Accueil  > Années 1942 à 1947  > N°613 Avril 1947  > Page 442 Tous droits réservés


Le « CHASSEUR FRANÇAIS » sollicite la collaboration de ses abonnés
et se fait un plaisir de publier les articles intéressants qui lui sont adressés.

L’arbre fruitier

Répondant à la demande de nos lecteurs, nous décrirons sommairement les organes composant l’arbre fruitier, leurs rôles et les fonctions de chacun d’eux.

Un arbre est constitué par une partie souterraine, la racine, et d’une partie aérienne comprenant la tige et les feuilles.

La racine fixe l’arbre au sol pour y puiser sa nourriture. Lorsqu’elle se trouve dans le prolongement de la tige (provenant de semis), elle est dite terminale. Parfois la racine prend naissance sur la tige placée, au printemps, dans un sol légèrement humide (boutures, marcottes) ; on les appelle racines adventives ou latérales. Quand la partie principale de la racine s’enfonce dans le sol verticalement, elle constitue un pied sur lequel naissent des ramifications dites radicelles primaires, donnant ensuite, par divisions successives, des radicelles secondaires, tertiaires, etc. Les plus déliées et fines, dirigées dans tous les sens, constituent le chevelu.

Quand le pied pénètre profondément en terre, la racine est dénommée pivotante (poiriers, pommiers, amandiers et pêchers provenant de semis). Les essences fruitières greffées sur des sujets à racines pivotantes résistent mieux à la sécheresse. Les racines pénétrant dans les couches inférieures du sol auront à leur disposition une plus grande quantité d’eau. Pour ces motifs, les essences fruitières greffées sur ces porte-greffes seront plus vigoureuses que les sujets à racines traçantes. Dans le cas où le pivot reste court, les radicelles prennent un plus grand développement dans les couches superficielles du sol moins riches en eau. Les greffons sur cas sujets seront moins vigoureux, mais, par contre, plus fructifères. Les cognassiers, pommiers paradis, pruniers, vignes sont dans ce cas. Une racine en voie d’accroissement se présente sous forme de cylindre blanc enveloppé dans sa partie terminale par un capuchon de couleur plus foncée que le reste de l’organe, destiné à forcer le passage pour la radicelle à travers les matériaux constituant le sol : c’est la coiffe protectrice. Au-dessus de la coiffe protectrice, le cylindre radiculaire est lisse. Sur cette région se produit l’accroissement de la racine. Plus haut, la racine est revêtue d’un duvet de poils très fins auxquels adhèrent les particules terreuses. C’est la région des poils absorbants ; elle présente constamment la même longueur. Les poils de la partie supérieure se flétrissent et sont remplacés par une couche de liège à mesure que, dans la zone lisse, en voie d’accroissement, de nouveaux poils prennent naissance.

Les poils radicaux sont les seuls organes souterrains d’absorption en déplacement continuel, à la recherche de l’eau et des matières nutritives qu’elle tient en dissolution. Les racines âgées n’ont plus qu’un rôle mécanique de fixation de l’arbre au sol et de transport de la sève vers les organes aériens.

Facteurs influant sur le développement radiculaire.

— C’est sous l’influence de la pesanteur que le pivot s’enfonce verticalement dans le sol et que les racines latérales font des angles de moins en moins aigus. On transforme un système radiculaire pivotant en système fasciculé ou traçant en supprimant le pivot au moment du repiquage des jeunes sujets issus de semis. Les arbres deviennent, après cette opération, plus sensibles au déracinement ; par contre, ils puisent leur nourriture dans la partie la plus riche, la plus aérée, la plus ensoleillée du sol, et les fruits qu’on y récolte sont plus savoureux.

Perméabilité du sol sur un terrain ameubli profondément.

— Le système radiculaire s’étend dans toutes les directions, en surface et en profondeur, en raison de la faible résistance qui s’oppose à la pénétration de la coiffe entre les particules terreuses. Les racines exploitent un cube de terre qui leur permet de rencontrer l’eau et les substances utiles à la production de récoltes abondantes. Nous avons là l’importance des défoncements profonds qui doivent précéder les plantations fruitières. À côté de cet avantage d’ordre mécanique, ils présentent un avantage plus considérable d’ordre physiologique. Une terre remuée permet des échanges gazeux se produisant avec l’atmosphère ; l’oxygène, indispensable à la vie des racines, pénètre dans toutes les parties du sol où elles se trouvent. Toutes causes tendant à priver d’oxygène le milieu dans lequel elles sont fixées (humidité, compacité ou tassement du sol) compromettent la vie des arbres ou arrêtent leur croissance.

L’humidité. — L’eau aérée favorise l’élongation des racines et leur ramification. On s’en rend compte en examinant le chevelu que produisent dans l’eau courante les arbres plantés le long de ruisseaux (queues de renard). L’eau stagnante, dépourvue d’oxygène, s’oppose à la pénétration des racines. En terres humides, le pivot ne se développe plus dès qu’il rencontre la nappe d’eau. Les racines latérales prennent des dimensions démesurées et sont exposées à la sécheresse si le plan d’eau s’abaisse plus rapidement que ne peuvent s’enfoncer les racines. Dans un milieu défavorable aux racines par manque d’oxygène, ces dernières seront facilement attaquées par les maladies parasitaires (pourridié), dont l’humidité favorise le développement. Pour ces raisons, le drainage, en éliminant l’eau en excès, facilite la circulation de l’air dans les interstices du sol. Cette amélioration s’impose en terres humides avant toute plantation fruitière. Normalement, dans les sols et sous-sols compacts, l’émission des racines des arbres se fait jusqu’à la profondeur suffisante pour puiser, en temps de sécheresse, l’eau utile à son alimentation. Mais il peut arriver qu’en période de sécheresse estivale prolongée les arrosages soient indispensables pour maintenir l’équilibre entre l’évaporation produite par les feuilles et l’eau absorbée par les racines.

Influence des engrais.

— Les racines se rendent au-devant de l’eau ; elles sont également attirées par les engrais solubles, leur offrant, sous forme assimilable, les substances nutritives également indispensables à la croissance et la fructification des arbres. Les nitrates de soude, de chaux et de potasse sont solubles dans l’eau et entraînés par les pluies dans les couches profondes du sol où les racines les suivent. D’autres engrais sont peu solubles dans l’eau (phosphates naturels, scories) ; ils sont fixés par le pouvoir absorbant du sol en sels potassiques, qui s’oppose dans une certaine mesure à leur circulation. Dans ces conditions, les racines vont les chercher où ils se trouvent ; il est tout de même indispensable de les incorporer au sol par un labour.

Le système radiculaire d’un arbre est d’autant plus développé en surface et en profondeur que le sol est plus pauvre en éléments minéraux utiles. Dans une terre de nature riche, ou abondamment pourvue d’engrais, la plante étend peu ses racines, parce qu’elle peut trouver les éléments dont elle a besoin sur une surface restreinte.

De ce qui précède, il nous est permis de conclure : pour obtenir des arbres à rendement maximum, on doit, autant que possible, leur assurer la vie « au sein de l’abondance ».

E. DEAUX.

Le Chasseur Français N°613 Avril 1947 Page 442