Le bélouga est un dériveur à cabine de 6m,50.
Cette série récente a été reconnue par la Fédération française de yachting à
voile, et elle compte actuellement plus de soixante-dix unités. Les plans du
« bélouga » ont été dessinés d’après les conceptions de M. Jacques
Lebrun, notre champion olympique de yachting. Les premiers essais eurent lieu
en 1945. Mais, en juillet 1946, M. Jacques Lebrun entreprît une croisière
sur les côtes de Bretagne avec une petite escadre de quatre bélougas. Ceux-ci
se comportèrent fort bien, même par houle creuse, bouchonnant et n’embarquant
pas une goutte d’eau. Enfin, certaines petites criques ignorées comme celles de
Belle-Ile, dans des sites sauvages et pittoresques, purent être visitées malgré
les difficultés d’accès. Seuls des canoés et des bélougas pouvaient passer.
Bien dessiné, c’est un bateau marin, pourvu d’une
solide dérive et rationnellement aménagé. Il est habitable et présente le
maximum de confort qu’on puisse obtenir dans d’aussi faibles dimensions. Il
convient, dans la petite croisière côtière, pour deux grandes personnes. Un
troisième équipier pourrait à la rigueur coucher dans le poste sur un matelas
pneumatique. C’est le bateau rêvé pour le week-end. On peut facilement le
remiser dans un garage et le remorquer derrière l’auto pour les vacances. D’une
longueur de 6m,50, d’une largeur de 2m,23, avec un tirant
d’eau de 0m,24 (1m,14 dérive basse), il peut passer un
peu partout et s’échouer sur les plages. À l’ancre ou au sec, l’équipage se
tiendra dans le cockpit, sous la tente. La cabine est relativement vaste avec
ses 2m,15 de longueur. On y trouve, avec les deux couchettes, une
table dont les battants retombent sur les flancs du puits de dérive, des
placards et penderies, un évier, une cuisine de camping. Le coqueron arrière
est muni de deux panneaux ouvrant à la partie supérieure pour permettre
l’installation d’un moteur auxiliaire hors-bord de 3 à 5 CV. La cabine est
éclairée par quatre hublots rectangulaires. On a adopté un gréement à corne
très apiquée qui donne à la grande voile une silhouette bermudienne. Le mât
court (2m,97) est rabattable pour le passage sous les ponts. La
surface totale de voilure est d’environ 20 mètres carrés, soit 15m2,40
pour la grande voile, 7m2,70 pour le foc de Gênes, 4m2,40
pour le grand foc et 3 mètres carrés pour le petit foc. La borne et la
corne mesurent respectivement 3m,68 et 4m,13. C’est un
gréement classique, et il est probable que le gréement marconi a été écarté
pour en faire un bateau « passe-partout » et pour les commodités du
transport par route ou par rails. La construction est à bouchains vifs. Les
pièces majeures sont en chêne ; le reste en acajou et sapin. On recommande
le fond acajou à double bordé (5+8 mm.). C’est un supplément de travail,
mais c’est beaucoup plus résistant et plus étanche. La dérive est en tôle de 8 millimètres
et le safran en tôle de 5 millimètres. Le dessus du roof est en sapin
entoilé. Construction classique sans difficultés majeures, si ce n’est celle du
puits de dérive qui demande une attention toute particulière. Une telle
construction représente pour un amateur un bon millier d’heures de travail.
Cette durée pourra être considérablement réduite si l’on achète les pièces de
charpente préfabriquées.
Des associations d’amateurs s’efforcent de développer leurs
séries en facilitant le travail de leurs adhérents, en groupant les commandes
de voilure, de quincaillerie, en faisant préfabriquer les membrures, tableaux,
étraves, dans les conditions les plus avantageuses. Il est recommandé aux
constructeurs isolés d’adhérer à ces associations. Ils y trouveront des
conseils éclairés et désintéressés et une aide matérielle précieuse.
L’Association des propriétaires de bélougas (130, faubourg Saint-Honoré,
Paris), celle des grondins [4, rue Gabrielle, Charenton (Seine)], comme celle
des moths (2, rue de Bréa, Nantes.) sont admirables d’activité. On ne peut que
rendre hommage aux dirigeants de ces associations, qui, par amour du yachting,
mettent leur foi et leur désintéressement au service des jeunes et des
débutants, leur consacrant une grande partie de leur temps et de leurs forces,
surmontant des difficultés matérielles considérables.
Mais n’est-ce pas dans la tradition ?
N’a-t-on pas toujours trouvé chez les gens de mer les plus
fréquents exemples d’abnégation et de dévouement ?
A. PIERRE.
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