les lignes diverses : 200 francs.
» Tous autres pêcheurs : 40 francs. »
En pratique, le timbre ordinaire portera le millésime 1947,
la mention « Taxe piscicole » et sa valeur de 40 francs.
Le timbre « Supplément » s’ajoutera éventuellement
au premier timbre, avec la valeur de 160 francs et portera le millésime
1947 et la mention « Taxe piscicole supplément ».
Des réclamations se sont élevées de la part de certains
pêcheurs qui prévoient des difficultés dans l’application de ce décret et
protestent contre le prix élevé de la taxe pour les pêcheurs sportifs.
Il est évident que l’application se heurtera à des
difficultés pratiques, et il est difficile, dans certains cas particuliers, de
discerner quel est le timbre-taxe que doit payer le pêcheur pour être bien en
règle.
Dans l’esprit du décret, es n’est pas le moulinet lui-même
qui est taxé, mais le lancer. C’est ainsi que le pêcheur au coup, même avec un
moulinet à tambour fixe (tel le pêcheur de carpes), n’est redevable que du
timbre à 40 francs, alors que le pêcheur au lancer, même s’il n’a pas un
coûteux tambour fixe, mais un simple cadre ou la boîte à petit pois Henri de
France, doit prendre le timbre à 200 francs.
En d’autres termes, est justifiable de la taxe à 200 francs
le lancer, c’est-à-dire l’acte de pêche qui exige de projeter au loin et de
ramener de façon continue l’appât ou le leurre naturel ou artificiel, ce
mouvement étant nécessaire pour rendre l’appât péchant.
Mais il n’est pas douteux qu’entre la pêche au coup et la
pêche sportive, toutes les transitions existent et qu’il faudra, de la part des
pêcheurs et des gardes-pêche, beaucoup de bonne volonté et de compréhension
réciproques pour éviter des frictions toujours regrettables.
DE LAPRADE.
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